R. c. Chassé, 2002 CanLII 23659 (QC C.Q.)
[10] À l'égard de ce crime, les tribunaux ont clairement voulu marquer l'opprobre de la société et la nécessité de dissuasion individuelle et collective en regard de tels gestes. Le Tribunal remarque l'existence d'une importante jurisprudence provenant des autres provinces canadiennes. Ainsi, en matière de possession de pornographie juvénile, le Tribunal a trouvé de la jurisprudence où les sentences vont de l'absolution conditionnelle à une peine de 30 mois d'incarcération au sein d'un pénitencier.
[11] Aussi, en matière de distribution, la jurisprudence dans les autres provinces du Canada va de l'absolution conditionnelle à l'amende, à 18 mois d'emprisonnement.
[12] En ce qui a trait à la production, la jurisprudence d'autres provinces situe les sentences entre 1 an et l'équivalent de 44 mois d'emprisonnement.
[13] Par ailleurs, la jurisprudence du Québec varie entre un sursis de peine et probation de 18 mois à un emprisonnement ferme de 12 mois. Ainsi, dans l'affaire Blondin c. R., un médecin a reçu une peine de 21 mois d'emprisonnement ferme dont 12 mois pour la possession de pornographie juvénile, 3 mois pour immoralité sexuelle et 6 mois pour agression sexuelle. L'accusé prenait des photos de ses patientes alors qu'il en faisait leur examen. L'une de ses patientes était âgée de 8 ans. L'agression sexuelle, quant à elle, consistait en un baiser arraché d'une de ses patientes. La Cour d'appel a considéré la circonstances aggravantes de la position de confiance et d'autorité du médecin envers ses patientes.
[14] Dans l'affaire R. c. Lévesque, l'accusé a plaidé coupable à 2 accusations d'incitation à des contacts sexuels, punissable par déclaration sommaire de culpabilité et à une accusation de possession de pornographie. L'accusé et son fils rencontraient 2 jeunes filles âgées de 10 ans et leur parlaient dans leur véhicule de photos nues et prenaient des photos d'elles dans des positions lascives ainsi que de leur partie génitale. L'accusé avait prévu une rencontre avec celles-ci pour prendre d'autres photos dans un bois mais heureusement la mère d'un enfant est intervenue suffisamment vite. L'accusé a été détenu 9 jours de façon préventive mais a eu des conditions strictes de remise en liberté. Le rapport présentenciel n'écarte pas la possibilité de récidive. L'accusé est sans antécédent. Il est condamné à un sursis de peine de 18 mois comportant une probation et un don de 900$.
[15] Dans l'affaire R. c. Hébert, l'accusé, âgé de 20 ans, possédant des condamnations criminelles, comprenant une agression sexuelle, a importé de Suisse, par Internet, 11 photographies impliquant de jeunes enfants s'adonnant à une activité sexuelle entre eux ou avec des adultes. L'accusé les a, par la suite, expédié à différentes adresses électroniques. Les événements se sont déroulés au cours d'une même nuit. Par ailleurs le rapport présentenciel faisait état d'un risque considérable que l'accusé développe une problématique de pédophilie. L'accusé est condamné à une peine d'emprisonnement de 9 mois concurrents sur chacun des chefs à être purgés au sein de la collectivité.
[16] Dans l'affaire R. c. Dabaté, l'accusé a reconnu sa culpabilité à un chef de possession de pornographie juvénile et 4 chefs de contacts sexuels avec des enfants de moins de 14 ans ainsi qu'à 20 chefs d'exhibitionnisme. L'accusé avait des antécédents judiciaires en semblable matière. L'accusé a entrepris une castration chimique. Les actes impliquaient 21 victimes. En regard des chefs d'accusation d'exhibitionnisme, l'accusé est condamné à 5 mois d'emprisonnement et est condamné à une peine de 9 mois concurrent en regard de la possession de la pornographie juvénile.
[17] Le législateur a créé toute une panoplie d'infractions en vue de protéger les enfants de l'exploitation sexuelle. Ainsi, toute personne qui a des contacts sexuels avec un enfant de moins de 14 ans, ou l'invite, ou l'incite à de tels contacts est passible d'une peine de 10 ans d'emprisonnement. Quiconque commet l'inceste est passible d'un emprisonnement maximal de 14 ans. Les relations sexuelles anales, non-commises dans l'intimité par 2 personnes consentantes d'au moins 18 ans, sont passibles d'une peine de 10 ans. La bestialité en présence d'un enfant de moins de 14 ans ou alors que celui-ci est incité à de tels gestes, est passible d'un emprisonnement de 10 ans. La production, l'impression, la publication, l'importation, la distribution et la possession à cette fin de pornographie juvénile est passible de 10 ans d'emprisonnement. La possession de pornographie juvénile est passible de 5 ans d'emprisonnement. Les parents ou tuteurs qui servent d'entremetteurs et qui amènent leur enfant ou pupille à commettre des actes sexuels interdits avec un tiers sont passibles d'une peine d'emprisonnement de 5 ans, si l'enfant est de moins de 14 ans, et de 2 ans, s'il est âgé entre 14 et 18 ans. Il en est de même du maître d'un lieu qui y permet des actes sexuels interdits. La personne qui participe à un adultère ou à une immoralité sexuelle ou se livre à une ivrognerie habituelle ou à toute autre forme de vices et qui par là met en danger les mœurs d'enfants de moins de 18 ans, est passible d'une peine d'emprisonnement de 2 ans. Enfin, l'agression sexuelle est passible d'une peine d'emprisonnement de 10 ans. L'agression sexuelle avec une arme ou violence supplémentaire est passible de 14 ans d'emprisonnement avec un minimum de 4 ans s'il y a usage d'arme à feu. L'agression sexuelle mettant la vie en danger ou blessant, mutilant, défigurant une personne est passible d'emprisonnement à perpétuité, avec un minimum de 4 ans s'il y a usage d'une arme à feu.
[18] Le Tribunal est d'avis qu'il faut d'abord considérer les sentences suivant la gravité objective mentionnée par le législateur. Par ailleurs, chaque cas demeure un cas d'espèce. Il y aura gradation des sentences suivant l'accumulation des facteurs aggravants. Le Tribunal est d'avis qu'il y a lieu d'examiner les facteurs suivants lorsqu'un individu est accusé de pornographie juvénile :
1) la nature du matériel:
Il y a lieu d'examiner s'il s'agit de films d'enfants, de photographies, de dessins ou graphiques ou encore de textes. En l'espèce, il s'agissait principalement de représentations par des dessins.
2) La quantité du matériel en cause en relation avec la période requise pour accumuler un tel matériel:
Ainsi, à l'heure de la technologie d'Internet, il faut peut-être éviter de considérer la quantité d'images comme étant en soi le facteur le plus aggravant. Il serait possible d'obtenir des centaines d'images, voire peut-être des milliers à l'intérieur de 24 heures d'utilisation d'Internet. Par ailleurs, la période pendant laquelle l'accusé s'est évertué à faire cette collection de pornographie juvénile peut être un élément déterminant. En l'espèce, le Tribunal n'a aucune preuve en regard de la période pendant laquelle les données ont été obtenues par Internet.
3) L'âge des enfants:
Plus les enfants sont jeunes, moins ils sont en mesure de discernement et plus ils sont susceptibles d'être affectés ultérieurement dans leur propre développement.
4) L'utilisation de propriété ou du nom d'un tiers:
Lorsque le matériel est obtenu par un ordinateur, l'est-il en utilisant l'ordinateur d'un tiers, les cartes de crédit d'un tiers ou le nom d'un tiers? Il apparaît, au Tribunal, lorsque l'accusé met en cause un tiers par l'utilisation de son ordinateur, qu'il s'agit d'un facteur aggravant. En l'espèce, l'accusé avait partiellement de ces images inappropriées à la tour de contrôle de Kuujjuarapik où il travaillait ainsi qu'à son domicile.
5) Le matériel retenu est-il sous une forme facilement diffusable ou distribuable?
Il est certain que les revues de pornographie infantile obtenues d'une façon secrète sont moins facilement diffusables que le matériel sauvegardé sur ordinateur. Le matériel sauvegardé sur ordinateur pose davantage de risque puisque plus facilement diffusable.
6) Les démarches et les coûts pour l'obtention du matériel pornographique juvénile:
Ici, il y a lieu d'examiner si l'accusé a déboursé des sommes d'argent pour l'obtenir, s'il est membre d'un quelconque réseau et quelles sont ses démarches pour obtenir ledit matériel. En l'espèce, il n'y a pas de démarche autre que l'utilisation d'Internet.
7) L'utilisation visée du matériel pornographique :
Enfin, l'utilisation du matériel pornographique juvénile est-elle ponctuelle? S'agit-il d'une curiosité immature? Sert-elle à émousser les fantasmes personnels d'une personne qui pourrait par ailleurs contrôler ses actions ou sert-elle davantage à entretenir une déviance sexuelle connue de l'individu? Sert-elle à être vue par d'autres enfants? En l'espèce, lorsqu'interrogé par l'agente de probation, l'accusé admettait avoir été en possession de matériel pornographique juvénile mais niait avoir fait des démarches pour s'en procurer et l'avoir utilisé. L'accusé ne se reconnaissait aucune problématique sexuelle. Par la suite, l'accusé admet s'être procuré, lui-même, le matériel pornographique sur Internet. Il réitère, cependant, que le fait de regarder ce matériel pornographique n'avait, d'aucune façon, un but de gratification sexuelle. Il dit ne pas pouvoir expliquer le but de l'observation des enfants ayant des activités sexuelles entre eux où avec des adultes. Il soutient que ce serait une simple curiosité. Il réitère qu'il n'a aucune problématique sexuelle. Les photos ne créeraient pas chez lui d'excitation. Il s'agissait seulement, selon lui, d'une curiosité malsaine, sans qu'il puisse s'en expliquer les raisons. Pourtant, le 15 mai 1984, l'accusé a été condamné à un total de 3 ans de pénitencier en regard de 9 chefs d'accusation, soit 3 accusations de sodomie à l'égard de jeunes garçons et 6 accusations de grossière indécence. Il faut bien comprendre que l'accusé a déjà reçu une sentence à cet égard. Cependant, il serait impossible de comprendre la situation de l'accusé sans référer aux événements précédents. Les 6 jeunes garçons, victimes des agressions sexuelles, étaient âgés entre 12 et 13 ans. Les actes reprochés se sont échelonnés sur une période d'environ un an. Un des jeunes a été sodomisé plus de 40 fois par l'accusé, qui était alors âgé de 31 ans. L'accusé était décrit comme un individu n'étant pas un sociopathe ni un pervers mais plutôt un individu immature, en bonne santé, intelligent et très doué. L'individu était considéré capable d'affection et de coopération mais aussi d'utilisation et de manipulation. Sans le qualifier de pédophile pervers, le psychologue ne le considérait pas comme un simple pédophile d'occasion. Cette conclusion est très claire, tant dans le jugement que dans le rapport du psychologue et le rapport sur sentence de l'agente de probation. Le psychologue le qualifie alors de pédophile immature et névrotique. Il était d'avis que l'intelligence supérieure, dont est doué l'accusé, permettait d'avoir un pronostic favorable. Le Tribunal ne peut retenir les prétentions de l'accusé sur ses interrogations en regard d'une simple curiosité. Il est manifeste que l'accusé, depuis 1984, savait qu'il souffrait de déviance sexuelle. Il a même, par la suite, poursuivi des thérapies. Il est clair qu'il a utilisé le matériel pornographique juvénile sans se soucier qu'il entretenait ainsi cette déviance sexuelle. Il y a lieu de signaler que l'accusé a accumulé en majorité des images de garçons entre 12 et 16 ans, qui avaient des comportements sexuels allant de la sodomie à la masturbation, lesquels ont beaucoup de similitude avec les gestes pour lesquels il a été condamné dans le passé. La psychologue ayant fait l'évaluation psycho-sexuelle, en regard du présent dossier, ainsi que l'agente de probation, sont d'avis que la présente accusation pourrait faire partie d'un cycle délictuel de l'accusé et représenter possiblement une étape dans un processus de récidive de l'accusé. Le fait qu'un individu, doté d'une intelligence supérieure, ne prenne pas les moyens nécessaires pour prévenir la récidive, dans un contexte où il est lui-même fragile en regard de son attirance pour les enfants, mais qu'il entretient davantage ses phantasmes inappropriés, devient un facteur aggravant.
8) Les autres éléments sont d'examiner s'il y a eu importation, distribution et production:
En cas de production et de distribution, il faut encore voir s'il y a existence de profits reliés à celles-ci, appartenance à une organisation, le nombre d'enfants impliqués et leur âge, et la gradation des formes d'humiliation et de violence à l'égard des enfants. En l'espèce, il n'y a aucun de ces derniers éléments, puisque seule la possession est en cause.
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vendredi 26 mars 2010
Principes devant présider le pouvoir discrétionnaire du tribunal de faire droit ou non à la demande présentée par un avocat pour cesser d’occuper
R. c. Cunningham, 2010 CSC 10
[46] Les principes suivants devraient présider à l’exercice du pouvoir discrétionnaire du tribunal de faire droit ou non à la demande présentée par un avocat pour cesser d’occuper.
[47] Le tribunal devrait faire droit à la demande qui est présentée suffisamment à l’avance pour que la procédure inscrite au rôle ne doive pas être reportée. Il n’y a pas lieu alors d’examiner le fondement de la demande ni d’exiger que l’avocat continue de représenter son client.
[48] Lorsque le délai est plus serré, le tribunal est justifié de pousser l’examen. Tant qu’il ne manque pas au secret professionnel, l’avocat peut révéler qu’il veut cesser d’occuper pour des motifs d’ordre déontologique, pour cause de non‑paiement de ses honoraires ou pour une autre raison (sa charge de travail, p. ex.). S’il invoque le respect de la déontologie, c’est que sa relation avec son client a évolué de telle sorte qu’il ne peut en conscience continuer de le représenter. L’avocat peut invoquer des « motifs d’ordre déontologique » lorsque, par exemple, l’accusé lui demande de manquer à ses obligations professionnelles (voir, p. ex., Barreau du Haut‑Canada, règles 2.09(7)b) et d); barreau de l’Alberta, ch. 14, règle 2; barreau de la Colombie‑Britannique, ch. 10, règle 1) ou qu’il ne suit pas ses conseils sur un point important lié au procès (voir, p. ex., Barreau du Haut‑Canada, règle 2.09(2); barreau de l’Alberta, ch. 14, règle 1; barreau de la Colombie‑Britannique, ch. 10, règle 2). Lorsque la véritable raison à l’origine de la demande est le non‑paiement des honoraires, l’avocat ne peut invoquer la déontologie. Toutefois, que l’un ou l’autre soit invoqué, le tribunal doit s’en tenir à l’explication donnée et s’abstenir de pousser l’examen afin de ne pas compromettre le secret professionnel.
[49] La demande d’autorisation de cesser d’occuper présentée pour un motif d’ordre déontologique doit être accueillie (voir les arrêts C. (D.D.), p. 328, et Deschamps, par. 23). Lorsqu’un problème d’ordre éthique se pose dans sa relation avec le client, l’avocat peut être tenu de se retirer du dossier pour se conformer à ses obligations professionnelles. Le tribunal ne saurait exiger qu’il continue d’occuper au mépris de celles‑ci.
[50] Lorsque le non‑paiement de ses honoraires est à l’origine de la demande de l’avocat, le tribunal peut, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, la rejeter. Il peut également recourir à son pouvoir en matière d’outrage au tribunal pour faire respecter sa décision de ne pas autoriser l’avocat à cesser d’occuper (C. (D.D.), p. 327). Voici une liste non exhaustive des éléments dont il peut tenir compte dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de faire droit ou non à la demande :
· la possibilité que l’accusé se défende lui‑même;
· l’existence d’autres avenues pour que l’accusé soit représenté;
· les conséquences pour l’accusé d’un délai dans le déroulement de la procédure, spécialement lorsque l’accusé est en détention;
· la conduite de l’avocat (p. ex., s’il a informé l’accusé suffisamment à l’avance pour qu’il puisse trouver un autre représentant ou s’il a demandé dès que possible au tribunal l’autorisation de cesser d’occuper);
· l’incidence sur le ministère public et sur un coaccusé;
· l’incidence sur les plaignants, les témoins et les jurés;
· l’équité envers l’avocat de la défense, compte tenu notamment de la durée prévue de l’instance et de sa complexité;
· l’historique du dossier, y compris le changement d’avocat à répétition.
Ces éléments étant tous étrangers à la relation avocat‑client, leur examen ne saurait violer le secret professionnel. Le tribunal doit déterminer, au regard de ces éléments, si l’autorisation de cesser d’occuper porterait sérieusement atteinte à l’administration de la justice. Dans l’affirmative, il peut la refuser.
[46] Les principes suivants devraient présider à l’exercice du pouvoir discrétionnaire du tribunal de faire droit ou non à la demande présentée par un avocat pour cesser d’occuper.
[47] Le tribunal devrait faire droit à la demande qui est présentée suffisamment à l’avance pour que la procédure inscrite au rôle ne doive pas être reportée. Il n’y a pas lieu alors d’examiner le fondement de la demande ni d’exiger que l’avocat continue de représenter son client.
[48] Lorsque le délai est plus serré, le tribunal est justifié de pousser l’examen. Tant qu’il ne manque pas au secret professionnel, l’avocat peut révéler qu’il veut cesser d’occuper pour des motifs d’ordre déontologique, pour cause de non‑paiement de ses honoraires ou pour une autre raison (sa charge de travail, p. ex.). S’il invoque le respect de la déontologie, c’est que sa relation avec son client a évolué de telle sorte qu’il ne peut en conscience continuer de le représenter. L’avocat peut invoquer des « motifs d’ordre déontologique » lorsque, par exemple, l’accusé lui demande de manquer à ses obligations professionnelles (voir, p. ex., Barreau du Haut‑Canada, règles 2.09(7)b) et d); barreau de l’Alberta, ch. 14, règle 2; barreau de la Colombie‑Britannique, ch. 10, règle 1) ou qu’il ne suit pas ses conseils sur un point important lié au procès (voir, p. ex., Barreau du Haut‑Canada, règle 2.09(2); barreau de l’Alberta, ch. 14, règle 1; barreau de la Colombie‑Britannique, ch. 10, règle 2). Lorsque la véritable raison à l’origine de la demande est le non‑paiement des honoraires, l’avocat ne peut invoquer la déontologie. Toutefois, que l’un ou l’autre soit invoqué, le tribunal doit s’en tenir à l’explication donnée et s’abstenir de pousser l’examen afin de ne pas compromettre le secret professionnel.
[49] La demande d’autorisation de cesser d’occuper présentée pour un motif d’ordre déontologique doit être accueillie (voir les arrêts C. (D.D.), p. 328, et Deschamps, par. 23). Lorsqu’un problème d’ordre éthique se pose dans sa relation avec le client, l’avocat peut être tenu de se retirer du dossier pour se conformer à ses obligations professionnelles. Le tribunal ne saurait exiger qu’il continue d’occuper au mépris de celles‑ci.
[50] Lorsque le non‑paiement de ses honoraires est à l’origine de la demande de l’avocat, le tribunal peut, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, la rejeter. Il peut également recourir à son pouvoir en matière d’outrage au tribunal pour faire respecter sa décision de ne pas autoriser l’avocat à cesser d’occuper (C. (D.D.), p. 327). Voici une liste non exhaustive des éléments dont il peut tenir compte dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de faire droit ou non à la demande :
· la possibilité que l’accusé se défende lui‑même;
· l’existence d’autres avenues pour que l’accusé soit représenté;
· les conséquences pour l’accusé d’un délai dans le déroulement de la procédure, spécialement lorsque l’accusé est en détention;
· la conduite de l’avocat (p. ex., s’il a informé l’accusé suffisamment à l’avance pour qu’il puisse trouver un autre représentant ou s’il a demandé dès que possible au tribunal l’autorisation de cesser d’occuper);
· l’incidence sur le ministère public et sur un coaccusé;
· l’incidence sur les plaignants, les témoins et les jurés;
· l’équité envers l’avocat de la défense, compte tenu notamment de la durée prévue de l’instance et de sa complexité;
· l’historique du dossier, y compris le changement d’avocat à répétition.
Ces éléments étant tous étrangers à la relation avocat‑client, leur examen ne saurait violer le secret professionnel. Le tribunal doit déterminer, au regard de ces éléments, si l’autorisation de cesser d’occuper porterait sérieusement atteinte à l’administration de la justice. Dans l’affirmative, il peut la refuser.
C'est à la poursuite de démontrer hors de tout doute raisonnable que les accusés n'agissaient pas en légitime défense
Barboza-Pena c. R., 2008 QCCA 1133 (CanLII)
[100] (...) c'est à la poursuite de démontrer hors de tout doute raisonnable que les accusés n'agissaient pas en légitime défense. La charge de la preuve incombe à la poursuite et ce moyen de défense ne change pas cette règle : R. c. Cinous, 2002 CSC 29 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 3. Il est vrai que la veille, au tout début de ses directives, la juge avait mentionné que si la poursuite n'a pas écarté cette défense « au-delà de tout doute raisonnable, ça amène un verdict de non culpabilité ». J'estime toutefois que cette dernière remarque, tant par son contenu que par le moment où elle a été faite, n'était pas suffisante pour neutraliser l'impact de la directive erronée survenue par la suite.
[102] Or, il n'était pas nécessaire que le jury décide en faveur des accusés pour que ces derniers bénéficient du doute raisonnable. Un doute raisonnable suffisait et c'est la raison pour laquelle les directives ont, à mon avis, renversé indûment le fardeau de la preuve, ce qui constitue en l'espèce une erreur de droit déterminante. Il faut de plus souligner que, lors du procès, la poursuite a admis, à bon droit, que la preuve pouvait donner ouverture à cette défense et j'estime qu'elle a tort de prétendre maintenant en appel que cette défense ne pouvait être supportée par la preuve.
[100] (...) c'est à la poursuite de démontrer hors de tout doute raisonnable que les accusés n'agissaient pas en légitime défense. La charge de la preuve incombe à la poursuite et ce moyen de défense ne change pas cette règle : R. c. Cinous, 2002 CSC 29 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 3. Il est vrai que la veille, au tout début de ses directives, la juge avait mentionné que si la poursuite n'a pas écarté cette défense « au-delà de tout doute raisonnable, ça amène un verdict de non culpabilité ». J'estime toutefois que cette dernière remarque, tant par son contenu que par le moment où elle a été faite, n'était pas suffisante pour neutraliser l'impact de la directive erronée survenue par la suite.
[102] Or, il n'était pas nécessaire que le jury décide en faveur des accusés pour que ces derniers bénéficient du doute raisonnable. Un doute raisonnable suffisait et c'est la raison pour laquelle les directives ont, à mon avis, renversé indûment le fardeau de la preuve, ce qui constitue en l'espèce une erreur de droit déterminante. Il faut de plus souligner que, lors du procès, la poursuite a admis, à bon droit, que la preuve pouvait donner ouverture à cette défense et j'estime qu'elle a tort de prétendre maintenant en appel que cette défense ne pouvait être supportée par la preuve.
Le consentement de la victime à l’emploi de la force
LSJPA — 093, 2009 QCCA 248 (CanLII)
[15] Si la victime a consenti à se battre avec l’appelant, ce dernier n’a pas pu se livrer à des voies de fait illégales. L’on ne pourra, en général, parler d'infraction car l'actus reus du crime fera défaut. L’absence de consentement doit-t-elle être démontrée hors de tout doute raisonnable par le ministère public dans chaque cas de voies de fait ou s’agit-il d’un moyen de défense ouvert à l’accusé ? Au Canada, l’absence de consentement au recours intentionnel à la force a toujours été un élément essentiel de l’infraction de voies de fait. Le juge Gonthier écrit à ce sujet, pour la majorité, dans l’arrêt Jobidon :
Que le consentement soit formellement considéré comme faisant partie de l'actus reus de l'infraction, ou comme moyen de défense, sa fonction essentielle demeure inchangée — si le consentement est prouvé, ou si l'absence de consentement n'est pas prouvée, une personne accusée de voies de fait pourra en général s'appuyer sur le consentement du plaignant pour empêcher sa condamnation. Elle pourra invoquer le consentement pour nier sa responsabilité. Cette réalité fondamentale est largement reconnue. […]
[16] En revanche, cette règle souffre des limitations que précise la Cour suprême, dans le même arrêt :
La limite que requiert l'application de l'art. 265 aux faits de l'espèce, est l'annulation du consentement entre adultes à l'utilisation intentionnelle de la force pour s'infliger mutuellement des blessures graves ou de sérieuses lésions corporelles au cours d'une rixe ou d'une bagarre à coups de poing. […] Telle est l'étendue de la limite prescrite par la common law en l'espèce. Il se peut qu'il soit jugé, dans d'autres cas, que des limites supplémentaires s'appliquent. Cependant, il est préférable de fixer ces limites, s'il en est, dans chaque cas de sorte que les caractéristiques particulières de l'affaire puissent exercer une influence rationnelle sur l'étendue de la limite et sur sa justification.
[…]
[…] l'énoncé qui précède évite l'invalidation du consentement au recours intentionnel à la force causant seulement de légères blessures ou des lésions corporelles mineures. Les lésions corporelles visées par le critère sont essentiellement équivalentes à celles envisagées par la définition figurant au par. 267(2) du Code, concernant l'infraction de voies de fait causant des lésions corporelles. En vertu de cette disposition, l'expression « lésions corporelles » désigne « une blessure qui nuit à la santé ou au bien‑être du plaignant et qui n'est pas de nature passagère ou sans importance ».
Selon cette définition, et compte tenu du fait que le critère s'applique uniquement aux cas dans lesquels des adultes sont en cause, le phénomène de la bousculade « ordinaire » dans une cour d'école, où garçons ou filles cherchent, par manque de maturité, à régler leurs différends avec leurs mains, ne sera pas visé par cette limite. Cela n'a jamais été la politique de la loi et je n'ai pas l'intention de modifier le statu quo. Toutefois, je ne me prononcerai pas sur la question de savoir si les garçons ou les filles âgés de moins de 18 ans qui ont vraiment l'intention de se blesser mutuellement, et qui se causent en fin de compte plus que des lésions corporelles mineures, pourraient invoquer le consentement comme moyen de
défense. […] Le résultat approprié dépendra sans aucun doute des circonstances propres à chaque affaire
[18] Dans ce contexte, l'accusé qui soulève un doute raisonnable sur le consentement de la victime à l’emploi de la force sera acquitté. L'état d'esprit de la victime au moment des événements permettra de déterminer si elle a consenti expressément ou tacitement à une bagarre, à une échauffourée avec l'accusé. La détermination du consentement s'effectue selon un critère subjectif puisque c'est l'état d'esprit de la victime qui importe alors.
[21] Constituant une erreur de fait, la croyance sincère de l'accusé au consentement de la victime, un critère subjectif, n'a pas à être raisonnable mais doit être fondée sur des motifs objectivement raisonnables.
[22] Il s'agit ici d'examiner la mens rea de l'infraction, soit la croyance de bonne foi appréciée selon le critère de la vraisemblance. Si l’accusé satisfait au fardeau de présentation, il peut bénéficier du doute raisonnable, que le doute découle de sa version ou de la preuve du poursuivant, à moins que le ministère public démontre hors de tout doute raisonnable que l'accusé savait que la victime ne consentait pas à l'emploi de la force contre elle. Ce fardeau est exigeant, tous en conviendront.
[15] Si la victime a consenti à se battre avec l’appelant, ce dernier n’a pas pu se livrer à des voies de fait illégales. L’on ne pourra, en général, parler d'infraction car l'actus reus du crime fera défaut. L’absence de consentement doit-t-elle être démontrée hors de tout doute raisonnable par le ministère public dans chaque cas de voies de fait ou s’agit-il d’un moyen de défense ouvert à l’accusé ? Au Canada, l’absence de consentement au recours intentionnel à la force a toujours été un élément essentiel de l’infraction de voies de fait. Le juge Gonthier écrit à ce sujet, pour la majorité, dans l’arrêt Jobidon :
Que le consentement soit formellement considéré comme faisant partie de l'actus reus de l'infraction, ou comme moyen de défense, sa fonction essentielle demeure inchangée — si le consentement est prouvé, ou si l'absence de consentement n'est pas prouvée, une personne accusée de voies de fait pourra en général s'appuyer sur le consentement du plaignant pour empêcher sa condamnation. Elle pourra invoquer le consentement pour nier sa responsabilité. Cette réalité fondamentale est largement reconnue. […]
[16] En revanche, cette règle souffre des limitations que précise la Cour suprême, dans le même arrêt :
La limite que requiert l'application de l'art. 265 aux faits de l'espèce, est l'annulation du consentement entre adultes à l'utilisation intentionnelle de la force pour s'infliger mutuellement des blessures graves ou de sérieuses lésions corporelles au cours d'une rixe ou d'une bagarre à coups de poing. […] Telle est l'étendue de la limite prescrite par la common law en l'espèce. Il se peut qu'il soit jugé, dans d'autres cas, que des limites supplémentaires s'appliquent. Cependant, il est préférable de fixer ces limites, s'il en est, dans chaque cas de sorte que les caractéristiques particulières de l'affaire puissent exercer une influence rationnelle sur l'étendue de la limite et sur sa justification.
[…]
[…] l'énoncé qui précède évite l'invalidation du consentement au recours intentionnel à la force causant seulement de légères blessures ou des lésions corporelles mineures. Les lésions corporelles visées par le critère sont essentiellement équivalentes à celles envisagées par la définition figurant au par. 267(2) du Code, concernant l'infraction de voies de fait causant des lésions corporelles. En vertu de cette disposition, l'expression « lésions corporelles » désigne « une blessure qui nuit à la santé ou au bien‑être du plaignant et qui n'est pas de nature passagère ou sans importance ».
Selon cette définition, et compte tenu du fait que le critère s'applique uniquement aux cas dans lesquels des adultes sont en cause, le phénomène de la bousculade « ordinaire » dans une cour d'école, où garçons ou filles cherchent, par manque de maturité, à régler leurs différends avec leurs mains, ne sera pas visé par cette limite. Cela n'a jamais été la politique de la loi et je n'ai pas l'intention de modifier le statu quo. Toutefois, je ne me prononcerai pas sur la question de savoir si les garçons ou les filles âgés de moins de 18 ans qui ont vraiment l'intention de se blesser mutuellement, et qui se causent en fin de compte plus que des lésions corporelles mineures, pourraient invoquer le consentement comme moyen de
défense. […] Le résultat approprié dépendra sans aucun doute des circonstances propres à chaque affaire
[18] Dans ce contexte, l'accusé qui soulève un doute raisonnable sur le consentement de la victime à l’emploi de la force sera acquitté. L'état d'esprit de la victime au moment des événements permettra de déterminer si elle a consenti expressément ou tacitement à une bagarre, à une échauffourée avec l'accusé. La détermination du consentement s'effectue selon un critère subjectif puisque c'est l'état d'esprit de la victime qui importe alors.
[21] Constituant une erreur de fait, la croyance sincère de l'accusé au consentement de la victime, un critère subjectif, n'a pas à être raisonnable mais doit être fondée sur des motifs objectivement raisonnables.
[22] Il s'agit ici d'examiner la mens rea de l'infraction, soit la croyance de bonne foi appréciée selon le critère de la vraisemblance. Si l’accusé satisfait au fardeau de présentation, il peut bénéficier du doute raisonnable, que le doute découle de sa version ou de la preuve du poursuivant, à moins que le ministère public démontre hors de tout doute raisonnable que l'accusé savait que la victime ne consentait pas à l'emploi de la force contre elle. Ce fardeau est exigeant, tous en conviendront.
La légitime défense
LSJPA — 093, 2009 QCCA 248 (CanLII)
[43] Ce moyen de défense ne peut être accepté que si les quatre conditions énumérées ci-haut sont réunies. Pour réussir, l'accusé doit soulever un doute raisonnable sur l'existence de chacune de ces conditions. Comme le soulignait le juge Cory pour la Cour suprême dans R. c. Hebert :
[…] Le jury doit en fait être convaincu que chaque élément du moyen de défense existe. Ainsi, pour que le moyen de défense soit accepté, le jury doit avoir un doute raisonnable quant à l'existence de tous les éléments du moyen de défense. C'est‑à‑dire (i) l'accusé a été attaqué illégalement; (ii) l'accusé n'a pas provoqué l'attaque; (iii) l'accusé a employé la force sans intention de causer la mort ni des lésions corporelles graves; et (iv) l'accusé n'a employé que la force nécessaire pour repousser l'attaque. Le juge du procès a eu raison de dire que la défense ne réussirait que si un doute raisonnable était soulevé à l'égard de tous ces éléments.
[…]
[…] Le ministère public n'est pas tenu de prouver hors de tout doute raisonnable que la conduite de l'appelant n'est compatible avec aucun des éléments du moyen de défense. Il suffit que le ministère public puisse prouver hors de tout doute raisonnable que l'un ou l'autre des quatre éléments énumérés n'a pas été établi.
[44] Le premier juge a procédé, à bon droit, à une analyse progressive de la preuve. La preuve établit l'existence des trois premiers éléments énumérés par le juge Cory. Le dernier élément, celui de la force nécessaire, est crucial en l’espèce. Le juge rappelle à juste titre que : l’appréciation du caractère raisonnable ou non de la force employée ne dépend pas du résultat de l’acte de légitime défense mais bien de l’intention de l’agent; « l’analyse appropriée consiste à se demander si la croyance de l’accusé, qu’il employait la force nécessaire pour repousser l’attaque, était subjectivement honnête et objectivement raisonnable »; une approche contextuelle de l'évaluation objective de la force nécessaire doit être favorisée et il ne faut pas s'attendre à ce que l'accusé, dans une situation où il se voit attaqué, ait mesuré avec précision le degré de force nécessaire pour se défendre.
[45] Au sujet de la force nécessaire, les auteurs Côté-Harper, Rainville et Turgeon écrivent :
[…] Si le tribunal en conclut que l'accusé n'a probablement pas excédé ce qu'il pouvait croire nécessaire dans le contexte, il doit bénéficier du doute raisonnable. Il faut aussi tenir compte du fait qu'une personne agit dans le feu de l'action et que cela exige des décisions parfois instinctives ou qui n'ont pas le temps d'être longuement ou mûrement réfléchies
[46] L'accusé peut croire, à tort, être victime d'une attaque ou estimer, de façon tout autant erronée, qu'il emploie la force nécessaire pour répondre à une attaque. La recevabilité de la légitime défense ne peut être laissée à la seule appréciation subjective de l'accusé. En revanche, lorsqu'un danger réel ou appréhendé est présent, il faut tenir compte de la perception et de la personnalité de l'individu.
[47] Enfin, cette défense pourra être invoquée, que l'accusé ait agi pour repousser une attaque ou pour l'éviter. La Cour suprême rappelait, dans l'arrêt Paice :
[…] La légitime défense prévue au par. 34(1) a un sens large et permet à la personne attaquée d'employer la force nécessaire pour se défendre, sans qu'aucune crainte préalable de mourir ou de subir des lésions corporelles graves soit nécessaire. […]
[49] Rappelons qu'un coup de poing peut constituer un acte de légitime défense en réponse à une simple poussée. Dans l'arrêt Whittaker rendu par la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, deux personnes (un garçon de 19 ans et son beau-père) avaient bu et s'étaient disputées. Le jeune avait donné deux coups de poing à son beau-père après que ce dernier, qui se trouvait entre lui et la porte, l'eut poussé. L'accusé avait également donné d'autres coups à son beau-père, une fois celui-ci au sol. La Cour a retenu que les deux premiers coups constituaient un acte de légitime défense.
[50] Dans l'arrêt Pinto, notre Cour devait décider si l'accusé avait agi en légitime défense en assenant un coup de poing au visage du plaignant ou si, comme l'avait conclu le premier juge, l'accusé n'avait été qu'ennuyé par le plaignant, harcelé, sans s’être toutefois senti menacé. Notre Cour a rejeté l'appel en concluant que le comportement de l'accusé avant que fut donné le coup de poing démontrait son désir de s'en prendre au plaignant et l'absence de crainte. Le geste a également été qualifié d’excessif par rapport aux gestes du plaignant, au point de ne pas soulever un doute raisonnable.
[43] Ce moyen de défense ne peut être accepté que si les quatre conditions énumérées ci-haut sont réunies. Pour réussir, l'accusé doit soulever un doute raisonnable sur l'existence de chacune de ces conditions. Comme le soulignait le juge Cory pour la Cour suprême dans R. c. Hebert :
[…] Le jury doit en fait être convaincu que chaque élément du moyen de défense existe. Ainsi, pour que le moyen de défense soit accepté, le jury doit avoir un doute raisonnable quant à l'existence de tous les éléments du moyen de défense. C'est‑à‑dire (i) l'accusé a été attaqué illégalement; (ii) l'accusé n'a pas provoqué l'attaque; (iii) l'accusé a employé la force sans intention de causer la mort ni des lésions corporelles graves; et (iv) l'accusé n'a employé que la force nécessaire pour repousser l'attaque. Le juge du procès a eu raison de dire que la défense ne réussirait que si un doute raisonnable était soulevé à l'égard de tous ces éléments.
[…]
[…] Le ministère public n'est pas tenu de prouver hors de tout doute raisonnable que la conduite de l'appelant n'est compatible avec aucun des éléments du moyen de défense. Il suffit que le ministère public puisse prouver hors de tout doute raisonnable que l'un ou l'autre des quatre éléments énumérés n'a pas été établi.
[44] Le premier juge a procédé, à bon droit, à une analyse progressive de la preuve. La preuve établit l'existence des trois premiers éléments énumérés par le juge Cory. Le dernier élément, celui de la force nécessaire, est crucial en l’espèce. Le juge rappelle à juste titre que : l’appréciation du caractère raisonnable ou non de la force employée ne dépend pas du résultat de l’acte de légitime défense mais bien de l’intention de l’agent; « l’analyse appropriée consiste à se demander si la croyance de l’accusé, qu’il employait la force nécessaire pour repousser l’attaque, était subjectivement honnête et objectivement raisonnable »; une approche contextuelle de l'évaluation objective de la force nécessaire doit être favorisée et il ne faut pas s'attendre à ce que l'accusé, dans une situation où il se voit attaqué, ait mesuré avec précision le degré de force nécessaire pour se défendre.
[45] Au sujet de la force nécessaire, les auteurs Côté-Harper, Rainville et Turgeon écrivent :
[…] Si le tribunal en conclut que l'accusé n'a probablement pas excédé ce qu'il pouvait croire nécessaire dans le contexte, il doit bénéficier du doute raisonnable. Il faut aussi tenir compte du fait qu'une personne agit dans le feu de l'action et que cela exige des décisions parfois instinctives ou qui n'ont pas le temps d'être longuement ou mûrement réfléchies
[46] L'accusé peut croire, à tort, être victime d'une attaque ou estimer, de façon tout autant erronée, qu'il emploie la force nécessaire pour répondre à une attaque. La recevabilité de la légitime défense ne peut être laissée à la seule appréciation subjective de l'accusé. En revanche, lorsqu'un danger réel ou appréhendé est présent, il faut tenir compte de la perception et de la personnalité de l'individu.
[47] Enfin, cette défense pourra être invoquée, que l'accusé ait agi pour repousser une attaque ou pour l'éviter. La Cour suprême rappelait, dans l'arrêt Paice :
[…] La légitime défense prévue au par. 34(1) a un sens large et permet à la personne attaquée d'employer la force nécessaire pour se défendre, sans qu'aucune crainte préalable de mourir ou de subir des lésions corporelles graves soit nécessaire. […]
[49] Rappelons qu'un coup de poing peut constituer un acte de légitime défense en réponse à une simple poussée. Dans l'arrêt Whittaker rendu par la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, deux personnes (un garçon de 19 ans et son beau-père) avaient bu et s'étaient disputées. Le jeune avait donné deux coups de poing à son beau-père après que ce dernier, qui se trouvait entre lui et la porte, l'eut poussé. L'accusé avait également donné d'autres coups à son beau-père, une fois celui-ci au sol. La Cour a retenu que les deux premiers coups constituaient un acte de légitime défense.
[50] Dans l'arrêt Pinto, notre Cour devait décider si l'accusé avait agi en légitime défense en assenant un coup de poing au visage du plaignant ou si, comme l'avait conclu le premier juge, l'accusé n'avait été qu'ennuyé par le plaignant, harcelé, sans s’être toutefois senti menacé. Notre Cour a rejeté l'appel en concluant que le comportement de l'accusé avant que fut donné le coup de poing démontrait son désir de s'en prendre au plaignant et l'absence de crainte. Le geste a également été qualifié d’excessif par rapport aux gestes du plaignant, au point de ne pas soulever un doute raisonnable.
Refus de souffler - Excuses raisonnables - Revue jurisprudentielle des décisions les plus pertinentes
R. c. Lemieux, 2006 QCCQ 14103 (CanLII)
[32] Pour ce chef, les éléments de l'infraction que la Couronne doit démontrer au Tribunal, hors de tout doute raisonnable, sont les suivants :
a) L'existence d'un ordre donné par un agent de la paix, selon l'article 254 (2) ou (3) du Code criminel.
b) Le défaut ou le rejet de l'accusé de fournir l'échantillon d'haleine ou de sang, requis selon le cas.
c) L'intention de l'accusé de produire ce résultat.
[33] Sur ce point, les parties ont soumis au Tribunal une série de décisions fort intéressantes pour étayer leurs prétentions. Examinons les plus pertinentes.
[34] Dans R. c. Thompson, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse renverse la décision de première instance et trouve coupable l'accusé pour refus de fournir un échantillon d'haleine. Le Tribunal d'appel explique que la Couronne avait présenté tous les éléments infractionnels. Si le test d'ivressomètre demandé par les policiers n'a pas eu lieu, c'est uniquement à cause de l'accusé.
[35] Dans cette affaire, l’accusé Thompson a fait un choix délibéré de refuser de se soumettre au test. L'inattention alléguée par ce dernier n'est pas suffisante pour repousser la mens rea de l'infraction.
[36] Dans R. c. Bonnell, l'accusé a plaidé face à une accusation de refus de test, qu'il souffrait d'asthme et de bronchite chronique, qui l'on empêché de fournir un échantillon d'haleine nécessaire, au moment opportun. Il mentionne de plus à la Cour, que sa situation physique l'amène à avoir de la difficulté à respirer et à reprendre son souffle.
[37] Pour corroborer ses dires, l'accusé a déposé une lettre de son médecin, établissant son asthme. La Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick confirme l'acquittement de l'accusé tout en ajoutant que le juge du procès n'avait pas besoin de se fonder sur la teneur de la lettre du médecin traitant de l'accusé, pour arriver à la même conclusion.
[38] Pour les juges d’appel, le témoignage de l'accusé était suffisant pour établir son asthme et ses problèmes respiratoires.
[39] Dans R. c. Aubut, la Cour d'appel du Québec nous rappelle que l'examen de l'excuse évoqué par l'accusé pour ne pas avoir obtempéré à un ordre d'un policier sous 254 (5) du Code criminel, est une question essentiellement de fait. L'excuse ou l'explication offerte par l'accusé, doit être suffisamment sérieuse pour ne pas constituer un faux prétexte afin de se soustraire à l'application de la loi.
[40] Dans R. c. Waugh, l'accusée, une fumeuse d'habitude, au souffle court et à la condition physique déficiente, a tenté à huit reprises de souffler dans l'appareil ALERT, sans succès. Elle était tout simplement incapable de souffler correctement. Malgré l'absence de preuve médicale, il fut démontré à la satisfaction du Tribunal, qu'elle était physiquement incapable de souffler suffisamment fort et longtemps dans l'appareil pour mesurer son alcoolémie.
[41] Son acquittement est confirmé par le tribunal d’appel.
[42] Dans R. c. Dhillon, l'accusé a soufflé cinq fois dans l'appareil mais jamais assez longtemps. Il explique cette situation par le fait qu'il souffre d'asthme depuis plusieurs années, bien qu'il n'ait pas besoin d'inhalateur.
[43] Le juge J. Sheppard de la Cour supérieure de l'Ontario, souligne que le juge des faits s'est trompé et je cite :
«Comments in reasons for sentence are not usually taken into account in determining whether the court erred in making its decision on the charge but here the comment about the appellant not having any co-ordination difficulties seemed to place an evidentiary onus on the appellant, an onus which the appellant failed to discharge. I am left with the same impression when I read the above comment to the effect that, "The accused doesn't testify that he was experiencing any difficulties affecting his ability to blow". The total effect of these comments seems to me to have put an onus on the appellant to prove he had asthma and could not provide a breath sample for 5 to 6 seconds and having failed that onus the court found the appellant guilty. This approach is, of course, contrary to law requiring that the appeal be allowed as stated. »
[44] Dans R. c. Pringle, la Cour suprême de la Colombie-Britannique ordonne un nouveau procès parce que le juge de première instance a erré en droit en omettant de déterminer si la Couronne a prouvé l'état mental de l'infraction avant de transmettre le fardeau d'une excuse raisonnable sur les épaules de l'accusé.
[45] Dans R. c. Carmichael, la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, rappelle que la Couronne doit démontrer hors de tout doute raisonnable que l'accusé a intentionnellement refusé de souffler. S'il y a un doute raisonnable dans la preuve entendue, ce doute doit bénéficier à l'accusé.
[46] Dans R. c. Sullivan, le juge des faits n'est pas convaincu hors de tout doute raisonnable que l'échec de l'accusé Sullivan de produire un échantillon d'haleine, était volontaire et intentionnel. L'accusé souffrait de problèmes respiratoires analogues à l'asthme.
[47] Dans R. c. Pietrovich, le juge de la Cour provinciale de la Saskatchewan, souligne que l'accusé n'a mentionné au Tribunal aucune raison pour expliquer entre autre, pourquoi il ne fermait pas les lèvres pour souffler dans l'appareil. Sa déposition n'est pas cru. Le Tribunal ne donne aucune crédibilité à sa version. De l'ensemble de la preuve, le Tribunal conclut que la Couronne a prouvé les éléments essentiels du refus.
[48] Il est clairement établi par la jurisprudence, qu'une fois que la preuve de la Couronne démontre hors de tout doute raisonnable les trois éléments de l'infraction, l'accusé est présumé avoir commis l'infraction, à moins qu'il ne présente une défense ou une excuse raisonnable.
[49] Pour se pencher sur l’excuse raisonnable et analyser la défense de l’accusé, il faut préalablement que la Couronne ait démontré tous les éléments de l’infraction, dont l’intention coupable de l’accusé.
[32] Pour ce chef, les éléments de l'infraction que la Couronne doit démontrer au Tribunal, hors de tout doute raisonnable, sont les suivants :
a) L'existence d'un ordre donné par un agent de la paix, selon l'article 254 (2) ou (3) du Code criminel.
b) Le défaut ou le rejet de l'accusé de fournir l'échantillon d'haleine ou de sang, requis selon le cas.
c) L'intention de l'accusé de produire ce résultat.
[33] Sur ce point, les parties ont soumis au Tribunal une série de décisions fort intéressantes pour étayer leurs prétentions. Examinons les plus pertinentes.
[34] Dans R. c. Thompson, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse renverse la décision de première instance et trouve coupable l'accusé pour refus de fournir un échantillon d'haleine. Le Tribunal d'appel explique que la Couronne avait présenté tous les éléments infractionnels. Si le test d'ivressomètre demandé par les policiers n'a pas eu lieu, c'est uniquement à cause de l'accusé.
[35] Dans cette affaire, l’accusé Thompson a fait un choix délibéré de refuser de se soumettre au test. L'inattention alléguée par ce dernier n'est pas suffisante pour repousser la mens rea de l'infraction.
[36] Dans R. c. Bonnell, l'accusé a plaidé face à une accusation de refus de test, qu'il souffrait d'asthme et de bronchite chronique, qui l'on empêché de fournir un échantillon d'haleine nécessaire, au moment opportun. Il mentionne de plus à la Cour, que sa situation physique l'amène à avoir de la difficulté à respirer et à reprendre son souffle.
[37] Pour corroborer ses dires, l'accusé a déposé une lettre de son médecin, établissant son asthme. La Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick confirme l'acquittement de l'accusé tout en ajoutant que le juge du procès n'avait pas besoin de se fonder sur la teneur de la lettre du médecin traitant de l'accusé, pour arriver à la même conclusion.
[38] Pour les juges d’appel, le témoignage de l'accusé était suffisant pour établir son asthme et ses problèmes respiratoires.
[39] Dans R. c. Aubut, la Cour d'appel du Québec nous rappelle que l'examen de l'excuse évoqué par l'accusé pour ne pas avoir obtempéré à un ordre d'un policier sous 254 (5) du Code criminel, est une question essentiellement de fait. L'excuse ou l'explication offerte par l'accusé, doit être suffisamment sérieuse pour ne pas constituer un faux prétexte afin de se soustraire à l'application de la loi.
[40] Dans R. c. Waugh, l'accusée, une fumeuse d'habitude, au souffle court et à la condition physique déficiente, a tenté à huit reprises de souffler dans l'appareil ALERT, sans succès. Elle était tout simplement incapable de souffler correctement. Malgré l'absence de preuve médicale, il fut démontré à la satisfaction du Tribunal, qu'elle était physiquement incapable de souffler suffisamment fort et longtemps dans l'appareil pour mesurer son alcoolémie.
[41] Son acquittement est confirmé par le tribunal d’appel.
[42] Dans R. c. Dhillon, l'accusé a soufflé cinq fois dans l'appareil mais jamais assez longtemps. Il explique cette situation par le fait qu'il souffre d'asthme depuis plusieurs années, bien qu'il n'ait pas besoin d'inhalateur.
[43] Le juge J. Sheppard de la Cour supérieure de l'Ontario, souligne que le juge des faits s'est trompé et je cite :
«Comments in reasons for sentence are not usually taken into account in determining whether the court erred in making its decision on the charge but here the comment about the appellant not having any co-ordination difficulties seemed to place an evidentiary onus on the appellant, an onus which the appellant failed to discharge. I am left with the same impression when I read the above comment to the effect that, "The accused doesn't testify that he was experiencing any difficulties affecting his ability to blow". The total effect of these comments seems to me to have put an onus on the appellant to prove he had asthma and could not provide a breath sample for 5 to 6 seconds and having failed that onus the court found the appellant guilty. This approach is, of course, contrary to law requiring that the appeal be allowed as stated. »
[44] Dans R. c. Pringle, la Cour suprême de la Colombie-Britannique ordonne un nouveau procès parce que le juge de première instance a erré en droit en omettant de déterminer si la Couronne a prouvé l'état mental de l'infraction avant de transmettre le fardeau d'une excuse raisonnable sur les épaules de l'accusé.
[45] Dans R. c. Carmichael, la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, rappelle que la Couronne doit démontrer hors de tout doute raisonnable que l'accusé a intentionnellement refusé de souffler. S'il y a un doute raisonnable dans la preuve entendue, ce doute doit bénéficier à l'accusé.
[46] Dans R. c. Sullivan, le juge des faits n'est pas convaincu hors de tout doute raisonnable que l'échec de l'accusé Sullivan de produire un échantillon d'haleine, était volontaire et intentionnel. L'accusé souffrait de problèmes respiratoires analogues à l'asthme.
[47] Dans R. c. Pietrovich, le juge de la Cour provinciale de la Saskatchewan, souligne que l'accusé n'a mentionné au Tribunal aucune raison pour expliquer entre autre, pourquoi il ne fermait pas les lèvres pour souffler dans l'appareil. Sa déposition n'est pas cru. Le Tribunal ne donne aucune crédibilité à sa version. De l'ensemble de la preuve, le Tribunal conclut que la Couronne a prouvé les éléments essentiels du refus.
[48] Il est clairement établi par la jurisprudence, qu'une fois que la preuve de la Couronne démontre hors de tout doute raisonnable les trois éléments de l'infraction, l'accusé est présumé avoir commis l'infraction, à moins qu'il ne présente une défense ou une excuse raisonnable.
[49] Pour se pencher sur l’excuse raisonnable et analyser la défense de l’accusé, il faut préalablement que la Couronne ait démontré tous les éléments de l’infraction, dont l’intention coupable de l’accusé.
jeudi 25 mars 2010
Ce qu'est une pyramide de Ponzi (ou schéma Ponzi)
R. c. Charbonneau, 2007 QCCQ 10244 (CanLII)
[18] La Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a défini ainsi le "Ponzi Scheme" dans l’arrêt Titan Investments Limited Partnership, (Judicature Act), 2005 ABQB 63 (CanLII), 2005 ABQB 63:
" [8] Ponzi schemes are fraudulent investment schemes whereby individuals are enticed by acon-man or fraudster to make investments in an operation promising an unreasonably high rate of return. Once the first few investments are made, subsequent investors are enticed to invest partly through reported gains and partly through the high payouts to earlier investors. Ultimately, the con-man either spends or disappears with the remaining money, or the scheme collapses on itself as funds are exhausted by payouts to earlier investors."
[18] La Cour du Banc de la Reine de l’Alberta a défini ainsi le "Ponzi Scheme" dans l’arrêt Titan Investments Limited Partnership, (Judicature Act), 2005 ABQB 63 (CanLII), 2005 ABQB 63:
" [8] Ponzi schemes are fraudulent investment schemes whereby individuals are enticed by acon-man or fraudster to make investments in an operation promising an unreasonably high rate of return. Once the first few investments are made, subsequent investors are enticed to invest partly through reported gains and partly through the high payouts to earlier investors. Ultimately, the con-man either spends or disappears with the remaining money, or the scheme collapses on itself as funds are exhausted by payouts to earlier investors."
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Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine
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R. v. Almarales, 2008 ONCA 692 Lien vers la décision 66 ] Section 21(1)(b) applies to aiders. A person is a party to a crime as an...
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