vendredi 25 janvier 2013

Un témoin ne peut pas être interrogé au sujet d'une infraction pour laquelle il a bénéficié d'une absolution, sauf s'il y a donné ouverture par une preuve de bonne réputation

L.-S.Y., Re, 2003 CanLII 12430 (QC CQ)

Lien vers la décision

[12] L'article 730(3) du Code criminel stipule ceci : "Le délinquant qui est absous en conformité avec le paragraphe (1) est réputé ne pas avoir été condamné à l'égard de l'infraction (…)."

[13] Les auteurs Jacques Bellemare et Louise Viau nous informent à la page 303 de leur volume intitulé Droit de la preuve pénale (2ème édition, les Éditions Thémis) qu'un témoin ne peut être interrogé au sujet d'une infraction pour laquelle il a bénéficié d'une absolution. Toutefois, les questions seront permises si le témoin y a donné ouverture par une preuve de bonne réputation.

[14] C'est aussi ce que nous laisse entendre l'auteure Hélène Dumont dans Pénologie : Le droit canadien relatif aux peines et aux sentences (Les Éditions Thémis, 1993). Ainsi, à la page 445 dudit volume, on nous dit que : "(…) la personne qui a bénéficié d'une absolution et qui témoigne dans une autre procédure criminelle, à titre d'inculpée ou de témoin, peut nier l'existence d'une infraction ayant fait l'objet d'une absolution au sens de l'article 736 C. cr. Lors du contre-interrogatoire de la personne absoute, on ne peut pas l'interroger au sujet d'une infraction absoute à moins qu'elle n'y ait donné ouverture par une preuve de bonne réputation."

[15] À la page 702 du Traité général de preuve et de procédure pénales (7ème édition, 2000, Les Éditions Thémis), on peut lire ceci : "L'absolution signifie qu'en dépit du verdict de culpabilité, aucune condamnation n'est enregistrée, de sorte que le prévenu est réputé ne pas avoir été condamné à l'égard de l'infraction." Puis à la page suivante, relativement à la notion et aux critères de l'absolution, les auteurs ajoutent que "l'intérêt public s'évalue, entre auteurs, par la gravité de la conduite et son incidence dans la collectivité, par le besoin de dissuasion générale et enfin, par l'importance de maintenir la confiance du public dans l'administration de la justice. (…) Le juge doit aussi tenir compte du fait qu'il n'est pas dans l'intérêt public que l'accusé perde son emploi et ne puisse assumer sa subsistance et celle de sa famille."

[16] Toujours dans le cadre du même volume, soit le Traité général de preuve et de procédure pénales, on traite à la page 180 du contre-interrogatoire de l'accusé. On y réitère le fait que : "Dans l'arrêt Dodge, la Cour d'Appel du Québec a décidé qu'une absolution, prononcée aux termes de l'article 730 du Code, ne constitue pas une condamnation au sens de l'article 12, de sorte que l'accusé ne peut être contre-interrogé à ce sujet."

[17] En effet, dans Dodge c. R. (C.A. Montréal, 1993-02-01, J.E. 93-436), le juge McCarthy réfère entre autres à la décision R. c. Corbett (1988 CanLII 80 (SCC), [1988] 1 S.C.R. 670, page 696) où on cite le juge en chef de la Cour suprême d'alors, le juge Lamer, qui s'exprimait pour lamajorité : "It has been held that an accused may be cross-examined only as to "convictions" strictly construed and that there can be no cross-examination where the accused was found guilty and granted a conditional discharge, conditions subsequently having been fulfilled : R. v. Danson, (reflex, [1982], 66, C.C.C. (2d) 369 (Ont. C.A.)."

[18] Puis, référant plus spécifiquement à l'arrêt R. v. Danson ci-haut cité, le juge McCarthy nous rappelle que la cour d'appel de l'Ontario avait alors conclu à l'unanimité que : "an adjudication of guilt followed by the granting of a discharge is not a conviction within s. 12 (1) of the Canada Evidence Act".

[19] En conclusion de son opinion dans le jugement Dodge c. R., le juge McCarthy écrit ceci : "With respect, the Corbett and Danson decisions make it clear that the judge was wrong in law. the conditional discharge was not a conviction, not an "antécédent judiciaire", and should not have been so considered in appreciating Dodge's credibility."

[20] L'arrêt Bombiski-Deyardin c. R. (Cour d'appel (C.A.) Montréal, 1997-08-11, 1997 CanLII 9988 (QC CA), [1997] R.J.Q. 2367, J.E.97-1685, juges Gendreau, Otis et Zerbisias (ad hoc)) abonde dans le même sens. Dans son opinion, la juge Otis réfère abondamment aux décisions R. c. Danson et R. c. Corbett, et soulève entre autres, à la page 8 du jugement : "l'accusé ne peut être interrogé au sujet d'une infraction pour laquelle il a bénéficié d'une absolution inconditionnelle ou sous condition puisqu'il est réputé ne pas avoir été condamné à l'égard de cette infraction par l,effet de l'article 736 (3) C. cr. (devenu par 730(3) dans L.C. 1995, c.22 art. 6). Puis à la page suivante, la juge Otis ajoute : "une infraction ayant fait l'objet d'une absolution inconditionnelle ou sous condition ne constitue pas, non plus, un antécédent judiciaire au sens de l'article 666 C.cr." Quant à l'arrêt R v Gyles rendu le 12 mai 2003 par la Cour supérieure de l'Ontario, cette décision concerne un "pardon" et non une absolution inconditionnelle.

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