mercredi 29 mai 2013

Détermination de la peine en matière de vol qualifié

R. c. Lubin Durand, 2012 QCCS 6713 (CanLII)

Lien vers la décision

[33]        La procureure de l’accusé soumet les précédents jurisprudentiels suivants :
a)   R. c. Vandal, J.E. 2002-621 (C.Q.)
L’accusé âgé de 33 ans a reconnu sa culpabilité sous neuf chefs d’accusation reliés à trois séries d’événements.
Le premier, un vol qualifié au cours duquel il a utilisé une fausse arme à feu, a séquestré ou saisi de force le gardien, a eu en sa possession, sans excuse légitime, des instruments servant à une introduction par effraction et s’est déguisé lors de la perpétration de l’infraction.
Le deuxième, une introduction par effraction dans une mine pour y voler des explosifs et la possession, sans excuse légitime, de ces explosifs.
Le troisième, un complot pour commettre un autre vol d’explosifs à la même mine.
L’accusé a des antécédents judiciaires de vol et recel, il n’affiche pas de remords face à ses victimes et il présente, selon un rapport de probation, des risques de récidive. Selon le juge d’instance, même si le pronostic à court terme n’est pas favorable, il n’en demeure pas moins que l’accusé est jeune et que son intelligence et sa grande capacité d’adaptation laissent entrevoir une possibilité de réhabilitation. Tenant compte de cent quarante-sept (147) jours que l’accusé a passés en détention préventive, soit l’équivalent de dix (10) mois de détention, le juge lui impose les peines suivantes : un emprisonnement de dix-huit (18) mois pour le vol qualifié et de douze (12) mois consécutifs pour l’usage d’une fausse arme à feu, douze (12) mois concurrents pour séquestration, possession d’outils de cambriolage et déguisement dans un dessein criminel pour un total de trente (30) mois, dix (10) mois pour introduction par effraction et quatre (4) mois consécutifs pour complot, ces peines consécutives à celle de trente (30) mois, pour un total de quarante‑quatre (44) mois d’emprisonnement.
b)   R. Constantineau 2012 QCCA 1312 (CanLII), (2012 QCCA 1312)
L’accusé, dont l’âge n’est pas mentionné dans l’arrêt, a commis un complot, un vol qualifié et des voies de fait alors qu’il portait une arme. Le juge de première instance lui a imposé une peine de seize (16) mois de détention, moins la détention provisoire de deux cent sept (207) jours. La Cour d’appel rejette la requête du ministère public pour permission d’en appeler de la peine. Elle écrit :
[4]         Le juge de première instance a tenu compte du témoignage de l'agent de probation qui écrit ce qui suit dans son rapport :
Par le passé, monsieur a fait montre d'un manque de conformisme en omettant de réaliser ses travaux communautaires en 2009, mais il a exécuté, avec satisfaction de la ressource, les travaux prescrits en 2010. Au cours des quatre dernières années, nous constations que monsieur a diminué ses agirs délictueux, il a stabilisé sa vie en travaillant et il a commencé à changer son réseau social alors nous croyons qu'il s'est mobilisé dans un certain changement.
Ceci dit, la présente mesure de détention préventive semble avoir eu les effets escomptés. Le sujet est davantage conscient des pertes encourues dans sa vie, il reconnaît ses problématiques et une mobilisation est amorcée. Nous constatons que le degré de malaise est bien présent et la volonté de changement l'est également. Son projet de réinsertion sociale est réalisable avec un encadrement serré et le support des siens (famille, conjointe et ami), diminuant ainsi le risque de récidive en matière criminelle.
Pour ce faire, monsieur doit demeurer abstinent (l'alcool / drogues), éviter les pairs déviants (consommateurs) et maintenir un emploi déclaré. De plus, il devra effectuer un suivi psychosocial afin d'aborder les problèmes susmentionnés et développer de nouvelles stratégies d'adaptation.
[34]        Dans R. c. Deschênes[4]le juge Claude C. Gagnon, j.c.s., passe en revue plusieurs précédents jurisprudentiels :
22.1      R. c. Corkum [1997] N.S.J. no. 421 (N.S. Sup. Court) :
w         L’accusé de 26 ans a commis deux vols qualifiés en menaçant ses victimes avec une note écrite.  Ses nombreux antécédents comprennent une condamnation à trente mois pour  vol qualifié.  La peine prononcée est de cinq (5) ans de prison.
R. c. A.D.P.  [2005] B.C.J. no 2737 (B.C.C.A.)
La Cour d’appel inflige à un accusé de 37 ans, déjà condamné à seize (16) mois et à quatre (4) ans pour des vols qualifiés, à une peine de six (6) ans en lieu et place de la peine avec sursis imposée en première instance.  L’accusé avait alors volé sous la menace trois postes d’essence de sommes d’argent inférieures à 150,00 $ en menaçant les commis.

R. c. MacDonald - 2006 B.C.C.A. 535
w         La Cour réduit de huit (8) à quatre (4) ans la peine d’un accusé de 45 ans, au long casier judiciaire, qui a commis deux vols à la pointe d’un couteau parce que le premier juge n’a pas suffisamment considéré une période d’accalmie de douze (12) années pendant laquelle MacDonald n’avait pas été condamné et avait travaillé régulièrement.
22.4      R. c. Allin – 2001 B.C.C.A. 710
w         La Cour confirme une peine de vingt-quatre (24) mois de prison pour vol qualifié consécutive à une peine de seize (16) mois. Le crime est commis dans une banque où l’accusé a exhibé au commis une note menaçante.  Allin a un passé judiciaire comprenant vingt-huit (28) condamnations dont deux (2) pour des vols qualifiés.  Au moment du vol reproché, la dépendance de l’accusé à la drogue était hors de contrôle.
22.5      R. c. Craig [2007] B.C.P.C. 144
w         L’accusé est condamné à cinq (5) ans de prison pour deux vols qualifiés dans des banques, commis au moyen de notes menaçantes.  Craig, 27 ans, avait un problème de dépendance à la drogue et cinq (5) antécédents judiciaires de vols qualifiés.  Les crimes reprochés avaient été commis peu de temps après sa sortie de prison et alors qu’il était encore sous libération conditionnelle.
22.6      R. c. Packwood [1991] A.Q. no 221 (C.A.Q.)
w         La Cour d’appel réduit à quatre (4) ans la peine pour un vol qualifié commis par un accusé déjà condamné à douze (12) reprises pour vol qualifié en treize (13) ans.  La peine est réduite en raison de la probabilité raisonnable de réhabilitation.
22.7      R. c. Dionne [2004 ] B.C.C.A.
w         La Cour confirme, dans le cas de l’appelant, la peine de trois (3) ans prononcée en première instance pour un vol qualifié commis par trois (3) individus en usant de menaces implicites.  L’accusé, qui était resté à l’extérieur de la banque, avait déjà à son passif onze (11) condamnations antérieures pour de tels crimes.  Le Tribunal note cependant que la peine se situe « at the very low end of the range for this offence committed by this offender… »
23.1      R. c. Upton (2006) B.C.P.C. 496.
w         L’accusé, qui avait un problème de dépendance à la drogue, a commis trois (3) vols qualifiés en exhibant une note évoquant la possibilité qu’il devienne violent.  Au moment de ses crimes, il était sous libération conditionnelle suite à une condamnation de cinquante-quatre (54) mois pour vol qualifié.  Le Tribunal lui impose une peine de six (6) ans consécutive à la partie non purgée de sa peine précédente.
23.2      R. c. D. (D.A.) 2001 S.K.C.A. 14
w         L’accusé a commis deux (2) vols qualifiés en présentant des notes menaçantes à des commis féminins où il exigeait l’argent de leurs caisses.  Il avait déjà été condamné à une cinquantaine de reprises et était en libération conditionnelle au moment de la commission des crimes reprochés, suite à une condamnation à cinq (5) ans pour vol à main armée.  Le Tribunal infirme la peine de quatre ans et demi (4 ½) imposée par le premier juge et impose plutôt huit (8) années de détention.
23.3      R. c. Bezdan – 2001 B.C.C.A. 215
w         L’accusé se présente dans une banque et remet au commis une note dans laquelle il exige la remise de l’argent.  Condamné à plusieurs reprises, dont sept (7) fois pour vol qualifié au cours des quinze (15) dernières années, l’accusé était toujours sous probation lors du vol de banque.  La Cour d’appel confirme une peine de cinq (5) années parce que le premier juge avait eu raison, compte tenu des faibles probabilités de réhabilitation, de faire primer la protection du public dans le cas de l’accusé qui a l’habitude de commettre des vols qualifiés pour satisfaire sa dépendance à la cocaïne.

23.4      R. c. Kirby (06-04-1992) C.A. Montréal 500-10-000350-916 (1992) (C.A. Québec)
w         L’accusé plaide coupable à un vol de deux cent soixante dollars (260,00 $) commis en exhibant une note menaçante à une caissière. Âgé de 29 ans, il est un consommateur abusif de drogue et d’alcool depuis plus de dix (10) ans et a commis plusieurs vols qualifiés pour satisfaire à sa dépendance.  La Cour d’appel réduit de cinq (5) à deux (2) ans moins un (1) jour sa peine pour tenir compte de la possibilité réelle de réhabilitation de l’accusé.
[35]        Cette revue amène le juge Gagnon à conclure :
[25]      L’expérience judiciaire nous enseigne donc que les peines pour le vol qualifié commis en utilisant la menace et sans causer de lésions corporelles aux victimes, varient entre deux (2) et neuf (9) ans pour un récidiviste en semblable matière.
[36]        Les facteurs atténuants dans la présente affaire sont :
•         les plaidoyers de culpabilité;
•         l’âge relativement jeune de l’accusé, 33 ans, au moment de la commission des infractions;
•         le fait qu’il n’a été, entre le 1er août 2008 et le 12 mai 2011, soit pendant près de trois ans, impliqué dans aucune infraction de nature criminelle, si ce n’est celle pour laquelle il se trouvait, le 12 mai 2011, en liberté sur engagement dans un dossier où on lui reproche d’avoir fait souffrir inutilement un animal, accusation dont l’issue n’est pas connue au moment de l’audition et du prononcé de la peine;
•         le fait qu’il ait occupé pendant plus d’un an des emplois à la satisfaction de ses employeurs;
•         l’absence d’antécédents judiciaires de vol qualifié;
•         l’absence de preuve quant à des séquelles à moyen ou long terme chez la victime du vol qualifié;
•         le fait que l’accusé exprime des regrets à l’endroit de cette victime, bien que sa sincérité paraît peu certaine.
[37]        Les facteurs aggravants sont les suivants :
•         la gravité objective des délits, particulièrement celle pour vol qualifié;
•         la préméditation dans la commission du vol qualifié : il a établi le lien entre ses deux complices Deschênes et Beaudry, a préparé les tuques aux fins de déguisement, a préparé l’utilisation d’une fausse arme à feu;
•         l’utilisation de voies de fait contre la victime de vol qualifié, bien que cette dernière n’ait pas souffert de lésions corporelles;
•         la tentative de minimiser sa participation et de faire porter une plus grande part de responsabilité sur une complice;
•         le nombre d’antécédents judiciaires dont vol, introduction par infraction, voies de fait et menaces et vingt (20) bris de probation ou d’ordonnance;
•         le fait que l’accusé était en liberté sous engagement au moment de la commission des crimes.
[41]        CONDAMNE Hérold Steve Lubin Durand aux peines d’emprisonnement suivantes :
a)            Sur le deuxième chef d’accusation, vol qualifié : un emprisonnement de trente (30) mois;
b)            Sur le troisième chef d’accusation, utilisation d’une fausse arme à feu lors de la perpétration d’un vol qualifié : un emprisonnement de douze (12) mois consécutifs;
c)            Sur le quatrième chef d’accusation, déguisement dans l’intention de commettre un acte criminel : un emprisonnement de six (6) mois concurrents;
pour un total de quarante-deux (42) mois d’emprisonnement, desquels doit être déduit le temps déjà couru depuis le 25 août 2011 jusqu’à ce jour, soit quinze (15) mois et douze (12) jours, ce qui établit la peine à être purgée à vingt-six (26) mois et dix-huit (18 jours), à compter de ce jour;

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