lundi 5 octobre 2009

Considérations relatives à ce qu'est une fraude

R. c. Tremblay, 2003 CanLII 48280 (QC C.S.)

[16] Considérons maintenant ce qu'est une fraude. La fraude consiste en une privation malhonnête. La Cour d'appel, dans l'arrêt Émond, a rappelé les trois composantes de cette infraction, prévue au par. 380(1) C. cr. :

a) L' emploi de la supercherie, d'un mensonge ou d'un autre moyen dolosif;

b) L'existence d'une privation pour le public ou pour une personne déterminée;

c) L'existence d'un lien de causalité suffisant entre les deux.

[17] La Cour d'appel précise, dans l'arrêt précité, que l'élément moral de l'infraction de fraude comprend les deux caractéristiques suivantes: d'une part, l'accusé doit avoir eu la connaissance subjective qu'il utilisait le mensonge ou un autre moyen dolosif et, d'autre part, la connaissance subjective que son acte pouvait causer une privation à autrui.

[18] Une fois prouvés ces deux éléments, la Cour suprême, dans l'arrêt Théroux, précise que l'accusé est coupable de fraude, peu importe qu'il ait effectivement souhaité la privation ou qu'il lui était indifférent qu'elle survienne ou non. La Cour suprême ajoute que la conviction de l'accusé à l'effet que sa conduite n'est pas mauvaise ou que personne ne sera lésé en fin de compte, ne constitue pas un moyen de défense valable.

[19] Dans l'arrêt Zlatic, le plus haut tribunal du pays, détermine les paramètres d'application de la fraude par un « autre moyen dolosif » ce qui vise, à son avis, tous les autres moyens qu'on peut proprement qualifier de malhonnêtes. La malhonnêteté doit être déterminée objectivement, selon ce qu'une personne raisonnable considérerait comme un acte malhonnête. La fraude, par un autre moyen dolosif, inclut, par exemple, l'utilisation des ressources financières d'une compagnie à des fins personnelles, la dissimulation de faits importants, l'exploitation de la faiblesse d'autrui, le détournement de fonds et l'usurpation de fonds ou de biens. Quant à la mens rea, il n'est pas nécessaire que l'accusé saisisse subjectivement la malhonnêteté de ses actes. Il doit plutôt adopter, sciemment, la conduite qui constitue l'acte malhonnête, en comprenant que cette conduite peut entraîner une privation, au sens de faire perdre à une autre personne l'intérêt pécuniaire qu'il a, dans un certain bien, ou encore de mettre en péril cet intérêt.

[20] Enfin, en ce qui a trait à la privation, celle-ci est établie par la preuve d'un dommage, d'un préjudice ou d'un risque de préjudice. Il n'est pas nécessaire que les moyens frauduleux aient causé une perte pécuniaire réelle pour la victime, la privation pouvant consister en une perte véritable ou dans la mise en péril des intérêts pécuniaires de la victime.

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