R. c. S.B., 2013 QCCQ 3525 (CanLII)
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[63] L’élément matériel de l’infraction consiste dans le fait pour l’accusé d’adopter une conduite (action ou omission) tendant à entraver, détourner ou contrecarrer le cours de la justice. Une intention spécifique est requise. Une simple erreur de jugement ne suffit pas. La poursuite doit prouver hors de tout doute raisonnable que l’accusé avait bel et bien l’intention d’entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice : R. c. Charbonneau 1992 CanLII 2979 (QC CA), (1992), 13 C.R. (4th) 191 (C.A.Qué.); R. c. Beaudry 2007 CSC 5 (CanLII), 2007 CSC 5, aux paragraphes 52 et 85.
[65] Le début du paragraphe 139(3) du Code criminel stipule que les façons ainsi évoquées ne doivent pas restreindre la portée générale du paragraphe 139(2) C.cr., qui lui, se veut d’application large et permet d’englober plusieurs conduites criminellement blâmables.
[66] Le fait que l’accusé n’obtienne pas ce qu’il recherche n’est pas pertinent : R. c. Hearn, 1989 CanLII 14 (CSC), [1989] 2 R.C.S. 1180. Incidemment, même si la fameuse lettre P-2 n’a pas été remise à Y, ni lue par cette dernière, cela demeure sans conséquence.
[67] De l’arrêt R. c. Barros se dégage un consensus des juges de la Cour suprême sur le sort du pourvoi concernant le chef d’entrave à la justice. Selon les enseignements de la cour, une telle infraction est définie de façon large. La limite qu’il convient d’imposer se trouve dans l’obligation pour le ministère public de prouver l’élément mental : Barros précité, au paragraphe 46.
[70] Lorsqu’un accusé demande directement ou indirectement à une présumée victime ou un plaignant de solliciter auprès des autorités (DPCP ou policiers) le retrait des accusations criminelles portées (ou dont le dépôt est à venir) contre lui, en recherchant ainsi à se soustraire au processus judiciaire (que ce soit dans le but d’éviter une éventuelle condamnation et l’imposition d’une peine ou encore de subir l’opprobre ou le stigmate d’une inculpation criminelle, voire même d’éviter d’engager des honoraires d’avocat pour se défendre), il commet alors une entrave à la justice au sens du paragraphe 139(2) du Code criminel.
[71] Cela vaut aussi pour toute personne qui agit pour le compte d’un tiers inculpé au criminel, comme par exemple, un avocat.
[72] À moins de particularité en ce sens dans le libellé de l’inculpation, je suis d’opinion qu’aucune preuve d’intimidation, de menace ou de corruption n’est nécessaire sous le paragraphe 139(2) du Code criminel, quoiqu’une telle preuve, si elle existe, puisse faciliter la démonstration de l’intention coupable : R. c. Reynolds, 2011 CSC 19 (CanLII), 2011 CSC 19.
[73] Dans Reynolds, précité, la Cour suprême a adopté l’opinion du juge dissident en Cour d’appel et a rétabli le verdict de culpabilité rendu en première instance. M. Reynolds avait suggéré à un témoin de se soustraire à son assignation à comparaître en présentant un faux certificat médical. Dans cette affaire, la poursuite avait, à la demande du juge, apporté une précision au chef d’accusation tel qu’exigé, en ajoutant les mots : « by threat or other corrupt means », ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Il existe en jurisprudence d’autres exemples de condamnation d’entrave à la justice sous le paragraphe 139(2) C.cr., sans que l’accusé n’ait explicitement recours à des menaces d’intimidation ou de violence, ni autre moyen de corruption.
[74] Évidemment, simplement inciter ou tenter de convaincre un éventuel témoin à ne s’en tenir qu’à exposer la vérité dans son éventuel témoignage ne constitue pas une entrave à la justice : R. c. Paré, 2010 ONCA 563 (CanLII), 2010 ONCA 563 au paragraphe 9.
mercredi 26 juin 2013
Comment traiter une menace et l'expression « le cours de la justice » relative à une accusation d'entrave à la justice
Couture c. R., 2012 QCCA 243 (CanLII)
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[46] Une menace à l'égard d'une victime peut empêcher l'institution de poursuites et détourner le cours de la justice. L'expression « le cours de la justice » inclut l'étape de l'enquête donnant lieu à une poursuite judiciaire ou quasi judiciaire
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[46] Une menace à l'égard d'une victime peut empêcher l'institution de poursuites et détourner le cours de la justice. L'expression « le cours de la justice » inclut l'étape de l'enquête donnant lieu à une poursuite judiciaire ou quasi judiciaire
mardi 25 juin 2013
L'infraction de voies de fait et la défense de plaisanterie
R c Lacerte, 2013 QCCQ 5793 (CanLII)
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[78] L'infraction de voies de fait en est d'intention générale, en ce sens qu'un accusé, pour être déclaré coupable, se doit d'avoir l'intention d'appliquer la force contre une autre personne sans le consentement de cette dernière.
[86] En principe, l'infraction de voies de fait rend irrecevable la défense de plaisanterie parce que cette infraction consiste à appliquer intentionnellement, et non par accident ni par inadvertance, la force à quelqu'un.
[87] La raison ou le mobile pour lequel on a appliqué la force, que ce soit par plaisanterie ou par vengeance n'a plus aucune importance.
[88] Dans une décision rendue par la Cour provinciale de l'Ontario, R. c. Engfield concernant une affaire de voies de fait, on peut lire, à la page 6, ce qui suit :
«The reason or purpose for the application of force is clearly irrelevant. Therefore, the reason that it was applied innocently or as a joke is also irrelevant.»
[89] Il faut ajouter que le degré de force utilisée n'a pas à être pris en compte, un simple contact suffit, tel que le geste de pointer du doigt la poitrine de quelqu'un d'autre.
[90] Certes, les voies de fait supposent un contact avec une autre personne mais encore faut-il que ce soit sans le consentement de cette dernière.
[91] Cette précision revêt toute son importance même dans le cas d'une personne qui, par plaisanterie, applique intentionnellement la force sur quelqu'un d'autre.
[92] En effet, si le plaisantin croit honnêtement et sincèrement que la victime prendra le geste à la légère ou y consentira ou le tolèrera, la plaisanterie devra alors être considérée et prise en compte à cette seule fin.
[93] Le contexte de la plaisanterie devra servir à évaluer la sincérité de la croyance.
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[78] L'infraction de voies de fait en est d'intention générale, en ce sens qu'un accusé, pour être déclaré coupable, se doit d'avoir l'intention d'appliquer la force contre une autre personne sans le consentement de cette dernière.
[86] En principe, l'infraction de voies de fait rend irrecevable la défense de plaisanterie parce que cette infraction consiste à appliquer intentionnellement, et non par accident ni par inadvertance, la force à quelqu'un.
[87] La raison ou le mobile pour lequel on a appliqué la force, que ce soit par plaisanterie ou par vengeance n'a plus aucune importance.
[88] Dans une décision rendue par la Cour provinciale de l'Ontario, R. c. Engfield concernant une affaire de voies de fait, on peut lire, à la page 6, ce qui suit :
«The reason or purpose for the application of force is clearly irrelevant. Therefore, the reason that it was applied innocently or as a joke is also irrelevant.»
[89] Il faut ajouter que le degré de force utilisée n'a pas à être pris en compte, un simple contact suffit, tel que le geste de pointer du doigt la poitrine de quelqu'un d'autre.
[90] Certes, les voies de fait supposent un contact avec une autre personne mais encore faut-il que ce soit sans le consentement de cette dernière.
[91] Cette précision revêt toute son importance même dans le cas d'une personne qui, par plaisanterie, applique intentionnellement la force sur quelqu'un d'autre.
[92] En effet, si le plaisantin croit honnêtement et sincèrement que la victime prendra le geste à la légère ou y consentira ou le tolèrera, la plaisanterie devra alors être considérée et prise en compte à cette seule fin.
[93] Le contexte de la plaisanterie devra servir à évaluer la sincérité de la croyance.
samedi 15 juin 2013
FORMES COURANTES DE SOUMISSIONS CONCERTÉES DANS LES MARCHÉS PUBLICS
Offres de couverture. L'offre de couverture (dite également "complémentaire", "de complaisance", "fictive", ou "symbolique") est la technique la plus fréquemment utilisée pour les soumissions concertées. Il y a offre de couverture lorsqu'un individu ou une entreprise accepte de soumettre une offre qui comporte au moins une des caractéristiques suivantes : (1) un concurrent accepte de soumettre une offre qui est plus élevée que celle de l'entreprise censée remporter le marché, (2) un concurrent soumet une offre dont on sait qu'elle est trop élevée pour être acceptée, ou (3) un concurrent soumet une offre qui est assortie de conditions spéciales notoirement inacceptables par l'acheteur. Les offres de couverture visent à donner l'apparence d'une véritable concurrence
Les schémas de suppression d'offres. Les schémas de suppression d'offres résultent d'accords entre concurrents par lesquels une ou plusieurs entreprises conviennent de ne pas soumissionner ou de retirer une offre faite précédemment, de façon que soit acceptée l'offre de l'entreprise censée remporter le marché. En définitive, la suppression d'offres signifie que l'entreprise ne soumet pas une offre pour examen final.
Rotation des offres. Lorsqu'il y a rotation des offres, les entreprises parties à la collusion continuent de soumissionner, mais elles conviennent que chacune remportera à tour de rôle le marché. La rotation des offres peut prendre des formes très variables. Par exemple, les entreprises parties à la collusion pourront choisir d'attribuer à chacune d'entre elles une valeur monétaire approximativement égale correspondant à un certain groupe de marchés, ou d'attribuer des volumes correspondant à la taille de chaque entreprise.
Répartition des marchés. Les concurrents procèdent à un "dépeçage" du marché et conviennent de ne pas se concurrencer pour certains clients ou certaines zones géographiques. Les entreprises concurrentes peuvent, par exemple, affecter certains clients ou types de clients à certaines entreprises, de façon que leurs concurrentes ne soumissionnent pas (ou ne soumettent qu'une offre de couverture) aux marchés passés par
une certaine catégorie de clients potentiels. En contrepartie, le concurrent bénéficiaire ne soumettra pas d'offres concurrentielles pour les marchés passés par une certaine catégorie de clients réservée aux autres entreprises parties à l'accord.
Tiré de: OCDE : LIGNES DIRECTRICES POUR LA LUTTE CONTRE LES SOUMISSIONS CONCERTÉES DANS LES MARCHÉS PUBLICS
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https://www.ceic.gouv.qc.ca/fileadmin/Fichiers_client/centre_documentaire/Piece_5P-100.pdf
Les schémas de suppression d'offres. Les schémas de suppression d'offres résultent d'accords entre concurrents par lesquels une ou plusieurs entreprises conviennent de ne pas soumissionner ou de retirer une offre faite précédemment, de façon que soit acceptée l'offre de l'entreprise censée remporter le marché. En définitive, la suppression d'offres signifie que l'entreprise ne soumet pas une offre pour examen final.
Rotation des offres. Lorsqu'il y a rotation des offres, les entreprises parties à la collusion continuent de soumissionner, mais elles conviennent que chacune remportera à tour de rôle le marché. La rotation des offres peut prendre des formes très variables. Par exemple, les entreprises parties à la collusion pourront choisir d'attribuer à chacune d'entre elles une valeur monétaire approximativement égale correspondant à un certain groupe de marchés, ou d'attribuer des volumes correspondant à la taille de chaque entreprise.
Répartition des marchés. Les concurrents procèdent à un "dépeçage" du marché et conviennent de ne pas se concurrencer pour certains clients ou certaines zones géographiques. Les entreprises concurrentes peuvent, par exemple, affecter certains clients ou types de clients à certaines entreprises, de façon que leurs concurrentes ne soumissionnent pas (ou ne soumettent qu'une offre de couverture) aux marchés passés par
une certaine catégorie de clients potentiels. En contrepartie, le concurrent bénéficiaire ne soumettra pas d'offres concurrentielles pour les marchés passés par une certaine catégorie de clients réservée aux autres entreprises parties à l'accord.
Tiré de: OCDE : LIGNES DIRECTRICES POUR LA LUTTE CONTRE LES SOUMISSIONS CONCERTÉES DANS LES MARCHÉS PUBLICS
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https://www.ceic.gouv.qc.ca/fileadmin/Fichiers_client/centre_documentaire/Piece_5P-100.pdf
vendredi 14 juin 2013
La notion de détournement concernant l'infraction de vol
«Détourner» signifie agir d'une manière incompatible avec les conditions régissant la possession d'une chose. Le mot «possession» est le mot qui, dans son sens le plus large, recouvre la possession, la garde, le droit partiel de propriété et le droit du fiduciaire.
(...)
Les conditions régissant la possession sont dans la plupart des cas expresses mais elles peuvent également être tacites.
(...)
Il va sans dire que la question de savoir si le possesseur a une conduite incompatible doit s'apprécier en regard des conditions régissant la possession. En règle générale, il doit y avoir commission: le délinquant doit faire quelque chose qui soit incompatible avec les conditions régissant sa détention du bien, par exemple, le vendre, le mettre en gage ou en disposer. Dans les cas ordinaires, une simple omission n'est pas suffisante. Ainsi, le simple défaut de faire remise d'une chose louée ou empruntée ne constitue pas un détournement. Toutefois, une décision ferme de conserver la chose constitue un détournement
Tiré de :
Commission de réforme du droit du Canada, le vol et la fraude, 12e RAPPORT LE VOL ET LA FRAUDE, Ministre des Approvisionnements et Services Canada 1977
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http://www.lareau-legal.ca/LRCWP19French.pdf
(...)
Les conditions régissant la possession sont dans la plupart des cas expresses mais elles peuvent également être tacites.
(...)
Il va sans dire que la question de savoir si le possesseur a une conduite incompatible doit s'apprécier en regard des conditions régissant la possession. En règle générale, il doit y avoir commission: le délinquant doit faire quelque chose qui soit incompatible avec les conditions régissant sa détention du bien, par exemple, le vendre, le mettre en gage ou en disposer. Dans les cas ordinaires, une simple omission n'est pas suffisante. Ainsi, le simple défaut de faire remise d'une chose louée ou empruntée ne constitue pas un détournement. Toutefois, une décision ferme de conserver la chose constitue un détournement
Tiré de :
Commission de réforme du droit du Canada, le vol et la fraude, 12e RAPPORT LE VOL ET LA FRAUDE, Ministre des Approvisionnements et Services Canada 1977
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http://www.lareau-legal.ca/LRCWP19French.pdf
La question de la compensation / remboursement en regard de la commission d'une infraction à caractère acquisitif
R. c. Olan et al., 1978 CanLII 9 (CSC), [1978] 2 RCS 1175
Quoi qu’il en soit, l’intention de rembourser n’a jamais permis d’excuser une fraude si la preuve révèle que la conduite de l’accusé a donné lieu à un détournement malhonnête à des fins personnelles .
R. c. Zlatic, [1993] 2 R.C.S. 29
Si l'actus reus a entraîné une privation ou un risque de privation, l'intention de compenser la perte ou de supprimer le risque ne constitue pas un moyen de défense. L'infraction est complète et une bonne intention ne sauvera pas l'accusé .
Quoi qu’il en soit, l’intention de rembourser n’a jamais permis d’excuser une fraude si la preuve révèle que la conduite de l’accusé a donné lieu à un détournement malhonnête à des fins personnelles .
R. c. Zlatic, [1993] 2 R.C.S. 29
Si l'actus reus a entraîné une privation ou un risque de privation, l'intention de compenser la perte ou de supprimer le risque ne constitue pas un moyen de défense. L'infraction est complète et une bonne intention ne sauvera pas l'accusé .
mercredi 12 juin 2013
Comment la dissuasion est définie par la Cour Suprême
R. c. B.W.P.; R. c. B.V.N., 2006 CSC 27 (CanLII), [2006] 1 RCS 941
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2 En tant que principe de détermination de la peine, la dissuasion consiste à imposer une sanction dans le but de décourager le délinquant, et quiconque, de se livrer à des activités criminelles. Lorsque la dissuasion vise le délinquant traduit devant le tribunal, on parle de « dissuasion spécifique », lorsqu’elle vise d’autres personnes, on parle de « dissuasion générale ». Les présents pourvois portent sur la dissuasion générale, qui est censée opérer ainsi : des criminels potentiels éviteront de se livrer à des activités criminelles en raison de l’exemple donné par la punition infligée au délinquant. Quand la dissuasion générale est prise en compte dans la détermination de la peine, le délinquant est puni plus sévèrement, non seulement parce qu’il le mérite, mais également parce que le tribunal décide de transmettre un message à quiconque pourrait être tenté de se livrer à des activités criminelles similaires.
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2 En tant que principe de détermination de la peine, la dissuasion consiste à imposer une sanction dans le but de décourager le délinquant, et quiconque, de se livrer à des activités criminelles. Lorsque la dissuasion vise le délinquant traduit devant le tribunal, on parle de « dissuasion spécifique », lorsqu’elle vise d’autres personnes, on parle de « dissuasion générale ». Les présents pourvois portent sur la dissuasion générale, qui est censée opérer ainsi : des criminels potentiels éviteront de se livrer à des activités criminelles en raison de l’exemple donné par la punition infligée au délinquant. Quand la dissuasion générale est prise en compte dans la détermination de la peine, le délinquant est puni plus sévèrement, non seulement parce qu’il le mérite, mais également parce que le tribunal décide de transmettre un message à quiconque pourrait être tenté de se livrer à des activités criminelles similaires.
L'interdiction de conduire imposée à des délinquants ayant commis l'infraction de conduite dangereuse causant la mort se situe généralement entre trois et cinq ans
Bilodeau c. R., 2013 QCCA 980 (CanLII)
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[62] Un tour d'horizon des arrêts récents de la Cour en la matière montre que l'interdiction de conduire imposée à des délinquants similaires ayant commis des crimes similaires se situe généralement entre trois et cinq ans.
[63] Dans R. c. Roy, la Cour confirme la peine imposée en première instance à la suite d'une course de rue planifiée entre deux amis. L'accusé, qui détenait un permis probatoire, avait consommé de l'alcool. La victime a rapidement gagné la course. À son retour vers la municipalité d'où ils étaient partis, la victime, suivie de l'accusé, a fait une manœuvre dans un virage et heurté un poteau. Elle est décédée sur le coup. La victime était le principal responsable de son accident. L'accusé, un jeune homme sans antécédents, dans une relation amoureuse stable et avec un emploi stable, a écopé de 90 jours de prison discontinus, avec trois ans de probation et une interdiction de conduire de trois ans.
[64] Dans R. c. Perry, une affaire de conduite dangereuse causant la mort dans le cadre d'une course de rue en motocyclette, la peine imposée était une peine avec sursis de deux ans moins un jour, avec une interdiction de conduire subséquente de un an. La Cour infirme la peine en partie seulement et substitue à la peine avec sursis une peine de 23 mois ferme d'emprisonnement[20]. La période d'interdiction de conduire n'est pas remise en question en appel. Le jeune homme impliqué détenait une longue liste de facteurs aggravants : son permis était suspendu lors de la course, il avait un passager alors que cela lui était interdit, il avait de nombreuses infractions antérieures d'excès de vitesse et la course a entraîné une mort et des lésions chez deux autres personnes. Il n'avait cependant pas d'antécédents judiciaires, poursuivait des études au cégep et était propriétaire de sa propre entreprise de lavage de vitres.
[65] Par ailleurs, dans Fournier c. R., un dossier de conduite dangereuse causant la mort, la Cour infirme la peine de détention de trois ans et l'interdiction de conduire de trois ans pour la remplacer par une détention de 18 mois et une interdiction de conduire de deux ans. On a ainsi voulu éviter le pénitencier au jeune homme impliqué, favorisant sa réhabilitation, et ce, puisqu'il acceptait les conséquences de ses gestes et les regrettait sincèrement.
[66] Dans Paré c. R., une affaire de conduite avec facultés affaiblies et de conduite dangereuse causant la mort, la Cour infirme les peines d'emprisonnement concurrentes de cinq et trois ans et les interdictions de conduire de dix et huit ans imposées par le premier juge. Elle y substitue des peines réduites de prison de trois ans et trente mois et des interdictions de conduire de six et cinq ans. L'accusé n'a pas d'antécédents judiciaires, bénéficie d'un rapport présentenciel favorable, a un bon dossier de conduite, accepte la responsabilité de ses gestes, témoigne d'empathie envers la famille de la victime et exprime des remords sincères.
[67] Dans R. c. Fortin, un autre dossier de conduite dangereuse causant la mort, la Cour confirme une peine de deux ans d'emprisonnement avec interdiction de conduire un véhicule moteur et révocation du permis de conduire pour trois ans. Le premier juge avait insisté sur l'importance de la dissuasion et de l'exemplarité à cause, entre autres, de la haute vitesse de l'appelant (215 km/h).
[68] Dans R. c. Montuori, l'accusé avait écopé de six mois d'emprisonnement et d'une probation de deux ans assortie d'une ordonnance lui interdisant de conduire un véhicule pour une durée de cinq ans à la suite d'une accusation de conduite dangereuse causant des lésions corporelles. En appel de la durée de l'interdiction de conduire, la Cour conclut qu'une période d'interdiction de cinq ans était justifiée puisque le délinquant avait un permis probatoire au moment de l'incident, qu'il circulait à une vitesse de 216 km/h dans une zone de 100 km/h et qu'il a tenté de fuir les policiers pour éviter son arrestation. Même si la durée de l'interdiction pouvait sembler longue, elle se devait de refléter la dissuasion générale et l'exemplarité nécessaires se rattachant aux circonstances de la commission de l'infraction.
[69] Dans Ferland c. R., la Cour confirme une peine pour conduite dangereuse causant la mort et conduite dangereuse causant des lésions de 3½ ans de détention et de trois ans d'interdiction de conduire. La peine était justifiée par la vitesse (160 km/h) dans des conditions de pluie intense, alors que l'accusé avait 32 ans et une condamnation antérieure pour conduite avec facultés affaiblies.
[70] Il y a quelques années, avant les amendements de 2006 j'en conviens, dans Olivier c. R., un cas de négligence criminelle ayant causé la mort de deux personnes à l'occasion d'une course de rue spontanée, la Cour maintient la peine d'emprisonnement de trois ans accompagnée d'une interdiction de conduire de cinq ans. Pour justifier une peine sévère, on a retenu les infractions antérieures de comportement dangereux sur la route, dont leur similitude et proximité avec la conduite reprochée.
[71] Je note de ces arrêts prononcés au cours des dernières années que, dans aucun cas, la période d'interdiction de conduire ne dépasse cinq ans lorsqu'il s'agit de conduite dangereuse causant la mort. En outre, dans tous ces cas, il est difficile de savoir s'il y a eu une longue période d'interdiction préalable au verdict et à la peine comme dans la situation de l'appelant.
[72] Il est vrai que, dans son exposé, le ministère public relève quelques arrêts rendus en Ontario et au Manitoba où les interdictions de conduire ont été de dix ans ou d'environ sept ans dans des cas de conduite dangereuse causant la mort.
[73] Cependant, d'une part, je note que ces exemples se démarquent de la jurisprudence de la Cour sur la question. D'autre part, je constate que, dans plusieurs de ces décisions, la longue période d'interdiction de conduire est consécutive à une peine d'emprisonnement plus courte que celle imposée ici par la juge.
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[62] Un tour d'horizon des arrêts récents de la Cour en la matière montre que l'interdiction de conduire imposée à des délinquants similaires ayant commis des crimes similaires se situe généralement entre trois et cinq ans.
[63] Dans R. c. Roy, la Cour confirme la peine imposée en première instance à la suite d'une course de rue planifiée entre deux amis. L'accusé, qui détenait un permis probatoire, avait consommé de l'alcool. La victime a rapidement gagné la course. À son retour vers la municipalité d'où ils étaient partis, la victime, suivie de l'accusé, a fait une manœuvre dans un virage et heurté un poteau. Elle est décédée sur le coup. La victime était le principal responsable de son accident. L'accusé, un jeune homme sans antécédents, dans une relation amoureuse stable et avec un emploi stable, a écopé de 90 jours de prison discontinus, avec trois ans de probation et une interdiction de conduire de trois ans.
[64] Dans R. c. Perry, une affaire de conduite dangereuse causant la mort dans le cadre d'une course de rue en motocyclette, la peine imposée était une peine avec sursis de deux ans moins un jour, avec une interdiction de conduire subséquente de un an. La Cour infirme la peine en partie seulement et substitue à la peine avec sursis une peine de 23 mois ferme d'emprisonnement[20]. La période d'interdiction de conduire n'est pas remise en question en appel. Le jeune homme impliqué détenait une longue liste de facteurs aggravants : son permis était suspendu lors de la course, il avait un passager alors que cela lui était interdit, il avait de nombreuses infractions antérieures d'excès de vitesse et la course a entraîné une mort et des lésions chez deux autres personnes. Il n'avait cependant pas d'antécédents judiciaires, poursuivait des études au cégep et était propriétaire de sa propre entreprise de lavage de vitres.
[65] Par ailleurs, dans Fournier c. R., un dossier de conduite dangereuse causant la mort, la Cour infirme la peine de détention de trois ans et l'interdiction de conduire de trois ans pour la remplacer par une détention de 18 mois et une interdiction de conduire de deux ans. On a ainsi voulu éviter le pénitencier au jeune homme impliqué, favorisant sa réhabilitation, et ce, puisqu'il acceptait les conséquences de ses gestes et les regrettait sincèrement.
[66] Dans Paré c. R., une affaire de conduite avec facultés affaiblies et de conduite dangereuse causant la mort, la Cour infirme les peines d'emprisonnement concurrentes de cinq et trois ans et les interdictions de conduire de dix et huit ans imposées par le premier juge. Elle y substitue des peines réduites de prison de trois ans et trente mois et des interdictions de conduire de six et cinq ans. L'accusé n'a pas d'antécédents judiciaires, bénéficie d'un rapport présentenciel favorable, a un bon dossier de conduite, accepte la responsabilité de ses gestes, témoigne d'empathie envers la famille de la victime et exprime des remords sincères.
[67] Dans R. c. Fortin, un autre dossier de conduite dangereuse causant la mort, la Cour confirme une peine de deux ans d'emprisonnement avec interdiction de conduire un véhicule moteur et révocation du permis de conduire pour trois ans. Le premier juge avait insisté sur l'importance de la dissuasion et de l'exemplarité à cause, entre autres, de la haute vitesse de l'appelant (215 km/h).
[68] Dans R. c. Montuori, l'accusé avait écopé de six mois d'emprisonnement et d'une probation de deux ans assortie d'une ordonnance lui interdisant de conduire un véhicule pour une durée de cinq ans à la suite d'une accusation de conduite dangereuse causant des lésions corporelles. En appel de la durée de l'interdiction de conduire, la Cour conclut qu'une période d'interdiction de cinq ans était justifiée puisque le délinquant avait un permis probatoire au moment de l'incident, qu'il circulait à une vitesse de 216 km/h dans une zone de 100 km/h et qu'il a tenté de fuir les policiers pour éviter son arrestation. Même si la durée de l'interdiction pouvait sembler longue, elle se devait de refléter la dissuasion générale et l'exemplarité nécessaires se rattachant aux circonstances de la commission de l'infraction.
[69] Dans Ferland c. R., la Cour confirme une peine pour conduite dangereuse causant la mort et conduite dangereuse causant des lésions de 3½ ans de détention et de trois ans d'interdiction de conduire. La peine était justifiée par la vitesse (160 km/h) dans des conditions de pluie intense, alors que l'accusé avait 32 ans et une condamnation antérieure pour conduite avec facultés affaiblies.
[70] Il y a quelques années, avant les amendements de 2006 j'en conviens, dans Olivier c. R., un cas de négligence criminelle ayant causé la mort de deux personnes à l'occasion d'une course de rue spontanée, la Cour maintient la peine d'emprisonnement de trois ans accompagnée d'une interdiction de conduire de cinq ans. Pour justifier une peine sévère, on a retenu les infractions antérieures de comportement dangereux sur la route, dont leur similitude et proximité avec la conduite reprochée.
[71] Je note de ces arrêts prononcés au cours des dernières années que, dans aucun cas, la période d'interdiction de conduire ne dépasse cinq ans lorsqu'il s'agit de conduite dangereuse causant la mort. En outre, dans tous ces cas, il est difficile de savoir s'il y a eu une longue période d'interdiction préalable au verdict et à la peine comme dans la situation de l'appelant.
[72] Il est vrai que, dans son exposé, le ministère public relève quelques arrêts rendus en Ontario et au Manitoba où les interdictions de conduire ont été de dix ans ou d'environ sept ans dans des cas de conduite dangereuse causant la mort.
[73] Cependant, d'une part, je note que ces exemples se démarquent de la jurisprudence de la Cour sur la question. D'autre part, je constate que, dans plusieurs de ces décisions, la longue période d'interdiction de conduire est consécutive à une peine d'emprisonnement plus courte que celle imposée ici par la juge.
mardi 11 juin 2013
La jurisprudence sur détermination de la peine dans les cas d'infractions d'abus de confiance commises par des fonctionnaires de l'État
R. c. Blain, 2004 CanLII 13737 (QC CQ)
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[11] La poursuite soutient que la jurisprudence dominante privilégie l'imposition d'une amende et, dans certains cas, la détention ferme pour les infractions d'abus de confiance commises par des fonctionnaires de l'État; elle cite les causes suivantes:
▪ R. c. Tremblay: l'accusé, un député fédéral, est trouvé coupable d'abus de confiance pour 6 faux contrats passés en faveur de 6 bénéficiaires représentant la somme globale de 5 000,00$; le juge Desmarais impose une amende de 12 000,00$.
▪ R. c. Bédard: l'accusé, un fonctionnaire du gouvernement, plaide coupable à un abus de confiance, soit d'avoir autorisé un faux contrat en faveur d'un entrepreneur en retour d'un pot-de-vin de 15 000,00$; une peine d'emprisonnement avec sursis de 15 mois est imposée.
▪ R. c. Carole Jacques et J. Yves Pantaloni: les deux accusés, une député fédérale et son organisateur politique, sont reconnus coupables de trafic d'influence et de complot (art. 121. C.cr.), en exigeant des pots-de-vin de deux entreprises négociant des contrats avec le gouvernement fédéral; le juge Desbiens retient comme sentence une peine d'emprisonnement ferme de 60 jours pour chacun.
▪ R. c. Bouchard et Gaudreau: le maire d'une petite municipalité et le président de la Commission d'urbanisme plaident coupable à une infraction d'abus de confiance en exigeant d'un développeur immobilier un pot-de-vin de 25 000,00$, en contrepartie d'une décision favorable pour son projet; le juge Beaudoin impose une peine d'incarcération d'un an pour le maire et de 6 mois pour le fonctionnaire.
▪ R. c. Lafrance: l'accusé, engagé comme consultant auprès du gouvernement, touche à 7 reprises des rémunérations auxquelles il n'a pas droit; il est trouvé coupable d'abus de confiance et fraude et condamné à une peine d'emprisonnement avec sursis de 18 mois par la Cour d'appel, à la place d'un première sentence d'un emprisonnement ferme de 18 mois en plus d'une amende de 10 000,00$ jugée trop sévère.
▪ R. c. Godbout: l'accusé plaide coupable à 4 chefs d'accusation d'abus de confiance en sa qualité de fonctionnaire du gouvernement fédéral (Travaux publics du Canada), en acceptant 4 pots-de-vin totalisant 21 895,00$; la Cour d'appel confirme la peine déjà imposée: une peine d'emprisonnement discontinue de 90 jours de détention et une amende de 4 000,00$;
▪ Blumer c. R.: l'accusé est trouvé coupable d'un abus de confiance en exigeant une rétribution pour exercer une influence indue sur un service gouvernemental; la Cour d'appel confirme la peine déjà imposée par le premier juge, soit une peine d'emprisonnement discontinue de 30 jours en plus.
▪ R. c. Power: l'accusé, un fonctionnaire, trouvé coupable d'un abus de confiance pour avoir négocié un contrat avec le gouvernement pour son bénéfice personnel, se voit imposer une amende de 5 000,00$.
[12] Pour sa part, le procureur de l'accusé cite plusieurs décisions où fut accordée une absolution;
▪ R. c. Couillard: l'accusé, qui était directeur général d'une entreprise de l'état, plaida coupable à une accusation de fraude relative à ses fonctions (art. 122 C. cr.), soit d'avoir profité illégalement d'un avantage pécuniaire de 5 000,00$; le juge Jean Falardeau accepta d'octroyer une absolution inconditionnelle assortie d'une ordonnance de dédommagement de 5 000,00$.
▪ R. c. Van Rassel: alors qu'il était un agent de la Gendarmerie Royale du Canada, l'accusé commet un abus de confiance en détournant illégalement pour son usage personnel des informations confidentielles (art. 122 C. cr.); le juge Jacques Ducros émit une ordonnance d'absolution, jugeant qu'il y allait de l'intérêt de l'accusé et que ce n'était pas contraire à l'intérêt public.
▪ R. c. Tanguay: en contrepartie de certains services consentis à un entrepreneur, lié à une entreprise de l'Etat dont il était l'assistant directeur, l'accusé reçoit un téléviseur couleur; la Cour d'appel substitua à la sentence suspendue avec probation, une ordonnance d'absolution inconditionnelle.
La malhonnêteté qui touche l'intégrité du pouvoir va au-delà de l'acte lui-même car elle porte atteinte à la légitimité de l'exercice du pouvoir
R. c. Trudeau, 1988 CanLII 1149 (QC CA)
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En vain soutiendrait-on que la perprétation du délit d'abus de confiance ne fait pas de victimes; des modifications apportées au Code en 1954 dissipent tout doute qui aurait pu exister à ce sujet. Vide Leblanc c. La Reine. La malhonnêteté qui touche l'intégrité du pouvoir va au-delà de l'acte lui-même car elle porte atteinte à la légitimité de l'exercice du pouvoir et, partant, choque vivement la conscience de la société. C'est ainsi, par exemple, que les termes "bénéfice de quelque nature" employés à l'art. 110(1)c) ont reçu une interprétation large par nos tribunaux.
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En vain soutiendrait-on que la perprétation du délit d'abus de confiance ne fait pas de victimes; des modifications apportées au Code en 1954 dissipent tout doute qui aurait pu exister à ce sujet. Vide Leblanc c. La Reine. La malhonnêteté qui touche l'intégrité du pouvoir va au-delà de l'acte lui-même car elle porte atteinte à la légitimité de l'exercice du pouvoir et, partant, choque vivement la conscience de la société. C'est ainsi, par exemple, que les termes "bénéfice de quelque nature" employés à l'art. 110(1)c) ont reçu une interprétation large par nos tribunaux.
Préparer la voie ou organiser des rencontres ne constitue pas en soi un exercice d’influence & l'appréciation de la notion de bénéfice
R. c. Giguère, 1983 CanLII 61 (CSC), [1983] 2 RCS 448
Le juge du procès a commis une erreur en présumant qu’en droit il n’y avait aucun «bénéfice» à moins que Giguère n’ait reçu plus que la juste valeur marchande de ses actions. Le prix d’achat en entier constitue un bénéfice au sens des al. 110(1)a) et d) du Code.
Toutefois, pour être illégal, le bénéfice doit être reçu en considération d’une collaboration, d’une aide ou d’un exercice d’influence. C’est dans ce contexte que la question de la juste valeur marchande devient importante. Si une personne reçoit l’équivalent de la valeur marchande de ses actions ou plus, il importe de chercher à déterminer l’objet du paiement. Si le paiement est fait pour rémunérer une personne pour des interventions antérieures ou futures de la nature de celles interdites par l’art. 110, il y a attribution d’un bénéfice illégal. En l’espèce, la valeur des actions de Canadian Advertising s’est accrue grâce aux contrats obtenus du gouvernement. Si ces contrats pouvaient être attribués à l’influence de Giguère, le paiement des actions de Giguère pourrait constituer un paiement pour cette influence. Le juge du procès n’a pas tiré les conclusions de fait nécessaires sur ce point parce qu’il a cru, à tort, que la juste valeur marchande était la seule question en litige.
Le juge du procès a aussi commis une erreur dans sa façon de traiter la juste valeur marchande. Pour déterminer si les actions de Giguère ont été acquises à leur juste valeur marchande, le juge du procès aurait dû tenir compte de la somme effectivement reçue par Giguère et non du coût pour celui qui l’a donnée.
Le juge du procès a aussi eu tort de conclure que le fait que Giguère ait préparé la voie et organisé des rencontres ne constitue pas une collaboration ou une aide visée par l’art. 110. Préparer la voie ou organiser des rencontres ne constitue pas en soi un exercice d’influence. Cependant, si quelqu’un prépare la voie et organise des rencontres comme première étape des démarches faites par quelqu’un d’autre pour obtenir un contrat du gouvernement, il s’agit vraiment d’une aide ou d’une collaboration concernant la conclusion d’affaires avec le gouvernement au sens des al. 110(1)a) et d).
Enfin, même si l’acte d’accusation imputait «collaboration, aide et exercice d’influence», la poursuite n’était pas tenue de faire la preuve des trois éléments. Un accusé peut être déclaré coupable pour toute partie de l’acte d’accusation qui constitue une infraction. En conséquence, il y aurait dû y avoir déclaration de culpabilité si la poursuite avait prouvé l’existence d’un complot en vue de verser un bénéfice à Giguère en considération d’une collaboration ou d’une aide, mais non d’un exercice d’influence. En l’espèce, le juge du procès a conclu à l’absence de preuve de l’existence d’une entente pour que Giguère collabore, aide ou exerce une influence. Une telle entente est un élément essentiel des infractions imputées.
jeudi 6 juin 2013
Quelques définitions du Code criminel utiles à l'appréciation du rôle du maire et du conseil municipal
« agent »
« agent » S’agissant d’une organisation, tout administrateur, associé, employé, membre, mandataire ou entrepreneur de celle-ci.
« agent de la paix »
a) Tout maire, président de conseil de comté, préfet, shérif, shérif adjoint, officier du shérif et juge de paix;
« cadre supérieur »
« cadre supérieur » Agent jouant un rôle important dans l’élaboration des orientations de l’organisation visée ou assurant la gestion d’un important domaine d’activités de celle-ci, y compris, dans le cas d’une personne morale, l’administrateur, le premier dirigeant ou le directeur financier.
« municipalité »
« municipalité » La personne morale d’une ville, d’un village, d’un comté, d’un canton, d’une paroisse ou d’une autre circonscription territoriale ou locale d’une province, dont les habitants sont constitués en personne morale ou ont le droit de détenir collectivement des biens à une fin publique.
« personne associée au système judiciaire »
a) Tout membre du Sénat, de la Chambre des communes, d’une législature ou d’un conseil municipal;
« agent » S’agissant d’une organisation, tout administrateur, associé, employé, membre, mandataire ou entrepreneur de celle-ci.
« agent de la paix »
a) Tout maire, président de conseil de comté, préfet, shérif, shérif adjoint, officier du shérif et juge de paix;
« cadre supérieur »
« cadre supérieur » Agent jouant un rôle important dans l’élaboration des orientations de l’organisation visée ou assurant la gestion d’un important domaine d’activités de celle-ci, y compris, dans le cas d’une personne morale, l’administrateur, le premier dirigeant ou le directeur financier.
« municipalité »
« municipalité » La personne morale d’une ville, d’un village, d’un comté, d’un canton, d’une paroisse ou d’une autre circonscription territoriale ou locale d’une province, dont les habitants sont constitués en personne morale ou ont le droit de détenir collectivement des biens à une fin publique.
« personne associée au système judiciaire »
a) Tout membre du Sénat, de la Chambre des communes, d’une législature ou d’un conseil municipal;
Rôles du maire et du directeur général découlant de la Loi sur les cités et villes
52. Le maire exerce le droit de surveillance, d'investigation et de contrôle sur tous les départements et les fonctionnaires ou employés de la municipalité, et voit spécialement à ce que les revenus de la municipalité soient perçus et dépensés suivant la loi, et à ce que les dispositions de la loi, les règlements et les ordonnances du conseil soient fidèlement et impartialement mis à exécution. Il soumet au conseil tout projet qu'il croit nécessaire ou utile, et lui communique toutes informations et suggestions relatives à l'amélioration des finances, de la police, de la santé, de la sûreté, de la propreté, au bien-être et au progrès de la municipalité.
Suspension d'employés.
Dans l'exercice de ses fonctions comme chef exécutif de l'administration municipale, le maire a droit, en tout temps, de suspendre un fonctionnaire ou employé de la municipalité, mais il doit faire rapport au conseil, à la séance qui suit cette suspension, et exposer ses motifs par écrit; le fonctionnaire ou employé suspendu ne doit recevoir aucun traitement pour la période pendant laquelle il est suspendu, à moins que le conseil n'en décide autrement sur cette suspension et celle-ci n'est valide que jusqu'à cette séance.
113. Le directeur général est le fonctionnaire principal de la municipalité.
Gestionnaire.
Il a autorité sur tous les autres fonctionnaires et employés de la municipalité, sauf sur le vérificateur général qui relève directement du conseil. À l'égard d'un fonctionnaire ou employé dont les fonctions sont prévues par la loi, l'autorité du directeur général n'est exercée que dans le cadre de son rôle de gestionnaire des ressources humaines, matérielles et financières de la municipalité et ne peut avoir pour effet d'entraver l'exercice de ces fonctions prévues par la loi.
Pouvoir de suspension.
Il peut suspendre un fonctionnaire ou employé de ses fonctions. Il doit immédiatement faire rapport de cette suspension au conseil. Le conseil décide du sort du fonctionnaire ou employé suspendu, après enquête.
114. Sous l'autorité du conseil ou du comité exécutif, le directeur général est responsable de l'administration de la municipalité et à cette fin planifie, organise, dirige et contrôle les activités de la municipalité.
114.1. Dans l'application des articles 113 et 114, le directeur général exerce notamment les fonctions suivantes:
1° il assure les communications entre le conseil, le comité exécutif et les commissions, d'une part, et les autres fonctionnaires et employés de la municipalité, d'autre part; à cette fin, il a accès à tous les documents de la municipalité et il peut obliger tout fonctionnaire ou employé à lui fournir tout document ou tout renseignement, sauf si celui-ci est, de l'avis du directeur du service de police, de nature à révéler le contenu d'un dossier concernant une enquête policière;
2° il prépare le budget et le programme d'immobilisations de la municipalité et les plans, les programmes et les projets destinés à assurer son bon fonctionnement, avec la collaboration des directeurs de services et des autres fonctionnaires ou employés de la municipalité;
3° il examine les plaintes et les réclamations contre la municipalité;
4° il étudie les projets de règlements de la municipalité;
5° il soumet au conseil, au comité exécutif ou à une commission, selon le cas, les budgets, les programmes d'immobilisations, les plans, les programmes et les projets qu'il a préparés ainsi que ses observations et ses recommandations concernant les plaintes, les réclamations et les projets de règlements qu'il a étudiés;
6° il fait rapport au conseil, au comité exécutif ou à une commission, selon le cas, sur tout sujet qu'il croit devoir porter à sa connaissance en vue de la saine administration des deniers publics, du progrès de la municipalité et du bien-être des citoyens, pourvu que ce rapport ne soit pas, de l'avis du directeur du service de police, de nature à révéler le contenu d'un dossier concernant une enquête policière; s'il le juge à propos, il verse ses propres conclusions au dossier sur tout sujet soumis au conseil, au comité exécutif ou à une commission;
7° il assiste aux séances du conseil, du comité exécutif et des commissions et, avec la permission du président de la séance, il donne son avis et présente ses recommandations sur les sujets discutés, sans avoir le droit de voter;
8° sous réserve des pouvoirs du maire, il veille à l'exécution des règlements de la municipalité et des décisions du conseil, et notamment il veille à l'emploi des fonds aux fins pour lesquelles ils ont été votés.
Tiré de : Loi sur les cités et villes (chapitre C-19)
Lien vers la Loi
http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=2&file=/C_19/C19.html
Suspension d'employés.
Dans l'exercice de ses fonctions comme chef exécutif de l'administration municipale, le maire a droit, en tout temps, de suspendre un fonctionnaire ou employé de la municipalité, mais il doit faire rapport au conseil, à la séance qui suit cette suspension, et exposer ses motifs par écrit; le fonctionnaire ou employé suspendu ne doit recevoir aucun traitement pour la période pendant laquelle il est suspendu, à moins que le conseil n'en décide autrement sur cette suspension et celle-ci n'est valide que jusqu'à cette séance.
113. Le directeur général est le fonctionnaire principal de la municipalité.
Gestionnaire.
Il a autorité sur tous les autres fonctionnaires et employés de la municipalité, sauf sur le vérificateur général qui relève directement du conseil. À l'égard d'un fonctionnaire ou employé dont les fonctions sont prévues par la loi, l'autorité du directeur général n'est exercée que dans le cadre de son rôle de gestionnaire des ressources humaines, matérielles et financières de la municipalité et ne peut avoir pour effet d'entraver l'exercice de ces fonctions prévues par la loi.
Pouvoir de suspension.
Il peut suspendre un fonctionnaire ou employé de ses fonctions. Il doit immédiatement faire rapport de cette suspension au conseil. Le conseil décide du sort du fonctionnaire ou employé suspendu, après enquête.
114. Sous l'autorité du conseil ou du comité exécutif, le directeur général est responsable de l'administration de la municipalité et à cette fin planifie, organise, dirige et contrôle les activités de la municipalité.
114.1. Dans l'application des articles 113 et 114, le directeur général exerce notamment les fonctions suivantes:
1° il assure les communications entre le conseil, le comité exécutif et les commissions, d'une part, et les autres fonctionnaires et employés de la municipalité, d'autre part; à cette fin, il a accès à tous les documents de la municipalité et il peut obliger tout fonctionnaire ou employé à lui fournir tout document ou tout renseignement, sauf si celui-ci est, de l'avis du directeur du service de police, de nature à révéler le contenu d'un dossier concernant une enquête policière;
2° il prépare le budget et le programme d'immobilisations de la municipalité et les plans, les programmes et les projets destinés à assurer son bon fonctionnement, avec la collaboration des directeurs de services et des autres fonctionnaires ou employés de la municipalité;
3° il examine les plaintes et les réclamations contre la municipalité;
4° il étudie les projets de règlements de la municipalité;
5° il soumet au conseil, au comité exécutif ou à une commission, selon le cas, les budgets, les programmes d'immobilisations, les plans, les programmes et les projets qu'il a préparés ainsi que ses observations et ses recommandations concernant les plaintes, les réclamations et les projets de règlements qu'il a étudiés;
6° il fait rapport au conseil, au comité exécutif ou à une commission, selon le cas, sur tout sujet qu'il croit devoir porter à sa connaissance en vue de la saine administration des deniers publics, du progrès de la municipalité et du bien-être des citoyens, pourvu que ce rapport ne soit pas, de l'avis du directeur du service de police, de nature à révéler le contenu d'un dossier concernant une enquête policière; s'il le juge à propos, il verse ses propres conclusions au dossier sur tout sujet soumis au conseil, au comité exécutif ou à une commission;
7° il assiste aux séances du conseil, du comité exécutif et des commissions et, avec la permission du président de la séance, il donne son avis et présente ses recommandations sur les sujets discutés, sans avoir le droit de voter;
8° sous réserve des pouvoirs du maire, il veille à l'exécution des règlements de la municipalité et des décisions du conseil, et notamment il veille à l'emploi des fonds aux fins pour lesquelles ils ont été votés.
Tiré de : Loi sur les cités et villes (chapitre C-19)
Lien vers la Loi
http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=2&file=/C_19/C19.html
Dans les cas de malhonnêteté qui se distinguent particulièrement par un abus de confiance, la détermination de la peine doit souligner la gravité des infractions et le sursis doit être écarté
R. c. Juteau, 1999 CanLII 13198 (QC CA)
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Quant à l'opportunité du sursis à l'emprisonnement dans ces matières, la Cour d'appel de l'Ontario, dans l'arrêt R. v. Pierce 1997 CanLII 3020 (ON CA), (1997), 114 C.C.C. (3d), 23, précise que dans les cas de malhonnêteté qui se distinguent particulièrement par un abus de confiance, la détermination de la peine doit souligner la gravité des infractions et le sursis doit être écarté. D'ailleurs, la même cour d'appel dans l'arrêt R. v. Wismayer 1997 CanLII 3294 (ON CA), (1997), 115 C.C.C. (3d) 18, sous la plume du juge Rosenberg, a affirmé que la dissuasion générale, en tant que principe pouvant légitimer la décision de ne pas imposer l'emprisonnement avec sursis, doit primer dans le cas de ces infractions1, notamment les fraudes systématiquement planifiées et structurées commises par des personnes qui abusent de la confiance de leur employeur, comme dans l'arrêt Pierce et celui qui prévaut en l'espèce. À mon avis, non seulement la dissuasion générale mais le juste dû et la dénonciation constituent également des objectifs prééminents. Néanmoins, ce principe ne saurait être absolu, puisque chaque cas doit être soumis à l'examen judiciaire à la lumière des éléments qui lui sont propres
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Quant à l'opportunité du sursis à l'emprisonnement dans ces matières, la Cour d'appel de l'Ontario, dans l'arrêt R. v. Pierce 1997 CanLII 3020 (ON CA), (1997), 114 C.C.C. (3d), 23, précise que dans les cas de malhonnêteté qui se distinguent particulièrement par un abus de confiance, la détermination de la peine doit souligner la gravité des infractions et le sursis doit être écarté. D'ailleurs, la même cour d'appel dans l'arrêt R. v. Wismayer 1997 CanLII 3294 (ON CA), (1997), 115 C.C.C. (3d) 18, sous la plume du juge Rosenberg, a affirmé que la dissuasion générale, en tant que principe pouvant légitimer la décision de ne pas imposer l'emprisonnement avec sursis, doit primer dans le cas de ces infractions1, notamment les fraudes systématiquement planifiées et structurées commises par des personnes qui abusent de la confiance de leur employeur, comme dans l'arrêt Pierce et celui qui prévaut en l'espèce. À mon avis, non seulement la dissuasion générale mais le juste dû et la dénonciation constituent également des objectifs prééminents. Néanmoins, ce principe ne saurait être absolu, puisque chaque cas doit être soumis à l'examen judiciaire à la lumière des éléments qui lui sont propres
mardi 4 juin 2013
Les principes en matière de publicité des procédures judiciaires
Toronto Star Newspapers Ltd. c. Ontario, 2005 CSC 41 (CanLII), [2005] 2 RCS 188
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4 Les demandes concurrentes se rapportant à des procédures judiciaires amènent nécessairement les tribunaux à exercer leur pouvoir discrétionnaire. La présomption de « publicité » des procédures judiciaires est désormais bien établie au Canada. L’accès du public ne sera interdit que lorsque le tribunal compétent conclut, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, que la divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice ou nuirait indûment à la bonne administration de la justice
21 Une fois le mandat de perquisition exécuté, la présomption devait jouer en faveur de la publicité des débats. La partie qui cherchait à interdire l’accès du public aux renseignements devait donc, après l’exécution du mandat, prouver que leur divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice.
23 Le paragraphe 487.3(2) est particulièrement pertinent en l’espèce. Il prévoit qu’une ordonnance de mise sous scellés peut être fondée sur le fait que la communication serait préjudiciable aux fins de la justice parce qu’elle compromettrait la nature et l’étendue d’une enquête en cours. C’est ce motif que le ministère public fait valoir en l’espèce. Il s’agit certainement d’un motif valable de mettre sous scellés une dénonciation utilisée pour obtenir un mandat provincial, en plus des dénonciations faites sous le régime du Code criminel. Dans les deux cas, il ne suffit cependant pas d’invoquer ce motif dans l’abstrait; il faut l’étayer d’allégations spécifiques liées à l’enquête que l’on prétend compromise. C’est ce qui n’a pas été fait en l’espèce, selon le juge Doherty, comme nous le verrons plus loin.
26 Dans Mentuck, la Cour a réaffirmé, tout en le reformulant dans une certaine mesure, le critère énoncé dans Dagenais. Dans Mentuck, le ministère public demandait une interdiction de publication visant l’identité de policiers banalisés et les techniques d’enquête qu’ils avaient utilisées. La Cour a statué que l’exercice du pouvoir discrétionnaire de restreindre la liberté d’expression relativement à des procédures judiciaires touche divers droits et qu’une ordonnance de non‑publication ne doit être rendue que si :
a) elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour la bonne administration de la justice, vu l’absence d’autres mesures raisonnables pouvant écarter ce risque;
b) ses effets bénéfiques sont plus importants que ses effets préjudiciables sur les droits et les intérêts des parties et du public, notamment ses effets sur le droit à la libre expression, sur le droit de l’accusé à un procès public et équitable, et sur l’efficacité de l’administration de la justice. [par. 32]
27 S’exprimant au nom de la Cour, le juge Iacobucci a souligné que le « risque » dont il est question dans le premier volet de l’analyse doit être réel et important et qu’il doit s’agir d’un risque dont l’existence est bien appuyée par la preuve : « il faut que ce soit un danger grave que l’on cherche à éviter, et non un important bénéfice ou avantage pour l’administration de la justice que l’on cherche à obtenir » (par. 34).
29 Enfin, dans Vancouver Sun, la Cour a approuvé expressément les motifs du juge Dickson dans MacIntyre et a souligné que la présomption de publicité des procédures judiciaires s’applique aussi au stade précédant le procès. Elle a statué que le « principe de la publicité des débats en justice est inextricablement lié à la liberté d’expression garantie par l’al. 2b) de la Charte et sert à promouvoir les valeurs fondamentales qu’elle véhicule » (par. 26). Ce principe s’applique donc à chacune des étapes de la procédure (par. 23‑27).
41 Le juge Doherty a insisté à juste titre sur l’importance de la liberté d’expression et de la liberté de la presse, et il a souligné que les demandes visant à empiéter sur ces libertés doivent être [traduction] « scrutées à la loupe et satisfaire à des normes rigoureuses » (par. 19). Toutefois, il a finalement rejeté la demande présentée par le ministère public en l’espèce parce qu’elle reposait entièrement sur une allégation générale portant que la publicité peut compromettre l’intégrité de l’enquête
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4 Les demandes concurrentes se rapportant à des procédures judiciaires amènent nécessairement les tribunaux à exercer leur pouvoir discrétionnaire. La présomption de « publicité » des procédures judiciaires est désormais bien établie au Canada. L’accès du public ne sera interdit que lorsque le tribunal compétent conclut, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, que la divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice ou nuirait indûment à la bonne administration de la justice
21 Une fois le mandat de perquisition exécuté, la présomption devait jouer en faveur de la publicité des débats. La partie qui cherchait à interdire l’accès du public aux renseignements devait donc, après l’exécution du mandat, prouver que leur divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice.
23 Le paragraphe 487.3(2) est particulièrement pertinent en l’espèce. Il prévoit qu’une ordonnance de mise sous scellés peut être fondée sur le fait que la communication serait préjudiciable aux fins de la justice parce qu’elle compromettrait la nature et l’étendue d’une enquête en cours. C’est ce motif que le ministère public fait valoir en l’espèce. Il s’agit certainement d’un motif valable de mettre sous scellés une dénonciation utilisée pour obtenir un mandat provincial, en plus des dénonciations faites sous le régime du Code criminel. Dans les deux cas, il ne suffit cependant pas d’invoquer ce motif dans l’abstrait; il faut l’étayer d’allégations spécifiques liées à l’enquête que l’on prétend compromise. C’est ce qui n’a pas été fait en l’espèce, selon le juge Doherty, comme nous le verrons plus loin.
26 Dans Mentuck, la Cour a réaffirmé, tout en le reformulant dans une certaine mesure, le critère énoncé dans Dagenais. Dans Mentuck, le ministère public demandait une interdiction de publication visant l’identité de policiers banalisés et les techniques d’enquête qu’ils avaient utilisées. La Cour a statué que l’exercice du pouvoir discrétionnaire de restreindre la liberté d’expression relativement à des procédures judiciaires touche divers droits et qu’une ordonnance de non‑publication ne doit être rendue que si :
a) elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour la bonne administration de la justice, vu l’absence d’autres mesures raisonnables pouvant écarter ce risque;
b) ses effets bénéfiques sont plus importants que ses effets préjudiciables sur les droits et les intérêts des parties et du public, notamment ses effets sur le droit à la libre expression, sur le droit de l’accusé à un procès public et équitable, et sur l’efficacité de l’administration de la justice. [par. 32]
27 S’exprimant au nom de la Cour, le juge Iacobucci a souligné que le « risque » dont il est question dans le premier volet de l’analyse doit être réel et important et qu’il doit s’agir d’un risque dont l’existence est bien appuyée par la preuve : « il faut que ce soit un danger grave que l’on cherche à éviter, et non un important bénéfice ou avantage pour l’administration de la justice que l’on cherche à obtenir » (par. 34).
29 Enfin, dans Vancouver Sun, la Cour a approuvé expressément les motifs du juge Dickson dans MacIntyre et a souligné que la présomption de publicité des procédures judiciaires s’applique aussi au stade précédant le procès. Elle a statué que le « principe de la publicité des débats en justice est inextricablement lié à la liberté d’expression garantie par l’al. 2b) de la Charte et sert à promouvoir les valeurs fondamentales qu’elle véhicule » (par. 26). Ce principe s’applique donc à chacune des étapes de la procédure (par. 23‑27).
41 Le juge Doherty a insisté à juste titre sur l’importance de la liberté d’expression et de la liberté de la presse, et il a souligné que les demandes visant à empiéter sur ces libertés doivent être [traduction] « scrutées à la loupe et satisfaire à des normes rigoureuses » (par. 19). Toutefois, il a finalement rejeté la demande présentée par le ministère public en l’espèce parce qu’elle reposait entièrement sur une allégation générale portant que la publicité peut compromettre l’intégrité de l’enquête
Il est possible d'obtenir un arrêt des procédures lorsque le délai entre l'infraction et la dénonciation est excessif et risque de nuire à l'équité du procès
R. c. Flamand, 1999 CanLII 13326 (QC CA)
Lien vers la décision
Il est effectivement possible d'obtenir un arrêt des procédures lorsque le délai entre l'infraction et la dénonciation est excessif et risque de nuire à l'équité du procès. Or cet équité n'est pas compromise du seul fait du retard (R. c L. (W. K.), 1991 CanLII 54 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 1091) et l'accusé invoquant l'article 24 de la Charte canadienne doit prouver cette violation (p. 1099, référant à R. c. Collins, 1987 CanLII 84 (CSC), [1987] 1 R.C.S. 265, à la p. 277). Le retard peut être perçu comme un abus de procédure s'il n'y a pas présence d'autres facteurs. Comme l'écrit le juge Lamer dans R. c. Mills, 1986 CanLII 17 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 863, à la p. 945, «Le délai antérieur à l'inculpation est pertinent en vertu de l'art. 7 et de l'alinéa 11d), car ce n'est pas la durée du délai qui importe, mais plutôt l'effet de ce délai sur l'équité du procès» (les soulignés sont du juge Stevenson qui, dans R. c. L. W.K., reprend cet extrait du juge Lamer).
Je suis d'avis qu'en l'espèce le délai n'a pas eu de conséquences préjudiciables à l'équité du procès. Le seul élément en principe préjudiciable à cette équité était l'absence de Réjean Fortier. Or les des deux parties aurait pu demander qu'une commission rogatoire se rende à son domicile pour l'interroger. Je suis donc d'avis qu'un arrêt des procédures ne devait pas être accordé pour ce motif, en l'absence de preuve de préjudice.
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Il est effectivement possible d'obtenir un arrêt des procédures lorsque le délai entre l'infraction et la dénonciation est excessif et risque de nuire à l'équité du procès. Or cet équité n'est pas compromise du seul fait du retard (R. c L. (W. K.), 1991 CanLII 54 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 1091) et l'accusé invoquant l'article 24 de la Charte canadienne doit prouver cette violation (p. 1099, référant à R. c. Collins, 1987 CanLII 84 (CSC), [1987] 1 R.C.S. 265, à la p. 277). Le retard peut être perçu comme un abus de procédure s'il n'y a pas présence d'autres facteurs. Comme l'écrit le juge Lamer dans R. c. Mills, 1986 CanLII 17 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 863, à la p. 945, «Le délai antérieur à l'inculpation est pertinent en vertu de l'art. 7 et de l'alinéa 11d), car ce n'est pas la durée du délai qui importe, mais plutôt l'effet de ce délai sur l'équité du procès» (les soulignés sont du juge Stevenson qui, dans R. c. L. W.K., reprend cet extrait du juge Lamer).
Je suis d'avis qu'en l'espèce le délai n'a pas eu de conséquences préjudiciables à l'équité du procès. Le seul élément en principe préjudiciable à cette équité était l'absence de Réjean Fortier. Or les des deux parties aurait pu demander qu'une commission rogatoire se rende à son domicile pour l'interroger. Je suis donc d'avis qu'un arrêt des procédures ne devait pas être accordé pour ce motif, en l'absence de preuve de préjudice.
Comment déterminer la crédibilité d'un témoin
R. c. Sareault, 2013 QCCQ 4502 (CanLII)
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[61] Le Tribunal est confronté à une preuve contradictoire, devant laquelle il n'est pas inutile de rappeler les propos de la Cour suprême dans l'arrêt R. c. W.(D.):
Premièrement, si vous croyez la déposition de l'accusé, manifestement vous devez prononcer l'acquittement;
Deuxièmement, si vous ne croyez pas le témoignage de l'accusé, mais si vous avez un doute raisonnable, vous devez prononcer l'acquittement;
Troisièmement, même si vous n'avez pas de doute à la suite de la déposition de l'accusé, vous devez vous demander si, en vertu de la preuve que vous acceptez, vous êtes convaincu hors de tout doute raisonnable par la preuve de la culpabilité de l'accusé.
[62] Notre Cour d'appel, dans l'affaire Araujo c. R., précitée, rappelle ceci quant à la norme de preuve (références omises) :
21 … Eu égard à la norme de preuve, un juge des faits qui est confronté à des versions contradictoires ne peut s'obliger à choisir entre les versions en accréditant le témoin à charge au motif qu'il n'a aucun intérêt à mentir et en faire un élément décisif si l'inculpé ne réussit pas à démontrer le contraire : c'est là enfreindre les principes fondamentaux qui régissent le fardeau et la norme de preuve.
22 Un juge ne peut pas faire appel à un élément extrinsèque au dossier, comme par exemple, affirmer qu'en principe un policier ne peut mentir, pour trancher la question de la crédibilité tout en respectant la norme de preuve. Si tel était le cas, il suffirait de substituer le juge des faits à un ordinateur qui déciderait de la crédibilité selon le statut, l'âge ou encore le sexe du témoin. Si la dynamique d'un procès expose très souvent le juge des faits à trancher en apparence une alternative entre deux versions opposées, il n'en est pas ainsi en droit puisqu'une troisième voie est ouverte, soit celle du doute raisonnable qui subsiste en raison de ces versions contradictoires.
23 Cela dit, il s'impose de distinguer ces situations irrégulières de celles où le juge des faits, à bon droit, peut s'interroger sur l'intérêt à mentir d'un témoin dans son appréciation de la crédibilité qui est de son ressort exclusif. Le sens commun mène très souvent le juge des faits à se demander si la victime a un intérêt à mentir : un problème surgira s'il fait porter à l'accusé le poids de son incapacité à démontrer l'intérêt à mentir et utiliser ce test pour décider de deux versions contradictoires…
[63] Déterminer la crédibilité d'un témoin constitue, pour un tribunal, un exercice difficile qui tient davantage de la logique et du bon sens que de règles juridiques rigides. Dans cet exercice, le Tribunal doit tenir compte de la conduite du témoin, de son comportement général, de son souci de renseigner le tribunal, de sa sincérité, de sa franchise et de sa spontanéité, de la vraisemblance de ses propos.
[64] Le Tribunal peut retenir un témoignage en entier ou partiellement. Il peut aussi le rejeter dans sa totalité. La crédibilité de l'accusé s'apprécie comme celle de n'importe quel autre témoin. Cette détermination de la crédibilité de l'accusé se fait dans le contexte de la preuve dans son ensemble.
[65] Pour le Tribunal, conclure qu'un témoin est crédible signifie qu'il est digne de foi et qu'il mérite d'être cru.
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[61] Le Tribunal est confronté à une preuve contradictoire, devant laquelle il n'est pas inutile de rappeler les propos de la Cour suprême dans l'arrêt R. c. W.(D.):
Premièrement, si vous croyez la déposition de l'accusé, manifestement vous devez prononcer l'acquittement;
Deuxièmement, si vous ne croyez pas le témoignage de l'accusé, mais si vous avez un doute raisonnable, vous devez prononcer l'acquittement;
Troisièmement, même si vous n'avez pas de doute à la suite de la déposition de l'accusé, vous devez vous demander si, en vertu de la preuve que vous acceptez, vous êtes convaincu hors de tout doute raisonnable par la preuve de la culpabilité de l'accusé.
[62] Notre Cour d'appel, dans l'affaire Araujo c. R., précitée, rappelle ceci quant à la norme de preuve (références omises) :
21 … Eu égard à la norme de preuve, un juge des faits qui est confronté à des versions contradictoires ne peut s'obliger à choisir entre les versions en accréditant le témoin à charge au motif qu'il n'a aucun intérêt à mentir et en faire un élément décisif si l'inculpé ne réussit pas à démontrer le contraire : c'est là enfreindre les principes fondamentaux qui régissent le fardeau et la norme de preuve.
22 Un juge ne peut pas faire appel à un élément extrinsèque au dossier, comme par exemple, affirmer qu'en principe un policier ne peut mentir, pour trancher la question de la crédibilité tout en respectant la norme de preuve. Si tel était le cas, il suffirait de substituer le juge des faits à un ordinateur qui déciderait de la crédibilité selon le statut, l'âge ou encore le sexe du témoin. Si la dynamique d'un procès expose très souvent le juge des faits à trancher en apparence une alternative entre deux versions opposées, il n'en est pas ainsi en droit puisqu'une troisième voie est ouverte, soit celle du doute raisonnable qui subsiste en raison de ces versions contradictoires.
23 Cela dit, il s'impose de distinguer ces situations irrégulières de celles où le juge des faits, à bon droit, peut s'interroger sur l'intérêt à mentir d'un témoin dans son appréciation de la crédibilité qui est de son ressort exclusif. Le sens commun mène très souvent le juge des faits à se demander si la victime a un intérêt à mentir : un problème surgira s'il fait porter à l'accusé le poids de son incapacité à démontrer l'intérêt à mentir et utiliser ce test pour décider de deux versions contradictoires…
[63] Déterminer la crédibilité d'un témoin constitue, pour un tribunal, un exercice difficile qui tient davantage de la logique et du bon sens que de règles juridiques rigides. Dans cet exercice, le Tribunal doit tenir compte de la conduite du témoin, de son comportement général, de son souci de renseigner le tribunal, de sa sincérité, de sa franchise et de sa spontanéité, de la vraisemblance de ses propos.
[64] Le Tribunal peut retenir un témoignage en entier ou partiellement. Il peut aussi le rejeter dans sa totalité. La crédibilité de l'accusé s'apprécie comme celle de n'importe quel autre témoin. Cette détermination de la crédibilité de l'accusé se fait dans le contexte de la preuve dans son ensemble.
[65] Pour le Tribunal, conclure qu'un témoin est crédible signifie qu'il est digne de foi et qu'il mérite d'être cru.
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