R. c. Youla, 2007 QCCS 5805 (CanLII)
[8] Les Tribunaux ont à maintes reprises énoncé que l'une des tâches les plus difficiles et délicates de la fonction judiciaire est de déterminer la peine appropriée lors d'un aveu ou d'un verdict de culpabilité. À moins d'erreur de droit ou de principe, un tribunal d'appel ne doit pas substituer sa discrétion à celle du juge de première instance et faire preuve de déférence à son endroit.
[9] La Cour suprême dans R. c. Shopshire 1995 CanLII 47 (C.S.C.), [1995] 4 R.C.S. 227 au paragraphe 47 écrivait :
[47] Je ferais mien le point de vue adopté par la Cour d'appel de la Nouvelle‑Écosse dans les arrêts R. c. Pepin 1990 CanLII 2481 (NS C.A.), (1990), 98 N.S.R. (2d) 238, et R. c. Muise 1994 CanLII 4074 (NS C.A.), (1994), 94 C.C.C. (3d) 119. Dans l'arrêt Pepin, à la p. 251, la cour conclut :
[traduction] Pour décider s'il y a lieu de modifier une peine, il ne s'agit pas de savoir si nous aurions infligé une peine différente; nous devons décider si le juge qui a prononcé la peine a appliqué des principes erronés ou […] [Si] […] la peine est nettement ou manifestement excessive.
[48] En outre, dans l'arrêt Muise, la cour tire la conclusion suivante, aux pages 123 et 124 :
[traduction] Chaque fois que notre cour a été appelée à examiner la justesse d'une peine infligée par un juge du procès, elle a constamment décidé de ne pas intervenir, sauf si la peine était nettement excessive ou inadéquate.
La règle de droit applicable aux appels interjetés contre une peine n'est pas complexe. Si la peine infligée n'est pas clairement excessive ou inadéquate, elle est indiquée à supposer que le juge du procès ait appliqué les bons principes et tenu compte de tous les faits pertinents. [. . .] Mon point de vue repose sur le fait que la détermination de la peine n'est pas une science exacte, tout au contraire. C'est un exercice de jugement qui tient compte des principes juridiques pertinents, des circonstances de l'infraction et du contrevenant. Tout au plus peut‑on s'attendre à ce que le juge qui prononce la peine en arrive à une peine qui respectera des limites acceptables. À mon sens, c'est la vraie raison pour laquelle des cours d'appel examinent des peines quand il s'agit seulement de savoir si la peine est inadéquate ou excessive.
[49] Pour un point de vue semblable, voir R. c. Émond, C.A. Qué., numéro 200‑10‑000173‑893, 6 février 1990, J.E. 90-557.
[10] Plus récemment, l'honorable juge Gendreault de la Cour d'appel du Québec réaffirmait ce principe dans l'affaire R. c. S.T. (500-10-003826-078 décision non rapportée du 23 octobre 2007) :
[15] La Cour suprême rappelle que le législateur a attribué un large pouvoir discrétionnaire au juge du procès pour la définition d'une peine adéquate à l'accusé. Le juge Lamer souligne de plus que « du fait qu'il sert en première ligne de notre système de justice pénale, le (juge de première instance) possède également une qualification unique sur le plan de l'expérience et de l'appréciation » Le juge en chef fait aussi remarquer que ce juge, puisqu'il exerce normalement dans la communauté qui a connu les conséquences du crime, « sera mieux à même de bien évaluer la combinaison particulière d'objectifs de détermination de la peine qui sera « juste et appropriée » pour assurer la protection de cette communauté.
[16] À cause de ces deux facteurs de l'attribution législative du pouvoir discrétionnaire du juge de procès en matière de peine et de l'expérience particulière de celui-ci, une cour d'appel doit faire preuve de grande retenue avant d'intervenir pour modifier la peine imposée et y substituer la sienne. La jurisprudence enseigne que cette intervention ne sera permise que si une erreur en droit est commise, si le premier juge a négligé de prendre en compte l'un des facteurs définis par la loi ou si la peine est nettement inadéquate ou excessive en ce qu'elle se situe à l'extérieur de la norme minimale ou maximale acceptable
[11] En l'espèce, l'intimé avait été détenu préventivement pendant 22 jours, et n'avait aucun antécédent judiciaire ni aucune cause pendante devant les tribunaux. Le premier juge, après avoir rejeté sa défense de légitime défense, parce que la réplique était disproportionnée à l'attaque a, néanmoins, pris en considération le contexte de l'agression, ce qu'il pouvait légitimement faire.
[12] Le fait qu'un autre juge ait pu être plus sévère n'est pas le processus d'examen que le Tribunal doit avoir. La clémence de la peine ne peut être modifiée que dans la mesure où elle est manifestement inappropriée.
[13] La décision rendue par le premier juge, lorsque prise dans son ensemble et dans le contexte de l'agression commise, n'a pas ce caractère déraisonnable ou inapproprié justifiant l'intervention du Tribunal.
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