R. c. Graetz, 2007 QCCS 3517 (CanLII)
[74] À ce sujet, il est intéressant de noter ce que les auteurs Béliveau et Vauclair écrivent :
« Enfin, on peut se poser la question de savoir si, au même moment, le policier a l’obligation d’aviser le prévenu de son droit au silence. Un certain flottement existait au niveau des Cours d’appel mais il nous apparaît que la Cour suprême ait implicitement réglé question dans l’arrêt Whittle, alors qu’elle a indiqué que la renonciation au droit au silence nécessite « la capacité de comprendre une mise en garde selon laquelle la déposition pourra être utilisée contre l’accusé. Toutefois, cela ne signifie pas que la police est tenue d’en informer l’accusé; Il suffit que ce dernier en soit au courant. De plus, il existe une présomption voulant que le prévenu qui a consulté son avocat en ait été dûment avisé. »
mercredi 30 juin 2010
Les grandes lignes de l'arrêt Grant (pour évaluer la pertinence d'exclure la preuve recueillie en violation de la Charte)
R. c. Côté, 2010 QCCA 303 (CanLII)
[33] Comme précédemment mentionné, le pourvoi ne soulève plus qu'une seule question, cependant déterminante, et pour laquelle le juge de première instance n'avait pas le bénéfice des décisions très récentes de la Cour suprême dans R. c. Grant et R. c. Harrison. Il s'agit de l'admission en preuve des éléments dérivés fiables, souvent exclus par le passé en cas de violation grave des droits constitutionnels de l'accusé. La règle est dorénavant changée en ce que « [l]e juge doit désormais se demander si l'utilisation des éléments de preuve dérivée obtenus par suite d'une violation de la Charte serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice ».
[34] Avant de poursuivre l'examen de cette question, il est opportun de reprendre les grandes lignes de l'affaire Grant.
[35] L'arrêt Grant présente un cadre d'analyse en trois étapes pour évaluer la pertinence d'exclure la preuve recueillie en violation de la Charte :
67 Le libellé du par. 24(2) en exprime bien l'objet : préserver la considération dont jouit l'administration de la justice. L'expression « administration de la justice » est souvent employée pour désigner les processus d'enquête, d'accusation et de jugement qui entrent en jeu en cas de non-respect de la loi. Toutefois, elle englobe de façon plus générale le maintien des droits garantis par la Charte et du principe de la primauté du droit dans l'ensemble du système de justice.
68 L'expression « déconsidérer l'administration de la justice » doit être prise dans l'optique du maintien à long terme de l'intégrité du système de justice et de la confiance à son égard. Certes, l'exclusion d'éléments de preuve qui aboutit à un acquittement peut provoquer des critiques sur le coup. Il n'en demeure pas moins que les réactions immédiates, dans des cas particuliers, ne sont pas visées par l'objet du par. 24(2). Cette disposition concerne plutôt l'appréciation de l'effet à long terme de l'utilisation d'éléments de preuve sur la considération globale dont jouit le système de justice et suppose un examen de nature objective, qui vise à déterminer si une personne raisonnable, au fait de l'ensemble des circonstances pertinentes et des valeurs sous-jacentes de la Charte, conclurait que l'utilisation d'éléments de preuve donnés serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice.
69 L'objet du par. 24(2) n'est pas seulement à long terme, il est également prospectif. L'existence d'une violation de la Charte signifie que l'administration de la justice a déjà été mise à mal. Le paragraphe 24(2) part de là et vise à faire en sorte que les éléments de preuve obtenus au moyen de cette violation ne déconsidèrent pas davantage le système de justice.
70 Enfin, le par. 24(2) a un objet sociétal. Il ne vise pas à sanctionner la conduite des policiers ou à dédommager l'accusé, il a plutôt une portée systémique. Il se rapporte aux importantes répercussions de l'utilisation d'éléments de preuve sur la considération à long terme portée au système de justice.
71 Il ressort de la jurisprudence et de la doctrine qu'il faut, pour déterminer si l'utilisation d'un élément de preuve obtenue en violation de la Charte déconsidérerait l'administration de la justice, examiner trois questions tirant chacune leur origine des intérêts publics sous-jacents au par. 24(2), considérés à long terme dans une perspective sociétale prospective. Ainsi, le tribunal saisi d'une demande d'exclusion fondée sur le par. 24(2) doit évaluer et mettre en balance l'effet que l'utilisation des éléments de preuve aurait sur la confiance de la société envers le système de justice en tenant compte de : (1) la gravité de la conduite attentatoire de l'État (l'utilisation peut donner à penser que le système de justice tolère l'inconduite grave de la part de l'État), (2) l'incidence de la violation sur les droits de l'accusé garantis par la Charte (l'utilisation peut donner à penser que les droits individuels ont peu de poids) et (3) l'intérêt de la société à ce que l'affaire soit jugée au fond. Le rôle du tribunal appelé à trancher une demande fondée sur le par. 24(2) consiste à procéder à une mise en balance de chacune de ces questions pour déterminer si, eu égard aux circonstances, l'utilisation d'éléments de preuve serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Bien qu'elles ne recoupent pas exactement les catégories élaborées dans Collins, ces questions visent les facteurs pertinents pour trancher une demande fondée sur le par. 24(2), tels qu'ils ont été formulés dans Collins et dans la jurisprudence subséquente.
[36] Appliquant l'arrêt Grant, la Cour suprême, dans Harrison, énonce ce qui suit pour diriger l'analyse sous le premier élément, soit la gravité de la conduite attentatoire de l'État :
22 À ce stade, le tribunal saisi de l'affaire examine la nature de la conduite de la police qui a porté atteinte aux droits protégés par la Charte et mené à la découverte des éléments de preuve. S'agit-il d'une inconduite dont le tribunal devrait souhaiter se dissocier? C'est le cas si la dérogation aux normes prescrites par la Charte était flagrante, ou si le policier savait (ou aurait dû savoir) que sa conduite ne respectait pas la Charte. En revanche, si la violation ne consiste qu'en une simple irrégularité ou résulte d'une erreur compréhensible, il n'est pas aussi crucial de s'en dissocier.
[38] Dans Harrison, la Cour suprême décrit ainsi le second élément, soit celui de l'incidence de la violation sur les droits de l'accusé garantis par la Charte :
28 Ce facteur porte sur la gravité de la violation, du point de vue de l'accusé. La violation a-t-elle sérieusement porté atteinte aux intérêts sous-jacents aux droits qui ont été enfreints? Ou l'incidence de la violation était-elle simplement passagère ou anodine? Voilà quelques questions auxquelles il faut répondre dans le cadre de l'analyse de ce facteur.
[40] Le troisième et dernier élément, l'intérêt de la société à ce que l'affaire soit jugée au fond, est présenté ainsi dans Harrison :
33 À ce stade, le tribunal saisi de l'affaire prend en compte les facteurs telles la fiabilité des éléments de preuve et leur importance pour la preuve du ministère public.
34 […] Comme nous l'avons souligné dans Grant, même si le public a un intérêt accru à ce que les litiges soient jugés au fond lorsque l'infraction reprochée est grave, le public a aussi un intérêt vital à ce que le système de justice soit irréprochable, particulièrement lorsque l'accusé encourt de lourdes conséquences pénales […].
[42] L'étape finale est celle de la balance des inconvénients. Voici ce que la Cour suprême dit à ce sujet dans Harrison :
36 L'exercice de mise en balance que commande le par. 24(2) est de nature qualitative et il ne peut être effectué avec une précision mathématique. Il ne s'agit pas simplement de savoir si, dans un cas en particulier, la majorité des facteurs pertinents milite en faveur de l'exclusion. La preuve à l'égard de chacune de ces questions doit être soupesée afin de déterminer si, eu égard aux circonstances, l'utilisation des éléments de preuve serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. La nécessité pour le système de justice de se dissocier de l'inconduite de la police ne l'emporte pas toujours sur les intérêts de recherche de la vérité du système de justice pénale. L'inverse est tout aussi vrai. Dans tous les cas, c'est la considération à long terme pour l'administration de la justice qui doit être examinée.
[43] Selon la Cour suprême, la possibilité de découvrir la preuve matérielle « reste toutefois utile pour évaluer l'impact réel de la violation sur les intérêts protégés de l'accusé » car ce critère permet « d'évaluer la force du lien de causalité entre l'auto-incrimination contraire à la Charte et les éléments de preuve qui en ont découlé ».
[45] Dans l'affaire Grant, la Cour suprême réitère le principe selon lequel « si les éléments de preuve dérivée pouvaient être découverts de façon indépendante, l'incidence de la violation pour l'accusé est atténuée et l'utilisation des éléments de preuve est plus probable ». Cela fait partie de l'analyse du deuxième élément devant servir à l'examen d'une violation d'un droit protégé en vertu de l'article 24 (2) de la Charte, étape où il s'agit de circonscrire les conséquences de cette violation pour l'accusée.
[46] Sur le troisième critère, soit celui de savoir si l'utilisation des éléments de preuve dérivée est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice, question qui, comme déjà mentionné, met en cause l'intérêt de la société à ce que l'affaire soit entendue et jugée au fond, la Cour suprême précise que :
Comme la preuve dérivée est de nature matérielle, sa fiabilité est généralement moins problématique, et l'intérêt du public à ce qu'un procès soit instruit sur le fond favorisera donc habituellement son utilisation
[33] Comme précédemment mentionné, le pourvoi ne soulève plus qu'une seule question, cependant déterminante, et pour laquelle le juge de première instance n'avait pas le bénéfice des décisions très récentes de la Cour suprême dans R. c. Grant et R. c. Harrison. Il s'agit de l'admission en preuve des éléments dérivés fiables, souvent exclus par le passé en cas de violation grave des droits constitutionnels de l'accusé. La règle est dorénavant changée en ce que « [l]e juge doit désormais se demander si l'utilisation des éléments de preuve dérivée obtenus par suite d'une violation de la Charte serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice ».
[34] Avant de poursuivre l'examen de cette question, il est opportun de reprendre les grandes lignes de l'affaire Grant.
[35] L'arrêt Grant présente un cadre d'analyse en trois étapes pour évaluer la pertinence d'exclure la preuve recueillie en violation de la Charte :
67 Le libellé du par. 24(2) en exprime bien l'objet : préserver la considération dont jouit l'administration de la justice. L'expression « administration de la justice » est souvent employée pour désigner les processus d'enquête, d'accusation et de jugement qui entrent en jeu en cas de non-respect de la loi. Toutefois, elle englobe de façon plus générale le maintien des droits garantis par la Charte et du principe de la primauté du droit dans l'ensemble du système de justice.
68 L'expression « déconsidérer l'administration de la justice » doit être prise dans l'optique du maintien à long terme de l'intégrité du système de justice et de la confiance à son égard. Certes, l'exclusion d'éléments de preuve qui aboutit à un acquittement peut provoquer des critiques sur le coup. Il n'en demeure pas moins que les réactions immédiates, dans des cas particuliers, ne sont pas visées par l'objet du par. 24(2). Cette disposition concerne plutôt l'appréciation de l'effet à long terme de l'utilisation d'éléments de preuve sur la considération globale dont jouit le système de justice et suppose un examen de nature objective, qui vise à déterminer si une personne raisonnable, au fait de l'ensemble des circonstances pertinentes et des valeurs sous-jacentes de la Charte, conclurait que l'utilisation d'éléments de preuve donnés serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice.
69 L'objet du par. 24(2) n'est pas seulement à long terme, il est également prospectif. L'existence d'une violation de la Charte signifie que l'administration de la justice a déjà été mise à mal. Le paragraphe 24(2) part de là et vise à faire en sorte que les éléments de preuve obtenus au moyen de cette violation ne déconsidèrent pas davantage le système de justice.
70 Enfin, le par. 24(2) a un objet sociétal. Il ne vise pas à sanctionner la conduite des policiers ou à dédommager l'accusé, il a plutôt une portée systémique. Il se rapporte aux importantes répercussions de l'utilisation d'éléments de preuve sur la considération à long terme portée au système de justice.
71 Il ressort de la jurisprudence et de la doctrine qu'il faut, pour déterminer si l'utilisation d'un élément de preuve obtenue en violation de la Charte déconsidérerait l'administration de la justice, examiner trois questions tirant chacune leur origine des intérêts publics sous-jacents au par. 24(2), considérés à long terme dans une perspective sociétale prospective. Ainsi, le tribunal saisi d'une demande d'exclusion fondée sur le par. 24(2) doit évaluer et mettre en balance l'effet que l'utilisation des éléments de preuve aurait sur la confiance de la société envers le système de justice en tenant compte de : (1) la gravité de la conduite attentatoire de l'État (l'utilisation peut donner à penser que le système de justice tolère l'inconduite grave de la part de l'État), (2) l'incidence de la violation sur les droits de l'accusé garantis par la Charte (l'utilisation peut donner à penser que les droits individuels ont peu de poids) et (3) l'intérêt de la société à ce que l'affaire soit jugée au fond. Le rôle du tribunal appelé à trancher une demande fondée sur le par. 24(2) consiste à procéder à une mise en balance de chacune de ces questions pour déterminer si, eu égard aux circonstances, l'utilisation d'éléments de preuve serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Bien qu'elles ne recoupent pas exactement les catégories élaborées dans Collins, ces questions visent les facteurs pertinents pour trancher une demande fondée sur le par. 24(2), tels qu'ils ont été formulés dans Collins et dans la jurisprudence subséquente.
[36] Appliquant l'arrêt Grant, la Cour suprême, dans Harrison, énonce ce qui suit pour diriger l'analyse sous le premier élément, soit la gravité de la conduite attentatoire de l'État :
22 À ce stade, le tribunal saisi de l'affaire examine la nature de la conduite de la police qui a porté atteinte aux droits protégés par la Charte et mené à la découverte des éléments de preuve. S'agit-il d'une inconduite dont le tribunal devrait souhaiter se dissocier? C'est le cas si la dérogation aux normes prescrites par la Charte était flagrante, ou si le policier savait (ou aurait dû savoir) que sa conduite ne respectait pas la Charte. En revanche, si la violation ne consiste qu'en une simple irrégularité ou résulte d'une erreur compréhensible, il n'est pas aussi crucial de s'en dissocier.
[38] Dans Harrison, la Cour suprême décrit ainsi le second élément, soit celui de l'incidence de la violation sur les droits de l'accusé garantis par la Charte :
28 Ce facteur porte sur la gravité de la violation, du point de vue de l'accusé. La violation a-t-elle sérieusement porté atteinte aux intérêts sous-jacents aux droits qui ont été enfreints? Ou l'incidence de la violation était-elle simplement passagère ou anodine? Voilà quelques questions auxquelles il faut répondre dans le cadre de l'analyse de ce facteur.
[40] Le troisième et dernier élément, l'intérêt de la société à ce que l'affaire soit jugée au fond, est présenté ainsi dans Harrison :
33 À ce stade, le tribunal saisi de l'affaire prend en compte les facteurs telles la fiabilité des éléments de preuve et leur importance pour la preuve du ministère public.
34 […] Comme nous l'avons souligné dans Grant, même si le public a un intérêt accru à ce que les litiges soient jugés au fond lorsque l'infraction reprochée est grave, le public a aussi un intérêt vital à ce que le système de justice soit irréprochable, particulièrement lorsque l'accusé encourt de lourdes conséquences pénales […].
[42] L'étape finale est celle de la balance des inconvénients. Voici ce que la Cour suprême dit à ce sujet dans Harrison :
36 L'exercice de mise en balance que commande le par. 24(2) est de nature qualitative et il ne peut être effectué avec une précision mathématique. Il ne s'agit pas simplement de savoir si, dans un cas en particulier, la majorité des facteurs pertinents milite en faveur de l'exclusion. La preuve à l'égard de chacune de ces questions doit être soupesée afin de déterminer si, eu égard aux circonstances, l'utilisation des éléments de preuve serait susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. La nécessité pour le système de justice de se dissocier de l'inconduite de la police ne l'emporte pas toujours sur les intérêts de recherche de la vérité du système de justice pénale. L'inverse est tout aussi vrai. Dans tous les cas, c'est la considération à long terme pour l'administration de la justice qui doit être examinée.
[43] Selon la Cour suprême, la possibilité de découvrir la preuve matérielle « reste toutefois utile pour évaluer l'impact réel de la violation sur les intérêts protégés de l'accusé » car ce critère permet « d'évaluer la force du lien de causalité entre l'auto-incrimination contraire à la Charte et les éléments de preuve qui en ont découlé ».
[45] Dans l'affaire Grant, la Cour suprême réitère le principe selon lequel « si les éléments de preuve dérivée pouvaient être découverts de façon indépendante, l'incidence de la violation pour l'accusé est atténuée et l'utilisation des éléments de preuve est plus probable ». Cela fait partie de l'analyse du deuxième élément devant servir à l'examen d'une violation d'un droit protégé en vertu de l'article 24 (2) de la Charte, étape où il s'agit de circonscrire les conséquences de cette violation pour l'accusée.
[46] Sur le troisième critère, soit celui de savoir si l'utilisation des éléments de preuve dérivée est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice, question qui, comme déjà mentionné, met en cause l'intérêt de la société à ce que l'affaire soit entendue et jugée au fond, la Cour suprême précise que :
Comme la preuve dérivée est de nature matérielle, sa fiabilité est généralement moins problématique, et l'intérêt du public à ce qu'un procès soit instruit sur le fond favorisera donc habituellement son utilisation
lundi 28 juin 2010
Les principes juridiques relatifs à l’ordonnance de dédommagement
Legault c. R., 2008 QCCA 1228 (CanLII)
[7] L’ordonnance de dédommagement fait partie du processus de détermination de la peine. Elle émane d’un pouvoir discrétionnaire qui doit être exercé avec circonspection.
[8] En général, une « cour d’appel est assujettie à une norme élevée de retenue à l’égard de la peine imposée par le juge de première instance » et elle ne doit pas « remettre en question la décision du juge qui prononce la peine à moins que celle-ci ne soit manifestement inappropriée ».
[10] Les principes qui prévalent en matière de dédommagement sont exposés par l'auteur François Dadour:
1. L’ordonnance de dédommagement doit être rendue avec circonspection ;
2. Cette ordonnance fait partie intégrante de la détermination de la peine en ce qu’elle participe à la sanction du contrevenant, lie ce dernier au dédommagement de la victime, le prive du fruit de l’infraction qu’il a commise et facilite la remise en état de la victime ;
3. Le juge d’instance doit considérer l’objectif visé par le créancier du dédommagement, de même que l’existence de procédures civiles ;
4. L’ordonnance de restitution n’est pas un substitut à ces procédures civiles ;
[...]
9. Le dédommagement en double peut être évité par le recours aux juridictions civiles ;
10. L’ordonnance de dédommagement peut être indiquée lorsqu’un jugement civil est inexécutoire suite à la faillite du débiteur.
[11] L’auteur ajoute :
Il est à noter que le juge d’instance a le pouvoir de rendre une ordonnance de dédommagement pour un montant inférieur aux dommages causés. En effet et en lien avec un commentaire similaire quant au quantum des amendes, il n’est ni souhaitable ni approprié qu’une ordonnance de dédommagement mette en péril les chances de réhabilitation du contrevenant par la destruction de son patrimoine.
[12] L’auteur Ruby partage le même avis :
A compensation order which would ruin the offender financially, thus impairing chances of rehabilitation, should not be imposed; neither should one be made where compliance would be particularly onerous or impossible, nor where enforcement would be difficult or impossible. The totality principle applies to the whole of the sentence, including the order of restitution.
[13] La jurisprudence a également établi que le juge qui rend l’ordonnance de dédommagement doit tenir compte des ressources financières de l’accusé, même si la capacité ne doit pas toujours être le facteur déterminant. Comme l'explique le juge Doherty, s'exprimant pour la Cour d’appel de l’Ontario, dans Taylor:
[5] It has been stated many times that restitution is a discretionary order. It should only be made with restraint and caution and not only in order to avoid putting the victim through the extra legal expense of going to the civil courts or as a substitute for civil procedure.
[6] As stated by Martin J.A., speaking for this court, in R. v. Scherer reflex, (1984), 16 C.C.C. (3d) 30 at 38:
It may be that in some cases it would be inappropriate to make a compensation order in an amount that is unrealistic to think that the accused could ever discharge.
[7] In his reasons, the trial judge said:
The only possible way to complete that part of his rehabilitation is through penal consequences. Because of the magnitude of the crime, the duration of the crime, there is no other way to compensate the victims other than his family, then by a penitentiary term [emphasis added].
[8] He then ordered restitution. The restitution order appears to have been added as an afterthought to permit the victim to avoid the costs of a civil action. The Crown had not asked for a restitution order.
[9] The relevant factors and objectives to the imposition of a restitution order have been discussed by this court in R. v. Devgan 1999 CanLII 2412 (ON C.A.), (1999), 136 C.C.C. (3d) 238 and R. v. Biegus 1999 CanLII 3815 (ON C.A.), (1999), 141 C.C.C. (3d) 245. An order for restitution must also bear some reality to the circumstances of the appellant and must be directly associated with the sentence imposed as the public reprobation of the offence. In the circumstances of this case, the overriding factor is the means of the appellant. There is no ability, as noted by the trial judge, to pay even the most minute part of this staggering amount, with no expiry date. It would kill all hope for the appellant for the future and it would likely impair his chances of rehabilitation. The order is clearly excessive and futile and the trial judge erred in that regard.
[10 ]It remains open to the victim to take proceedings in the civil court, if so advised.
[14] En conclusion, une ordonnance de dédommagement doit être rendue avec pondération et circonspection afin de remplir les objectifs et principes de la détermination de la peine soit, plus particulièrement, la réparation des torts, la conscience de la responsabilité, la dénonciation et la dissuasion. Cette ordonnance ne constitue pas le substitut à un recours civil. Lorsque la capacité de payer est absente, comme en l’espèce, il est déraisonnable de rendre une ordonnance de dédommagement de plus d’un million de dollars. Il importe de souligner que l’ordonnance de dédommagement survie à la libération d’un failli. En l'espèce, le montant du dédommagement est si excessif que le délinquant ne pourra jamais l'acquitter, ce qui met en péril le principe de réinsertion sociale.
[7] L’ordonnance de dédommagement fait partie du processus de détermination de la peine. Elle émane d’un pouvoir discrétionnaire qui doit être exercé avec circonspection.
[8] En général, une « cour d’appel est assujettie à une norme élevée de retenue à l’égard de la peine imposée par le juge de première instance » et elle ne doit pas « remettre en question la décision du juge qui prononce la peine à moins que celle-ci ne soit manifestement inappropriée ».
[10] Les principes qui prévalent en matière de dédommagement sont exposés par l'auteur François Dadour:
1. L’ordonnance de dédommagement doit être rendue avec circonspection ;
2. Cette ordonnance fait partie intégrante de la détermination de la peine en ce qu’elle participe à la sanction du contrevenant, lie ce dernier au dédommagement de la victime, le prive du fruit de l’infraction qu’il a commise et facilite la remise en état de la victime ;
3. Le juge d’instance doit considérer l’objectif visé par le créancier du dédommagement, de même que l’existence de procédures civiles ;
4. L’ordonnance de restitution n’est pas un substitut à ces procédures civiles ;
[...]
9. Le dédommagement en double peut être évité par le recours aux juridictions civiles ;
10. L’ordonnance de dédommagement peut être indiquée lorsqu’un jugement civil est inexécutoire suite à la faillite du débiteur.
[11] L’auteur ajoute :
Il est à noter que le juge d’instance a le pouvoir de rendre une ordonnance de dédommagement pour un montant inférieur aux dommages causés. En effet et en lien avec un commentaire similaire quant au quantum des amendes, il n’est ni souhaitable ni approprié qu’une ordonnance de dédommagement mette en péril les chances de réhabilitation du contrevenant par la destruction de son patrimoine.
[12] L’auteur Ruby partage le même avis :
A compensation order which would ruin the offender financially, thus impairing chances of rehabilitation, should not be imposed; neither should one be made where compliance would be particularly onerous or impossible, nor where enforcement would be difficult or impossible. The totality principle applies to the whole of the sentence, including the order of restitution.
[13] La jurisprudence a également établi que le juge qui rend l’ordonnance de dédommagement doit tenir compte des ressources financières de l’accusé, même si la capacité ne doit pas toujours être le facteur déterminant. Comme l'explique le juge Doherty, s'exprimant pour la Cour d’appel de l’Ontario, dans Taylor:
[5] It has been stated many times that restitution is a discretionary order. It should only be made with restraint and caution and not only in order to avoid putting the victim through the extra legal expense of going to the civil courts or as a substitute for civil procedure.
[6] As stated by Martin J.A., speaking for this court, in R. v. Scherer reflex, (1984), 16 C.C.C. (3d) 30 at 38:
It may be that in some cases it would be inappropriate to make a compensation order in an amount that is unrealistic to think that the accused could ever discharge.
[7] In his reasons, the trial judge said:
The only possible way to complete that part of his rehabilitation is through penal consequences. Because of the magnitude of the crime, the duration of the crime, there is no other way to compensate the victims other than his family, then by a penitentiary term [emphasis added].
[8] He then ordered restitution. The restitution order appears to have been added as an afterthought to permit the victim to avoid the costs of a civil action. The Crown had not asked for a restitution order.
[9] The relevant factors and objectives to the imposition of a restitution order have been discussed by this court in R. v. Devgan 1999 CanLII 2412 (ON C.A.), (1999), 136 C.C.C. (3d) 238 and R. v. Biegus 1999 CanLII 3815 (ON C.A.), (1999), 141 C.C.C. (3d) 245. An order for restitution must also bear some reality to the circumstances of the appellant and must be directly associated with the sentence imposed as the public reprobation of the offence. In the circumstances of this case, the overriding factor is the means of the appellant. There is no ability, as noted by the trial judge, to pay even the most minute part of this staggering amount, with no expiry date. It would kill all hope for the appellant for the future and it would likely impair his chances of rehabilitation. The order is clearly excessive and futile and the trial judge erred in that regard.
[10 ]It remains open to the victim to take proceedings in the civil court, if so advised.
[14] En conclusion, une ordonnance de dédommagement doit être rendue avec pondération et circonspection afin de remplir les objectifs et principes de la détermination de la peine soit, plus particulièrement, la réparation des torts, la conscience de la responsabilité, la dénonciation et la dissuasion. Cette ordonnance ne constitue pas le substitut à un recours civil. Lorsque la capacité de payer est absente, comme en l’espèce, il est déraisonnable de rendre une ordonnance de dédommagement de plus d’un million de dollars. Il importe de souligner que l’ordonnance de dédommagement survie à la libération d’un failli. En l'espèce, le montant du dédommagement est si excessif que le délinquant ne pourra jamais l'acquitter, ce qui met en péril le principe de réinsertion sociale.
vendredi 25 juin 2010
L’absence d’antécédents judiciaires n’est pas très significative dans la détermination de la peine pour une infraction de fraude
R. c. Cioffi, 2010 QCCA 69 (CanLII)
[74] L’absence d’antécédents judiciaires n’est pas très significative. La Cour l’a déjà souligné dans R. c. Larochelle, [1986] J.Q., no 1218 :
25. C’est pour cette raison d’ailleurs que le passé apparemment sans tache de l’appelant ne peut, en l’espèce, avoir un effet déterminant sur la peine. C’est en effet de cette réputation avantageuse dont il s’est servi pour masquer ses agissements criminels et déjouer ses victimes. Dans l’arrêt R. v. Spiller (1969, 4 C.C.C. 211, C.A. C.B.), il s’agissait d’une employée de banque condamnée pour vol de près d’un demi-million, à trois années de réclusion. La Cour d’appel de la Colombie Britanique, en augmentant la peine à six années, fut d’opinion que :
“The general good character of the offender is not a mitigating factor where the offence consists of a series of planned acts which were carried out over a lengthy period. Where the offender uses her good character to enable her to perpetrate the crime it should not be used to mitigate penalty.”
[74] L’absence d’antécédents judiciaires n’est pas très significative. La Cour l’a déjà souligné dans R. c. Larochelle, [1986] J.Q., no 1218 :
25. C’est pour cette raison d’ailleurs que le passé apparemment sans tache de l’appelant ne peut, en l’espèce, avoir un effet déterminant sur la peine. C’est en effet de cette réputation avantageuse dont il s’est servi pour masquer ses agissements criminels et déjouer ses victimes. Dans l’arrêt R. v. Spiller (1969, 4 C.C.C. 211, C.A. C.B.), il s’agissait d’une employée de banque condamnée pour vol de près d’un demi-million, à trois années de réclusion. La Cour d’appel de la Colombie Britanique, en augmentant la peine à six années, fut d’opinion que :
“The general good character of the offender is not a mitigating factor where the offence consists of a series of planned acts which were carried out over a lengthy period. Where the offender uses her good character to enable her to perpetrate the crime it should not be used to mitigate penalty.”
jeudi 24 juin 2010
La Cour ne devrait pas punir des personnes pour des crimes perpétrés en raison de maladie mentale; l'aspect dissuasif devient grandement secondaire
R. c. Canney, 1995 CanLII 6994 (NB C.A.)
Je suis d'accord avec le juge d'appel Brooks, lorsqu'il dit, dans l'arrêt R. c. Robinson (1974), 19 C.C.C. (2d) 193 (C.A. Ont.), à la page 197 :
Cette affaire nous crée des problèmes particuliers qui la rendent vraiment différente de la plupart des autres. Il s'agit d'une affaire où il n'est pas vraiment exact de dire que la peine devait avoir un effet dissuasif parce que les autres personnes comme lui, étant dissociées de la réalité, sont nullement touchées par l'effet dissuasif de la peine. De plus, la peine ne devrait pas se fonder sur la punition puisque la Cour ne devrait pas punir des personnes pour des crimes perpétrés en raison de maladie mentale. Les principaux objectifs de la peine sont de protéger le public aussi longtemps que la personne condamnée demeure dans cet état dangereux et de permettre la réinsertion de celle-ci dans la collectivité lorsqu'elle est rétablie, ou autrement dit, réhabilitée. L'accent doit être mis sur la protection du public et, bien sûr, cela peut d'abord se faire par la guérison de la personne condamnée. Il faudra donc que la détention soit assez longue pour permettre un traitement complet mais, si le traitement ne donne pas les résultats escomptés, que le public soit protégé dans la mesure du possible.
Je suis d'accord avec le juge d'appel Brooks, lorsqu'il dit, dans l'arrêt R. c. Robinson (1974), 19 C.C.C. (2d) 193 (C.A. Ont.), à la page 197 :
Cette affaire nous crée des problèmes particuliers qui la rendent vraiment différente de la plupart des autres. Il s'agit d'une affaire où il n'est pas vraiment exact de dire que la peine devait avoir un effet dissuasif parce que les autres personnes comme lui, étant dissociées de la réalité, sont nullement touchées par l'effet dissuasif de la peine. De plus, la peine ne devrait pas se fonder sur la punition puisque la Cour ne devrait pas punir des personnes pour des crimes perpétrés en raison de maladie mentale. Les principaux objectifs de la peine sont de protéger le public aussi longtemps que la personne condamnée demeure dans cet état dangereux et de permettre la réinsertion de celle-ci dans la collectivité lorsqu'elle est rétablie, ou autrement dit, réhabilitée. L'accent doit être mis sur la protection du public et, bien sûr, cela peut d'abord se faire par la guérison de la personne condamnée. Il faudra donc que la détention soit assez longue pour permettre un traitement complet mais, si le traitement ne donne pas les résultats escomptés, que le public soit protégé dans la mesure du possible.
Comment le tribunal devrait traiter la question des victimes choisies au hasard dans le cadre de la détermination de la peine
R. c. Canney, 1995 CanLII 6994 (NB C.A.)
Dans l'ouvrage de Clayton C. Ruby, intitulé Sentencing, 4e éd. (Toronto et Vancouver : Butterworths, 1994), à la page 517, l'auteur traite de la question des victimes choisies au hasard. Il expose trois affaires de meurtre : dans les deux premières, la victime avait été tuée à coups de couteau et, dans la troisième, elle avait été battue à mort. Le paragraphe en question est assez court; je le cite donc intégralement.
Les tribunaux ont tendance à réagir défavorablement aux situations dans lesquelles l'accusé ne peut pas prétendre avoir été poussé à agir par une relation ou une conversation particulière avec sa victime. Le contrevenant est dans un certain sens plus dangereux lorsque son instinct de violence vient uniquement de lui et ne nécessite aucune incitation extérieure. Ainsi, la peine relativement élevée de huit ans infligée dans l'affaire Trottier [(1980), 22 C.L.Q. 296 (C.A. Ont.)], où un homme qui n'avait aucun lien avec l'accusé a été agressé sur le pas de sa porte en rentrant chez lui le soir et tué à coups de couteau. Bien que l'accusé ait été extrêmement ivre, il n'a pas été établi qu'il avait pris sa victime pour quelqu'un d'autre en particulier. Le tribunal a par conséquent conclu que l'accusé avait tout simplement quitté son domicile ce soir-là dans le but de s'en prendre violemment à quelqu'un. Dans l'affaire Crowe [(1983), 23 Sask. R. 1 (C.A.)], l'accusé avait lancé, avec un groupe d'amis en état d'ivresse, une attaque collective contre des personnes liées à une bande qui les avait agressés quelques semaines auparavant. Au cours de l'attaque contre la maison, l'accusé était entré en courant dans le sous-sol, armé d'un couteau, et avait attaqué un étranger qui est ensuite mort de ses blessures. Le tribunal lui a infligé une peine de huit ans en soulignant « le caractère gratuit des actes du groupe ». Voir aussi l'affaire Johnson [(1971), 4 C.C.C. (2d) 226 (C.A. Ont.)], où un jeune homme de 22 ans en état d'ivresse qui était entré par effraction dans la maison d'une femme âgée, qui lui était étrangère, et l'avait battue à mort a été condamné à dix ans d'emprisonnement.
Dans l'ouvrage de Clayton C. Ruby, intitulé Sentencing, 4e éd. (Toronto et Vancouver : Butterworths, 1994), à la page 517, l'auteur traite de la question des victimes choisies au hasard. Il expose trois affaires de meurtre : dans les deux premières, la victime avait été tuée à coups de couteau et, dans la troisième, elle avait été battue à mort. Le paragraphe en question est assez court; je le cite donc intégralement.
Les tribunaux ont tendance à réagir défavorablement aux situations dans lesquelles l'accusé ne peut pas prétendre avoir été poussé à agir par une relation ou une conversation particulière avec sa victime. Le contrevenant est dans un certain sens plus dangereux lorsque son instinct de violence vient uniquement de lui et ne nécessite aucune incitation extérieure. Ainsi, la peine relativement élevée de huit ans infligée dans l'affaire Trottier [(1980), 22 C.L.Q. 296 (C.A. Ont.)], où un homme qui n'avait aucun lien avec l'accusé a été agressé sur le pas de sa porte en rentrant chez lui le soir et tué à coups de couteau. Bien que l'accusé ait été extrêmement ivre, il n'a pas été établi qu'il avait pris sa victime pour quelqu'un d'autre en particulier. Le tribunal a par conséquent conclu que l'accusé avait tout simplement quitté son domicile ce soir-là dans le but de s'en prendre violemment à quelqu'un. Dans l'affaire Crowe [(1983), 23 Sask. R. 1 (C.A.)], l'accusé avait lancé, avec un groupe d'amis en état d'ivresse, une attaque collective contre des personnes liées à une bande qui les avait agressés quelques semaines auparavant. Au cours de l'attaque contre la maison, l'accusé était entré en courant dans le sous-sol, armé d'un couteau, et avait attaqué un étranger qui est ensuite mort de ses blessures. Le tribunal lui a infligé une peine de huit ans en soulignant « le caractère gratuit des actes du groupe ». Voir aussi l'affaire Johnson [(1971), 4 C.C.C. (2d) 226 (C.A. Ont.)], où un jeune homme de 22 ans en état d'ivresse qui était entré par effraction dans la maison d'une femme âgée, qui lui était étrangère, et l'avait battue à mort a été condamné à dix ans d'emprisonnement.
Le sens du mot ''défigure'' dans la définition de l'infraction de voies de graves / Éléments devant être considérés par la Cour lors de son analyse
R. c. Cloud, 2005 NBCP 41 (CanLII)
[48] Le juge Robertson, dans l’arrêt Innes and Brotchie, a ajouté :
[TRADUCTION]
À partir de ces autorités, je dois conclure qu’en l’espèce les méchants coups portés à la tête de la victime ne prouvent pas l’intention de mutiler. Les mêmes autorités éclairent le sens du mot « défigurer », et je dois conclure qu’il désigne quelque chose de plus qu’une atteinte temporaire à la silhouette ou à l’apparence de la personne. Un oeil au beurre noir, par exemple, nuit à l’apparence de la victime, mais il disparaît en peu de temps et ne laisse pas de marques durables, et je ne pense pas que le mot « défigurer » à l’article 228 soit censé inclure le fait de causer une blessure telle qu’un oeil au beurre noir. Il désigne plutôt les cas où la blessure consiste à amputer une oreille ou un nez, à entailler un nez ou à causer une cicatrice permanente au visage en lançant de l’acide. En l’espèce, aucune preuve n’indique qu’au moment du procès (cinq semaines plus tard) il restait des traces de l’extrême enflure du visage de la victime ou de toute autre blessure qui lui a été infligée, sauf la coupure à la gorge. Je suppose donc que la coupure à la gorge était encore visible au moment du procès, et je ne pense pas pouvoir dire qu’il ait été réellement défiguré par les coups ou coups de pied reçus, et on ne peut pas inférer non plus qu’il y avait intention de le défigurer en agissant ainsi.
[49] Ces précédents indiquent que le défigurement ne doit pas être seulement temporaire pour que l’infraction puisse être considérée comme prouvée. Il n’existe aucune preuve indiquant si les blessures guériront à court ou à moyen terme.
[53] À mon avis, une blessure causant un défigurement comporte plusieurs facteurs, y compris les suivants :
1) En fait de gravité, quel est le genre de blessure en cause? La blessure est-elle majeure, ou est-elle difficile à observer?
2) Quelle partie du corps a été atteinte? Même une légère blessure au visage sera sans doute beaucoup plus facilement considérée comme causant un défigurement que la même blessure à l’intérieur de la main ou à la face intérieure d’un doigt, ces parties du corps étant souvent blessées et exposées à des cicatrices mineures au cours de notre vie.
3) La blessure est-elle temporaire de nature? Le défigurement, par sa nature même, comporte une certaine permanence. Bien que la blessure ne doive pas nécessairement être absolument permanente, elle doit, à mon avis, être telle que sa définition exclut les genres de blessures qu’une personne jouissant d’une santé raisonnable s’attendrait, compte tenu de la partie du corps atteinte, à voir guérir dans un délai raisonnable. Si la période de guérison dépasse cette durée de telle sorte qu’une personne raisonnable considérerait que la blessure change le style de vie, même à moyen terme, c’est un facteur qu’il faut également prendre en considération.
4) Un autre facteur à considérer consiste à savoir si la blessure est de nature temporaire et ne défigure donc pas la partie du corps atteinte. Notre expérience courante nous montre qu’une blessure ouverte de cinq centimètres de long à l’avant-bras ou au bras, au-dessus du coude, par exemple, guérira complètement chez une personne jouissant d’une santé raisonnable, et ce, beaucoup plus rapidement qu’une blessure de la même longueur à la paume de la main, qui est une partie du corps que nous utilisons constamment dans notre vie quotidienne. Ces facteurs m’amènent à conclure que la blessure ne doit pas être seulement temporaire.
[48] Le juge Robertson, dans l’arrêt Innes and Brotchie, a ajouté :
[TRADUCTION]
À partir de ces autorités, je dois conclure qu’en l’espèce les méchants coups portés à la tête de la victime ne prouvent pas l’intention de mutiler. Les mêmes autorités éclairent le sens du mot « défigurer », et je dois conclure qu’il désigne quelque chose de plus qu’une atteinte temporaire à la silhouette ou à l’apparence de la personne. Un oeil au beurre noir, par exemple, nuit à l’apparence de la victime, mais il disparaît en peu de temps et ne laisse pas de marques durables, et je ne pense pas que le mot « défigurer » à l’article 228 soit censé inclure le fait de causer une blessure telle qu’un oeil au beurre noir. Il désigne plutôt les cas où la blessure consiste à amputer une oreille ou un nez, à entailler un nez ou à causer une cicatrice permanente au visage en lançant de l’acide. En l’espèce, aucune preuve n’indique qu’au moment du procès (cinq semaines plus tard) il restait des traces de l’extrême enflure du visage de la victime ou de toute autre blessure qui lui a été infligée, sauf la coupure à la gorge. Je suppose donc que la coupure à la gorge était encore visible au moment du procès, et je ne pense pas pouvoir dire qu’il ait été réellement défiguré par les coups ou coups de pied reçus, et on ne peut pas inférer non plus qu’il y avait intention de le défigurer en agissant ainsi.
[49] Ces précédents indiquent que le défigurement ne doit pas être seulement temporaire pour que l’infraction puisse être considérée comme prouvée. Il n’existe aucune preuve indiquant si les blessures guériront à court ou à moyen terme.
[53] À mon avis, une blessure causant un défigurement comporte plusieurs facteurs, y compris les suivants :
1) En fait de gravité, quel est le genre de blessure en cause? La blessure est-elle majeure, ou est-elle difficile à observer?
2) Quelle partie du corps a été atteinte? Même une légère blessure au visage sera sans doute beaucoup plus facilement considérée comme causant un défigurement que la même blessure à l’intérieur de la main ou à la face intérieure d’un doigt, ces parties du corps étant souvent blessées et exposées à des cicatrices mineures au cours de notre vie.
3) La blessure est-elle temporaire de nature? Le défigurement, par sa nature même, comporte une certaine permanence. Bien que la blessure ne doive pas nécessairement être absolument permanente, elle doit, à mon avis, être telle que sa définition exclut les genres de blessures qu’une personne jouissant d’une santé raisonnable s’attendrait, compte tenu de la partie du corps atteinte, à voir guérir dans un délai raisonnable. Si la période de guérison dépasse cette durée de telle sorte qu’une personne raisonnable considérerait que la blessure change le style de vie, même à moyen terme, c’est un facteur qu’il faut également prendre en considération.
4) Un autre facteur à considérer consiste à savoir si la blessure est de nature temporaire et ne défigure donc pas la partie du corps atteinte. Notre expérience courante nous montre qu’une blessure ouverte de cinq centimètres de long à l’avant-bras ou au bras, au-dessus du coude, par exemple, guérira complètement chez une personne jouissant d’une santé raisonnable, et ce, beaucoup plus rapidement qu’une blessure de la même longueur à la paume de la main, qui est une partie du corps que nous utilisons constamment dans notre vie quotidienne. Ces facteurs m’amènent à conclure que la blessure ne doit pas être seulement temporaire.
mercredi 23 juin 2010
Ce que doit prouver l'accusé pour démontrer que sa détention n’est pas nécessaire dans l’intérêt public lors de son appel
Tremblay c. R., 2010 QCCA 889 (CanLII)
[10] Pour démontrer que la détention n’est pas nécessaire dans l’intérêt public, l’appelant doit établir que :
1) l'appel n'est pas frivole
2) l'absence de violence
3) l'absence de danger pour la sécurité du public
4) l'absence de risque de récidive de se livrer à la même activité
5) l'absence de célérité de l'audition en appel
6) le respect des conditions de la mise en liberté avant procès
[11] La Cour écrivait récemment:
[10] Le requérant doit démontrer plus que le simple respect des deux premières conditions pour obtenir sa remise en liberté. En effet, le troisième critère est à double volet : il vise à la fois la protection et la sécurité du public de même que la confiance du public dans l'administration de la justice eu égard à l'ensemble des circonstances du dossier. Le public dont il s'agit est celui qui est en mesure de se former une opinion éclairée et a pleinement connaissance des faits de la cause et du droit applicable.
[10] Pour démontrer que la détention n’est pas nécessaire dans l’intérêt public, l’appelant doit établir que :
1) l'appel n'est pas frivole
2) l'absence de violence
3) l'absence de danger pour la sécurité du public
4) l'absence de risque de récidive de se livrer à la même activité
5) l'absence de célérité de l'audition en appel
6) le respect des conditions de la mise en liberté avant procès
[11] La Cour écrivait récemment:
[10] Le requérant doit démontrer plus que le simple respect des deux premières conditions pour obtenir sa remise en liberté. En effet, le troisième critère est à double volet : il vise à la fois la protection et la sécurité du public de même que la confiance du public dans l'administration de la justice eu égard à l'ensemble des circonstances du dossier. Le public dont il s'agit est celui qui est en mesure de se former une opinion éclairée et a pleinement connaissance des faits de la cause et du droit applicable.
On ne peut s'attendre à ce qu'une personne mesure à la perfection l'étendue de la force employée pour repousser une agression imminente
Friolet c. R., 2006 QCCA 748 (CanLII)
[14] Dans l'arrêt R. c. Paice, la juge Charron, exprimant l'opinion unanime de la Cour suprême sur la question, rappelle que « la légitime défense prévue à l'article 34(1) C.cr. a un sens large et permet à la personne attaquée d'employer la force nécessaire pour se défendre, sans qu'aucune crainte préalable de mourir ou de subir des lésions corporelles graves soit nécessaire. La conduite adoptée est justifiée dans la mesure où la force employée n'a pas pour but de causer la mort ou des lésions corporelles graves. Le paragraphe 34(1) ne peut être invoqué que dans le cas où l'accusé serait une victime innocente qui a été attaquée sans provocation de sa part. La personne qui décide de participer à un échange de coups ne peut par la suite affirmer qu'elle n'a pas provoqué l'attaque… »;
[18] L'imminence de l'attaque, bien que n'étant pas une exigence formelle en matière de légitime défense, constitue un facteur qui doit être pris en considération pour déterminer si un accusé a des motifs raisonnables d'appréhender un danger et de croire qu'il ne pourra s'en sortir qu'en attaquant;
[19] Le coup porté par l'appelant a certes causé de graves blessures, mais comme le rappelait notre Cour dans l'arrêt R. c. Bélanger, on ne peut s'attendre à ce qu'une personne mesure à la perfection l'étendue de la force employée pour repousser une agression imminente. Il faut tenir compte des circonstances et de l'état d'esprit de l'accusé;
[20] La preuve pouvait raisonnablement permettre les inférences requises pour que le moyen de légitime défense plaidé par l'appelant soit retenu. Ce dernier, est-il nécessaire de le rappeler, n'avait qu'une charge de présentation et non de persuasion. Cette dernière charge incombait au ministère public qui devait prouver, hors de tout doute raisonnable, que l'appelant devait être déclaré coupable parce que son moyen de défense ne pouvait être retenu;
[14] Dans l'arrêt R. c. Paice, la juge Charron, exprimant l'opinion unanime de la Cour suprême sur la question, rappelle que « la légitime défense prévue à l'article 34(1) C.cr. a un sens large et permet à la personne attaquée d'employer la force nécessaire pour se défendre, sans qu'aucune crainte préalable de mourir ou de subir des lésions corporelles graves soit nécessaire. La conduite adoptée est justifiée dans la mesure où la force employée n'a pas pour but de causer la mort ou des lésions corporelles graves. Le paragraphe 34(1) ne peut être invoqué que dans le cas où l'accusé serait une victime innocente qui a été attaquée sans provocation de sa part. La personne qui décide de participer à un échange de coups ne peut par la suite affirmer qu'elle n'a pas provoqué l'attaque… »;
[18] L'imminence de l'attaque, bien que n'étant pas une exigence formelle en matière de légitime défense, constitue un facteur qui doit être pris en considération pour déterminer si un accusé a des motifs raisonnables d'appréhender un danger et de croire qu'il ne pourra s'en sortir qu'en attaquant;
[19] Le coup porté par l'appelant a certes causé de graves blessures, mais comme le rappelait notre Cour dans l'arrêt R. c. Bélanger, on ne peut s'attendre à ce qu'une personne mesure à la perfection l'étendue de la force employée pour repousser une agression imminente. Il faut tenir compte des circonstances et de l'état d'esprit de l'accusé;
[20] La preuve pouvait raisonnablement permettre les inférences requises pour que le moyen de légitime défense plaidé par l'appelant soit retenu. Ce dernier, est-il nécessaire de le rappeler, n'avait qu'une charge de présentation et non de persuasion. Cette dernière charge incombait au ministère public qui devait prouver, hors de tout doute raisonnable, que l'appelant devait être déclaré coupable parce que son moyen de défense ne pouvait être retenu;
Les éléments devant être prouvés par la défense pour l'application du paragraphe 34(1) sur la légitime défense
R. c. Levasseur, 2006 NBBR 112 (CanLII)
[43] Les quatre éléments du paragraphe 34(1) sont :
i) l’accusé croyait, ou croyait raisonnablement qu’il était, ou allait être illégalement attaqué. (Analyse subjective)
ii) l’accusé n’a pas provoqué l’attaque.
iii) la force n’a pas été utilisée avec l’intention de causer la mort ou des lésions corporelles graves. (Analyse subjective)
iv) la force utilisée n’était pas poussée au-delà de ce qui était nécessaire, c’est-à-dire la force employée était proportionnelle. (Analyse objective)
[43] Les quatre éléments du paragraphe 34(1) sont :
i) l’accusé croyait, ou croyait raisonnablement qu’il était, ou allait être illégalement attaqué. (Analyse subjective)
ii) l’accusé n’a pas provoqué l’attaque.
iii) la force n’a pas été utilisée avec l’intention de causer la mort ou des lésions corporelles graves. (Analyse subjective)
iv) la force utilisée n’était pas poussée au-delà de ce qui était nécessaire, c’est-à-dire la force employée était proportionnelle. (Analyse objective)
Le degré de preuve requis, pour citation à procès lors de l'enquête préliminaire, est un soupçon de preuve concernant chacun des éléments constitutifs de l'infraction
Blier c. R., 2008 QCCA 1671 (CanLII)
[5] En matière d'enquête préliminaire, la Cour suprême enseigne que le tribunal doit procéder à une appréciation indépendante du dossier, sans nécessairement retenir l'interprétation donnée à la preuve par la poursuite. L'expression consacrée pour définir le degré de preuve requise est un soupçon de preuve ou, en anglais, "a scintilla of evidence".
[6] La question devant le ou la juge de l'enquête est donc celle de savoir si un jury bien informé en droit pourrait conclure à la culpabilité de la personne accusée en se fondant sur les éléments de preuve apportés, sans tirer d'inférence au regard des faits et sans apprécier la crédibilité. «Il s'agirait plutôt d'une évaluation du caractère raisonnable des inférences qu'il convient de tirer de la preuve circonstancielle».
[7] La Cour suprême enseigne également qu'un juge enquêteur «ne commet pas une erreur de compétence si, après examen de l'ensemble de la preuve et en l'absence de preuve directe concernant chacun des éléments constitutifs de l'infraction, il conclut à tort que l'ensemble de la preuve (directe et circonstancielle) ne suffit pas pour satisfaire au critère applicable […] et libère l'accusé […]».
[5] En matière d'enquête préliminaire, la Cour suprême enseigne que le tribunal doit procéder à une appréciation indépendante du dossier, sans nécessairement retenir l'interprétation donnée à la preuve par la poursuite. L'expression consacrée pour définir le degré de preuve requise est un soupçon de preuve ou, en anglais, "a scintilla of evidence".
[6] La question devant le ou la juge de l'enquête est donc celle de savoir si un jury bien informé en droit pourrait conclure à la culpabilité de la personne accusée en se fondant sur les éléments de preuve apportés, sans tirer d'inférence au regard des faits et sans apprécier la crédibilité. «Il s'agirait plutôt d'une évaluation du caractère raisonnable des inférences qu'il convient de tirer de la preuve circonstancielle».
[7] La Cour suprême enseigne également qu'un juge enquêteur «ne commet pas une erreur de compétence si, après examen de l'ensemble de la preuve et en l'absence de preuve directe concernant chacun des éléments constitutifs de l'infraction, il conclut à tort que l'ensemble de la preuve (directe et circonstancielle) ne suffit pas pour satisfaire au critère applicable […] et libère l'accusé […]».
mardi 22 juin 2010
Les circonstances où peut être présentée une requête en non-lieu
R. c. Tran, 2009 QCCA 701 (CanLII)
[4] Les auteurs Béliveau et Vauclair expliquent ainsi dans quelles circonstances peut être présentée une requête en non-lieu :
484. En sus, la common law a dégagé une conséquence procédurale importante du principe de la présomption d’innocence qui attribue à l’État la charge de la preuve. En effet, après la preuve de la poursuite au procès et avant que l'accusé n'ait décidé de présenter ou non une défense, il doit exister devant le tribunal suffisamment de preuve pour qu'un jury correctement instruit puisse fonder un verdict de culpabilité. En l'absence de preuve relativement à l'un des éléments essentiels de l'accusation, l'accusé peut présenter, à la fin de la démonstration de la poursuite, une requête en non-lieu ou encore une requête pour verdict imposé d'acquittement. Si cette requête est accueillie, l'accusé est acquitté faute de preuves. Cela étant, un juge ne peut pas, vu les principes de la common law et l'alinéa 11f) de la Charte, imposer un verdict de culpabilité.
[6] La Cour suprême, dans l’arrêt R. c. Arcuri, mentionne que lorsque la preuve est entièrement circonstancielle, comme en l’espèce, le juge doit, dans le cadre d’une requête en non-lieu, procéder à une évaluation limitée de la preuve.
[…] le juge doit procéder à une évaluation limitée afin de déterminer si, dans l’ensemble de la preuve (c.-à-d. qui comprend la preuve de la défense), un jury équitable ayant reçu des directives appropriées pourrait raisonnablement arriver à un verdict de culpabilité.
En exerçant cette fonction d’évaluation limitée, le juge présidant l’enquête préliminaire ne tire aucune inférence au regard des faits. Il n’apprécie pas non plus la crédibilité. La fonction du juge consiste plutôt à déterminer si, en supposant que la preuve du ministère public soit crue, il serait raisonnable pour un jury ayant reçu des directives appropriées d’inférer la culpabilité. Par conséquent, dans le cadre de cette fonction qui consiste à procéder à l’ « évaluation limitée », le juge n’est jamais tenu d’examiner la fiabilité inhérente de la preuve elle-même. Il s’agirait plutôt d’une évaluation du caractère raisonnable des inférences qu’il convient de tirer de la preuve circonstancielle
[4] Les auteurs Béliveau et Vauclair expliquent ainsi dans quelles circonstances peut être présentée une requête en non-lieu :
484. En sus, la common law a dégagé une conséquence procédurale importante du principe de la présomption d’innocence qui attribue à l’État la charge de la preuve. En effet, après la preuve de la poursuite au procès et avant que l'accusé n'ait décidé de présenter ou non une défense, il doit exister devant le tribunal suffisamment de preuve pour qu'un jury correctement instruit puisse fonder un verdict de culpabilité. En l'absence de preuve relativement à l'un des éléments essentiels de l'accusation, l'accusé peut présenter, à la fin de la démonstration de la poursuite, une requête en non-lieu ou encore une requête pour verdict imposé d'acquittement. Si cette requête est accueillie, l'accusé est acquitté faute de preuves. Cela étant, un juge ne peut pas, vu les principes de la common law et l'alinéa 11f) de la Charte, imposer un verdict de culpabilité.
[6] La Cour suprême, dans l’arrêt R. c. Arcuri, mentionne que lorsque la preuve est entièrement circonstancielle, comme en l’espèce, le juge doit, dans le cadre d’une requête en non-lieu, procéder à une évaluation limitée de la preuve.
[…] le juge doit procéder à une évaluation limitée afin de déterminer si, dans l’ensemble de la preuve (c.-à-d. qui comprend la preuve de la défense), un jury équitable ayant reçu des directives appropriées pourrait raisonnablement arriver à un verdict de culpabilité.
En exerçant cette fonction d’évaluation limitée, le juge présidant l’enquête préliminaire ne tire aucune inférence au regard des faits. Il n’apprécie pas non plus la crédibilité. La fonction du juge consiste plutôt à déterminer si, en supposant que la preuve du ministère public soit crue, il serait raisonnable pour un jury ayant reçu des directives appropriées d’inférer la culpabilité. Par conséquent, dans le cadre de cette fonction qui consiste à procéder à l’ « évaluation limitée », le juge n’est jamais tenu d’examiner la fiabilité inhérente de la preuve elle-même. Il s’agirait plutôt d’une évaluation du caractère raisonnable des inférences qu’il convient de tirer de la preuve circonstancielle
La possession comporte comme élément essentiel le contrôle du bien en cause
R. c. Terrence, [1983] 1 R.C.S. 357
Un certain contrôle sur le bien en cause de la part de la personne qui est réputée avoir ce bien en sa possession est un des éléments essentiels constitutifs de la possession au sens de l’al. 3(4)b) (maintenant 4(3) )du Code criminel. La «connaissance et le consentement» requis ne peuvent exister sans qu’il y ait un certain contrôle du bien en cause
Un certain contrôle sur le bien en cause de la part de la personne qui est réputée avoir ce bien en sa possession est un des éléments essentiels constitutifs de la possession au sens de l’al. 3(4)b) (maintenant 4(3) )du Code criminel. La «connaissance et le consentement» requis ne peuvent exister sans qu’il y ait un certain contrôle du bien en cause
Comment la jurisprudence définit l'infraction de complot
R. c. Lacoursière, 2002 CanLII 41284 (QC C.A.)
[17] La jurisprudence définit un complot comme (1) une entente entre au moins deux personnes (2) qui ont l'intention de participer ensemble (3) à la poursuite d'une fin illégale.
[18] L'entente devient significative dans la mesure où les participants ont l'intention de s'entraider ou de prendre ensemble des moyens pour réaliser la fin illégale qui leur est commune. Dès lors, si dans leur tractations ou leurs rencontres, les parties se limitent à considérer un projet ou la possibilité de réaliser une fin illégale, elles n'ont pas nécessairement exprimé une entente de même que l'intention de s'entraider dans la poursuite de la fin illégale: le complot ne s'est pas formé.
[19] Il n'est pas cependant requis que la fin illégale se réalise pour que le complot soit consommé.
[17] La jurisprudence définit un complot comme (1) une entente entre au moins deux personnes (2) qui ont l'intention de participer ensemble (3) à la poursuite d'une fin illégale.
[18] L'entente devient significative dans la mesure où les participants ont l'intention de s'entraider ou de prendre ensemble des moyens pour réaliser la fin illégale qui leur est commune. Dès lors, si dans leur tractations ou leurs rencontres, les parties se limitent à considérer un projet ou la possibilité de réaliser une fin illégale, elles n'ont pas nécessairement exprimé une entente de même que l'intention de s'entraider dans la poursuite de la fin illégale: le complot ne s'est pas formé.
[19] Il n'est pas cependant requis que la fin illégale se réalise pour que le complot soit consommé.
La mens rea applicable à une tentative de meurtre est l’intention spécifique de tuer
R. c. Ancio, [1984] 1 R.C.S. 225
La mens rea applicable à une tentative de meurtre est l’intention spécifique de tuer et l’état d’esprit qui n’atteint pas ce niveau, même s’il pouvait donner lieu à une déclaration de culpabilité relativement à d’autres infractions, ne peut donner lieu à une déclaration de culpabilité pour une tentative. L’infraction complète de meurtre comporte le fait de tuer et l’intention de commettre cette infraction doit inclure l’intention de tuer. Une tentative de meurtre ne doit pas comporter une intention moindre. Il n’y a rien d’illogique dans le fait que, dans certaines circonstances, une intention moindre est suffisante pour prononcer une déclaration de culpabilité de meurtre. Une personne ne peut pas avoir l’intention de commettre les homicides involontaires décrits aux art. 212 et 213 du Code. Tout illogisme, s’il en est, réside dans le fait que le Code qualifie de meurtre l’homicide involontaire.
Le crime de tentative a évolué comme une infraction distincte du meurtre et il demeure une infraction distincte du meurtre. Bien que le ministère public doive encore prouver la mens rea et l’actus reus, la mens rea est l’élément le plus important. L’intention de commettre l’infraction voulue est un élément essentiel de l’infraction de tentative et, en fait, peut constituer le seul élément criminel de l’infraction pourvu que la tentative soit commise sans qu’il y ait perpétration de l’infraction envisagée
La mens rea applicable à une tentative de meurtre est l’intention spécifique de tuer et l’état d’esprit qui n’atteint pas ce niveau, même s’il pouvait donner lieu à une déclaration de culpabilité relativement à d’autres infractions, ne peut donner lieu à une déclaration de culpabilité pour une tentative. L’infraction complète de meurtre comporte le fait de tuer et l’intention de commettre cette infraction doit inclure l’intention de tuer. Une tentative de meurtre ne doit pas comporter une intention moindre. Il n’y a rien d’illogique dans le fait que, dans certaines circonstances, une intention moindre est suffisante pour prononcer une déclaration de culpabilité de meurtre. Une personne ne peut pas avoir l’intention de commettre les homicides involontaires décrits aux art. 212 et 213 du Code. Tout illogisme, s’il en est, réside dans le fait que le Code qualifie de meurtre l’homicide involontaire.
Le crime de tentative a évolué comme une infraction distincte du meurtre et il demeure une infraction distincte du meurtre. Bien que le ministère public doive encore prouver la mens rea et l’actus reus, la mens rea est l’élément le plus important. L’intention de commettre l’infraction voulue est un élément essentiel de l’infraction de tentative et, en fait, peut constituer le seul élément criminel de l’infraction pourvu que la tentative soit commise sans qu’il y ait perpétration de l’infraction envisagée
vendredi 18 juin 2010
Conditions applicables à une ordonnance Anton Piller
Celanese Canada Inc. c. Murray Demolition Corp., 2006 CSC 36, [2006] 2 R.C.S. 189
35 Quatre conditions doivent être remplies pour donner ouverture à une ordonnance Anton Piller. Premièrement, le demandeur doit présenter une preuve prima facie solide. Deuxièmement, le préjudice causé ou risquant d’être causé au demandeur par l’inconduite présumée du défendeur doit être très grave. Troisièmement, il doit y avoir une preuve convaincante que le défendeur a en sa possession des documents ou des objets incriminants, et quatrièmement, il faut démontrer qu’il est réellement possible que le défendeur détruise ces pièces avant que le processus de communication préalable puisse être amorcé (références omises)
36 La force et la faiblesse d’une ordonnance Anton Piller tiennent toutes deux au fait qu’elle est une ordonnance ex parte interlocutoire : aucun contre‑interrogatoire ne porte donc sur le contenu des affidavits produits au soutien de la requête. Le juge des requêtes compte nécessairement sur une divulgation fidèle et complète de la part des déposants, et tout autant, sinon plus, sur le professionnalisme des avocats qui participent à l’exécution de l’ordonnance. On nous informe qu’il n’est pas possible d’obtenir de telles ordonnances aux États‑Unis
35 Quatre conditions doivent être remplies pour donner ouverture à une ordonnance Anton Piller. Premièrement, le demandeur doit présenter une preuve prima facie solide. Deuxièmement, le préjudice causé ou risquant d’être causé au demandeur par l’inconduite présumée du défendeur doit être très grave. Troisièmement, il doit y avoir une preuve convaincante que le défendeur a en sa possession des documents ou des objets incriminants, et quatrièmement, il faut démontrer qu’il est réellement possible que le défendeur détruise ces pièces avant que le processus de communication préalable puisse être amorcé (références omises)
36 La force et la faiblesse d’une ordonnance Anton Piller tiennent toutes deux au fait qu’elle est une ordonnance ex parte interlocutoire : aucun contre‑interrogatoire ne porte donc sur le contenu des affidavits produits au soutien de la requête. Le juge des requêtes compte nécessairement sur une divulgation fidèle et complète de la part des déposants, et tout autant, sinon plus, sur le professionnalisme des avocats qui participent à l’exécution de l’ordonnance. On nous informe qu’il n’est pas possible d’obtenir de telles ordonnances aux États‑Unis
Quant au délit de fuite, il n'est pas nécessaire, pour être impliqué dans un accident, au sens de l'art. 252 C.cr., qu'il y ait eu collision
Thériault c. R., 2005 QCCA 583 (CanLII)
[5] Quant au délit de fuite, il n'est pas nécessaire, pour être impliqué dans un accident, au sens de l'art. 252 C.cr., qu'il y ait eu collision : R. c. Mihalik, 28 M.V.R. (2d) 114, C.A. C.B.; en l'espèce, la conduite de l'appelant fut précisément la cause de l'accident ayant entraîné la perte totale du véhicule de la victime et il n'y a donc aucun doute, à notre avis, qu'il a été impliqué dans un accident avec un véhicule et que son départ précipité des lieux de cet accident constitue un délit de fuite au sens du Code criminel;
[5] Quant au délit de fuite, il n'est pas nécessaire, pour être impliqué dans un accident, au sens de l'art. 252 C.cr., qu'il y ait eu collision : R. c. Mihalik, 28 M.V.R. (2d) 114, C.A. C.B.; en l'espèce, la conduite de l'appelant fut précisément la cause de l'accident ayant entraîné la perte totale du véhicule de la victime et il n'y a donc aucun doute, à notre avis, qu'il a été impliqué dans un accident avec un véhicule et que son départ précipité des lieux de cet accident constitue un délit de fuite au sens du Code criminel;
Le résumé des diverses obligations qui découlent de l’al. 10b) de la Charte et leurs modalités d’interaction
R. c. Faudel, 2010 NBBR 82 (CanLII)
[28] Au paragraphe 20 de l’affaire de R c. Brown, [2009] A.N.-B. no 143, 2009 NBCA 27 (CanLII), 2009 NBCA 27, notre Cour d’appel a traité des obligations qui découlent de l’alinéa 10b) de la Charte et a souscrit au résumé proposé dans l’arrêt R. v. Luong, 2000 ABCA 301 (CanLII), 2000 ABCA 301, (2000), 271 A.R. 368 :
20. Les diverses obligations qui découlent de l'al. 10b) de la Charte et leurs modalités d'interaction ont été résumées dans l'arrêt R. c. Luong (G.V.) 2000 ABCA 301 (CanLII), (2000), 271 A.R. 368, [2000] A.J. No. 1310 (QL), 2000 ABCA 301:
[TRADUCTION]
En guise d'assistance aux juges de procès chargés de la lourde tâche de trancher pareilles questions en litige, nous offrons les orientations suivantes:
1. Il incombe à la personne qui affirme que son droit garanti par la Charte a été violé d'établir qu'il y a eu violation ou négation du droit garanti par la Charte.
2. L'alinéa 10b) impose aux autorités de l'État qui arrêtent une personne ou la placent en détention des obligations en matière d'information et en matière de mise en application.
3. L'obligation en matière d'information consiste à informer la personne détenue de son droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat et à lui faire connaître l'existence et l'accessibilité de l'aide juridique et des avocats de service.
4. Les obligations en matière de mise en application sont doubles et prennent naissance lorsque la personne détenue indique qu'elle désire exercer son droit à l'assistance d'un avocat.
5. La première obligation en matière de mise en application consiste à "donner [à la personne détenue] la possibilité raisonnable [d'exercer son droit] (sauf en cas d'urgence ou de danger)". Voir R. c. Bartle, 1994 CanLII 64 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 173; 92 C.C.C. (3d) 289 (C.S.C.), à la page 192 [R.C.S.].
6. La deuxième obligation en matière de mise en application consiste à "s'abstenir de tenter de soutirer des éléments de preuve à la personne détenue jusqu'à ce qu'elle ait eu cette possibilité raisonnable (encore une fois, sauf en cas d'urgence ou de danger)". Voir R. c. Bartle, précité, à la page 192 [R.C.S.].
7. Le juge du procès doit d'abord déterminer si, étant donné l'ensemble des circonstances, la police a accordé à la personne détenue une possibilité raisonnable d'exercer son droit à l'assistance d'un avocat; il incombe à la Couronne d'établir que la personne détenue qui a invoqué le droit à l'assistance d'un avocat a obtenu une possibilité raisonnable d'exercer ce droit.
8. Si le juge du procès conclut qu'il y a eu violation de la première obligation en matière de mise en application, l'atteinte aux droits de la personne détenue est prouvée.
9. Si le juge du procès est convaincu que la première obligation en matière de mise en application a été respectée, ce n'est qu'alors qu'il peut examiner si la personne détenue qui a invoqué le droit à l'assistance d'un avocat a fait preuve d'une diligence raisonnable pour l'exercer, et il incombe à la personne détenue d'établir qu'elle a fait preuve d'une diligence raisonnable afin d'exercer ses droits. Voir R. c. Smith 1989 CanLII 27 (S.C.C.), (1989), 50 C.C.C. (3d) 308 (C.S.C.), aux pages 315, 316 et 323.
10. Si on conclut que la personne détenue qui a invoqué le droit à l'assistance d'un avocat n'a pas fait preuve d'une diligence raisonnable pour l'exercer, ou bien les obligations en matière de mise en application ne prennent pas naissance du tout, ou bien elles sont suspendues. Voir R. c. Tremblay 1987 CanLII 28 (S.C.C.), (1987), 37 C.C.C. (3d) 565 (C.S.C.), à la page 568, R. c. Ross 1989 CanLII 134 (S.C.C.), (1989), 46 C.C.C. (3d) 129 (C.S.C.), à la page 135, R. c. Black 1989 CanLII 75 (S.C.C.), (1989), 50 C.C.C. (3d) 1 (C.S.C.), à la page 13, R. c. Smith, précité, à la page 314, R. c. Bartle, précité, à la page 301 et R. c. Prosper, 1994 CanLII 65 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 236; 92 C.C.C. (3d) 353 (C.S.C.), aux pages 375 à 381, 400 et 401 [du recueil C.C.C.]. Dans de telles circonstances, aucune atteinte aux droits n'est prouvée.
11. Une fois qu'une personne détenue a affirmé son droit à l'assistance d'un avocat et a fait preuve d'une diligence opportune pour l'exercer (après avoir obtenu une possibilité raisonnable de l'exercer), si elle indique qu'elle a changé d'idée et ne veut plus d'avis juridique, la Couronne est tenue de prouver l'existence d'une renonciation valide à l'assistance d'un avocat. Dans un tel cas, les pouvoirs de l'État ont une obligation additionnelle en matière d'information: ils doivent "informer [la personne détenue] de son droit d'avoir une possibilité raisonnable de communiquer avec un avocat et de l'obligation de la police, au cours de cette période, de s'abstenir, tant que la personne n'aura pas eu cette possibilité raisonnable de prendre toute déposition ou d'exiger qu'elle participe à quelque processus qui pourrait éventuellement être incriminant" (c'est ce qu'on appelle parfois "la mise en garde prévue dans l'arrêt Prosper"). Voir R. c. Prosper, précité, à la page 274 [du R.C.S.]. En l'absence d'une telle mise en garde, une atteinte aux droits est prouvée.
[29] L'exercice du droit à l'avocat que prévoit l'alinéa 10b) de la Charte comporte deux volets. Il y a le volet de l'information et le volet de mise en application
[28] Au paragraphe 20 de l’affaire de R c. Brown, [2009] A.N.-B. no 143, 2009 NBCA 27 (CanLII), 2009 NBCA 27, notre Cour d’appel a traité des obligations qui découlent de l’alinéa 10b) de la Charte et a souscrit au résumé proposé dans l’arrêt R. v. Luong, 2000 ABCA 301 (CanLII), 2000 ABCA 301, (2000), 271 A.R. 368 :
20. Les diverses obligations qui découlent de l'al. 10b) de la Charte et leurs modalités d'interaction ont été résumées dans l'arrêt R. c. Luong (G.V.) 2000 ABCA 301 (CanLII), (2000), 271 A.R. 368, [2000] A.J. No. 1310 (QL), 2000 ABCA 301:
[TRADUCTION]
En guise d'assistance aux juges de procès chargés de la lourde tâche de trancher pareilles questions en litige, nous offrons les orientations suivantes:
1. Il incombe à la personne qui affirme que son droit garanti par la Charte a été violé d'établir qu'il y a eu violation ou négation du droit garanti par la Charte.
2. L'alinéa 10b) impose aux autorités de l'État qui arrêtent une personne ou la placent en détention des obligations en matière d'information et en matière de mise en application.
3. L'obligation en matière d'information consiste à informer la personne détenue de son droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat et à lui faire connaître l'existence et l'accessibilité de l'aide juridique et des avocats de service.
4. Les obligations en matière de mise en application sont doubles et prennent naissance lorsque la personne détenue indique qu'elle désire exercer son droit à l'assistance d'un avocat.
5. La première obligation en matière de mise en application consiste à "donner [à la personne détenue] la possibilité raisonnable [d'exercer son droit] (sauf en cas d'urgence ou de danger)". Voir R. c. Bartle, 1994 CanLII 64 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 173; 92 C.C.C. (3d) 289 (C.S.C.), à la page 192 [R.C.S.].
6. La deuxième obligation en matière de mise en application consiste à "s'abstenir de tenter de soutirer des éléments de preuve à la personne détenue jusqu'à ce qu'elle ait eu cette possibilité raisonnable (encore une fois, sauf en cas d'urgence ou de danger)". Voir R. c. Bartle, précité, à la page 192 [R.C.S.].
7. Le juge du procès doit d'abord déterminer si, étant donné l'ensemble des circonstances, la police a accordé à la personne détenue une possibilité raisonnable d'exercer son droit à l'assistance d'un avocat; il incombe à la Couronne d'établir que la personne détenue qui a invoqué le droit à l'assistance d'un avocat a obtenu une possibilité raisonnable d'exercer ce droit.
8. Si le juge du procès conclut qu'il y a eu violation de la première obligation en matière de mise en application, l'atteinte aux droits de la personne détenue est prouvée.
9. Si le juge du procès est convaincu que la première obligation en matière de mise en application a été respectée, ce n'est qu'alors qu'il peut examiner si la personne détenue qui a invoqué le droit à l'assistance d'un avocat a fait preuve d'une diligence raisonnable pour l'exercer, et il incombe à la personne détenue d'établir qu'elle a fait preuve d'une diligence raisonnable afin d'exercer ses droits. Voir R. c. Smith 1989 CanLII 27 (S.C.C.), (1989), 50 C.C.C. (3d) 308 (C.S.C.), aux pages 315, 316 et 323.
10. Si on conclut que la personne détenue qui a invoqué le droit à l'assistance d'un avocat n'a pas fait preuve d'une diligence raisonnable pour l'exercer, ou bien les obligations en matière de mise en application ne prennent pas naissance du tout, ou bien elles sont suspendues. Voir R. c. Tremblay 1987 CanLII 28 (S.C.C.), (1987), 37 C.C.C. (3d) 565 (C.S.C.), à la page 568, R. c. Ross 1989 CanLII 134 (S.C.C.), (1989), 46 C.C.C. (3d) 129 (C.S.C.), à la page 135, R. c. Black 1989 CanLII 75 (S.C.C.), (1989), 50 C.C.C. (3d) 1 (C.S.C.), à la page 13, R. c. Smith, précité, à la page 314, R. c. Bartle, précité, à la page 301 et R. c. Prosper, 1994 CanLII 65 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 236; 92 C.C.C. (3d) 353 (C.S.C.), aux pages 375 à 381, 400 et 401 [du recueil C.C.C.]. Dans de telles circonstances, aucune atteinte aux droits n'est prouvée.
11. Une fois qu'une personne détenue a affirmé son droit à l'assistance d'un avocat et a fait preuve d'une diligence opportune pour l'exercer (après avoir obtenu une possibilité raisonnable de l'exercer), si elle indique qu'elle a changé d'idée et ne veut plus d'avis juridique, la Couronne est tenue de prouver l'existence d'une renonciation valide à l'assistance d'un avocat. Dans un tel cas, les pouvoirs de l'État ont une obligation additionnelle en matière d'information: ils doivent "informer [la personne détenue] de son droit d'avoir une possibilité raisonnable de communiquer avec un avocat et de l'obligation de la police, au cours de cette période, de s'abstenir, tant que la personne n'aura pas eu cette possibilité raisonnable de prendre toute déposition ou d'exiger qu'elle participe à quelque processus qui pourrait éventuellement être incriminant" (c'est ce qu'on appelle parfois "la mise en garde prévue dans l'arrêt Prosper"). Voir R. c. Prosper, précité, à la page 274 [du R.C.S.]. En l'absence d'une telle mise en garde, une atteinte aux droits est prouvée.
[29] L'exercice du droit à l'avocat que prévoit l'alinéa 10b) de la Charte comporte deux volets. Il y a le volet de l'information et le volet de mise en application
Pouvoir d'enquête du policier VS Refus de collaborer de la part du justiciable; les principles juridiques applicables
R. c. Ermilus, 2010 QCCQ 2878 (CanLII)
[18] Les agents de la paix ont un rôle essentiel à jouer dans la protection des citoyens; en particulier les policiers qui travaillent la nuit ont une mission importante qui, sous plusieurs aspects, présente certains dangers.
[19] L'arrêt R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59 résume le pouvoir des policiers lorsqu'ils agissent dans leur mission de protection de la paix publique. À la page 9 du jugement, au paragraphe 16, la cour déclare :
"Comme les policiers ont pour mission de protéger la paix publique et d'enquêter sur les crimes, ils doivent être habilités à réagir avec rapidité, efficacité et souplesse pour diverses situations qu'ils rencontrent quotidiennement aux premières lignes du maintien de l'ordre. Malgré l'absence de consensus formel quant à l'existence du pouvoir des policiers de détenir une personne aux fins d'enquête, plusieurs commentateurs signalent que ce pouvoir est utilisé depuis longtemps au Canada en tant que pratique du maintien de l'ordre…"
[20] L'arrêt précise , à la page 12, paragraphe 26, les conditions que doit avoir un policier pour détenir un citoyen aux fins d'enquête:
"… le tribunal s'attache à la nécessité ou à la justification raisonnable de la conduite du policier dans les circonstances particulières de l'affaire."
et à la page 14, au paragraphe 34 :
"… les détentions aux fins d'enquête reposent sur des motifs raisonnables. La détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suivant une considération objective de l'ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu'il existe un lien clair entre l'individu qui sera détenu et l'infraction criminelle récente ou en cours. La question des motifs raisonnables intervient dès le départ dans cette détermination, car ces motifs sont à la base des soupçons raisonnables du policier que l'individu en cause est impliqué dans l'activité criminelle visée par l'enquête. …le caractère globalement non abusif de la décision de détenir une personne doit également être apprécié au regard de l'ensemble des circonstances, principalement la mesure dans laquelle il est nécessaire au policier de porter atteinte à une liberté individuelle afin d'accomplir son devoir, la liberté à laquelle il est porté atteinte, ainsi que la nature et l'étendue de cette atteinte."
[21] Le deuxième arrêt considéré par le tribunal est l'arrêt R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, où la majorité déclare à la page 14, paragraphe 26 puis à la page 15, paragraphe 27 et 28:
" Monsieur Suberu… ne s'exposait pas à une sanction d'ordre juridique en cas de refus d'obtempérer lorsque le policier lui a demandé d'attendre. …
L'agent Roughley l'a immédiatement suivi à l'extérieur et lui a dit: [TRADUCTION] «Attendez une minute! Il faut que je vous parle avant que vous vous en alliez.» Monsieur Suberu n'était pas tenu d'obtempérer à la demande du policier.
…
Même si un policier demande des renseignements ou de l'aide à un passant, celui-ci n'est pas tenu en droit d'obtempérer."
[18] Les agents de la paix ont un rôle essentiel à jouer dans la protection des citoyens; en particulier les policiers qui travaillent la nuit ont une mission importante qui, sous plusieurs aspects, présente certains dangers.
[19] L'arrêt R. c. Mann, 2004 CSC 52 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 59 résume le pouvoir des policiers lorsqu'ils agissent dans leur mission de protection de la paix publique. À la page 9 du jugement, au paragraphe 16, la cour déclare :
"Comme les policiers ont pour mission de protéger la paix publique et d'enquêter sur les crimes, ils doivent être habilités à réagir avec rapidité, efficacité et souplesse pour diverses situations qu'ils rencontrent quotidiennement aux premières lignes du maintien de l'ordre. Malgré l'absence de consensus formel quant à l'existence du pouvoir des policiers de détenir une personne aux fins d'enquête, plusieurs commentateurs signalent que ce pouvoir est utilisé depuis longtemps au Canada en tant que pratique du maintien de l'ordre…"
[20] L'arrêt précise , à la page 12, paragraphe 26, les conditions que doit avoir un policier pour détenir un citoyen aux fins d'enquête:
"… le tribunal s'attache à la nécessité ou à la justification raisonnable de la conduite du policier dans les circonstances particulières de l'affaire."
et à la page 14, au paragraphe 34 :
"… les détentions aux fins d'enquête reposent sur des motifs raisonnables. La détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suivant une considération objective de l'ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu'il existe un lien clair entre l'individu qui sera détenu et l'infraction criminelle récente ou en cours. La question des motifs raisonnables intervient dès le départ dans cette détermination, car ces motifs sont à la base des soupçons raisonnables du policier que l'individu en cause est impliqué dans l'activité criminelle visée par l'enquête. …le caractère globalement non abusif de la décision de détenir une personne doit également être apprécié au regard de l'ensemble des circonstances, principalement la mesure dans laquelle il est nécessaire au policier de porter atteinte à une liberté individuelle afin d'accomplir son devoir, la liberté à laquelle il est porté atteinte, ainsi que la nature et l'étendue de cette atteinte."
[21] Le deuxième arrêt considéré par le tribunal est l'arrêt R. c. Suberu, 2009 CSC 33 (CanLII), [2009] 2 R.C.S. 460, où la majorité déclare à la page 14, paragraphe 26 puis à la page 15, paragraphe 27 et 28:
" Monsieur Suberu… ne s'exposait pas à une sanction d'ordre juridique en cas de refus d'obtempérer lorsque le policier lui a demandé d'attendre. …
L'agent Roughley l'a immédiatement suivi à l'extérieur et lui a dit: [TRADUCTION] «Attendez une minute! Il faut que je vous parle avant que vous vous en alliez.» Monsieur Suberu n'était pas tenu d'obtempérer à la demande du policier.
…
Même si un policier demande des renseignements ou de l'aide à un passant, celui-ci n'est pas tenu en droit d'obtempérer."
lundi 14 juin 2010
Détermination de la peine dans les cas d'homicides involontaire coupable lorsque l'accusé est intoxiqué au moment des gestes reprochés
R. c. Blacksmith, 2006 QCCQ 4919 (CanLII)
[20] D’abord, il est clairement établi dans l’affaire R. c. Quévillon que, même si le degré d’intoxication est considéré par la poursuite pour porter la plainte d’homicide involontaire, il est encore nécessaire de le considérer pour les fins du prononcé de la peine vu l’absolue nécessité d’individualiser le processus des peines.
[21] Vu l’article 718 du Code criminel et l’affaire Gladue, bien que la Cour suprême ait enseigné que, généralement, plus le crime est sérieux et violent, le plus probable la réalité imposera que le terme d’emprisonnement soit similaire entre un membre des Premières Nations et la population issue des communautés européennes, il demeure toujours nécessaire de considérer les circonstances propres aux autochtones.
[22] Dans l’affaire R. v. Costa, l’accusé, âgé de 21 ans, frappe la victime dans un excès de colère alors que la victime fait du vandalisme sur des voitures dans un quartier de Toronto. L’accusé est nouvellement marié et attend un enfant. Il a toujours été employé, est de bonne réputation et sans antécédents. Il est détenu préventivement trois semaines. Il est considéré comme étant non susceptible de faire une récidive. Il a de profonds remords. Le Tribunal le condamne à quatorze mois d’emprisonnement.
[23] Dans l’affaire R. v. Massetoe, l’accusé tue son cousin en déchargeant son arme à feu par accident durant une fête où il y a de la consommation d’alcool. L’accusé est un autochtone issu d’une communauté désavantagée. Il a une faible compréhension. La poursuite recommande une peine de douze à dix-huit mois si l’accusé se qualifie pour une exemption constitutionnelle. L’accusé reçoit une peine de douze mois d’emprisonnement suivie de trois ans de probation, en tenant compte de la nature accidentelle de l’événement et de l’incapacité de l’individu intellectuellement défavorisé à réintégrer sa communauté s’il devait purger quatre ans d’emprisonnement. Le Tribunal souligne l’important problème de consommation. Le Tribunal considère aussi les importants problèmes vécus par la communauté.
[24] Dans l’affaire R. c. Yang, l’accusé reçoit une peine de deux ans moins un jour d’emprisonnement avec sursis, deux cent quarante heures de travaux communautaires et une probation de trois ans pour avoir tué une victime de 80 ans qui s’est interposée dans une altercation entre deux jeunes à la sortie du métro. L’accusé repousse alors violemment la victime sur la poitrine pour s’en dégager. Celle-ci tombe par terre, se heurte la tête et décède plus tard suite à une hémorragie interne. L’accusé est sans antécédents judiciaires, a entrepris une démarche thérapeutique visant l’acquisition de connaissances psychosociales, la gestion des émotions et la résolution de conflits. En considérant le faible degré de faute morale de l’accusé, la Cour est d’avis qu’il n’est pas requis une peine de pénitencier, considère que le crime commis est beaucoup plus près de l’accident et que l’accusé s’est considérablement impliqué dans des thérapies.
[25] Dans l’affaire R. c. Neeposh, l’accusé, âgé de 21 ans et sans antécédents judiciaires, frustré d’avoir perdu à un concours de tir au poignet, après avoir consommé beaucoup d’alcool, va chercher une arme à feu avec laquelle il tire en direction d’une maison. Il se réfugie par la suite en dehors du village. Les policiers font un périmètre de sécurité. La victime franchit le périmètre de sécurité et reçoit une balle tirée par l’accusé. La Cour impose une peine de deux ans moins un jour, en considérant que les conditions de sa libération l’avaient tenu à l’écart de sa communauté, dans un centre résidentiel communautaire, pendant près de vingt-et-un mois, dont sept semaines en prison. La Cour considère le haut taux d’intoxication de l’accusé. L’accusé connaît de sévères problèmes psychologiques causant des dépressions aggravées par une consommation excessive. Ses problèmes dépressifs sont intimement liés aux difficultés qu’il a vécues dans son enfance. Il est noté que l’accusé est sur le chemin de la réhabilitation. Au moment des événements, il savait cependant qu’il y avait des dangers reliés à sa consommation d’alcool vu son état dépressif. Cette affaire est cependant rendue avant que le législateur ne prévoie une preuve minimale de 4 ans.[16]
[26] Dans l’affaire Gladue, Mme Gladue reçoit une peine de trois ans d’emprisonnement ferme après avoir tué son conjoint de fait suite à une rage de jalousie. Elle n’a pas d’antécédents, est la mère d’un enfant et démontre un potentiel élevé de réhabilitation.
[27] Dans l’affaire R. v. Iozzo, l’accusé, sans antécédents judiciaires et âgé de 25 ans, frappe la victime au cou avec une bouteille cassée dans le cadre d’une altercation et la blessure lui est fatale. L’accusé n’a démontré aucune propension à la violence ou l’agressivité dans le passé. Considérant qu’un complice a reçu une peine de dix-huit mois d’emprisonnement dans la communauté, l’accusé reçoit une peine de trois ans vu son plus haut degré de responsabilité. L’accusé a un important niveau de regrets. Il étudie à l’université. Il s’est conformé à de strictes conditions de remise en liberté et mène une vie exemplaire.
[28] Dans l’affaire R. c. Paquette, l’accusé, âgé de 18 ans, et quelques jeunes amis se rendent à un endroit dans le but spécifique de s’en prendre à des personnes homosexuelles qui le fréquentent. L’accusé suit la victime vers les toilettes et la frappe, à quelques reprises, de coups de poing en pleine figure. La victime tombe par terre et en décède. La victime est ensuite volée, puis on lui saute sur l’abdomen. Elle est laissée sur place inconsciente. Le Tribunal considère qu’il ne s’agit pas d’un geste spontané. Il n’y a eu aucune provocation et les individus avaient l’intention d’agresser une personne; l’alcool n’était pas un facteur déterminant. Le Tribunal qualifie les gestes de violence aveugle et gratuite provoqués par une motivation malsaine de haine en relation avec l’orientation sexuelle présumée d’une personne. L’accusé jouit d’une excellente réputation dans sa communauté, poursuit des études post-secondaires et travaille à temps partiel. Il exprime de la honte, n’a pas de problèmes de consommation d’alcool ou de produits psychotropes. L’agent de probation est d’avis qu’il s’agit d’une grave erreur de jeunesse, mais que le pronostic quant à l’évolution sociale est favorable. Suite à une revue importante de la jurisprudence, le Tribunal prononce une peine de quatre ans de pénitencier.
[29] Dans l’affaire R. v. Beauchamp, la Cour impose une peine de quatre ans à un accusé ayant consommé de l’alcool qui poignarde, de cinq à huit reprises, la victime marchant sur la route.
[30] Dans l’affaire Guy Hébert c. R., l’accusé, âgé de 45 ans, vendeur de cocaïne et de marijuana, abat la victime d’un coup de fusil. Il a pointé son arme sur celui-ci, l’a tiré, mais n’avait pas l’intention de le tuer. L’accusé a des antécédents judiciaires. La Cour d’appel ramène la peine initialement prononcée de sept ans à quatre ans d’emprisonnement.
[31] Dans l’affaire R. c. Culzac, l’accusé, âgé de 19 ans et sans antécédents judiciaires, se bagarre avec la victime, lui assène un coup de couteau au thorax et un coup dans le dos au niveau de l’épaule; le tout suite à une bagarre consensuelle. Le Tribunal considère le tempérament agressif et violent de l’accusé et insiste sur la nécessité de sanctionner l’usage d’un couteau à l’intérieur d’une institution d’enseignement. L’accusé est décrit comme un individu violent et agressif, montrant peu d’empathie à l’égard de la victime. Il n’a suivi aucune thérapie. Le Tribunal estime que des risques de récidives sont présents et prononce une peine de cinq ans d’emprisonnement .
[32] Dans l’affaire R. c. Quévillon, la Cour d’appel prononce une peine de cinq ans d’emprisonnement pour un individu qui a frappé la victime avec son camion et l’a traînée sur une distance de vingt-huit kilomètres. Cet événement suit une altercation précédente entre les parties au bar. La Cour considère les facteurs tels que l’ivresse et l’intoxication et souligne qu’est une circonstance aggravante la connaissance de l’accusé de son agressivité possible à la suite de consommation de boissons. Le Tribunal est d’avis que la provocation par la victime et le fait que l’accusé a tenté de s’éloigner de la confrontation doivent être considérés. La Cour est aussi d’avis que les risques de récidives sont pour le moins mineurs.
[33] Dans l’affaire R. c. François Leroux, l’accusé, âgé de 19 ans, ayant consommé des drogues, frappe, sans raison apparente, son meilleur ami avec un tisonnier et un couteau. L’accusé est sans antécédents judiciaires et reçoit une peine de six ans de pénitencier. L’accusé est décrit comme un jeune homme docile, fiable et serviable, bon travaillant, polyvalent, apprécié de la communauté, n’ayant jamais démontré de signes de violence ou d’agressivité. Aucun mobile ne justifie cette violence. Le Tribunal insiste sur le fait que l’accusé aurait dû savoir que sa consommation importante de stupéfiants pouvait le rendre imprévisible dans ses agissements et souligne l’importance de la dissuasion à l’égard d’une violence gratuite extrême.
[34] Dans l’affaire R. c. Moreau, l’accusé, un autochtone de 24 ans ayant des antécédents judiciaires et consommateur de drogues, poignarde à trois reprises la victime dans le cadre d’une altercation. Il reçoit une peine équivalente à 6 ans. Le Tribunal insiste sur le fait que l’accusé ne pouvait ignorer la perte de contrôle des impulsions que provoquait sa consommation et la violence qui pouvait en résulter. Par ailleurs, le Tribunal considère aussi que l’accusé a été lui-même agressé à trois reprises par la victime, lui aussi sous l’effet de consommation de stupéfiants. Le Tribunal considère enfin qu’il y a une possibilité sérieuse de réhabilitation chez l’accusé.
[35] Dans l’affaire R. v. Couterielle, l’accusé, un autochtone, poignarde la victime fournisseuse de drogues à deux reprises pour le mobile d’obtenir des drogues. Il reçoit une peine équivalente à six ans de pénitencier.
[36] Dans l’affaire R. v. Roberts, l’accusé bat à mort la victime dans un établissement hôtelier. L’alcool est un problème récurrent chez l’accusé. Il a des antécédents judiciaires incluant des voies de fait et des agressions sexuelles. L’accusé a été élevé dans un milieu désavantagé. Il a fait l’objet de violence et a un père violent et alcoolique. L’accusé est un autochtone. La Cour impose six ans de prison en mentionnant que, si la poursuite avait requis davantage, elle l’aurait considéré.
[37] Dans l’affaire R. v. Cran, l’accusé de 23 ans, sans antécédents judiciaires, ayant vécu dans un environnement familial remarquable et n’ayant aucun événement dans sa vie qui le prédestine à agir de façon criminelle, reçoit une peine de six ans d’emprisonnement pour avoir attaqué un homme, avec deux autres complices munis de bâtons de baseball, de baguettes de pool et de bâtons de golf, et l’avoir battu à mort avec une violence gratuite et importante, alors que la victime se trouve à proximité d’un stationnement, qu’il y fume et y est nu. Bien qu’il n’y ait pas de preuve de plan préalable, cette situation ne peut néanmoins être considérée comme un événement soudain ou spontané. La Cour tire la conclusion que le groupe de criminels se cherchaient quelqu’un à battre, puisque chacun d’eux avait quitté leur domicile avec une arme. La Cour estime alors qu’un message important de dissuasion doit être envoyé à la communauté.
[38] Dans l’affaire R. v. White Man Left, l’accusé, membre des Premières Nations, est attaqué par la victime sans qu’il n’y ait provocation de sa part. Il la poursuit sur une distance de cent vingt pieds, elle tombe par terre et l’accusé la poignarde à plusieurs reprises. Le Tribunal prononce une peine équivalente à six ans et demi.
[39] Dans l’affaire R. c. Thomishiah Cooper, l’accusé reçoit une peine équivalente à sept ans pour une violence entraînant la mort de sa conjointe après qu’il ait consommé une importante quantité d’alcool avec elle et alors qu’il est jaloux. Elle décède une semaine plus tard suite à ces voies de fait. L’accusé a un important dossier criminel et a brisé des conditions de remise en liberté comprenant des gestes de violence. L’accusé sait qu’il a un problème avec la consommation de boissons, ne fait jamais rien pour le régler bien qu’il le lui soit recommandé à plusieurs reprises par l’agent de probation. Il est d’ailleurs sous probation lorsque l’événement survient.
[40] Dans l’affaire R. c. Joseph Nappartuk, l’accusé, fortement intoxiqué, est furieux que le chauffeur de taxi ne l’ait pas amené à la destination voulue. Pour cela, il le bat à coups de poing et à coups de pieds. Il en résulte son décès. Il reçoit une peine équivalente à sept ans de prison. L’accusé a quelques antécédents de violence et exprime beaucoup de remords.
[41] Dans l’affaire R. c. Tremblay, l’accusé reçoit une peine équivalente à sept ans de prison pour avoir tué le nouvel ami de sa conjointe en lui assénant des coups à la tête. L’accusé est âgé de 30 ans, a des antécédents judiciaires révélant un comportement violent. Il est en probation au moment de la commission du crime, ne reconnaît ni sa jalousie ni son agressivité.
[42] Dans l’affaire R. c. Langlois, l’accusé de 34 ans reçoit une peine équivalente à sept ans de pénitencier pour un homicide involontaire coupable commis par des coups de poing et des coups de pieds causant le décès de la victime. L’accusé a des antécédents de vol qualifié, d’agression armée, de voies de fait et de menaces. Après plusieurs altercations et une invitation de la victime, que l’accusé ne refuse pas, celui-ci lui donne des coups de poing et des coups de pieds au point où celle-ci en meurt en se cognant notamment la tête sur le pavé. L’accusé appelle les ambulanciers et va se réfugier dans un motel. La Cour en vient à la conclusion que l’accusé a utilisé une force excessive au-delà de ce qui était nécessaire pour repousser l’attaque à laquelle il aurait pu, de toute façon, se soustraire. La Cour insiste sur l’importance de sanctionner l’usage démesuré de la violence à la sortie d’un bar et prononce une peine équivalente à sept ans de pénitencier.
[43] Dans l’affaire R. v. Quatsiak Sivuarapik, le soussigné impose une peine de sept ans pour un homicide commis avec un couteau, motivé par la jalousie et par l’important niveau d’intoxication par l’alcool. L’accusé a plusieurs antécédents parmi lesquels des voies de fait. Il est âgé de 28 ans et l’alcool a toujours influencé son comportement violent dans sa vie.
[44] Dans l’affaire R. v. Brian, la Cour d’appel prononce une peine de sept ans et demi à un accusé âgé de 20 ans qui, avec un complice, alors qu’il est intoxiqué, attaquent la victime à coups de pieds. La victime décède des suites de ses blessures. L’accusé exprime des remords et accepte sa responsabilité. Il a passé dix-neuf mois en détention préventive. La Cour considère comme important le jeune âge de l’accusé.
[45] Dans l’affaire R. c. Jacques Silahian, la victime est frappée à la tête avec un bâton de baseball et des coups de pieds sont donnés dans le cadre d’un geste successif à de la rage au volant. La Cour fait état qu’il n’y a aucun doute que les accusés n’avaient pas eu l’intention précise de tuer leur victime. Cependant, la rage avec laquelle ils l’ont battu en le rouant de coups alors qu’elle gisait au sol confère à leurs gestes une gravité indéniable. Les accusés sont condamnés à une peine d’emprisonnement de huit ans de pénitencier. Les deux accusés ont un passé sans taches. Ils sont instruits, sont issus de familles qui leur ont dispensé une solide éducation et ne sont affectés d’aucun problème mental. Le Tribunal signale la violence inouïe dont ont fait preuve les accusés et leur haut potentiel de violence.
[46] Dans l’affaire R. v. Crane, l’accusé, âgé de 37 ans et membre des Premières Nations, reçoit une peine de huit ans pour homicide involontaire lié à un important degré d’intoxication. L’accusé frappe la victime à outrance afin de la réveiller pour boire avec elle et l’abandonne sur place; le tout après lui avoir imposé un traitement dégradant en urinant sur elle. Il est suffisamment conscient des faits pour demander à sa fille d’appeler une ambulance, ce qu’elle ne fait pas. Il a un important dossier judiciaire incluant de la violence.
[47] Dans l’affaire R. c. Martin Veilleux, l’accusé loge chez la victime, y consomme des drogues et, sans aucune raison valable, donne plusieurs coups de couteau à la victime qui en décède. Il a des antécédents judiciaires importants, dont certains de violence. Il est condamné à huit ans de prison. Le Tribunal conclut que l’homicide a été commis de façon tout à fait gratuite alors que le meurtrier était hautement perturbé par la consommation de marijuana contenant une haute teneur en THC.
[48] Dans l’affaire R. c. Charlie Papak, l’accusé reçoit une peine équivalente à huit ans et demi de prison. Les vies de l’accusé et de son épouse sont marquées par des agressions répétées de ce dernier sur celle-ci et par un sévère problème d’alcoolisme. Il tente, par la suite, de s’enlever la vie, mais ne se blesse finalement pas très sérieusement. Le Tribunal estime alors que la dissuasion s’impose. Le Tribunal fait notamment la remarque que, dans les communautés nordiques, leur population est de plus en plus confrontée à la violence liée à l’intoxication extrême.
[49] Dans l’affaire R. c. Levi Novalinga, l’accusé, âgé de 40 ans, est sérieusement intoxiqué par l’alcool, les drogues et les médicaments. Suite à une altercation avec la victime qui l’a initiée en lançant des pierres, l’accusé retourne à l’intérieur de la maison, prend un fusil et en tire deux coups sur la victime à travers la fenêtre. La victime en meurt. Le Tribunal prononce une peine de neuf ans d’emprisonnement, en considérant les antécédents de l’accusé et sa personnalité propre, la collaboration de l’accusé, son plaidoyer de culpabilité à la première occasion, ses remords, mais aussi l’utilisation d’une arme et le fait que l’accusé est un vendeur de stupéfiants.
[50] Dans l’affaire R. c. Charlie Quara et Kaitak Alaku Qumaluk, deux accusés se vengent eu égard à des insultes et des voies de fait portées par la victime sur d’autres personnes et la battent à mort. L’accusé Quara est sans antécédents judiciaires, alors que l’accusé Qumaluk a des antécédents de voies de fait. Les deux accusés sont Inuits. Ils sont intoxiqués par l’alcool lors de ces événements. La Cour ordonne respectivement pour MM. Quara et Qumaluk des peines de huit et six ans, en considérant qu’ils ont déjà purgé trois ans de temps préventif.
[51] Dans l’affaire R. c. Bisson, deux accusés autochtones, respectivement âgés de 24 et 22 ans, se retrouvent intoxiqués dans l’appartement de la victime qui décède suite à une altercation où elle est frappée de coups de poing, de coups de pieds et aussi par des bouteilles, des lampes et des conserves lancées par ces derniers. L’un des accusés reçoit une peine de dix ans de prison pour homicide involontaire. Le Tribunal considère les importantes difficultés et abus qui ont marqué l’enfance des accusés.
[52] Dans l’affaire R. c. Rondeau, la Cour d’appel prononce une peine de douze ans d’emprisonnement à un accusé de 19 ans, sans antécédents judiciaires, qui a poignardé la victime à la gorge avec un couteau dans le cadre d’une discussion préalable avec un complice. L’accusé est considéré comme un individu paranoïde dangereux et le crime commis est plus près de la mens rea requise pour un meurtre.
[53] Dans l’affaire R. c. Snowball, la victime et l’accusé se sont battus au cours d’une fête pour une cigarette. L’accusé part des lieux, puis y revient avec une arme à feu et tire sur la victime qui est à toute proximité. L’accusé est intoxiqué de façon importante par l’alcool. Il se voit imposer une peine de huit ans et six mois, en considération du fait qu’il a purgé une peine préventive équivalente à quarante-deux mois.
[20] D’abord, il est clairement établi dans l’affaire R. c. Quévillon que, même si le degré d’intoxication est considéré par la poursuite pour porter la plainte d’homicide involontaire, il est encore nécessaire de le considérer pour les fins du prononcé de la peine vu l’absolue nécessité d’individualiser le processus des peines.
[21] Vu l’article 718 du Code criminel et l’affaire Gladue, bien que la Cour suprême ait enseigné que, généralement, plus le crime est sérieux et violent, le plus probable la réalité imposera que le terme d’emprisonnement soit similaire entre un membre des Premières Nations et la population issue des communautés européennes, il demeure toujours nécessaire de considérer les circonstances propres aux autochtones.
[22] Dans l’affaire R. v. Costa, l’accusé, âgé de 21 ans, frappe la victime dans un excès de colère alors que la victime fait du vandalisme sur des voitures dans un quartier de Toronto. L’accusé est nouvellement marié et attend un enfant. Il a toujours été employé, est de bonne réputation et sans antécédents. Il est détenu préventivement trois semaines. Il est considéré comme étant non susceptible de faire une récidive. Il a de profonds remords. Le Tribunal le condamne à quatorze mois d’emprisonnement.
[23] Dans l’affaire R. v. Massetoe, l’accusé tue son cousin en déchargeant son arme à feu par accident durant une fête où il y a de la consommation d’alcool. L’accusé est un autochtone issu d’une communauté désavantagée. Il a une faible compréhension. La poursuite recommande une peine de douze à dix-huit mois si l’accusé se qualifie pour une exemption constitutionnelle. L’accusé reçoit une peine de douze mois d’emprisonnement suivie de trois ans de probation, en tenant compte de la nature accidentelle de l’événement et de l’incapacité de l’individu intellectuellement défavorisé à réintégrer sa communauté s’il devait purger quatre ans d’emprisonnement. Le Tribunal souligne l’important problème de consommation. Le Tribunal considère aussi les importants problèmes vécus par la communauté.
[24] Dans l’affaire R. c. Yang, l’accusé reçoit une peine de deux ans moins un jour d’emprisonnement avec sursis, deux cent quarante heures de travaux communautaires et une probation de trois ans pour avoir tué une victime de 80 ans qui s’est interposée dans une altercation entre deux jeunes à la sortie du métro. L’accusé repousse alors violemment la victime sur la poitrine pour s’en dégager. Celle-ci tombe par terre, se heurte la tête et décède plus tard suite à une hémorragie interne. L’accusé est sans antécédents judiciaires, a entrepris une démarche thérapeutique visant l’acquisition de connaissances psychosociales, la gestion des émotions et la résolution de conflits. En considérant le faible degré de faute morale de l’accusé, la Cour est d’avis qu’il n’est pas requis une peine de pénitencier, considère que le crime commis est beaucoup plus près de l’accident et que l’accusé s’est considérablement impliqué dans des thérapies.
[25] Dans l’affaire R. c. Neeposh, l’accusé, âgé de 21 ans et sans antécédents judiciaires, frustré d’avoir perdu à un concours de tir au poignet, après avoir consommé beaucoup d’alcool, va chercher une arme à feu avec laquelle il tire en direction d’une maison. Il se réfugie par la suite en dehors du village. Les policiers font un périmètre de sécurité. La victime franchit le périmètre de sécurité et reçoit une balle tirée par l’accusé. La Cour impose une peine de deux ans moins un jour, en considérant que les conditions de sa libération l’avaient tenu à l’écart de sa communauté, dans un centre résidentiel communautaire, pendant près de vingt-et-un mois, dont sept semaines en prison. La Cour considère le haut taux d’intoxication de l’accusé. L’accusé connaît de sévères problèmes psychologiques causant des dépressions aggravées par une consommation excessive. Ses problèmes dépressifs sont intimement liés aux difficultés qu’il a vécues dans son enfance. Il est noté que l’accusé est sur le chemin de la réhabilitation. Au moment des événements, il savait cependant qu’il y avait des dangers reliés à sa consommation d’alcool vu son état dépressif. Cette affaire est cependant rendue avant que le législateur ne prévoie une preuve minimale de 4 ans.[16]
[26] Dans l’affaire Gladue, Mme Gladue reçoit une peine de trois ans d’emprisonnement ferme après avoir tué son conjoint de fait suite à une rage de jalousie. Elle n’a pas d’antécédents, est la mère d’un enfant et démontre un potentiel élevé de réhabilitation.
[27] Dans l’affaire R. v. Iozzo, l’accusé, sans antécédents judiciaires et âgé de 25 ans, frappe la victime au cou avec une bouteille cassée dans le cadre d’une altercation et la blessure lui est fatale. L’accusé n’a démontré aucune propension à la violence ou l’agressivité dans le passé. Considérant qu’un complice a reçu une peine de dix-huit mois d’emprisonnement dans la communauté, l’accusé reçoit une peine de trois ans vu son plus haut degré de responsabilité. L’accusé a un important niveau de regrets. Il étudie à l’université. Il s’est conformé à de strictes conditions de remise en liberté et mène une vie exemplaire.
[28] Dans l’affaire R. c. Paquette, l’accusé, âgé de 18 ans, et quelques jeunes amis se rendent à un endroit dans le but spécifique de s’en prendre à des personnes homosexuelles qui le fréquentent. L’accusé suit la victime vers les toilettes et la frappe, à quelques reprises, de coups de poing en pleine figure. La victime tombe par terre et en décède. La victime est ensuite volée, puis on lui saute sur l’abdomen. Elle est laissée sur place inconsciente. Le Tribunal considère qu’il ne s’agit pas d’un geste spontané. Il n’y a eu aucune provocation et les individus avaient l’intention d’agresser une personne; l’alcool n’était pas un facteur déterminant. Le Tribunal qualifie les gestes de violence aveugle et gratuite provoqués par une motivation malsaine de haine en relation avec l’orientation sexuelle présumée d’une personne. L’accusé jouit d’une excellente réputation dans sa communauté, poursuit des études post-secondaires et travaille à temps partiel. Il exprime de la honte, n’a pas de problèmes de consommation d’alcool ou de produits psychotropes. L’agent de probation est d’avis qu’il s’agit d’une grave erreur de jeunesse, mais que le pronostic quant à l’évolution sociale est favorable. Suite à une revue importante de la jurisprudence, le Tribunal prononce une peine de quatre ans de pénitencier.
[29] Dans l’affaire R. v. Beauchamp, la Cour impose une peine de quatre ans à un accusé ayant consommé de l’alcool qui poignarde, de cinq à huit reprises, la victime marchant sur la route.
[30] Dans l’affaire Guy Hébert c. R., l’accusé, âgé de 45 ans, vendeur de cocaïne et de marijuana, abat la victime d’un coup de fusil. Il a pointé son arme sur celui-ci, l’a tiré, mais n’avait pas l’intention de le tuer. L’accusé a des antécédents judiciaires. La Cour d’appel ramène la peine initialement prononcée de sept ans à quatre ans d’emprisonnement.
[31] Dans l’affaire R. c. Culzac, l’accusé, âgé de 19 ans et sans antécédents judiciaires, se bagarre avec la victime, lui assène un coup de couteau au thorax et un coup dans le dos au niveau de l’épaule; le tout suite à une bagarre consensuelle. Le Tribunal considère le tempérament agressif et violent de l’accusé et insiste sur la nécessité de sanctionner l’usage d’un couteau à l’intérieur d’une institution d’enseignement. L’accusé est décrit comme un individu violent et agressif, montrant peu d’empathie à l’égard de la victime. Il n’a suivi aucune thérapie. Le Tribunal estime que des risques de récidives sont présents et prononce une peine de cinq ans d’emprisonnement .
[32] Dans l’affaire R. c. Quévillon, la Cour d’appel prononce une peine de cinq ans d’emprisonnement pour un individu qui a frappé la victime avec son camion et l’a traînée sur une distance de vingt-huit kilomètres. Cet événement suit une altercation précédente entre les parties au bar. La Cour considère les facteurs tels que l’ivresse et l’intoxication et souligne qu’est une circonstance aggravante la connaissance de l’accusé de son agressivité possible à la suite de consommation de boissons. Le Tribunal est d’avis que la provocation par la victime et le fait que l’accusé a tenté de s’éloigner de la confrontation doivent être considérés. La Cour est aussi d’avis que les risques de récidives sont pour le moins mineurs.
[33] Dans l’affaire R. c. François Leroux, l’accusé, âgé de 19 ans, ayant consommé des drogues, frappe, sans raison apparente, son meilleur ami avec un tisonnier et un couteau. L’accusé est sans antécédents judiciaires et reçoit une peine de six ans de pénitencier. L’accusé est décrit comme un jeune homme docile, fiable et serviable, bon travaillant, polyvalent, apprécié de la communauté, n’ayant jamais démontré de signes de violence ou d’agressivité. Aucun mobile ne justifie cette violence. Le Tribunal insiste sur le fait que l’accusé aurait dû savoir que sa consommation importante de stupéfiants pouvait le rendre imprévisible dans ses agissements et souligne l’importance de la dissuasion à l’égard d’une violence gratuite extrême.
[34] Dans l’affaire R. c. Moreau, l’accusé, un autochtone de 24 ans ayant des antécédents judiciaires et consommateur de drogues, poignarde à trois reprises la victime dans le cadre d’une altercation. Il reçoit une peine équivalente à 6 ans. Le Tribunal insiste sur le fait que l’accusé ne pouvait ignorer la perte de contrôle des impulsions que provoquait sa consommation et la violence qui pouvait en résulter. Par ailleurs, le Tribunal considère aussi que l’accusé a été lui-même agressé à trois reprises par la victime, lui aussi sous l’effet de consommation de stupéfiants. Le Tribunal considère enfin qu’il y a une possibilité sérieuse de réhabilitation chez l’accusé.
[35] Dans l’affaire R. v. Couterielle, l’accusé, un autochtone, poignarde la victime fournisseuse de drogues à deux reprises pour le mobile d’obtenir des drogues. Il reçoit une peine équivalente à six ans de pénitencier.
[36] Dans l’affaire R. v. Roberts, l’accusé bat à mort la victime dans un établissement hôtelier. L’alcool est un problème récurrent chez l’accusé. Il a des antécédents judiciaires incluant des voies de fait et des agressions sexuelles. L’accusé a été élevé dans un milieu désavantagé. Il a fait l’objet de violence et a un père violent et alcoolique. L’accusé est un autochtone. La Cour impose six ans de prison en mentionnant que, si la poursuite avait requis davantage, elle l’aurait considéré.
[37] Dans l’affaire R. v. Cran, l’accusé de 23 ans, sans antécédents judiciaires, ayant vécu dans un environnement familial remarquable et n’ayant aucun événement dans sa vie qui le prédestine à agir de façon criminelle, reçoit une peine de six ans d’emprisonnement pour avoir attaqué un homme, avec deux autres complices munis de bâtons de baseball, de baguettes de pool et de bâtons de golf, et l’avoir battu à mort avec une violence gratuite et importante, alors que la victime se trouve à proximité d’un stationnement, qu’il y fume et y est nu. Bien qu’il n’y ait pas de preuve de plan préalable, cette situation ne peut néanmoins être considérée comme un événement soudain ou spontané. La Cour tire la conclusion que le groupe de criminels se cherchaient quelqu’un à battre, puisque chacun d’eux avait quitté leur domicile avec une arme. La Cour estime alors qu’un message important de dissuasion doit être envoyé à la communauté.
[38] Dans l’affaire R. v. White Man Left, l’accusé, membre des Premières Nations, est attaqué par la victime sans qu’il n’y ait provocation de sa part. Il la poursuit sur une distance de cent vingt pieds, elle tombe par terre et l’accusé la poignarde à plusieurs reprises. Le Tribunal prononce une peine équivalente à six ans et demi.
[39] Dans l’affaire R. c. Thomishiah Cooper, l’accusé reçoit une peine équivalente à sept ans pour une violence entraînant la mort de sa conjointe après qu’il ait consommé une importante quantité d’alcool avec elle et alors qu’il est jaloux. Elle décède une semaine plus tard suite à ces voies de fait. L’accusé a un important dossier criminel et a brisé des conditions de remise en liberté comprenant des gestes de violence. L’accusé sait qu’il a un problème avec la consommation de boissons, ne fait jamais rien pour le régler bien qu’il le lui soit recommandé à plusieurs reprises par l’agent de probation. Il est d’ailleurs sous probation lorsque l’événement survient.
[40] Dans l’affaire R. c. Joseph Nappartuk, l’accusé, fortement intoxiqué, est furieux que le chauffeur de taxi ne l’ait pas amené à la destination voulue. Pour cela, il le bat à coups de poing et à coups de pieds. Il en résulte son décès. Il reçoit une peine équivalente à sept ans de prison. L’accusé a quelques antécédents de violence et exprime beaucoup de remords.
[41] Dans l’affaire R. c. Tremblay, l’accusé reçoit une peine équivalente à sept ans de prison pour avoir tué le nouvel ami de sa conjointe en lui assénant des coups à la tête. L’accusé est âgé de 30 ans, a des antécédents judiciaires révélant un comportement violent. Il est en probation au moment de la commission du crime, ne reconnaît ni sa jalousie ni son agressivité.
[42] Dans l’affaire R. c. Langlois, l’accusé de 34 ans reçoit une peine équivalente à sept ans de pénitencier pour un homicide involontaire coupable commis par des coups de poing et des coups de pieds causant le décès de la victime. L’accusé a des antécédents de vol qualifié, d’agression armée, de voies de fait et de menaces. Après plusieurs altercations et une invitation de la victime, que l’accusé ne refuse pas, celui-ci lui donne des coups de poing et des coups de pieds au point où celle-ci en meurt en se cognant notamment la tête sur le pavé. L’accusé appelle les ambulanciers et va se réfugier dans un motel. La Cour en vient à la conclusion que l’accusé a utilisé une force excessive au-delà de ce qui était nécessaire pour repousser l’attaque à laquelle il aurait pu, de toute façon, se soustraire. La Cour insiste sur l’importance de sanctionner l’usage démesuré de la violence à la sortie d’un bar et prononce une peine équivalente à sept ans de pénitencier.
[43] Dans l’affaire R. v. Quatsiak Sivuarapik, le soussigné impose une peine de sept ans pour un homicide commis avec un couteau, motivé par la jalousie et par l’important niveau d’intoxication par l’alcool. L’accusé a plusieurs antécédents parmi lesquels des voies de fait. Il est âgé de 28 ans et l’alcool a toujours influencé son comportement violent dans sa vie.
[44] Dans l’affaire R. v. Brian, la Cour d’appel prononce une peine de sept ans et demi à un accusé âgé de 20 ans qui, avec un complice, alors qu’il est intoxiqué, attaquent la victime à coups de pieds. La victime décède des suites de ses blessures. L’accusé exprime des remords et accepte sa responsabilité. Il a passé dix-neuf mois en détention préventive. La Cour considère comme important le jeune âge de l’accusé.
[45] Dans l’affaire R. c. Jacques Silahian, la victime est frappée à la tête avec un bâton de baseball et des coups de pieds sont donnés dans le cadre d’un geste successif à de la rage au volant. La Cour fait état qu’il n’y a aucun doute que les accusés n’avaient pas eu l’intention précise de tuer leur victime. Cependant, la rage avec laquelle ils l’ont battu en le rouant de coups alors qu’elle gisait au sol confère à leurs gestes une gravité indéniable. Les accusés sont condamnés à une peine d’emprisonnement de huit ans de pénitencier. Les deux accusés ont un passé sans taches. Ils sont instruits, sont issus de familles qui leur ont dispensé une solide éducation et ne sont affectés d’aucun problème mental. Le Tribunal signale la violence inouïe dont ont fait preuve les accusés et leur haut potentiel de violence.
[46] Dans l’affaire R. v. Crane, l’accusé, âgé de 37 ans et membre des Premières Nations, reçoit une peine de huit ans pour homicide involontaire lié à un important degré d’intoxication. L’accusé frappe la victime à outrance afin de la réveiller pour boire avec elle et l’abandonne sur place; le tout après lui avoir imposé un traitement dégradant en urinant sur elle. Il est suffisamment conscient des faits pour demander à sa fille d’appeler une ambulance, ce qu’elle ne fait pas. Il a un important dossier judiciaire incluant de la violence.
[47] Dans l’affaire R. c. Martin Veilleux, l’accusé loge chez la victime, y consomme des drogues et, sans aucune raison valable, donne plusieurs coups de couteau à la victime qui en décède. Il a des antécédents judiciaires importants, dont certains de violence. Il est condamné à huit ans de prison. Le Tribunal conclut que l’homicide a été commis de façon tout à fait gratuite alors que le meurtrier était hautement perturbé par la consommation de marijuana contenant une haute teneur en THC.
[48] Dans l’affaire R. c. Charlie Papak, l’accusé reçoit une peine équivalente à huit ans et demi de prison. Les vies de l’accusé et de son épouse sont marquées par des agressions répétées de ce dernier sur celle-ci et par un sévère problème d’alcoolisme. Il tente, par la suite, de s’enlever la vie, mais ne se blesse finalement pas très sérieusement. Le Tribunal estime alors que la dissuasion s’impose. Le Tribunal fait notamment la remarque que, dans les communautés nordiques, leur population est de plus en plus confrontée à la violence liée à l’intoxication extrême.
[49] Dans l’affaire R. c. Levi Novalinga, l’accusé, âgé de 40 ans, est sérieusement intoxiqué par l’alcool, les drogues et les médicaments. Suite à une altercation avec la victime qui l’a initiée en lançant des pierres, l’accusé retourne à l’intérieur de la maison, prend un fusil et en tire deux coups sur la victime à travers la fenêtre. La victime en meurt. Le Tribunal prononce une peine de neuf ans d’emprisonnement, en considérant les antécédents de l’accusé et sa personnalité propre, la collaboration de l’accusé, son plaidoyer de culpabilité à la première occasion, ses remords, mais aussi l’utilisation d’une arme et le fait que l’accusé est un vendeur de stupéfiants.
[50] Dans l’affaire R. c. Charlie Quara et Kaitak Alaku Qumaluk, deux accusés se vengent eu égard à des insultes et des voies de fait portées par la victime sur d’autres personnes et la battent à mort. L’accusé Quara est sans antécédents judiciaires, alors que l’accusé Qumaluk a des antécédents de voies de fait. Les deux accusés sont Inuits. Ils sont intoxiqués par l’alcool lors de ces événements. La Cour ordonne respectivement pour MM. Quara et Qumaluk des peines de huit et six ans, en considérant qu’ils ont déjà purgé trois ans de temps préventif.
[51] Dans l’affaire R. c. Bisson, deux accusés autochtones, respectivement âgés de 24 et 22 ans, se retrouvent intoxiqués dans l’appartement de la victime qui décède suite à une altercation où elle est frappée de coups de poing, de coups de pieds et aussi par des bouteilles, des lampes et des conserves lancées par ces derniers. L’un des accusés reçoit une peine de dix ans de prison pour homicide involontaire. Le Tribunal considère les importantes difficultés et abus qui ont marqué l’enfance des accusés.
[52] Dans l’affaire R. c. Rondeau, la Cour d’appel prononce une peine de douze ans d’emprisonnement à un accusé de 19 ans, sans antécédents judiciaires, qui a poignardé la victime à la gorge avec un couteau dans le cadre d’une discussion préalable avec un complice. L’accusé est considéré comme un individu paranoïde dangereux et le crime commis est plus près de la mens rea requise pour un meurtre.
[53] Dans l’affaire R. c. Snowball, la victime et l’accusé se sont battus au cours d’une fête pour une cigarette. L’accusé part des lieux, puis y revient avec une arme à feu et tire sur la victime qui est à toute proximité. L’accusé est intoxiqué de façon importante par l’alcool. Il se voit imposer une peine de huit ans et six mois, en considération du fait qu’il a purgé une peine préventive équivalente à quarante-deux mois.
En matière de voies de fait grave envers les enfants, les tribunaux vont prioriser les objectifs d'exemplarité et de dissuasion générale et habituellement et ce crime inexcusable attire des peines d'emprisonnement significatives
R. c. S.T., 2009 QCCQ 12941 (CanLII)
[43] Dans R. c. Colak, le juge Parent, après avoir déclaré l'accusé coupable de voies de fait graves à l'égard de sa fille âgée de moins de deux mois, l'a condamné à une peine de trente mois d'incarcération.
[44] L'enfant avait été secouée dans le but de l'arrêter de pleurer, causant d'importantes hémorragies au cerveau ayant des conséquences sérieuses sur le développement de l'enfant.
[45] Après une revue de la jurisprudence, le juge Parent a estimé cette peine juste en tenant compte de la personnalité de l'accusé (intelligence limitée) et du geste impulsif et non prémédité posé par l'accusé.
[46] Dans R. c. M.B., le juge Bigué, après avoir examiné plusieurs décisions, a imposé une peine de trois ans de pénitencier à un accusé qui avait secoué violemment sa fille âgée de sept semaines parce qu'elle pleurait, lui causant d'importantes séquelles permanentes au cerveau et entraînant des problèmes de vision, de développement et d'apprentissage.
[47] Dans cette affaire, le juge d'instance fait une revue minutieuse de plusieurs décisions. Il conclut que l'échelle des peines imposées varie de peine maximale d'emprisonnement avec sursis, soit deux ans moins un jour, à huit ans de pénitencier.
[48] De son côté, l'avocate de l'accusé soumet la décision de R. c. J.C.
[49] Dans cette affaire, madame la juge Lemoyne impose à l'accusé qui a reconnu sa culpabilité à des voies de fait graves à l'égard de son bébé âgé de six semaines une peine de deux ans moins un jour à être purgée dans la collectivité. L'enfant, qui a subi des fractures aux côtes, présente un léger retard moteur suite aux événements, retard qui s'améliore suite à l'intervention d'une équipe multidisciplinaire.
[50] Après une revue des peines imposées pour des crimes semblables, la juge d'instance conclut à la peine maximale dans la communauté vu les efforts et le potentiel de réhabilitation de l'accusé et l'absence de preuve de séquelles futures chez l'enfant.
[52] Parmi d'autres décisions consultées, le tribunal retient celles de R. c. Alcius, de R. c. J.B. et de R. c. E.P.
[53] Dans Alcius, notre Cour d'appel confirme une peine exceptionnellement clémente de deux ans moins un jour d'incarcération. L'accusé avait été reconnu coupable d'homicide involontaire de l'enfant de sa conjointe âgé de trois ans, enfant qu'il avait secoué. À cause des longs délais avant le procès, la Cour d'appel décide de ne pas intervenir bien que la peine imposée, acceptable à ses yeux, « se situe en bas de l'échelle des peines imposées dans des situations semblables ».
[54] Dans J.B., un père âgé de 19 ans a été condamné à une peine de 54 mois pour avoir violenté son enfant à 3 reprises, lui occasionnant des séquelles permanentes sérieuses. L'accusé, qui avait des troubles psychologiques importants, n'avait aucun antécédent de violence et il ne consommait ni drogue ni alcool.
[55] Dans R. c. E.P., notre Cour d'appel confirme l'imposition d'une peine de deux ans de pénitencier assortie d'une période de probation d'une durée de trois ans imposée à l'accusé qui s'était reconnu coupable de voies de fait graves à l'égard d'un enfant de trois ans et demi. L'accusé était atteint d'une déficience intellectuelle sérieuse.
[56] Le tribunal constate à l'examen des décisions rendues dans des cas plus ou moins semblables que les peines imposées varient considérablement.
[57] Cependant, toutes ces décisions rappellent ce qu'exprimait notre Cour d'appel dans E.P. :
« […] en matière de crime de violence envers des enfants les tribunaux vont prioriser les objectifs d'exemplarité et de dissuasion générale et habituellement, ces crimes inexcusables attirent des peines d'emprisonnement significatives.
Par ailleurs, l'importance de cette peine variera en fonction des circonstances de commission du crime et des particularités du délinquant […] »
[43] Dans R. c. Colak, le juge Parent, après avoir déclaré l'accusé coupable de voies de fait graves à l'égard de sa fille âgée de moins de deux mois, l'a condamné à une peine de trente mois d'incarcération.
[44] L'enfant avait été secouée dans le but de l'arrêter de pleurer, causant d'importantes hémorragies au cerveau ayant des conséquences sérieuses sur le développement de l'enfant.
[45] Après une revue de la jurisprudence, le juge Parent a estimé cette peine juste en tenant compte de la personnalité de l'accusé (intelligence limitée) et du geste impulsif et non prémédité posé par l'accusé.
[46] Dans R. c. M.B., le juge Bigué, après avoir examiné plusieurs décisions, a imposé une peine de trois ans de pénitencier à un accusé qui avait secoué violemment sa fille âgée de sept semaines parce qu'elle pleurait, lui causant d'importantes séquelles permanentes au cerveau et entraînant des problèmes de vision, de développement et d'apprentissage.
[47] Dans cette affaire, le juge d'instance fait une revue minutieuse de plusieurs décisions. Il conclut que l'échelle des peines imposées varie de peine maximale d'emprisonnement avec sursis, soit deux ans moins un jour, à huit ans de pénitencier.
[48] De son côté, l'avocate de l'accusé soumet la décision de R. c. J.C.
[49] Dans cette affaire, madame la juge Lemoyne impose à l'accusé qui a reconnu sa culpabilité à des voies de fait graves à l'égard de son bébé âgé de six semaines une peine de deux ans moins un jour à être purgée dans la collectivité. L'enfant, qui a subi des fractures aux côtes, présente un léger retard moteur suite aux événements, retard qui s'améliore suite à l'intervention d'une équipe multidisciplinaire.
[50] Après une revue des peines imposées pour des crimes semblables, la juge d'instance conclut à la peine maximale dans la communauté vu les efforts et le potentiel de réhabilitation de l'accusé et l'absence de preuve de séquelles futures chez l'enfant.
[52] Parmi d'autres décisions consultées, le tribunal retient celles de R. c. Alcius, de R. c. J.B. et de R. c. E.P.
[53] Dans Alcius, notre Cour d'appel confirme une peine exceptionnellement clémente de deux ans moins un jour d'incarcération. L'accusé avait été reconnu coupable d'homicide involontaire de l'enfant de sa conjointe âgé de trois ans, enfant qu'il avait secoué. À cause des longs délais avant le procès, la Cour d'appel décide de ne pas intervenir bien que la peine imposée, acceptable à ses yeux, « se situe en bas de l'échelle des peines imposées dans des situations semblables ».
[54] Dans J.B., un père âgé de 19 ans a été condamné à une peine de 54 mois pour avoir violenté son enfant à 3 reprises, lui occasionnant des séquelles permanentes sérieuses. L'accusé, qui avait des troubles psychologiques importants, n'avait aucun antécédent de violence et il ne consommait ni drogue ni alcool.
[55] Dans R. c. E.P., notre Cour d'appel confirme l'imposition d'une peine de deux ans de pénitencier assortie d'une période de probation d'une durée de trois ans imposée à l'accusé qui s'était reconnu coupable de voies de fait graves à l'égard d'un enfant de trois ans et demi. L'accusé était atteint d'une déficience intellectuelle sérieuse.
[56] Le tribunal constate à l'examen des décisions rendues dans des cas plus ou moins semblables que les peines imposées varient considérablement.
[57] Cependant, toutes ces décisions rappellent ce qu'exprimait notre Cour d'appel dans E.P. :
« […] en matière de crime de violence envers des enfants les tribunaux vont prioriser les objectifs d'exemplarité et de dissuasion générale et habituellement, ces crimes inexcusables attirent des peines d'emprisonnement significatives.
Par ailleurs, l'importance de cette peine variera en fonction des circonstances de commission du crime et des particularités du délinquant […] »
dimanche 13 juin 2010
Détermination de la peine pour des infractions de nature sexuelle sur des enfants
G.L. c. R., 2008 QCCA 2401 (CanLII)
[20] Enfin, la peine, en elle-même, n'est ni déraisonnable ni contre-indiquée. Le requérant fait état de divers jugements imposant, pour des cas similaires, des peines moindres que celle de l'espèce. Cela, en soi, n'est pas déterminant, comme l'indique d'ailleurs la Cour suprême dans l'affaire L.M., précitée, l'imposition d'une peine demeurant un exercice fortement individualisé. Par ailleurs, en parallèle avec les jugements cités par le requérant, notre Cour, dans des arrêts plus récents encore, a imposé pour des infractions de même nature ou analogues des peines comparables et parfois plus sévères que celle de l'espèce :
- G.L. c. R., où la Cour confirme la peine globale de 10 ans d'emprisonnement imposée à un homme qui a agressé sexuellement trois adolescentes. Pour l'une de ces agressions, qui résulte d'abus sexuels commis à l'endroit de l'une des adolescentes sur une période de cinq ans, la Cour confirme une peine de six ans d'emprisonnement. Elle confirme aussi la peine de quatre ans d'emprisonnement pour des abus sexuels commis sur la personne d'une autre victime alors que celle-ci était âgée de 13 à 17 ans, peine consécutive à la précédente. Un troisième chef d'agression sexuelle vaut à l'appelant une peine concurrente d'une année d'emprisonnement. La Cour fait dans cet arrêt une revue de la jurisprudence en matière d'agressions sexuelles sur des personnes mineures.
- A.C. c. R. : la Cour confirme la peine de 33 mois d'emprisonnement (c'est-à-dire 36 mois moins 3 mois de détention provisoire) imposée au père qui a agressé sa fille pendant une période d'environ 8 mois (touchers aux parties génitales, avec les mains ou la bouche). Constituait un facteur aggravant le fait que l'appelant avait laissé un voisin agresser l'enfant.
- R. c. S.H.: par l'effet de la consécutivité des peines, la Cour d'appel impose une peine globale de neuf ans d'emprisonnement au père déclaré coupable de diverses infractions de nature sexuelle sur ses trois enfants.
- L.B. c. R. : une peine globale de 10 ans d'incarcération est maintenue pour agressions sexuelles (6 ans) commises sur la personne des trois enfants de l'appelant, pendant plusieurs années, et inceste avec l'une d'entre elles (10 ans).
- R. c. R.D. : la Cour impose une peine de 34 mois d'emprisonnement ferme (tenant compte de 2 mois de sursis déjà purgés, pour une peine globale de 36 mois) à celui qui, pendant plusieurs années, a agressé sexuellement la fille de sa conjointe de fait (attouchements aux parties génitales, pénétrations digitales, masturbation, cunnilingus, tentative de fellation, une relation sexuelle complète).
- R. c. L.M., où la Cour suprême a rétabli une peine de 10 ans (c'est-à-dire la peine maximale) pour agressions sexuelles sur la personne d'une très jeune enfant
[20] Enfin, la peine, en elle-même, n'est ni déraisonnable ni contre-indiquée. Le requérant fait état de divers jugements imposant, pour des cas similaires, des peines moindres que celle de l'espèce. Cela, en soi, n'est pas déterminant, comme l'indique d'ailleurs la Cour suprême dans l'affaire L.M., précitée, l'imposition d'une peine demeurant un exercice fortement individualisé. Par ailleurs, en parallèle avec les jugements cités par le requérant, notre Cour, dans des arrêts plus récents encore, a imposé pour des infractions de même nature ou analogues des peines comparables et parfois plus sévères que celle de l'espèce :
- G.L. c. R., où la Cour confirme la peine globale de 10 ans d'emprisonnement imposée à un homme qui a agressé sexuellement trois adolescentes. Pour l'une de ces agressions, qui résulte d'abus sexuels commis à l'endroit de l'une des adolescentes sur une période de cinq ans, la Cour confirme une peine de six ans d'emprisonnement. Elle confirme aussi la peine de quatre ans d'emprisonnement pour des abus sexuels commis sur la personne d'une autre victime alors que celle-ci était âgée de 13 à 17 ans, peine consécutive à la précédente. Un troisième chef d'agression sexuelle vaut à l'appelant une peine concurrente d'une année d'emprisonnement. La Cour fait dans cet arrêt une revue de la jurisprudence en matière d'agressions sexuelles sur des personnes mineures.
- A.C. c. R. : la Cour confirme la peine de 33 mois d'emprisonnement (c'est-à-dire 36 mois moins 3 mois de détention provisoire) imposée au père qui a agressé sa fille pendant une période d'environ 8 mois (touchers aux parties génitales, avec les mains ou la bouche). Constituait un facteur aggravant le fait que l'appelant avait laissé un voisin agresser l'enfant.
- R. c. S.H.: par l'effet de la consécutivité des peines, la Cour d'appel impose une peine globale de neuf ans d'emprisonnement au père déclaré coupable de diverses infractions de nature sexuelle sur ses trois enfants.
- L.B. c. R. : une peine globale de 10 ans d'incarcération est maintenue pour agressions sexuelles (6 ans) commises sur la personne des trois enfants de l'appelant, pendant plusieurs années, et inceste avec l'une d'entre elles (10 ans).
- R. c. R.D. : la Cour impose une peine de 34 mois d'emprisonnement ferme (tenant compte de 2 mois de sursis déjà purgés, pour une peine globale de 36 mois) à celui qui, pendant plusieurs années, a agressé sexuellement la fille de sa conjointe de fait (attouchements aux parties génitales, pénétrations digitales, masturbation, cunnilingus, tentative de fellation, une relation sexuelle complète).
- R. c. L.M., où la Cour suprême a rétabli une peine de 10 ans (c'est-à-dire la peine maximale) pour agressions sexuelles sur la personne d'une très jeune enfant
Fourchette des peines pour les crimes de distribution et de possession de pornographie infantile, de contact sexuel sur une personne âgée de moins de 14 ans, de production de matériel pornographique et pour le crime de leurre
St-Pierre c. R., 2008 QCCA 896 (CanLII)
[9] À cet égard, une revue de la jurisprudence canadienne montre que :
- pour le crime de contact sexuel sur une personne âgée de moins de 14 ans (article 151 C.cr.), les peines varient entre 9 mois et 3 ans d'emprisonnement.
Ici, le juge de première instance a prononcé une peine d'emprisonnement de 3 ans pour l'infraction visant un complot en vue de commettre l'infraction.
- pour les crimes de distribution et de possession de pornographie infantile (article 163.1(3) C.cr.), les peines imposées varient entre 6 mois et 2 ans.
Le juge de première instance a plutôt condamné l'appelant à un emprisonnement de 3 ans pour ce chef d'accusation.
- pour le crime de production de matériel pornographique (article 163.1(2) C.cr.), les peines imposées vont de 10 mois à 2 ans.
Or, ici, l'appelant a été condamné à une peine d'emprisonnement de 2 ans pour un complot en vue de commettre l'infraction.
- pour le leurre (article 172.1 C.cr.), les peines imposées pour ce crime vont de 6 mois à 1 an d'emprisonnement.
Le juge a imposé à l'appelant une peine de 3 ans.
[9] À cet égard, une revue de la jurisprudence canadienne montre que :
- pour le crime de contact sexuel sur une personne âgée de moins de 14 ans (article 151 C.cr.), les peines varient entre 9 mois et 3 ans d'emprisonnement.
Ici, le juge de première instance a prononcé une peine d'emprisonnement de 3 ans pour l'infraction visant un complot en vue de commettre l'infraction.
- pour les crimes de distribution et de possession de pornographie infantile (article 163.1(3) C.cr.), les peines imposées varient entre 6 mois et 2 ans.
Le juge de première instance a plutôt condamné l'appelant à un emprisonnement de 3 ans pour ce chef d'accusation.
- pour le crime de production de matériel pornographique (article 163.1(2) C.cr.), les peines imposées vont de 10 mois à 2 ans.
Or, ici, l'appelant a été condamné à une peine d'emprisonnement de 2 ans pour un complot en vue de commettre l'infraction.
- pour le leurre (article 172.1 C.cr.), les peines imposées pour ce crime vont de 6 mois à 1 an d'emprisonnement.
Le juge a imposé à l'appelant une peine de 3 ans.
jeudi 10 juin 2010
Exemples de préjudice autre que celui découlant de l’atteinte à un procès juste et équitable pouvant entraîner la violation du droit garanti par l’al. 11a) de la Charte
R. c. Delaronde, [1997] 1 R.C.S. 213
Avec égards, je ne pense pas que la violation de l’al. 11a) de la Charte soit exclusivement reliée à l’atteinte à un procès juste et équitable. Un inculpé a le droit d’être informé rapidement d’une dénonciation portée contre lui afin de pouvoir planifier, entre autres, des décisions importantes affectant sa vie professionnelle ou familiale. Si ces décisions ont entraîné un préjudice économique résultant directement du temps excessif mis à l’informer de l’infraction précise qu’on lui reproche, la personne devrait avoir la possibilité d’invoquer la violation du droit protégé par l’al. 11a) de la Charte et de recourir au par. 24(1) pour demander réparation devant le tribunal approprié.
Je donnerai deux exemples pour expliciter comment un préjudice autre que celui découlant de l’atteinte à un procès juste et équitable peut entraîner la violation du droit garanti par l’al. 11a) de la Charte. Ainsi, une personne qui, n’étant pas au courant qu’une dénonciation pèse contre elle depuis un certain temps, décide d’investir toutes ses économies dans l’achat d’un dépanneur pour le gérer avec son conjoint ou sa conjointe, pourrait encourir des dommages financiers importants si elle devait s’absenter pour subir un procès et même purger une peine d’emprisonnement. Cette personne pourrait soutenir que, si elle avait été informée plus tôt, dans un délai raisonnable, de la dénonciation portée contre elle, elle n’aurait jamais pris la décision d’investir la totalité de son argent dans ce petit commerce qui ne pouvait survivre sans sa participation active. En outre, elle pourrait plaider qu’elle n’avait pas prévu des coûts supplémentaires nécessaires pour engager, pendant la durée de son procès et de son emprisonnement le cas échéant, un employé temporaire pour accomplir la part des tâches qui lui incombait dans l’administration de son dépanneur. Pour mentionner un autre exemple, une personne qui décide de ne pas renouveler une assurance juridique lui garantissant des services d’avocat à moindre coût, car elle ne sait pas que des accusations sont portées contre elle, pourrait fort bien demander réparation en vertu du par. 24(1) de la Charte. En effet, un lien de causalité pourrait être établi entre le préjudice qui découle de cette décision et le fait de ne pas avoir été informé dans un délai raisonnable de l’infraction précise qu’on lui reproche.
Par cet addendum, je voulais mentionner que les réparations réclamées en vertu du par. 24(1) de la Charte en raison d’une violation du droit garanti par l’al. 11a), ne devraient pas, à mon avis, être limitées au préjudice résultant de l’atteinte à un procès juste et équitable. Le fait d’avoir une dénonciation pendante contre soi peut affecter des décisions à prendre dans sa vie autres que pour la préparation d’une défense.
Avec égards, je ne pense pas que la violation de l’al. 11a) de la Charte soit exclusivement reliée à l’atteinte à un procès juste et équitable. Un inculpé a le droit d’être informé rapidement d’une dénonciation portée contre lui afin de pouvoir planifier, entre autres, des décisions importantes affectant sa vie professionnelle ou familiale. Si ces décisions ont entraîné un préjudice économique résultant directement du temps excessif mis à l’informer de l’infraction précise qu’on lui reproche, la personne devrait avoir la possibilité d’invoquer la violation du droit protégé par l’al. 11a) de la Charte et de recourir au par. 24(1) pour demander réparation devant le tribunal approprié.
Je donnerai deux exemples pour expliciter comment un préjudice autre que celui découlant de l’atteinte à un procès juste et équitable peut entraîner la violation du droit garanti par l’al. 11a) de la Charte. Ainsi, une personne qui, n’étant pas au courant qu’une dénonciation pèse contre elle depuis un certain temps, décide d’investir toutes ses économies dans l’achat d’un dépanneur pour le gérer avec son conjoint ou sa conjointe, pourrait encourir des dommages financiers importants si elle devait s’absenter pour subir un procès et même purger une peine d’emprisonnement. Cette personne pourrait soutenir que, si elle avait été informée plus tôt, dans un délai raisonnable, de la dénonciation portée contre elle, elle n’aurait jamais pris la décision d’investir la totalité de son argent dans ce petit commerce qui ne pouvait survivre sans sa participation active. En outre, elle pourrait plaider qu’elle n’avait pas prévu des coûts supplémentaires nécessaires pour engager, pendant la durée de son procès et de son emprisonnement le cas échéant, un employé temporaire pour accomplir la part des tâches qui lui incombait dans l’administration de son dépanneur. Pour mentionner un autre exemple, une personne qui décide de ne pas renouveler une assurance juridique lui garantissant des services d’avocat à moindre coût, car elle ne sait pas que des accusations sont portées contre elle, pourrait fort bien demander réparation en vertu du par. 24(1) de la Charte. En effet, un lien de causalité pourrait être établi entre le préjudice qui découle de cette décision et le fait de ne pas avoir été informé dans un délai raisonnable de l’infraction précise qu’on lui reproche.
Par cet addendum, je voulais mentionner que les réparations réclamées en vertu du par. 24(1) de la Charte en raison d’une violation du droit garanti par l’al. 11a), ne devraient pas, à mon avis, être limitées au préjudice résultant de l’atteinte à un procès juste et équitable. Le fait d’avoir une dénonciation pendante contre soi peut affecter des décisions à prendre dans sa vie autres que pour la préparation d’une défense.
L’affidavit au soutien d’une requête est essentiel et il est reconnu que chaque fois qu’il s’agit d’une question de faits, l’affidavit doit être donné par la partie qui est au courant et non par son procureur
R. c. Bergeron, 2010 QCCQ 4160 (CanLII)
[33] « L’affidavit au soutien d’une requête est essentiel et il est reconnu que chaque fois qu’il s’agit d’une question de faits, l’affidavit doit être donné par la partie qui est au courant et non par son procureur » : Blenda Construction Inc. C. Gouveia, [1981] C.S. 272, p. 273; R. c. Deslauriers 1992 CanLII 4022 (MB C.A.), (1992), 77 C.C.C. (3d) 329, p. 336-337 (C.A. Man.).
[34] En l’espèce, Me Dionne allègue, à titre de préjudice, des faits personnels au requérant telles les vérifications concernant le mandat d’arrestation (paragr. F). Pour établir les faits au soutien de sa requête, celui-ci doit témoigner sous serment, soit de vive voix ou par l’intermédiaire de sa déclaration assermentée, et subir un contre-interrogatoire de façon à permettre au juge d’apprécier le fondement de sa prétention.
[35] La déclaration assermentée aurait dû être signée par le requérant et non par son avocate, car certains faits allégués constituent pour elle de l’ouï-dire. Elle ne peut affirmer sous serment qu’ils sont vrais puisqu’elle ne les connaît pas personnellement : Bédard c. Les Développements L’Esplanade Inc., [1989] R.D.J. 329, p. 330-331 (C.S.); Feuiltault c. Ville de Ste-Julie, [1978] C.S. 774. Dans ces circonstances, cette déclaration assermentée représente une preuve par ouï-dire irrecevable, car le but recherché consiste à établir la véracité de son contenu sans que le requérant ne soit entendu : R. c. Khelawon, 2006 CSC 57 (CanLII), [2006] 2 R.C.S. 787.
[33] « L’affidavit au soutien d’une requête est essentiel et il est reconnu que chaque fois qu’il s’agit d’une question de faits, l’affidavit doit être donné par la partie qui est au courant et non par son procureur » : Blenda Construction Inc. C. Gouveia, [1981] C.S. 272, p. 273; R. c. Deslauriers 1992 CanLII 4022 (MB C.A.), (1992), 77 C.C.C. (3d) 329, p. 336-337 (C.A. Man.).
[34] En l’espèce, Me Dionne allègue, à titre de préjudice, des faits personnels au requérant telles les vérifications concernant le mandat d’arrestation (paragr. F). Pour établir les faits au soutien de sa requête, celui-ci doit témoigner sous serment, soit de vive voix ou par l’intermédiaire de sa déclaration assermentée, et subir un contre-interrogatoire de façon à permettre au juge d’apprécier le fondement de sa prétention.
[35] La déclaration assermentée aurait dû être signée par le requérant et non par son avocate, car certains faits allégués constituent pour elle de l’ouï-dire. Elle ne peut affirmer sous serment qu’ils sont vrais puisqu’elle ne les connaît pas personnellement : Bédard c. Les Développements L’Esplanade Inc., [1989] R.D.J. 329, p. 330-331 (C.S.); Feuiltault c. Ville de Ste-Julie, [1978] C.S. 774. Dans ces circonstances, cette déclaration assermentée représente une preuve par ouï-dire irrecevable, car le but recherché consiste à établir la véracité de son contenu sans que le requérant ne soit entendu : R. c. Khelawon, 2006 CSC 57 (CanLII), [2006] 2 R.C.S. 787.
mercredi 9 juin 2010
Le danger pour la sécurité de la société, pour déterminer si le sursis est possible, s’apprécie au regard du risque de récidive et de la gravité du préjudice découlant d’une récidive y inclus le dommage économique possible
R. c. Alain, 2001 CanLII 12757 (QC C.A.)
[13] En somme, la fraude de l’appelant ne peut pas se comparer à une autre où le bénéfice personnel est le seul objectif et la cupidité, l’unique motivation.
[15] En somme, doivent aussi être pris en considération le lien de confiance des souscripteurs à l’endroit de l’accusé, la préméditation, la planification évidente et le montant en jeu à titre de facteurs aggravants, l’absence d’antécédents criminels, la valeur relativement peu élevée de l’avantage personnel retiré, l’objectif et la motivation ultime visés, comme facteurs atténuants.
[16] Après l’examen de la responsabilité personnelle ou intrinsèque du contrevenant, reste celui de la fonction dissuasive de la peine. Les fraudes importantes qui nécessitent habituellement la mise en place et l’utilisation d’un système sophistiqué entraînent des peines d’emprisonnement. Les tribunaux ont généralement voulu souligner la gravité de ces fraudes « dans les affaires », sans doute, pour qu’il soit bien compris que les « criminels à col blanc » peuvent, et en réalité, causent un préjudice sérieux aux victimes spécialement lorsqu’elles sont de petits épargnants, et qu’il y a lieu de décourager ces agissements, causes de dommages sociaux.
[18] Cela m’amène inéluctablement à examiner le droit au sursis à l’incarcération en application de l’article 742.1 C.cr. puisque aucune infraction n’est exclue du champ d’application de cette disposition sauf si une peine minimale d’emprisonnement est prévue.
[19] Le juge Rosenberg de la Cour d’appel de l’Ontario, dans un texte approuvé par la Cour suprême dans R. c. Proulx précité, faisait le commentaire suivant :
I do not read R. v. Pierce as laying down an inflexible rule that a conditional sentence should never or rarely be imposed in fraud cases involving a breach of trust or that the community can only be safeguarded in such cases by incarcerating the offender. In my view, general deterrence is neither inconsistent with a conditional sentence order nor is it a basis for reserving the conditional sentence for rare or exceptional cases. To the contrary, the objective of general deterrence can be achieved through the conditional sentence of imprisonment.
[20] Cela dit, il me faut examiner les deux critères de la sécurité du public et de la conformité que présenterait un sursis de l’incarcération avec l’objectif et les principes de la détermination de la peine.
[21] Le danger pour la sécurité de la société s’apprécie au regard du risque de récidive et de la gravité du préjudice découlant d’une récidive y inclus le dommage économique possible. En l’espèce, aucun élément au dossier ne permet de conclure à un risque de récidive. J’estime donc que ce critère est satisfait.
[22] Reste à déterminer si le sursis d’incarcération serait ici conforme à l’objectif et aux critères de la détermination de la peine. En d’autres termes, est-ce que cette sanction, si elle bénéficie à l’appelant, serait une peine proportionnée à la gravité de son infraction et à son degré de responsabilité?
[23] L’examen de ce facteur de proportionnalité est, sans doute, le plus difficile. Il consiste à évaluer l’ensemble des aspects de la personnalité du prévenu et toutes les caractéristiques de son crime pour décider si la peine d’emprisonnement exigée et infligée était purgée dans la collectivité et aurait un degré d’efficacité tant individuel que social approprié.
[13] En somme, la fraude de l’appelant ne peut pas se comparer à une autre où le bénéfice personnel est le seul objectif et la cupidité, l’unique motivation.
[15] En somme, doivent aussi être pris en considération le lien de confiance des souscripteurs à l’endroit de l’accusé, la préméditation, la planification évidente et le montant en jeu à titre de facteurs aggravants, l’absence d’antécédents criminels, la valeur relativement peu élevée de l’avantage personnel retiré, l’objectif et la motivation ultime visés, comme facteurs atténuants.
[16] Après l’examen de la responsabilité personnelle ou intrinsèque du contrevenant, reste celui de la fonction dissuasive de la peine. Les fraudes importantes qui nécessitent habituellement la mise en place et l’utilisation d’un système sophistiqué entraînent des peines d’emprisonnement. Les tribunaux ont généralement voulu souligner la gravité de ces fraudes « dans les affaires », sans doute, pour qu’il soit bien compris que les « criminels à col blanc » peuvent, et en réalité, causent un préjudice sérieux aux victimes spécialement lorsqu’elles sont de petits épargnants, et qu’il y a lieu de décourager ces agissements, causes de dommages sociaux.
[18] Cela m’amène inéluctablement à examiner le droit au sursis à l’incarcération en application de l’article 742.1 C.cr. puisque aucune infraction n’est exclue du champ d’application de cette disposition sauf si une peine minimale d’emprisonnement est prévue.
[19] Le juge Rosenberg de la Cour d’appel de l’Ontario, dans un texte approuvé par la Cour suprême dans R. c. Proulx précité, faisait le commentaire suivant :
I do not read R. v. Pierce as laying down an inflexible rule that a conditional sentence should never or rarely be imposed in fraud cases involving a breach of trust or that the community can only be safeguarded in such cases by incarcerating the offender. In my view, general deterrence is neither inconsistent with a conditional sentence order nor is it a basis for reserving the conditional sentence for rare or exceptional cases. To the contrary, the objective of general deterrence can be achieved through the conditional sentence of imprisonment.
[20] Cela dit, il me faut examiner les deux critères de la sécurité du public et de la conformité que présenterait un sursis de l’incarcération avec l’objectif et les principes de la détermination de la peine.
[21] Le danger pour la sécurité de la société s’apprécie au regard du risque de récidive et de la gravité du préjudice découlant d’une récidive y inclus le dommage économique possible. En l’espèce, aucun élément au dossier ne permet de conclure à un risque de récidive. J’estime donc que ce critère est satisfait.
[22] Reste à déterminer si le sursis d’incarcération serait ici conforme à l’objectif et aux critères de la détermination de la peine. En d’autres termes, est-ce que cette sanction, si elle bénéficie à l’appelant, serait une peine proportionnée à la gravité de son infraction et à son degré de responsabilité?
[23] L’examen de ce facteur de proportionnalité est, sans doute, le plus difficile. Il consiste à évaluer l’ensemble des aspects de la personnalité du prévenu et toutes les caractéristiques de son crime pour décider si la peine d’emprisonnement exigée et infligée était purgée dans la collectivité et aurait un degré d’efficacité tant individuel que social approprié.
mardi 8 juin 2010
L'appréciation de l'oppression dans le contexte de la confession / les limites acceptables de l'insistance policière
R. c. Mailhot, 2008 QCCS 3033 (CanLII)
[38] Tel que mentionné lors des débats, la véritable question est de décider s'il y a preuve hors de tout doute raisonnable que cette déclaration fut donnée librement et volontairement.
[39] Dans Hobbins vs The Queen (Cour suprême) (1982) 66 C.C.C.(2) page 289, le juge en chef Laskin énonçait ainsi le concept de la confession obtenue par contrainte ou oppression:
«There is no doubt that the state of mind of the accused is relevant to the admissibility of a statement made by him to the police after interrogation, and even if he has been cautioned, as was the case here in respect of the second statement. An atmosphere of oppression may be created in the circumstances surrounding the taking of a statement, although there be no inducement held out of hope of advantage or fear of prejudice, and absent any threats of violence or actual violence. However, and counsel for the appellant accused conceded this, an accused's own timidity or subjective fear of the police will not avail to avoid the admissibility of a statement or confession unless there are external circumstances brought about by the conduct of the police that can be said to cast doubt on the voluntariness of a statement or confession by the accused or there are considerations affecting the accused, as in the Ward case, infra, which would justify doubt as to voluntariness. In this respect, it does not, of course, matter that the police did not commit any illegality if the circumstances of the interrogation, including time and place and length of interrogation, raise or should raise doubt in the trial Judge whether the statement or confession was freely and voluntarily given.» (page 292)
[40] Il s'agit, je pense, de la question primordiale véritable qu'il faille aborder puisqu'il n'y a aucune preuve de promesses ou de menaces susceptibles d'avoir provoqué les aveux.
[42] Il me semble que la situation qui nous confronte actuellement cadre bien avec les propos tenus par monsieur le juge Proulx dans R. vs Auclair (Qué.C.A.) (2004) 183 C.C.C.(3) page 273:
«It is settled law since the cases Ward v. The Queen 1979 CanLII 14 (S.C.C.), (1979) 2 S.C.R. 30, 44 C.C.C.(2d) 498, Horvath v. The Queen 1979 CanLII 16 (S.C.C.), (1979) 2 S.C.R. 376, 44 C.C.C.(2d) 385, and Hobbins v. The Queen 1982 CanLII 46 (S.C.C.), (1982) 1 S.C.R. 553, 66 C.C.C.(2d) 289, that the circumstances underlying the obtaining of a statement which may create an atmosphere of oppression or intimidation are relevant in the determination of the free and voluntary nature of that statement. Oppression means anything which undermines free will (R. v. Otis 2000 CanLII 11367 (QC C.A.), (2000), 37 C.R.(5th) 320, 151 C.C.C.(3d) 416 (Qué.C.A.)). We are not speaking here of denying police officers an opportunity to persuade a suspect to make admissions within the framework of respect of his fundamental rights. In this regard, I would reiterate here some of the propositions of law set forth in R. v. Otis, supra (p. 339):
(Translation)
1) It is legitimate to allow police officers the opportunity to pursue an investigation with the intent of obtaining admissions.
2) Notwithstanding the possibility of a spontaneous admission, experience demonstrates that it is generally interrogation which convinces a person to confess.
3) While conceding to police officers the power to persuade a person to confess despite his stated intention to remain silent, the courts should consider the position of power of the person interrogating the subject, who is in a position of dependence.
4) When a person raises his rights, one cannot ignore them and act as if the person had waived them.
5) In the current state of the law, both objective and subjective factors have to be examined in the determination of the voluntary nature of admissions, a rule which essentially examines any influences on the free will of the subject.
and furthermore it is not acceptable to prolong detention in order to persuade a person to speak. I will now discuss the common law principle with respect to tainting of evidence.» (par. 37)
[43] L'opinion du juge Proulx reprenait presque textuellement celle exprimée plus tôt, en dissidence, par monsieur le juge Fish (à l'époque) dans R. vs Buttino (Qué.C.A.) (2000) 150 C.C.C.(3) page 286:
«3. Although a detained person previously indicated to the police that it was his intention not to answer their questions, in the present state of the jurisprudence, nothing prevents the police from attempting to get the detained person to change his mind.
4. Therefore, [t]he police persuasion, short of denying the suspect the right to choose or of depriving him of an operating mind… is permitted (R. v. Hebert, supra, note 1, p. 184, emphasis added). It follows that what is prohibited is "police persuasion" which has the contrary effect. That is all forms of pressure or duress, physical or psychological, or all ruse or subterfuge which in fact deprives the suspect of his right to choose freely or to maintain his choice. In my view, a constitutional right the exercise of which the police authorities can undermine with impunity, is illusory. Accordingly, the right to the respect of one's choice is not, to again use this metaphor, an umbrella which one removes when it is raining.
5. Manifestly, the authorities cannot unduly prolong a suspect's detention in order to induce him to modify his initial choice. As I wrote elsewhere, "detention until confession is an unacceptable form of persuasion" (R. v. Timm (1998) A.Q. No. 3168 (QL) (Qué.C.A.) (reported 131 C.C.C.(3d) 306), where I dissented with respect to the result. However, nothing in the majority's judgment, confirmed by the Supreme Court of Canada, at 1999 CanLII 636 (S.C.C.), (1997) 3 S.C.R. 666, 140 C.C.C.(3d) 225, advances the opposite conclusion)"» (par. 26)
[44] Voir au même effet R. vs Fleet (Man.Q.B.) (2004) 23 C.R.(6) page 337; R. vs K.(C.) (Ont.C.J.) (2005) 36 C.R.(6) page 153; R. vs Hammerstron (B.C.S.C.) (2006) 43 C.R.(6) page 346; R. vs Reader (Man.Q.B.) (2007) 49 C.R.(6) page 301.
[45] A priori, il n'y a rien de répréhensible à l'utilisation de techniques d'interrogatoire pour obtenir des aveux d'une personne qui, au départ, peut revendiquer son droit de ne rien dire. Je suis disposé à croire que la police n'est pas obligée d'accepter un premier refus et cesser la poursuite de l'interrogatoire. L'adage populaire «never take no for an answer» s'applique jusqu'à une certaine limite.
[46] Mais vouloir aller au delà de onze refus, clairement exprimés par un jeune homme instruit, sans antécédents judiciaires, étudiant universitaire qui savait que le policier suivait une technique d'interrogatoire pour obtenir des aveux, accepter que le même policier fasse appel aux sentiments de culpabilité éprouvés par l'accusé en suggérant de minimiser les conséquences, qu'il invoque le chagrin éprouvé par ses proches, son père, sa mère, son oncle ou encore les parents de la victime, sa mère, sa fille, qu'il utilise des photos du cadavre pour demander à l'accusé d'expliquer l'acharnement du meurtrier et finalement qu'il tente d'induire l'accusé en erreur en lui répétant que tout ce qu'il voulait savoir était le pourquoi du geste et non pas sa description, tout cela, me semble-t-il, constitue la contrainte ou l'oppression dont font état les décisions mentionnées auparavant. C'est à ce point vrai qu'à la toute fin de l'interrogatoire, l'accusé déclarait être déçu de ne pas avoir pu résister davantage au policier et s'excusait en même temps de lui avoir menti (23:00h. et 23:19 h.).
[47] La police a le devoir d'enquêter les crimes commis et de débusquer le coupable. Tout est question de mesure ainsi que le mentionnait le juge Doherty dans Roy (supra). Vouloir vaincre à tout prix la résistance du détenu et provoquer ainsi l'effondrement de sa volonté éclairée de ne rien dire comportent des conséquences. Le résultat de cet acharnement sera de rendre inadmissible la déclaration ainsi obtenue.
[48] Me Desrosiers a signalé que durant les six heures qu'a duré l'interrogatoire, on n'avait jamais offert à l'accusé de la nourriture ou des services sanitaires. C'est un facteur qu'il faut retenir même si sa conséquence me semble minime puisque l'accusé, un jeune homme bien déluré, n'en a jamais fait la demande.
[38] Tel que mentionné lors des débats, la véritable question est de décider s'il y a preuve hors de tout doute raisonnable que cette déclaration fut donnée librement et volontairement.
[39] Dans Hobbins vs The Queen (Cour suprême) (1982) 66 C.C.C.(2) page 289, le juge en chef Laskin énonçait ainsi le concept de la confession obtenue par contrainte ou oppression:
«There is no doubt that the state of mind of the accused is relevant to the admissibility of a statement made by him to the police after interrogation, and even if he has been cautioned, as was the case here in respect of the second statement. An atmosphere of oppression may be created in the circumstances surrounding the taking of a statement, although there be no inducement held out of hope of advantage or fear of prejudice, and absent any threats of violence or actual violence. However, and counsel for the appellant accused conceded this, an accused's own timidity or subjective fear of the police will not avail to avoid the admissibility of a statement or confession unless there are external circumstances brought about by the conduct of the police that can be said to cast doubt on the voluntariness of a statement or confession by the accused or there are considerations affecting the accused, as in the Ward case, infra, which would justify doubt as to voluntariness. In this respect, it does not, of course, matter that the police did not commit any illegality if the circumstances of the interrogation, including time and place and length of interrogation, raise or should raise doubt in the trial Judge whether the statement or confession was freely and voluntarily given.» (page 292)
[40] Il s'agit, je pense, de la question primordiale véritable qu'il faille aborder puisqu'il n'y a aucune preuve de promesses ou de menaces susceptibles d'avoir provoqué les aveux.
[42] Il me semble que la situation qui nous confronte actuellement cadre bien avec les propos tenus par monsieur le juge Proulx dans R. vs Auclair (Qué.C.A.) (2004) 183 C.C.C.(3) page 273:
«It is settled law since the cases Ward v. The Queen 1979 CanLII 14 (S.C.C.), (1979) 2 S.C.R. 30, 44 C.C.C.(2d) 498, Horvath v. The Queen 1979 CanLII 16 (S.C.C.), (1979) 2 S.C.R. 376, 44 C.C.C.(2d) 385, and Hobbins v. The Queen 1982 CanLII 46 (S.C.C.), (1982) 1 S.C.R. 553, 66 C.C.C.(2d) 289, that the circumstances underlying the obtaining of a statement which may create an atmosphere of oppression or intimidation are relevant in the determination of the free and voluntary nature of that statement. Oppression means anything which undermines free will (R. v. Otis 2000 CanLII 11367 (QC C.A.), (2000), 37 C.R.(5th) 320, 151 C.C.C.(3d) 416 (Qué.C.A.)). We are not speaking here of denying police officers an opportunity to persuade a suspect to make admissions within the framework of respect of his fundamental rights. In this regard, I would reiterate here some of the propositions of law set forth in R. v. Otis, supra (p. 339):
(Translation)
1) It is legitimate to allow police officers the opportunity to pursue an investigation with the intent of obtaining admissions.
2) Notwithstanding the possibility of a spontaneous admission, experience demonstrates that it is generally interrogation which convinces a person to confess.
3) While conceding to police officers the power to persuade a person to confess despite his stated intention to remain silent, the courts should consider the position of power of the person interrogating the subject, who is in a position of dependence.
4) When a person raises his rights, one cannot ignore them and act as if the person had waived them.
5) In the current state of the law, both objective and subjective factors have to be examined in the determination of the voluntary nature of admissions, a rule which essentially examines any influences on the free will of the subject.
and furthermore it is not acceptable to prolong detention in order to persuade a person to speak. I will now discuss the common law principle with respect to tainting of evidence.» (par. 37)
[43] L'opinion du juge Proulx reprenait presque textuellement celle exprimée plus tôt, en dissidence, par monsieur le juge Fish (à l'époque) dans R. vs Buttino (Qué.C.A.) (2000) 150 C.C.C.(3) page 286:
«3. Although a detained person previously indicated to the police that it was his intention not to answer their questions, in the present state of the jurisprudence, nothing prevents the police from attempting to get the detained person to change his mind.
4. Therefore, [t]he police persuasion, short of denying the suspect the right to choose or of depriving him of an operating mind… is permitted (R. v. Hebert, supra, note 1, p. 184, emphasis added). It follows that what is prohibited is "police persuasion" which has the contrary effect. That is all forms of pressure or duress, physical or psychological, or all ruse or subterfuge which in fact deprives the suspect of his right to choose freely or to maintain his choice. In my view, a constitutional right the exercise of which the police authorities can undermine with impunity, is illusory. Accordingly, the right to the respect of one's choice is not, to again use this metaphor, an umbrella which one removes when it is raining.
5. Manifestly, the authorities cannot unduly prolong a suspect's detention in order to induce him to modify his initial choice. As I wrote elsewhere, "detention until confession is an unacceptable form of persuasion" (R. v. Timm (1998) A.Q. No. 3168 (QL) (Qué.C.A.) (reported 131 C.C.C.(3d) 306), where I dissented with respect to the result. However, nothing in the majority's judgment, confirmed by the Supreme Court of Canada, at 1999 CanLII 636 (S.C.C.), (1997) 3 S.C.R. 666, 140 C.C.C.(3d) 225, advances the opposite conclusion)"» (par. 26)
[44] Voir au même effet R. vs Fleet (Man.Q.B.) (2004) 23 C.R.(6) page 337; R. vs K.(C.) (Ont.C.J.) (2005) 36 C.R.(6) page 153; R. vs Hammerstron (B.C.S.C.) (2006) 43 C.R.(6) page 346; R. vs Reader (Man.Q.B.) (2007) 49 C.R.(6) page 301.
[45] A priori, il n'y a rien de répréhensible à l'utilisation de techniques d'interrogatoire pour obtenir des aveux d'une personne qui, au départ, peut revendiquer son droit de ne rien dire. Je suis disposé à croire que la police n'est pas obligée d'accepter un premier refus et cesser la poursuite de l'interrogatoire. L'adage populaire «never take no for an answer» s'applique jusqu'à une certaine limite.
[46] Mais vouloir aller au delà de onze refus, clairement exprimés par un jeune homme instruit, sans antécédents judiciaires, étudiant universitaire qui savait que le policier suivait une technique d'interrogatoire pour obtenir des aveux, accepter que le même policier fasse appel aux sentiments de culpabilité éprouvés par l'accusé en suggérant de minimiser les conséquences, qu'il invoque le chagrin éprouvé par ses proches, son père, sa mère, son oncle ou encore les parents de la victime, sa mère, sa fille, qu'il utilise des photos du cadavre pour demander à l'accusé d'expliquer l'acharnement du meurtrier et finalement qu'il tente d'induire l'accusé en erreur en lui répétant que tout ce qu'il voulait savoir était le pourquoi du geste et non pas sa description, tout cela, me semble-t-il, constitue la contrainte ou l'oppression dont font état les décisions mentionnées auparavant. C'est à ce point vrai qu'à la toute fin de l'interrogatoire, l'accusé déclarait être déçu de ne pas avoir pu résister davantage au policier et s'excusait en même temps de lui avoir menti (23:00h. et 23:19 h.).
[47] La police a le devoir d'enquêter les crimes commis et de débusquer le coupable. Tout est question de mesure ainsi que le mentionnait le juge Doherty dans Roy (supra). Vouloir vaincre à tout prix la résistance du détenu et provoquer ainsi l'effondrement de sa volonté éclairée de ne rien dire comportent des conséquences. Le résultat de cet acharnement sera de rendre inadmissible la déclaration ainsi obtenue.
[48] Me Desrosiers a signalé que durant les six heures qu'a duré l'interrogatoire, on n'avait jamais offert à l'accusé de la nourriture ou des services sanitaires. C'est un facteur qu'il faut retenir même si sa conséquence me semble minime puisque l'accusé, un jeune homme bien déluré, n'en a jamais fait la demande.
vendredi 4 juin 2010
Dans le contexte d'une confession, le nombre de refus de répondre aux questions de la police n'est pas en soi déterminant mais constitue un facteur à considérer
R. c. Mailhot, 2008 QCCS 3033 (CanLII)
[28] Me Dagenais, pour la Couronne, invoque l'observation de madame le juge Charron dans Singh (supra) cité au tout début de cette décision: le nombre de refus n'est pas en soi déterminant mais constitue un facteur à considérer comme l'avait d'ailleurs indiqué monsieur le juge Doherty dans R. vs Roy (Ont.C.A.) (2003) 180 C.C.C.(3) page 298:
«This was a prolonged interview of a detained person. The appellant declined to answer questions on many occasions. These features of the interview invite close judicial scrutiny of the admissibility of the statement. Clearly, the repeated assertion by a detained person during a lengthy interview that he does not want to speak to the police any further will provide strong and sometimes conclusive evidence that any subsequent statement was not the product of a free exercise of the detainee's right to choose whether to speak. The question is, however, a factual question to be decided on a case-by-case basis by the trial judge. On the facts as found by this trial judge, the appellant never chose to remain silent.» (par. 13)
[29] Plus récemment dans R. vs Rybak (Ont.C.A.) (2008) (ONCA) 354 (5 mai 2008), une décision soumise par Me Dagenais, le juge Watt reprenait la même observation au paragraphe 190:
«A lengthy interview, coupled with repeated refusals to answer some questions without first speaking to a lawyer, mandate close judicial scrutiny of the admissibility of the record of interview. R. v. Roy 2003 CanLII 4272 (ON C.A.), 2003 CanLII 4272 (ON C.A.), (2003), 180 C.C.C.(3d) 298, 303-4 (Ont.C.A.). In the end, what must be decided is whether the conduct of the state authorities denied the appellant the right to choose speech or silence, or deprived him of an operating mind. Hebert at 184; Singh at para. 46.» (par. 190)
[28] Me Dagenais, pour la Couronne, invoque l'observation de madame le juge Charron dans Singh (supra) cité au tout début de cette décision: le nombre de refus n'est pas en soi déterminant mais constitue un facteur à considérer comme l'avait d'ailleurs indiqué monsieur le juge Doherty dans R. vs Roy (Ont.C.A.) (2003) 180 C.C.C.(3) page 298:
«This was a prolonged interview of a detained person. The appellant declined to answer questions on many occasions. These features of the interview invite close judicial scrutiny of the admissibility of the statement. Clearly, the repeated assertion by a detained person during a lengthy interview that he does not want to speak to the police any further will provide strong and sometimes conclusive evidence that any subsequent statement was not the product of a free exercise of the detainee's right to choose whether to speak. The question is, however, a factual question to be decided on a case-by-case basis by the trial judge. On the facts as found by this trial judge, the appellant never chose to remain silent.» (par. 13)
[29] Plus récemment dans R. vs Rybak (Ont.C.A.) (2008) (ONCA) 354 (5 mai 2008), une décision soumise par Me Dagenais, le juge Watt reprenait la même observation au paragraphe 190:
«A lengthy interview, coupled with repeated refusals to answer some questions without first speaking to a lawyer, mandate close judicial scrutiny of the admissibility of the record of interview. R. v. Roy 2003 CanLII 4272 (ON C.A.), 2003 CanLII 4272 (ON C.A.), (2003), 180 C.C.C.(3d) 298, 303-4 (Ont.C.A.). In the end, what must be decided is whether the conduct of the state authorities denied the appellant the right to choose speech or silence, or deprived him of an operating mind. Hebert at 184; Singh at para. 46.» (par. 190)
jeudi 3 juin 2010
La distinction entre aveu et confession
Rothman c. La Reine, [1981] 1 R.C.S. 640
Les savants auteurs de Phipson on Evidence (12e éd., 1976) énoncent au paragraphe 671:
[TRADUCTION] Dans les affaires criminelles, les déclarations que fait l’accusé hors de cour sont également recevables contre lui, même si elles sont assujetties à des conditions particulières si elles sont faites à une personne ayant autorité; elles sont alors habituellement appelées «confessions».
Graduellement, le droit a évolué de façon à séparer du domaine général des aveux les déclarations faites par un accusé à une personne ayant autorité: on parle alors de confessions, et c’est à elles que s’appliquent des règles particulières de recevabilité au procès.
Les règles de la preuve en droit pénal, et même en droit civil, portent toutes sur la pertinence, la véracité et l’impartialité, ainsi que sur d’autres préoccupations telles l’économie relative et l’efficacité du procès. Les règles relatives aux confessions ont un élément supplémentaire, soit la préoccupation du public pour l’intégrité du système de l’administration de la justice. Si la véracité des déclarations d’un accusé était le seul aspect à examiner pour établir leur recevabilité, les cours n’auraient pas adopté des principes applicables uniquement aux déclarations faites aux personnes ayant autorité et non aux déclarations incriminantes en général. La véracité ne peut être le seul critère de recevabilité, parce que des déclarations peuvent paraître assez véridiques pour assurer que le juge des faits s’y réfère, et être quand même écartées suivant les normes de la confession.
Les savants auteurs de Phipson on Evidence (12e éd., 1976) énoncent au paragraphe 671:
[TRADUCTION] Dans les affaires criminelles, les déclarations que fait l’accusé hors de cour sont également recevables contre lui, même si elles sont assujetties à des conditions particulières si elles sont faites à une personne ayant autorité; elles sont alors habituellement appelées «confessions».
Graduellement, le droit a évolué de façon à séparer du domaine général des aveux les déclarations faites par un accusé à une personne ayant autorité: on parle alors de confessions, et c’est à elles que s’appliquent des règles particulières de recevabilité au procès.
Les règles de la preuve en droit pénal, et même en droit civil, portent toutes sur la pertinence, la véracité et l’impartialité, ainsi que sur d’autres préoccupations telles l’économie relative et l’efficacité du procès. Les règles relatives aux confessions ont un élément supplémentaire, soit la préoccupation du public pour l’intégrité du système de l’administration de la justice. Si la véracité des déclarations d’un accusé était le seul aspect à examiner pour établir leur recevabilité, les cours n’auraient pas adopté des principes applicables uniquement aux déclarations faites aux personnes ayant autorité et non aux déclarations incriminantes en général. La véracité ne peut être le seul critère de recevabilité, parce que des déclarations peuvent paraître assez véridiques pour assurer que le juge des faits s’y réfère, et être quand même écartées suivant les normes de la confession.
Les déclarations d’un accusé à des personnes ordinaires sont présumées admissibles, comme étant des aveux faits par une partie opposée, sans voir‑dire
R. c. S.G.T., 2010 CSC 20
[20] La distinction entre aveu et confession est pertinente en l’espèce. Selon les règles de preuve, les déclarations d’un accusé sont des aveux faits par une partie opposée et, à ce titre, elles relèvent d’une exception à la règle du ouï‑dire. Elles sont admissibles comme preuve de la véracité de leur contenu. Les déclarations d’un accusé à des personnes ordinaires, tels des amis ou des membres de sa famille, sont présumées admissibles sans voir‑dire. C’est seulement lorsque l’accusé fait une déclaration à une « personne en autorité » que le ministère public doit prouver le caractère volontaire de la déclaration pour que celle‑ci soit admise en preuve. Il s’agit là, bien sûr, de la règle des confessions.
[20] La distinction entre aveu et confession est pertinente en l’espèce. Selon les règles de preuve, les déclarations d’un accusé sont des aveux faits par une partie opposée et, à ce titre, elles relèvent d’une exception à la règle du ouï‑dire. Elles sont admissibles comme preuve de la véracité de leur contenu. Les déclarations d’un accusé à des personnes ordinaires, tels des amis ou des membres de sa famille, sont présumées admissibles sans voir‑dire. C’est seulement lorsque l’accusé fait une déclaration à une « personne en autorité » que le ministère public doit prouver le caractère volontaire de la déclaration pour que celle‑ci soit admise en preuve. Il s’agit là, bien sûr, de la règle des confessions.
Manquement à ordonnance de probation VS Indigence de l’accusé - Ce que constitue le concept de “sans excuse raisonnable”.
R. c. Tremblay, 2001 CanLII 13135 (QC C.Q.)
[11] Le débat tourne autour du changement de l’article 740(1) pour l’article 733.1 du Code criminel qui substitue les mots « sans excuse raisonnable » au mot « volontairement ».
[13] En l’occurrence, aux modifications apportées par le législateur, le juge Laurier dans R. c. Foglia explique que :
« En substituant les mots « excuse raisonnable » à « volontairement », il semblerait que le législateur ait voulu réduire ce niveau élevé d’exigence en facilitant la preuve de la poursuite. »
[14] Pour sa part, dans R. c. Greco, le juge Lampkin s’exprime ainsi :
Unlike the former s. 666(1) which was a straight summary conviction offence, s 733.1(1) is now a hybrid offence and may be prosecuted by way of indictment or by way of conviction. More importantly, the word « willfully » has been removed and has been replaced by the phrase « without reasonable excuse ».
[...]
I believe those words would be read in the construction of the section. If the probationer can prove on a balance of probabilities that he had a reasonable excuse to act in the manner he did, then he would be acquitted of the chare of breach of probation.
[15] Le juge Handrigan abonde dans le même sens:
This provision was replaced with that which I have set out above by an amendment to the criminal Code in 1996. It changed that offence from one punishable only summary conviction to a hybrid offence which follows the Crown election.
[…]
It is clear that remodeling which Parliament has done to the subsection of the Criminel Code which defines “breach of probation” has lowered the bar for the Crown to prove the element of “willfulness”. It will be recognized that proof of this (mens rea of the old offence) would be a difficult thing in most cases.
[…]
Whatever the merits of the debate about the charge in this former statement as being a “general intent v. Specific intent” offence, subsection 733.1(1) in its present form, clearly creates on offence of general intent. It might even be argued that something less than an intention to cause the actus reus of the crime will constitute a sufficient mens rea I refer here simply to the possibility that “recklessness”, in appropriate the mens rea of a breach of probation charge.
[16] Dans R. Monrose, le juge Boilard souligne que
Similarly, failure to comply with a condition of a probation order pursuant to s. 733.1 (formerly 666(10 renumbered 740(1) requires a subjective mens rea i.e. blameworthy state of mind that exceeds carelessness. I do not believe that reworking the description of the offense as failing to comply without a reasonable excuse (s. 733.2) or willfully failing to comply as s. 666(1) read, has changed the nature of the requisite mental ingredient.
[17] Pour ma part, je ferai mienne l’opinion du juge Laurier puisque en changeant le mot “volontairement” par ceux de “sans excuse raisonnable”, il va de soi que le législateur a voulu réduire le fardeau qui incombait à la poursuite de devoir prouver, au niveau de la mens rea, que l’accusé avait l’intention de violer les conditions de la probation et la connaissance coupable de la part de l’accusé.
[18] La jurisprudence antérieure à cette modification accepte comme défense valable l’indigence. Ainsi, dans Grandbois c. R., la Cour a renversé une déclaration de culpabilité pour le bris de probation consistant au non-remboursement d’une somme. La preuve de la mens rea devant être faite hors de tout doute raisonnable, l’appelant a soulevé un doute en faisant la preuve du dénuement le plus complet.
[19] Dans l’arrêt Sugg c. R. cité par la Cour suprême du Canada, l’appelant n’était pas parvenu à payer le plein montant de la restitution qu’il devait faire selon les conditions de sa probation. Le juge MacDonald, au nom de la division d’appel de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse, a tenu pour acquis que l’appelant ne pouvait acquitter le plein montant. Selon la Cour suprême, on ne peut dire que l’appelant a volontairement omis de payer un tel montant d’argent; il manquait l’intention criminelle.
[20] Dans le cas présent, la défense d’indigence ne pourrait trouver application puisque cette défense exige le dénuement le plus complet, ce qui n’était pas le cas de monsieur Tremblay puisqu’il a acquitté les dettes qui lui semblaient préférables, en l’occurrence les honoraires de son avocat, au détriment de son ordonnance de probation. De plus, étant homme d’affaires, il savait ou s’est aveuglé volontairement qu’il ne pourrait à court et à moyen terme (c’est-à-dire dans les délais prescrits) rembourser les sommes dues. L’accusé, trop content de recevoir une absolution conditionnelle à son remboursement émis dans l’ordonnance de probation, n’a pas voulu faire de vagues et expliquer sa situation de peur d’une peine plus lourde. Il a accepté la peine et a même payé dans l’intervalle d’autres dettes que la peine qui lui avait été infligée. Il est donc clair que l’accusé n’a pas pris les mesures raisonnables pour s’acquitter de sa dette ou s’est aveuglé volontairement.
[21] Monsieur Tremblay ne peut non plus invoquer comme moyen de défense qu’il ignorait pouvoir obtenir une extension de délai à cause du changement de procureur au dossier. En effet, même si dans R. c. Docherty une exception est créée au principe que nul n’est censé ignorer la loi, cette exception s’applique à une croyance honnête que son comportement ne contrevient pas à l’ordonnance parce que ce n’était pas un crime.
[22] L’accusé savait pertinemment que le fait de ne pas payer le montant de 3 000 $ contrevenait à l’ordonnance de probation. Il ne peut donc invoquer l’exception à l’article 19 C. cr.
[23] L’auteur Sophie Bourque explique
Depuis la décision R. Docherty le législateur a modifié le Code criminel en remplaçant à l’article 733.1 le mot « volontairement » par « sans excuse raisonnable », dans l’intention évidente de ne plus permettre l’utilisation de l’erreur de droit à l’encontre d’une accusation de bris de probation. Le degré de mens rea n’étant plus aussi élevé, il est peu probable que les tribunaux accepteront l’ignorance de la loi à titre d’excuse raisonnable à la perpétration d’une telle infraction.
[24] Pour répondre à la dernière question, puisque l’article 733.1 fait référence aux mots « sans excuse raisonnable », la Couronne n’a pas à prouver que l’accusé avait l’intention d’omettre volontairement de payer. La preuve d’indigence ne doit servir qu’à lui procurer une excuse raisonnable.
[11] Le débat tourne autour du changement de l’article 740(1) pour l’article 733.1 du Code criminel qui substitue les mots « sans excuse raisonnable » au mot « volontairement ».
[13] En l’occurrence, aux modifications apportées par le législateur, le juge Laurier dans R. c. Foglia explique que :
« En substituant les mots « excuse raisonnable » à « volontairement », il semblerait que le législateur ait voulu réduire ce niveau élevé d’exigence en facilitant la preuve de la poursuite. »
[14] Pour sa part, dans R. c. Greco, le juge Lampkin s’exprime ainsi :
Unlike the former s. 666(1) which was a straight summary conviction offence, s 733.1(1) is now a hybrid offence and may be prosecuted by way of indictment or by way of conviction. More importantly, the word « willfully » has been removed and has been replaced by the phrase « without reasonable excuse ».
[...]
I believe those words would be read in the construction of the section. If the probationer can prove on a balance of probabilities that he had a reasonable excuse to act in the manner he did, then he would be acquitted of the chare of breach of probation.
[15] Le juge Handrigan abonde dans le même sens:
This provision was replaced with that which I have set out above by an amendment to the criminal Code in 1996. It changed that offence from one punishable only summary conviction to a hybrid offence which follows the Crown election.
[…]
It is clear that remodeling which Parliament has done to the subsection of the Criminel Code which defines “breach of probation” has lowered the bar for the Crown to prove the element of “willfulness”. It will be recognized that proof of this (mens rea of the old offence) would be a difficult thing in most cases.
[…]
Whatever the merits of the debate about the charge in this former statement as being a “general intent v. Specific intent” offence, subsection 733.1(1) in its present form, clearly creates on offence of general intent. It might even be argued that something less than an intention to cause the actus reus of the crime will constitute a sufficient mens rea I refer here simply to the possibility that “recklessness”, in appropriate the mens rea of a breach of probation charge.
[16] Dans R. Monrose, le juge Boilard souligne que
Similarly, failure to comply with a condition of a probation order pursuant to s. 733.1 (formerly 666(10 renumbered 740(1) requires a subjective mens rea i.e. blameworthy state of mind that exceeds carelessness. I do not believe that reworking the description of the offense as failing to comply without a reasonable excuse (s. 733.2) or willfully failing to comply as s. 666(1) read, has changed the nature of the requisite mental ingredient.
[17] Pour ma part, je ferai mienne l’opinion du juge Laurier puisque en changeant le mot “volontairement” par ceux de “sans excuse raisonnable”, il va de soi que le législateur a voulu réduire le fardeau qui incombait à la poursuite de devoir prouver, au niveau de la mens rea, que l’accusé avait l’intention de violer les conditions de la probation et la connaissance coupable de la part de l’accusé.
[18] La jurisprudence antérieure à cette modification accepte comme défense valable l’indigence. Ainsi, dans Grandbois c. R., la Cour a renversé une déclaration de culpabilité pour le bris de probation consistant au non-remboursement d’une somme. La preuve de la mens rea devant être faite hors de tout doute raisonnable, l’appelant a soulevé un doute en faisant la preuve du dénuement le plus complet.
[19] Dans l’arrêt Sugg c. R. cité par la Cour suprême du Canada, l’appelant n’était pas parvenu à payer le plein montant de la restitution qu’il devait faire selon les conditions de sa probation. Le juge MacDonald, au nom de la division d’appel de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse, a tenu pour acquis que l’appelant ne pouvait acquitter le plein montant. Selon la Cour suprême, on ne peut dire que l’appelant a volontairement omis de payer un tel montant d’argent; il manquait l’intention criminelle.
[20] Dans le cas présent, la défense d’indigence ne pourrait trouver application puisque cette défense exige le dénuement le plus complet, ce qui n’était pas le cas de monsieur Tremblay puisqu’il a acquitté les dettes qui lui semblaient préférables, en l’occurrence les honoraires de son avocat, au détriment de son ordonnance de probation. De plus, étant homme d’affaires, il savait ou s’est aveuglé volontairement qu’il ne pourrait à court et à moyen terme (c’est-à-dire dans les délais prescrits) rembourser les sommes dues. L’accusé, trop content de recevoir une absolution conditionnelle à son remboursement émis dans l’ordonnance de probation, n’a pas voulu faire de vagues et expliquer sa situation de peur d’une peine plus lourde. Il a accepté la peine et a même payé dans l’intervalle d’autres dettes que la peine qui lui avait été infligée. Il est donc clair que l’accusé n’a pas pris les mesures raisonnables pour s’acquitter de sa dette ou s’est aveuglé volontairement.
[21] Monsieur Tremblay ne peut non plus invoquer comme moyen de défense qu’il ignorait pouvoir obtenir une extension de délai à cause du changement de procureur au dossier. En effet, même si dans R. c. Docherty une exception est créée au principe que nul n’est censé ignorer la loi, cette exception s’applique à une croyance honnête que son comportement ne contrevient pas à l’ordonnance parce que ce n’était pas un crime.
[22] L’accusé savait pertinemment que le fait de ne pas payer le montant de 3 000 $ contrevenait à l’ordonnance de probation. Il ne peut donc invoquer l’exception à l’article 19 C. cr.
[23] L’auteur Sophie Bourque explique
Depuis la décision R. Docherty le législateur a modifié le Code criminel en remplaçant à l’article 733.1 le mot « volontairement » par « sans excuse raisonnable », dans l’intention évidente de ne plus permettre l’utilisation de l’erreur de droit à l’encontre d’une accusation de bris de probation. Le degré de mens rea n’étant plus aussi élevé, il est peu probable que les tribunaux accepteront l’ignorance de la loi à titre d’excuse raisonnable à la perpétration d’une telle infraction.
[24] Pour répondre à la dernière question, puisque l’article 733.1 fait référence aux mots « sans excuse raisonnable », la Couronne n’a pas à prouver que l’accusé avait l’intention d’omettre volontairement de payer. La preuve d’indigence ne doit servir qu’à lui procurer une excuse raisonnable.
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