jeudi 3 septembre 2009

L’article 88 exige la preuve de la possession d’une arme et la preuve que la possession de l'arme visait un dessein dangereux pour la paix publique

Rodrigue c. R., 2005 QCCA 310 (CanLII)

[18] Je rappelle tout d’abord que la disposition du Code criminel en vertu de laquelle l’appelant a été mis en accusation énonce ce qui suit :

88. (1) Commet une infraction quiconque porte ou a en sa possession une arme, une imitation d’arme, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées dans un dessein dangereux pour la paix publique ou en vue de commettre une infraction.

(2) Quiconque commet l’infraction prévue au paragraphe (1) est coupable :

a) soit d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de dix ans;

b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Là où il est question de possession dans cet article, on doit tenir compte des précisions que fournit le paragraphe 4(3) du même code sur le sens de ce terme:

4. (3) Pour l'application de la présente loi :

a) une personne est en possession d'une chose lorsqu'elle l'a en sa possession personnelle ou que, sciemment :

(i) ou bien elle l'a en la possession ou garde réelle d'une autre personne,

(ii) ou bien elle l'a en un lieu qui lui appartient ou non ou qu'elle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d'une autre personne;

b) lorsqu'une de deux ou plusieurs personnes, au su et avec le consentement de l'autre ou des autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et de chacune d'elles.

[19] La Cour suprême du Canada a déjà précisé dans l’arrêt R. c. Cassidy que l’article 88 exige la preuve de la possession d’une arme et la preuve que la possession de cette arme visait un dessein dangereux pour la paix publique. Rédigeant les motifs unanimes de la Cour dans cet arrêt, le juge Lamer (qui n’était pas encore juge en chef à l’époque) écrit : «Il doit y avoir à un moment quelconque rencontre de ces deux éléments.» Plusieurs des décisions publiées de tribunaux canadiens traitent de la difficulté qui survient parfois au regard de l’article 88 lorsqu’une personne utilise illicitement une arme légalement en sa possession. Mais ce problème ne se pose pas ici car la preuve, comme l’a noté la juge de première instance, ne permet aucunement de rattacher les coups de feu entendus dans l’après-midi à la personne de l’appelant.

[24] Il n’est pas douteux, je crois, que les éléments de l’infraction créée par le par. 88(1) comprennent une intention spécifique. Cela est implicite dans l’arrêt Cassidy, précité. Notre Cour, dans l’arrêt R. c. Le, décrivait cette intention en ces termes : «L’infraction prévue par l’article 87 C. cr. […] exigeait non seulement la preuve de la détention de l’arme, mais aussi de l’intention de s’en servir pour mettre en danger la sécurité publique.» Dans cette affaire, sur laquelle s’appuie l’appelant, on avait perquisitionné l’appartement dont l’accusé était colocataire et on avait découvert dans une garde-robe un fusil en trois morceaux (la crosse de l’arme ayant été sciée près du canon et la partie restante de la crosse ayant été démontée).

[26] (...) Dans le cas qui nous intéresse, l’expert a témoigné non pas sur les coutumes de la Maffia, mais sur les façons de faire de groupes de motards criminalisés. À la lumière de ce témoignage et de l’ensemble des faits mis en preuve – le lieu précis où les armes et les munitions ont été trouvées, à portée de la main de la personne affectée à la surveillance du local fortifié, le caractère élaboré des installations de surveillance et de sécurité, l’heure à laquelle la perquisition a eu lieu, la présence des vêtements de l’appelant dans la pièce de surveillance et l’appartenance de l’appelant à un groupe criminalisé – la juge de première instance pouvait conclure à l’absence de tout doute raisonnable quant au dessein dangereux qui animait l’appelant.

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