R. c. Ladouceur, [1990] 1 R.C.S. 1257
Résumé des faits
Deux agents de police étaient de faction quand l'appelant a dépassé leur véhicule. Ils ont décidé d'interpeller l'appelant par simple routine. Cependant, bien qu'ils invoquent le par. 189a (1) du Code de la route comme source de leur pouvoir d'agir, les agents reconnaissent qu'il n'y avait pas de motif de soupçonner l'appelant ni aucun autre motif d'intercepter son véhicule. Quand les agents ont demandé à l'appelant de produire son permis de conduire, ils ont découvert que son permis était suspendu parce qu'il n'avait pas payé des contraventions de stationnement
Analyse
L'appelant a été détenu au sens de l'art. 9 de la Charte. Les agents de police ont restreint sa liberté d'action au moyen d'une sommation ou d'un ordre et les conséquences juridiques de la détention étaient sérieuses. La détention était arbitraire du fait que la décision d'interpeller était laissée à l'entière discrétion des agents de police.
Le paragraphe 189a(1) du Code de la route est sauvegardé par l'article premier de la Charte. Le pouvoir d'un agent de police d'intercepter des véhicules automobiles au hasard découle du par. 189a(1) du Code de la route et il est donc prescrit par une règle de droit. Ce pouvoir a également été justifié par notre Cour comme étant prescrit par la common law.
Les statistiques relatives au carnage qui se produit sur les routes révèlent l'existence d'une préoccupation urgente et réelle à laquelle le gouvernement a eu raison de répondre au moyen de la mesure législative en cause et des interpellations au hasard.
Le moyen choisi est proportionnel à ces préoccupations urgentes ou il convient à celles‑ci. L'interpellation au hasard a un lien rationnel avec la sécurité sur les routes et est conçue avec soin pour la réaliser; elle porte le moins possible atteinte aux droits du conducteur. Elle ne porte pas atteinte assez gravement aux droits individuels pour que la restriction de ces droits l'emporte sur l'objectif de la loi. L'interception des véhicules est à vrai dire la seule façon de vérifier le permis de conduire et l'assurance d'un conducteur, l'état mécanique du véhicule ou la sobriété d'un conducteur.
La dissuasion constitue un aspect important de la vérification de routine. La suspension du permis de conduire pour des infractions en matière de circulation est importante parce qu'elle permet aux tribunaux d'imposer des peines d'emprisonnement moins longues à l'avantage du contrevenant, tout en permettant d'assurer la protection de la société. Cependant, pour que les suspensions de permis constituent une peine efficace, elles doivent être exécutoires. Il doit exister un véritable élément de risque de détection des conducteurs sans permis pour que la suspension d'un permis puisse être un remède efficace. Les interpellations au hasard constituent le seul moyen dissuasif efficace.
Reconnaître la validité de la vérification de routine au hasard, c'est se rendre à la réalité. Cette forme de dissuasion est la seule réponse plausible aux difficultés générales de mettre sur pied de tels programmes en raison des contraintes budgétaires et d'un manque de personnel et à l'impossibilité d'établir un programme structuré efficace dans les régions rurales en particulier.
La vérification de routine au hasard ne porte pas atteinte gravement au droit garanti par l'art. 9 au point de l'emporter sur l'objectif législatif.
Les policiers ne peuvent interpeller des personnes que pour des motifs fondés sur la loi -- en l'espèce des motifs relatifs à la conduite d'une automobile comme la vérification du permis de conduire, des assurances et de la sobriété du conducteur et de l'état mécanique du véhicule. Lorsque l'interpellation est effectuée, les seules questions qui peuvent être justifiées sont celles qui se rapportent aux infractions en matière de circulation.
Toute autre procédure plus inquisitoire ne pourrait être engagée que sur le fondement de motifs raisonnables et probables. Lorsqu'une interpellation est jugée illégale, les éléments de preuve ainsi obtenus pourraient bien être écartés en vertu du par. 24(2) de la Charte.
Le paragraphe 189a(1) du Code de la route ontarien est l'équivalent l'article 636 du Code de la sécurité routière québécois qui édicte ce qui suit:
Un agent de la paix, identifiable à première vue comme tel, peut, dans le cadre des fonctions qu'il exerce en vertu du présent code, des ententes conclues en vertu de l'article 519.65 et de la Loi concernant les propriétaires, les exploitants et les conducteurs de véhicules lourds (chapitre P-30.3), exiger que le conducteur d'un véhicule routier immobilise son véhicule. Le conducteur doit se conformer sans délai à cette exigence.
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