R. c. Lemieux, 2006 QCCQ 14103 (CanLII)
[32] Pour ce chef, les éléments de l'infraction que la Couronne doit démontrer au Tribunal, hors de tout doute raisonnable, sont les suivants :
a) L'existence d'un ordre donné par un agent de la paix, selon l'article 254 (2) ou (3) du Code criminel.
b) Le défaut ou le rejet de l'accusé de fournir l'échantillon d'haleine ou de sang, requis selon le cas.
c) L'intention de l'accusé de produire ce résultat.
[33] Sur ce point, les parties ont soumis au Tribunal une série de décisions fort intéressantes pour étayer leurs prétentions. Examinons les plus pertinentes.
[34] Dans R. c. Thompson, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse renverse la décision de première instance et trouve coupable l'accusé pour refus de fournir un échantillon d'haleine. Le Tribunal d'appel explique que la Couronne avait présenté tous les éléments infractionnels. Si le test d'ivressomètre demandé par les policiers n'a pas eu lieu, c'est uniquement à cause de l'accusé.
[35] Dans cette affaire, l’accusé Thompson a fait un choix délibéré de refuser de se soumettre au test. L'inattention alléguée par ce dernier n'est pas suffisante pour repousser la mens rea de l'infraction.
[36] Dans R. c. Bonnell, l'accusé a plaidé face à une accusation de refus de test, qu'il souffrait d'asthme et de bronchite chronique, qui l'on empêché de fournir un échantillon d'haleine nécessaire, au moment opportun. Il mentionne de plus à la Cour, que sa situation physique l'amène à avoir de la difficulté à respirer et à reprendre son souffle.
[37] Pour corroborer ses dires, l'accusé a déposé une lettre de son médecin, établissant son asthme. La Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick confirme l'acquittement de l'accusé tout en ajoutant que le juge du procès n'avait pas besoin de se fonder sur la teneur de la lettre du médecin traitant de l'accusé, pour arriver à la même conclusion.
[38] Pour les juges d’appel, le témoignage de l'accusé était suffisant pour établir son asthme et ses problèmes respiratoires.
[39] Dans R. c. Aubut, la Cour d'appel du Québec nous rappelle que l'examen de l'excuse évoqué par l'accusé pour ne pas avoir obtempéré à un ordre d'un policier sous 254 (5) du Code criminel, est une question essentiellement de fait. L'excuse ou l'explication offerte par l'accusé, doit être suffisamment sérieuse pour ne pas constituer un faux prétexte afin de se soustraire à l'application de la loi.
[40] Dans R. c. Waugh, l'accusée, une fumeuse d'habitude, au souffle court et à la condition physique déficiente, a tenté à huit reprises de souffler dans l'appareil ALERT, sans succès. Elle était tout simplement incapable de souffler correctement. Malgré l'absence de preuve médicale, il fut démontré à la satisfaction du Tribunal, qu'elle était physiquement incapable de souffler suffisamment fort et longtemps dans l'appareil pour mesurer son alcoolémie.
[41] Son acquittement est confirmé par le tribunal d’appel.
[42] Dans R. c. Dhillon, l'accusé a soufflé cinq fois dans l'appareil mais jamais assez longtemps. Il explique cette situation par le fait qu'il souffre d'asthme depuis plusieurs années, bien qu'il n'ait pas besoin d'inhalateur.
[43] Le juge J. Sheppard de la Cour supérieure de l'Ontario, souligne que le juge des faits s'est trompé et je cite :
«Comments in reasons for sentence are not usually taken into account in determining whether the court erred in making its decision on the charge but here the comment about the appellant not having any co-ordination difficulties seemed to place an evidentiary onus on the appellant, an onus which the appellant failed to discharge. I am left with the same impression when I read the above comment to the effect that, "The accused doesn't testify that he was experiencing any difficulties affecting his ability to blow". The total effect of these comments seems to me to have put an onus on the appellant to prove he had asthma and could not provide a breath sample for 5 to 6 seconds and having failed that onus the court found the appellant guilty. This approach is, of course, contrary to law requiring that the appeal be allowed as stated. »
[44] Dans R. c. Pringle, la Cour suprême de la Colombie-Britannique ordonne un nouveau procès parce que le juge de première instance a erré en droit en omettant de déterminer si la Couronne a prouvé l'état mental de l'infraction avant de transmettre le fardeau d'une excuse raisonnable sur les épaules de l'accusé.
[45] Dans R. c. Carmichael, la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, rappelle que la Couronne doit démontrer hors de tout doute raisonnable que l'accusé a intentionnellement refusé de souffler. S'il y a un doute raisonnable dans la preuve entendue, ce doute doit bénéficier à l'accusé.
[46] Dans R. c. Sullivan, le juge des faits n'est pas convaincu hors de tout doute raisonnable que l'échec de l'accusé Sullivan de produire un échantillon d'haleine, était volontaire et intentionnel. L'accusé souffrait de problèmes respiratoires analogues à l'asthme.
[47] Dans R. c. Pietrovich, le juge de la Cour provinciale de la Saskatchewan, souligne que l'accusé n'a mentionné au Tribunal aucune raison pour expliquer entre autre, pourquoi il ne fermait pas les lèvres pour souffler dans l'appareil. Sa déposition n'est pas cru. Le Tribunal ne donne aucune crédibilité à sa version. De l'ensemble de la preuve, le Tribunal conclut que la Couronne a prouvé les éléments essentiels du refus.
[48] Il est clairement établi par la jurisprudence, qu'une fois que la preuve de la Couronne démontre hors de tout doute raisonnable les trois éléments de l'infraction, l'accusé est présumé avoir commis l'infraction, à moins qu'il ne présente une défense ou une excuse raisonnable.
[49] Pour se pencher sur l’excuse raisonnable et analyser la défense de l’accusé, il faut préalablement que la Couronne ait démontré tous les éléments de l’infraction, dont l’intention coupable de l’accusé.
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