jeudi 6 novembre 2014

L'État du droit quant au certiorari

Pèse Pêche Inc. c. R., 2013 NBCA 37 (CanLII)


[8]                                                               D’entrée de jeu, il est important de remarquer que la décision de faire droit ou non à une demande de bref de prérogative tel le certiorari relève d’un pouvoir discrétionnaire qu’exerce la cour supérieure dans le cadre de sa compétence générale et inhérente; qui plus est, la portée de la révision par voie de certiorariest très limitée et s’exerce « seulement lorsqu’on reproche à [un tribunal inférieur] d’avoir outrepassé la compétence qui lui a été attribuée par la loi ou d’avoir violé les principes de justice naturelle, ce qui, d’après la jurisprudence, équivaut à un abus de compétence » (R. c. Gallant2009 NBCA 84 (CanLII), 352 R.N.-B. (2e) 333, au par. 7). Voir à cet égard Harelkin c. Université de Regina1979 CanLII 18 (CSC), [1979] 2 R.C.S. 561, au par. 29 et les propos du juge Richard au nom de notre Cour dans R. c. Gallant, aux par. 7 à 9 ainsi que ceux du juge Robertson dans R. c. Chapelstone Developments Inc. et al.2004 NBCA 96 (CanLII), 277 R.N.-B. (2e) 350, aux par. 11 à 19.

[9]                                            Finalement, la nature de ce pouvoir est telle que « [m]ême lorsque l’on conclut à l’erreur de compétence, le certiorari est une mesure discrétionnaire qui peut être refusée » (voir R. c. Gallant, au par. 13).

[14]                                                            Il est vrai qu’un juge, autre que le juge du procès, peut accueillir favorablement une demande en certiorari et déclarer un mandat illégal et invalide dans certaines circonstances où les intérêts de la justice l’exigent (voir à cet égard les arrêts R. c. Sanchez1994 CanLII 5271 (ON SC), [1994] O.J. No. 2260 (C. Ont. (Div. gén.)) (QL), et R. c. Branton2001 CanLII 8535 (ON CA), [2001] O.J. No. 1445 (C.A.) (QL). On peut affirmer, toutefois, qu’il faudrait l’existence de circonstances exceptionnelles pour accorder une telle réparation lorsque la preuve du ministère public est probablement constituée surtout de preuves documentaires dont on conserve les copies, ce qui permet de continuer l’enquête. Il se peut, bien sûr, qu’en bout de ligne tous ces éléments de preuve soient inadmissibles en raison d’une analyse approfondie de la preuve dans son ensemble dans le cadre d’un procès éventuel. C’est dans ce contexte que le juge saisi des requêtes a refusé de se pencher sur la validité des mandats de perquisition, préférant plutôt l’approche préconisée dans l’arrêt R. c. Zevallos1987 CanLII 169 (ON CA), [1987] O.J. No. 663 (QL); Zevallos privilégie le juge du procès pour trancher les questions telles la validité des mandats de perquisition, les violations des droits protégés par laCharte ainsi que leurs répercussions sur l’admissibilité de la preuve.

[15]                                                           Cette démarche a d’ailleurs été retenue par notre Cour dans R. c. King (1997), 187 R.N.-B. (2e) 185, [1997] A.N.-B. no 106 (QL), en discutant de la contestation par voie de certiorari des mandats de perquisition avant la tenue du procès :

[TRADUCTION]
Le second point soulevé, l’étape de présentation de la demande, est aussi important. De façon générale, c’est au procès qu’il convient le mieux de décider les questions relatives à la Charte. Il y a des motifs valides pour ne pas examiner les violations de la Charte ni décider de la constitutionnalité des lois pertinentes par voie d’une demande préalable au procès. Les requêtes préalables fragmentent et prolongent les instances, elles ont tendance à présenter un fondement factuel incomplet et elles ne contribuent pas toujours à la détermination de la juste réparation prévue au paragraphe 24(1) de la Charte. [par. 14]

Au paragraphe 15, la Cour d’appel dans King reprenait les propos de la Cour d’appel de l’Ontario dans Zevallos portant que [TRADUCTION] « [...] l’annulation avant le procès du mandat de perquisition en raison de son invalidité constitue, dans un sens, un exercice futile. Dans l’hypothèse que le mandat de perquisition soit fondamentalement invalide, c’est-à-dire qu’il comporte plus que des vices mineurs ou de forme et que, par conséquent, les droits de l’accusé prévus à l’article 8 de laCharte aient été violés [...] la preuve est toujours susceptible d’être admise à moins que l’accusé ne réponde aux critères du paragraphe 24(2) [de la Charte] ». (Voir aussi R. c. Valley Equipment Ltd. (1998), 198 R.N.-B. (2e) 211 (C.A.), [1998] A.N.-B. no 73 (QL), au par. 28).      

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