R. c. Poirier, 2010 QCCQ 4709 (CanLII)
[15] C'est essentiellement par souci de fiabilité que la common law a formulé une règle interdisant l'admissibilité en preuve de la déclaration d'un accusé contre un coaccusé. "Un complice", écrit Wigmore dans son traité Évidence, "a un intérêt à confesser et à trahir ses coaccusés".
[16] Cette méfiance à l'égard d'une déclaration d'un complice—pour valoir comme preuve à l'égard d'un de ses cohortes—est un thème récurrent dans la jurisprudence américaine. Dans Crawford v. United States, la Cour suprême des États-Unis a énoncé le principe suivant :
[A confession that] incriminate[s] himself together with defendant … ought to be received with suspicion, and with the very greatest care and caution, and ought not to be passed upon by the jury under the same rules governing other and apparently credible witnesses
[17] Tout comme les tribunaux américains, les tribunaux supérieurs canadiens ont également souligné qu'il faut être suspicieux des déclarations d'un complice. Dans l'arrêt Naicker de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, le juge Lowry, qui écrit pour un banc unanime, explique le souci de fiabilité qui s'attachait à de telles déclarations :
What is said to be the inherent unreliability of the statement of an accomplice lies in the concern that an accomplice may seek to evade criminal liability by falsely blaming the other participant in a crime either to minimize his own involvement or obtain more favourable treatment for himself. Because an accomplice has been involved in the crime, he will be aware of details enabling him to substitute the roles of others for his own: R. v. Meston (1975), 28 C.C.C. (2d) 497 (Ont. C.A) at 501. (paragraphe 25)
[18] Cependant, dans la cause de R. v. Vetrovec , la Cour suprême du Canada, à la suite de commentaires sur la fiabilité d'une preuve qui émane d'un complice, émet les propos suivants :
Aucun de ces arguments ne justifie une règle unique et invariable pour tous les complices. Tout ce qu'on peut établir, c'est que le témoignage de certains complices peut ne pas être digne de foi. On peut en dire autant de beaucoup d'autres catégories de témoins. Il n'y a rien d'inhérent au témoignage d'un complice qui le rende nécessairement indigne de foi. (page 823 dans Vetrovec, cité au par. 24 de Naicker)
[19] À l'égard d'un témoignage d'un complice, l'approche canadienne consiste à examiner tous les facteurs susceptibles de porter atteinte à la crédibilité d'un témoin en particulier. Si, d'après lui, la crédibilité du témoin exige que le jury soit mis en garde, il peut alors donner des directives à cet effet. Si, d'autre part, il estime que le témoin est digne de foi, que ce dernier soit formellement un «complice» ou non, aucune mise en garde n'est nécessaire. En somme, le seul fait qu'une personne soit complice n'implique pas, nécessairement, que son témoignage est peu fiable et qu'une mise en garde est nécessaire.
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