samedi 6 février 2010

La notion de garde et contrôle après avoir volontairement consommé de l’alcool ou de la drogue

R. c. Strano, 2007 CanLII 42974 (QC C.M.)

[ 94 ] Il est de l’intérêt public de tenir un contrevenant responsable de mettre la sécurité du public en danger en assumant la garde et le contrôle d’un véhicule après avoir volontairement consommé de l’alcool ou de la drogue, même si son intoxication l’empêche de réaliser ce qu’il fait.

[ 95 ] La poursuite dispose de deux (2) moyens de preuve pour établir que le défendeur a eu la garde ou le contrôle de son véhicule :

[ 96 ] La présomption de l’article 258 (1) a) C.cr. stipule que :

«lorsqu'il est prouvé que l'accusé occupait la place ou la position ordinairement occupée par la personne qui conduit le véhicule… il est réputé en avoir eu la garde ou le contrôle à moins qu'il n'établisse qu'il n'occupait pas cette place ou position dans le but de mettre en marche ce véhicule…»

[ 97 ] Cette présomption s’applique même si le véhicule automobile n’est pas en état de marche.

[ 98 ] Afin de se prévaloir de cette présomption, le seul élément que la poursuite doit prouver est que le défendeur occupait la place du conducteur. Le défendeur peut repousser cette présomption par prépondérance de preuve en établissant qu’il n’occupait pas cette place dans le but de mettre le véhicule en marche.

[ 99 ] Il ne rencontre pas ce fardeau en soulevant simplement un doute quant à l’applicabilité de cette présomption, comme dans le cas de la preuve contraire.

[ 100 ] Si la poursuite ne réussit pas à établir que le défendeur occupait la place du conducteur ou si le défendeur réussit à établir qu’il n’occupait pas la place du conducteur dans le but de mettre en marche le véhicule, la poursuite ne peut plus bénéficier de cette présomption. Elle doit à ce moment, se prévaloir du deuxième (2e) moyen de preuve.

[ 101 ] Le deuxième (2e) moyen de preuve est fondé sur une preuve directe ou circonstancielle basée sur des actes qui peuvent permettre au Tribunal une inférence que le défendeur a eu l’intention d’assumer la garde ou le contrôle du véhicule, créant ainsi un risque d’utiliser le véhicule d’une manière dangereuse pour le défendeur et / ou le public comme par exemple, un danger de le mettre en mouvement.

[ 102 ] La détermination de ce volet ne répond pas à des critères fixes mais dépend des circonstances particulières de chaque cas.

[ 103 ] Il n’est pas nécessaire que le danger soit immédiat. La simple possibilité que le véhicule soit mis en mouvement, intentionnellement ou non, par une personne intoxiquée, met en cause la sécurité du public.

[ 104 ] Une personne qui se trouve dans une automobile et qui a à sa portée les moyens de la mettre en marche en a le contrôle. Il n’est pas nécessaire que cette personne ait l’intention immédiate de mettre le véhicule en marche.

[ 105 ] Le danger résulte de la coexistence de deux (2) facteurs : les facultés affaiblies par des substances enivrantes et la présence d’une personne dans un véhicule dans une situation susceptible de constituer un danger.

[ 106 ] Le risque que proscrit cette disposition est celui qui découle du fait qu’une personne dont le jugement est altéré par l’alcool ou par la drogue et qui a les moyens de mettre le véhicule en mouvement le fasse.

[ 107 ] Il suffit qu’un acte ou une série d’actes, comportant le risque que le véhicule soit mis en marche involontairement, soient posés.

[ 108 ] L’intention de mettre le véhicule en mouvement n’est pas pertinente.

[ 109 ] La Cour supérieure, dans R. c. Sergerie, propose le cheminement suivant en matière de garde et de contrôle :

- La preuve révèle-t-elle les facultés affaiblies ou l’alcoolémie illégale de l’accusé?

- Si oui, la présomption s’applique-t-elle?

- Si la présomption s’applique, a-t-elle été repoussée? Si non, l’accusé doit être déclaré coupable.

- Si la présomption est repoussée, la poursuite a-t-elle démontré un risque ou un danger que l’accusé mette le véhicule en mouvement?

- Y a-t-il une preuve de la concomitance des facultés affaiblies ou d’alcoolémie avec le fait que l’accusé s’est placé consciemment dans une situation susceptible de devenir dangereuse?

- L’intention de mettre le véhicule en mouvement n’est pas perti-nente. L’absence de cette intention n’entraîne pas un acquittement.

- Les autres règles du droit criminel s’appliquent intégralement en cette matière.

[ 110 ] Voir les arrêts de la Cour d’appel du Québec de Dupont, Hamel, Rousseau, Rioux, Olivier, Loubier, Drake, Bouchard et Sénécal.

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