R. c. Borden, [1994] 3 R.C.S. 145
Je souscris aux propos du juge Doherty de la Cour d'appel de l'Ontario, dans l'arrêt R. c. Wills 1992 CanLII 2780 (ON C.A.), (1992), 12 C.R. (4th) 58, à la p. 72:
[traduction] Lorsqu'une personne consent à ce que des policiers prennent quelque chose qu'ils n'auraient pas autrement le droit de prendre, elle renonce à son droit de ne pas être inquiétée par l'État et fait disparaître l'obstacle du caractère raisonnable imposé par l'art. 8 de la Charte. Le consentement donné doit être proportionné à l'effet considérable qu'il produit.
À mon avis, c'est ce qui ressort implicitement de l'arrêt R. c. Debot, 1989 CanLII 13 (C.S.C.), [1989] 2 R.C.S. 1140, où le juge Lamer (maintenant Juge en chef) affirme que, même si en règle générale il n'est pas nécessaire de suspendre la fouille légale d'une personne pendant que celle‑ci exerce son droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat, il y a exception lorsque la fouille exige le consentement de la personne détenue. Cela ressort aussi implicitement des arrêts de notre Cour Dyment, précité, et R. c. Colarusso, 1994 CanLII 134 (C.S.C.), [1994] 1 R.C.S. 20, à la p. 55, où l'on reconnaît qu'une personne peut consentir à un prélèvement de son sang à certaines fins précises seulement. Ce concept révèle l'existence d'un lien entre l'étendue d'un consentement valide et l'étendue de la connaissance qu'a l'accusé des conséquences de ce consentement.
Pour que la renonciation au droit à la protection contre les saisies abusives soit réelle, la personne qui est censée donner son consentement doit disposer de tous les renseignements requis pour pouvoir renoncer réellement à ce droit. Le droit de choisir exige non seulement que la personne puisse exercer sa volonté de préférer une solution à une autre, mais aussi qu'elle possède suffisamment de renseignements pour faire un choix utile. Cela est également vrai lorsque la personne choisit de s'abstenir de consulter un avocat ou d'abandonner aux policiers quelque chose qu'ils n'auraient autrement pas le droit de prendre.
Le degré de conscience qu'un accusé doit avoir des conséquences d'une renonciation au droit qui lui est garanti par l'art. 8 dépend des faits particuliers de chaque cas. Évidemment, il ne sera pas nécessaire que l'accusé ait une compréhension approfondie de chacune des répercussions possibles de son consentement. Toutefois, il devrait comprendre notamment que les policiers comptent utiliser le produit de la saisie dans une enquête portant sur une infraction différente de celle pour laquelle il est détenu. Tel n'était pas le cas en l'espèce. Par conséquent, je conclus que les policiers ont saisi le sang de l'intimé relativement à l'infraction visée par la présente accusation.
Comme notre Cour l'a déjà dit, les droits garantis par les al. 10a) et b) de la Charte sont liés. L'une des principales raisons d'obliger les policiers à informer une personne des motifs de sa détention est d'assurer que celle‑ci puisse faire un choix éclairé d'exercer ou non son droit à l'assistance d'un avocat et, dans l'affirmative, qu'elle obtienne des conseils judicieux en fonction de sa compréhension de l'ampleur du risque qu'elle court: R. c. Black, 1989 CanLII 75 (C.S.C.), [1989] 2 R.C.S. 138, aux pp. 152 et 153; et R. c. Smith, 1991 CanLII 91 (C.S.C.), [1991] 1 R.C.S. 714, à la p. 728. Il faut reconnaître, ce qui est tout à leur honneur que les policiers en l'espèce se sont montrés extrêmement justes en facilitant l'exercice par l'intimé de son droit à l'assistance d'un avocat relativement à l'agression sexuelle pour laquelle il avait été arrêté. Il est évident que l'intimé n'a pas tenu compte du conseil de son avocat de ne rien dire à la police.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire