R. c. Ross, [1989] 1 R.C.S. 3
Résumé des faits
Les appelants L et R ont été accusés d'introduction par effraction et de vol. Au moment de leur arrestation, au milieu de la nuit, ils ont été informés de leur droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat. Ils ont essayé de téléphoner à leurs avocats respectifs mais n'ont reçu aucune réponse. Les policiers ont alors demandé à L s'il voulait appeler un autre avocat et il a répondu que non. Peu après les appelants ont été identifiés au cours d'une séance d'identification. Ni l'un ni l'autre appelant n'a été informé qu'il n'était pas tenu de participer à la séance d'identification.
Analyse
Les personnes accusées ou détenues ont le droit de choisir leur avocat et ce n'est que si l'avocat choisi ne peut être disponible dans un délai raisonnable qu'on doit s'attendre à ce qu'elles exercent leur droit d'appeler un autre avocat.
L'alinéa 10b) de la Charte impose au moins deux obligations aux policiers en plus de celle d'informer les détenus de leurs droits. En premier lieu, les policiers doivent donner au détenu qui le désire une possibilité raisonnable d'exercer sans délai le droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat; en second lieu, les policiers doivent s'abstenir de tenter de soutirer des éléments de preuve au détenu tant que celui-ci n'aura pas eu une possibilité raisonnable de recourir à l'assistance d'un avocat.
Dès qu'un détenu a fait valoir son droit à l'assistance d'un avocat, les policiers ne peuvent en aucune façon, jusqu'à ce qu'il ait eu une possibilité raisonnable d'exercer ce droit, le forcer à prendre une décision ou à participer à quelque chose qui pourrait finalement avoir un effet préjudiciable sur un éventuel procès.
L'utilisation de tout élément de preuve qu'on n'aurait pas pu obtenir sans la participation de l'accusé à la constitution de la preuve aux fins du procès est susceptible de rendre le procès inéquitable. Il est vrai qu'en règle générale, l'identité de l'accusé n'est pas un élément de preuve émanant de l'accusé ni un élément de preuve qui ne peut être obtenu sans sa participation. Cependant, quand il participe à une séance d'identification, l'accusé participe à la constitution d'une preuve incriminante crédible.
Le simple refus d'appeler un autre avocat ne peut honnêtement être considéré comme une renonciation à son droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat. Bien au contraire, il a simplement fait valoir son droit à l'assistance d'un avocat, et à l'avocat de son choix. Notons que comme l'a dit cette Cour dans l'arrêt R. c. Tremblay, [1987] 2 R.C.S. 435, un prévenu ou un détenu, bien qu'il ait le droit de choisir un avocat, doit faire preuve de diligence raisonnable dans l'exercice de ses droits, sinon les obligations corollaires qui, selon l'arrêt Manninen, sont imposées aux policiers, sont suspendues.
La diligence raisonnable dans l'exercice du droit de choisir son avocat dépend de la situation dans laquelle se trouve l'accusé ou le détenu. Au moment de son arrestation, par exemple, le détenu a un besoin immédiat de conseils juridiques et doit faire preuve de diligence raisonnable en conséquence.
Néanmoins, l'accusé ou le détenu a le droit de choisir son avocat et ce n'est que si l'avocat choisi ne peut être disponible dans un délai raisonnable qu'on doit s'attendre à ce que le détenu ou l'accusé exerce son droit à l'assistance d'un avocat en appelant un autre avocat.
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