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lundi 13 septembre 2010

La preuve d'identification par témoin oculaire et les principes directeurs d'une parade d'identification

R. c. Lavoie, 2010 QCCQ 4157 (CanLII)

[36] La Cour d'appel du Québec a rappelé récemment dans l'arrêt El Morr c. La Reine que de tous les types de preuves, c'est l'identification par témoin oculaire qui est la plus susceptible d'entraîner une erreur judiciaire, particulièrement lorsqu'elle repose exclusivement sur la déposition d'un témoin qui n'avait jamais vu l'accusé avant l'incident en cause.

[37] Toutefois, ce risque est amoindri lorsque, comme en l'espèce, le témoin oculaire connaît l'auteur de l'infraction et qu'il l'a identifié à plusieurs reprises, notamment au cours d'une parade d'identification conduite avec professionnalisme.

[38] Dans l'arrêt El Morr précité, le juge Doyon de la Cour d'appel du Québec réitère les principes directeurs d'une parade d'identification, que l'on peut ainsi résumer :

− les policiers doivent procéder de façon à éviter que le témoin ne soit amené à identifier à priori l'individu déjà soupçonné;

− ils doivent exhiber une série de photographies de personnes dont la physionomie correspond à la description de l'auteur de l'infraction;

− ils ne doivent pas faire de gestes ou prononcer des paroles qui risquent d'influer sur l'identification;

− ni aider le témoin à choisir parmi les photos;

− ni indiquer de quelque façon que ce soit qui est le suspect ou s'il est parmi les sujets des photos.

dimanche 12 septembre 2010

L’importance des facteurs de dénonciation et de dissuasion générale et spécifique lorsqu’en présence d’infractions sexuelles commises par une personne en relation d’autorité

R. c. M.O., 2010 QCCQ 6014 (CanLII)

[53] Dans une récente décision, mon collègue Pierre Bélisle, J.C.Q. impose une peine globale de sept ans à un homme qui avait agressé son fils et ses trois neveux à répétition sur plusieurs années. Il écrivait (R. c. N.L. 2010 QCCQ 629 (CanLII), 2010, QCCQ, 629) :

« Par. 35 : Une peine d’emprisonnement avec sursis est totalement inappropriée dans les circonstances pour des infractions commises sur une aussi longue période par un accusé en situation de confiance ou d’autorité à l’égard de victimes adolescentes ou envers un jeune adulte ayant une déficience mentale.

Par. 36 : Par conséquent, une peine de détention ferme de plus de deux ans s’impose dans cette affaire. (…) »

[54] Il y a aussi lieu de rappeler, comme il l’a fait que depuis les incidents envers la victime, une peine minimale de 45 jours d’incarcération est prévue par le législateur.

[55] Le Tribunal est du même avis que la peine de sursis serait inadéquate. Elle ne répondrait surtout pas aux critères de dénonciation et de dissuasion générale et spécifique.

[56] C’est comme suit que notre Cour d’appel rappelle l’importance des ces facteurs lorsqu’en présence d’infractions sexuelles commises par une personne en relation d’autorité, dans l’arrêt R. c. R.D. 2008 QCCA 164 (CanLII), 2008 QCCA 164, par. 55 :

« Le second facteur aggravant est la relation d’autorité et de confiance entre la victime et l’intimé. L’importance de ce facteur est bien notée par l’auteur renommé Clayton Ruby, qui, s’appuyant sur la jurisprudence, affirme que l’abus sexuel par un adulte en relation de confiance avec un enfant milite pour une peine d’au moins quatre ans d’incarcération :

"Where the offender is in a position of trust in relation to the child, the violation of this by sexual abuse will often be noted by the court as an aggravating factor. Four years’ imprisonment for the sexual assault of a child by an adult in a position of trust has been recognised as a starting point"[1] ».

[57] Toujours dans R. c. R.D., on écrit, (par. 44) :

« La Cour d’appel de l’Ontario a indiqué, à plusieurs reprises, qu’une peine avec sursis devrait rarement être imposée dans les cas d’agressions sexuelles sur des mineurs lorsque l’agresseur est en position d’autorité et de confiance. Dans R. c. D.R., elle a substitué une peine d’emprisonnement ferme à celle d’une incarcération avec sursis, dans une affaire d’agression sexuelle commise par un père sur sa fille de quinze ans, pendant une période de plus d’un an. voici comment elle s’est exprimée :

"While sentences imposed by sentencing judges attract considerable deference from this court, on the facts of this case, we conclude that the governing principles of denunciation and deterrence, both specefic and general, cannot be satisfied by a conditional sentence. This court has repeatedly indicated that a conditional sentence should rarely be imposed in cases involving the sexual touching of children by adults, particularly where, as here, the sexual violation is of a vulnerable victim by a person in a position of trust. In addition, circumstances that involve multiple sexual acts over an extended period of time and escalating in intrusiveness generally warrant a severe sentence. (Références omises) The trial judge, with respect, failed in this case to give adequate or any consideration to those controlling principes. […]" »

[58] Par après, dans G.L. c. R., 2008 QCCA 2401 (CanLII), 2008 QCCA 2401, notre Cour d’appel révise ses propres décisions entre 2005 et 2008 eu égard entre autre aux objectifs de la dénonciation et de la dissuasion, « … facteurs d’une importance particulière dans les crimes de cette nature perpétrés contre des enfants ». (par 22; voir également par. 20).

[59] En particulier, elle rappelle que la peine de dix ans imposée par le juge de première instance Claude Provost, J.C.Q. avait été maintenue (G.L. c. R., 2005 QCCA 597 (CanLII), 2005 QCCA 597). Outre le nombre de victimes qui était de trois, cette affaire avait des ressemblances toutes particulières avec la présente affaire. L’accusé se considérait comme victime de la provocation des jeunes filles. Les infractions constituaient un mauvais traitement des jeunes filles de ses conjointes de même qu’un abus de confiance et d’autorité à leur égard. Il y avait un grand nombre d’agressions, de très longues périodes de temps durant lesquelles les infractions ont eu lieu, ainsi que des séquelles physiques et psychologiques subies par au moins une victime. La culpabilité morale de l’accusé était patente. Jamais il n’avait manifesté le moindre remords, ni la moindre compassion ou empathie pour ses victimes. Le juge avait privilégié les objectifs de dénonciation d’exemplarité collective, de dissuasion individuelle et de conscientisation personnelle. La Cour d’appel lui donnait raison.

[60] Très récemment (le 18 mai 2010) notre Cour d’appel rappelait (R. c. M.S., 2010 QCCA 964 (CanLII), 2010 QCCA 964, par. 37) :

« La vengeance n’a pas sa place dans la détermination de la peine, mais la peine infligée à l’intimé doit tout de même refléter la répugnance de la société pour les crimes à caractère sexuel commis contre de jeunes enfants et sanctionner adéquatement la culpabilité morale de l’intimé »

La note au bas de page précisait :

« Dans R. c. M. (C.A., 1996 CanLII 230 (C.S.C.), 1996 CanLII 230 (C.S.C.), [1996] 1 R.C.S. 500, le juge en chef Lamer, s’exprimant pour une Cour surpême unanime, explique pourquoi le châtiment – contrairement à la vengeance – est un principe légitime, pertinent et important de la détermination de la peine. Au-delà des considérations utilitaristes liées à la dissuasion et à la réadaptation, les sanctions pénales doivent également être infligées afin de sanctionner adéquatement la culpabilité morale du contrevenant (par. 76-80) ».

[61] Pour l’ensemble de ces raisons et plus particulièrement, compte tenu des facteurs aggravants, la détention ferme s’impose. Et les objectifs de dénonciation, d’exemplarité collective, de dissuasion individuelle et de conscientisation personnelle amène le Tribunal à lui imposer une peine d’incarcération de 6 ans sur chaque chef, peine à être purgée de façon concurrente.

La fourchette des peines selon la Cour d'Appel concernant les infractions de voies de fait graves

Réjouis c. R., 2010 QCCA 1120 (CanLII)

[58] En résumé, des voies de fait graves à l’égard d’une seule victime peuvent justifier une peine de quatre ans lorsqu'il y a peu de facteurs atténuants (Nyongabo), de cinq ans et quatre mois lorsqu'il y a des séquelles permanentes malgré des facteurs atténuants (Rioux), et de cinq ans lorsqu'il y a deux victimes dont l'une garde des séquelles permanentes (Allard).

samedi 11 septembre 2010

L'accusé souleve la question de sa réputation lorsqu’il déclare n’avoir jamais été condamné, ni arrêté; ces déclarations ne constituent qu’une tentative de prouver son honorabilité

Morris c. La Reine, [1979] 1 R.C.S. 405

Comme le juge du procès et la Cour d’appel, j’estime que l’appelant a soulevé la question de sa réputation lorsqu’il a déclaré n’avoir jamais été condamné, ni arrêté; ces déclarations ne constituent qu’une tentative de prouver son honorabilité. En se montrant sous le jour d’un citoyen respectueux des lois, l’appelant cherchait uniquement à montrer que, vu sa réputation, il était peu vraisemblable qu’il ait commis l’infraction dont on l’accusait.

Dans R. v. Baker, l’accusé déclara dans son témoignage que, pendant quatre ans, il avait gagné honnêtement sa vie; de l’avis de la Cour d’appel criminel, ceci constitue une preuve d’honorabilité qui ouvre la porte à un contre-interrogatoire sur sa réputation.

Dans R. v. Samuel, la Cour d’appel criminel a jugé qu’une personne accusée de vol soulève la question de sa réputation lorsqu’elle dit, au cours de son témoignage, qu’à deux reprises elle a retourné des objets trouvés à leur propriétaire. Parlant de ce témoignage et des questions qui l’avaient amené, le lord juge en chef a dit (aux pp. 10 et 11):

[TRADUCTION] Bien sûr, ce comportement indique que la personne est honnête.



… le seul objet de ces questions est d’inciter le jury à se dire: «Cet homme est de ceux qui rendent un objet trouvé; autrement dit, il est honnête». C’est manifestement le but des questions et je ne peux certainement pas admettre que tout ce qu’elles signifient c’est que l’appelant est homme à rendre un objet trouvé. La réponse péremptoire à cela est que si un prisonnier invoque sa réputation, tous les aspects de sa réputation sont alors en cause et pas uniquement ceux qui lui sont favorables à l’exclusion des autres. De l’avis de là cour, il est clair que ces questions mettent la réputation de l’appelant en cause. Il demande au jury de croire qu’il est homme à disposer honnêtement d’objets trouvés. En conséquence, l’avocat de la poursuite est en droit de lui poser, en contre‑interrogatoire, des questions sur ses condamnations antérieures.

Sur la question du genre de témoignages qui pourraient être qualifiés de preuve de réputation, Cross a dit, On Evidence, 4e éd., à la p. 367:

[TRADUCTION] En règle générale, l’accusé cherche à faire la preuve de sa réputation par des allusions à un passé honnête et vertueux et la jurisprudence montre que les tribunaux n’hésitent pas beaucoup à conclure que ces allusions soulèvent la question de sa réputation. Les cas où une personne affirme assister régulièrement à la messe, soutient avoir gagné honnêtement sa vie pendant longtemps, répond qu’elle est mariée, qu’elle a une famille ou qu’elle occupe un emploi stable, sont autant de cas où …

l’accusé a soulevé la question de sa réputation.

On a prétendu que l’appelant n’a pas soulevé la question de sa réputation lorsqu’il a témoigné au sujet de sa bonne conduite, parce que cette preuve a été faite au cours de son interrogatoire principal, pour des [TRADUCTION] «raisons de tactique», au sens de la règle adoptée par la Cour d’appel de l’Ontario dans R. v. St. Pierre, R. c. Merolla, 19 avril 1974, non publié, et R. v. MacDonald. Quelle que soit la validité de cette règle lorsque l’accusé avoue des condamnations antérieures au cours de son interrogatoire principal, elle ne peut s’appliquer lorsqu’il nie toute condamnation antérieure; le fondement de cette règle est qu’il est moins préjudiciable à la crédibilité d’un accusé de révéler ses condamnations antérieures au cours de son interrogatoire principal, que d’être tenu de le faire en contre-interrogatoire en réponse aux questions du ministère public; ce raisonnement ne vaut plus lorsque le témoignage de l’accusé tend à prouver sa bonne conduite plutôt que son inconduite. Avec égards, je conclus que ce moyen n’est pas fondé.

Je ne puis me rallier non plus à la proposition suivant laquelle une preuve d’honorabilité peut seulement être réfutée par la preuve de condamnations antérieures. Dès que l’accusé soulève la question de sa réputation, il donne au ministère public la faculté d’établir le contraire, c’est-à-dire sa mauvaise réputation en général ou son immoralité. On le fait souvent par la preuve de condamnations antérieures, mais ce n’est pas, et beaucoup s’en faut, le seul moyen de preuve permis. L’article 593 du Code criminel n’a jamais été interprété comme
limitant aux condamnations antérieures la preuve de mauvaise réputation qui peut être faite contre l’accusé, et je ne crois pas qu’il doive l’être. En fait, l’objet de cette disposition du Code est tout à fait à l’opposé: elle vise à assurer que les condamnations antérieures seront admises comme preuves de mauvaise réputation à l’encontre de la règle selon laquelle la mauvaise réputation ne peut pas, en général, être prouvée par des actes précis d’inconduite (1953) 11, The Cambridge Law Journal, à la p. 377, «Is the Prisoner’s Character Indivisible?» par R.N. Gooderson; R. v. Triganzie; contrairement aux règles de preuve relatives aux faits collatéraux, elle permet également la preuve de condamnations antérieures autrement qu’au cours du contre-interrogatoire de l’accusé et en dépit de toute dénégation de sa part.

La période de détention présentencielle devrait-elle influer sur la possibilité d’ordonner l’emprisonnement avec sursis?

R. c. Fice, [2005] 1 R.C.S. 742, 2005 CSC 32

Suivant l’art. 742.1 du Code criminel, le délinquant qui mérite par ailleurs l’emprisonnement dans un pénitencier ne saurait avoir accès à l’emprisonnement avec sursis du seul fait de la période qu’il passe en détention présentencielle. Le régime d’emprisonnement avec sursis n’a pas été conçu à l’intention des délinquants à l’égard desquels l’emprisonnement dans un pénitencier est approprié. Quand, après avoir examiné la gravité de l’infraction et la culpabilité morale du délinquant, le tribunal conclut qu’une peine située dans la fourchette des peines d’emprisonnement dans un pénitencier est justifiée et qu’un sursis à l’emprisonnement n’est donc pas possible, la période de détention présentencielle ne doit pas avoir pour effet de modifier cette conclusion.

L’article 742.1 prévoit que le délinquant doit avoir été condamné à un emprisonnement de moins de deux ans pour être admissible à l’emprisonnement avec sursis. Conformément à l’approche établie dans Proulx à l’égard de l’art. 742.1, le juge qui détermine la peine doit procéder en deux étapes. Il doit d’abord se demander s’il est possible de prononcer une condamnation à l’emprisonnement avec sursis. À cette étape, le juge n’a pas à infliger une peine d’emprisonnement d’une durée déterminée; il n’a qu’à décider s’il y a lieu d’écarter deux possibilités : (i) les mesures probatoires; (ii) l’emprisonnement dans un pénitencier. Si le juge peut prononcer l’emprisonnement avec sursis, il doit ensuite décider si cette peine est appropriée. La période passée en détention présentencielle doit être prise en compte à cette deuxième étape de l’analyse, qui concerne la durée de la peine, plutôt qu’à la première, qui concerne la fourchette des peines applicables. Toute autre conclusion serait contraire à la nature du régime d’emprisonnement avec sursis, tel qu’il a été défini dans Proulx. La période passée sous garde par le délinquant avant le prononcé de sa peine doit être considérée comme faisant partie de la durée totale de l’emprisonnement plutôt que comme un facteur atténuant susceptible d’avoir une incidence sur la fourchette des peines applicables et, partant, sur son admissibilité à l’emprisonnement avec sursis. En outre, suivant l’approche établie dans Proulx, la condition prévue par l’art. 742.1 requérant que le tribunal condamne le délinquant « à un emprisonnement de moins de deux ans » doit être interprétée téléologiquement. Le tribunal satisfait à cette condition en déterminant de façon préliminaire la fourchette des peines applicables.

Le pouvoir discrétionnaire que confère le par. 719(3) du Code de prendre en compte la période de détention présentencielle pour fixer la peine à infliger ne signifie pas que le second préalable prévu par l’art. 742.1 — à savoir que la personne ait été condamnée à un emprisonnement de moins de deux ans pour être admissible à un sursis à l’emprisonnement — vise uniquement la période qui devra de fait être passée en prison après le prononcé de la peine; ce préalable concerne plutôt la période totale que le tribunal prend en compte pour déterminer la sévérité de la sanction requise par la gravité de l’infraction et la culpabilité morale du délinquant.

mercredi 8 septembre 2010

Lorsqu’il est possible de combiner des objectifs punitifs et des objectifs correctifs, l’emprisonnement avec sursis sera vraisemblablement une sanction plus appropriée que l’incarcération

R. c. Proulx, 2000 CSC 5, [2000] 1 R.C.S. 61

109 Bien que l’incarcération puisse produire des effets dénonciateurs et dissuasifs plus grands que l’emprisonnement avec sursis, cette dernière mesure sera généralement plus propice à la réalisation des objectifs correctifs de réinsertion sociale des délinquants, de réparation des torts causés et de prise de conscience par les délinquants de leurs responsabilités. Comme l’a mentionné notre Cour dans Gladue, précité, au par. 43, «[l]es objectifs correctifs ne concordent habituellement pas avec le recours à l’emprisonnement». Il ne faut pas sous‑estimer l’importance de ces objectifs, car ils sont le principal facteur d’abaissement du taux de récidive. En conséquence, lorsque les objectifs de réinsertion sociale, de réparation des torts causés et de prise de conscience des responsabilités peuvent réalistement être atteints dans le cas d’un délinquant donné, l’emprisonnement avec sursis sera vraisemblablement la sanction appropriée, sous réserve de la prise en compte des considérations de dénonciation et de dissuasion exposées plus tôt.

110 Je vais maintenant examiner certains exemples de conditions tendant à la réalisation de ces objectifs. Un juge peut assortir une ordonnance d’une multitude de conditions visant à la réinsertion sociale du délinquant. Des ordonnances de participation obligatoire à un traitement peuvent être rendues, notamment en matière de counseling psychologique et de désintoxication. Il est notoire que le fait de condamner un délinquant à l’incarcération par suite d’une infraction reliée à la dépendance à la drogue sans s’attaquer à ce problème n’aboutira probablement pas à la réinsertion sociale de l’intéressé. Dans le Rapport final de la Commission d’enquête sur l’usage des drogues à des fins non médicales (1973), on a fait l’observation suivante, aux pp. 55 et 56:

Ces effets néfastes de la prison sont particulièrement manifestes dans le cas des délits relatifs aux stupéfiants. D’après nos recherches, les stupéfiants sont très répandus dans les établissements pénitentiaires, les détenus s’y asservissent davantage à leur habitude et dans nombre de cas ils font même la découverte de nouveaux emplois de la drogue. La prison ne coupe pas le détenu du monde de la drogue, mais l’expose au contraire à l’influence de toxicomanes et d’usagers des drogues dangereuses.

111 La détention à domicile est une autre mesure qui peut contribuer, dans une certaine mesure, à la réinsertion sociale du délinquant, en ce qu’elle l’empêche de maintenir ses fréquentations antisociales en plus de favoriser des comportements socialement souhaitables tels que l’assiduité au travail ou aux cours: voir Roberts, «The Hunt for the Paper Tiger: Conditional Sentencing after Brady», loc. cit., à la p. 65.

112 L’emprisonnement avec sursis peut aussi favoriser l’atteinte de l’objectif de réparation des torts causés à la victime et à la collectivité, et de l’objectif de prise de conscience par les délinquants de leurs responsabilités, notamment par la reconnaissance du tort qu’ils ont causé aux victimes et à la collectivité. Dans certains cas, par exemple, l’ordonnance de sursis peut être assortie de l’obligation de dédommager la victime. En outre, le fait d’imposer au délinquant une ordonnance de service communautaire peut l’aider à réparer les torts qu’il a causés à la collectivité et l’amener à prendre conscience de ses responsabilités. À cet égard, constituerait une possibilité intéressante une ordonnance l’obligeant à parler en public des conséquences malheureuses de sa conduite, dans la mesure où le délinquant est ouvert à une telle condition. Non seulement une telle ordonnance pourrait‑elle amener le délinquant à prendre conscience de ses responsabilités et à reconnaître les torts qu’il a causés, mais elle pourrait également favoriser la réalisation de l’objectif de dissuasion générale, comme je l’ai indiqué précédemment. À mon avis, il y a lieu d’encourager le recours aux ordonnances de service communautaire, dans la mesure évidemment où il existe des programmes appropriés pour le délinquant dans la collectivité concernée. Si les tribunaux recourent davantage aux ordonnances de service communautaire, le public considérera que les délinquants s’acquittent de leur dette envers la société. Une telle mesure aura également pour effet d’aider à accroître le respect de la loi par le public.

113 En résumé, au moment de décider si l’octroi du sursis à l’emprisonnement est conforme à l’objectif essentiel et aux principes de la détermination de la peine, le juge qui détermine la peine doit se demander quels sont les objectifs qui apparaissent prépondérants au regard des faits du cas dont il est saisi. Lorsqu’il est possible de combiner des objectifs punitifs et des objectifs correctifs, l’emprisonnement avec sursis sera vraisemblablement une sanction plus appropriée que l’incarcération. Pour décider s’il est possible de réaliser des objectifs correctifs dans une affaire donnée, le juge doit étudier les chances de réinsertion sociale du délinquant, notamment en tenant compte de tout plan de réadaptation proposé par ce dernier, de l’existence de programmes appropriés de service communautaire et de traitement dans la collectivité, de la question de savoir si le délinquant reconnaît ses torts et manifeste des remords, ainsi que des souhaits exprimés par la victime dans sa déclaration (que le tribunal doit prendre en considération suivant l’art. 722 du Code). Cette liste n’est pas exhaustive.

mardi 7 septembre 2010

Cadre analytique que doit adopter le juge pour évaluer la défense de nécessité

R. v. Costoff, 2010 ONCJ 109 (CanLII)

[17] The defence of “necessity” is set out in R. v. Perka 1984 CanLII 23 (S.C.C.), [1984] 2 S.C.R. 232. There are three elements to the defence of necessity:

• Imminent danger and peril.

• No reasonable legal alternative to what the defendant did.

• A relationship between the harm inflicted and the harm avoided.

[18] For the defence to be successful, I must have a reasonable doubt about each of these elements. Where an accused places before the court sufficient evidence to raise the issue, the onus is on the Crown to meet it beyond a reasonable doubt (R. v. Gyetvan [2005] O.J. No. 5813 para 18:

“The state of the law, therefore, is that for the necessity defence to prevail, the trial judge must be satisfied that there is evidence sufficient to give an air of reality of each of the three requirements. Having considered the evidence in this case and the applicable law, I am satisfied that the evidence here is sufficient to give an air of reality to each of these requirements.”

[19] In a significant review of the law in R. v. L.S. [2001] B.C.J. No. 3062, the justice observed at para 25:

“Generally, if there is clear evidence that the accused, or someone under his or her protection is at an immediate risk of physical harm, if no reasonable alternative is available and, if the driving is for no longer than is necessary to escape the harm, the defence of necessity will succeed”.

[20] In Regina v. Latimer [2001] S.C.J. No 1, the court observed that the standard is a modified objective test which takes into account the situation and characteristics of the particular accused:

“The accused person must, at the time of the act, honestly believe, on reasonable grounds, that he faces a situation of imminent peril that leaves no reasonable legal alternative open.” (para. 33)

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le pouvoir d'amender un acte d'accusation ou une dénonciation expliqué par la Cour d'appel de l'Ontario

R. v. K.R., 2025 ONCA 330 Lien vers la décision [ 17 ]        The power to amend an indictment or information under  s. 601(2)  of the  Crim...