J.L. c. R., 2017 QCCA 398
[74] L’arrêt W. (D.) n’édicte pas une règle que doit servilement suivre le juge : R. c. Dinardo, 2008 CSC 24 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 788, par. 23; R. c. C.L.Y., 2008 CSC 2 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 5, par. 9; R. c. Boucher, 2005 CSC 72 (CanLII), [2005] 3 R.C.S. 499, par. 29.
[75] Cependant, comme le rappelle la Cour dans l’arrêt R. c. Dubé, 2012 QCCA 1710, par. 14, la démarche est vertueuse et met en évidence le but de l’exercice qui n’est surtout pas de choisir entre les versions. Elle force une démarche intellectuelle correcte pour éviter les raisonnements interdits. De manière générale ici, et l’appelant est d’accord, le juge adopte le modèle préconisé par l’arrêt W. (D.).
[76] C'est dans son application que le juge aurait erré. Selon l’appelant, le juge conclut à une preuve hors de tout doute raisonnable uniquement parce qu’il rejette son témoignage. Il souligne que le rejet du témoignage d’un accusé ne met pas un terme à l’analyse. L’appelant a raison puisqu’il n’y a pas d’«équation directe entre le fait [de ne pas croire] l'appelant et le fait que la poursuite se soit déchargée de son fardeau »: R. c. Willard, 2007 QCCA 1483, par. 3. Je ne suis pas convaincu que le juge soit tombé dans ce piège, même si son analyse est courte.
[77] Enfin, l’appelant reproche au juge d’avoir fait une mauvaise application de l’arrêt W. (D.) en analysant son témoignage au regard de l’ensemble de la preuve à la « première étape ». Or, non seulement il le pouvait, il le devait. Le juge a raison.
[78] Si un certain débat semble exister sur ce point, il découle sans doute d’une lecture trop étroite de l’arrêt W. (D.). La Cour suprême y dit bien que si l’accusé est cru, il doit être acquitté, mais elle n’a ni infirmé ni mis de côté l’autre important principe voulant que les éléments de preuve ne doivent jamais être évalués en vase clos : R. c. Morin, 1988 CanLII 8 (CSC), [1988] 2 R.C.S. 345.
[79] Aussi, le juge doit toujours évaluer la preuve dans son ensemble, y compris le témoignage de l’accusé. Déjà en 1994, la Cour avait indiqué, sous la plume du juge Fish, que tel était le cas. Fort de l’enseignement de W. (D.), le juge Fish énumère les points importants à communiquer à un jury confronté à des versions contradictoires de l’accusé et de la victime. Notamment, il écrit dans l’arrêt R. c. Potvin, 1994 CanLII 5460 (QC CA), [1994] R.J.Q. 640, à la page 643 :
(7) If the jury, after considering all of the evidence, believes the testimony of the accused, then the accused must be acquitted. […]
(Je souligne)
Voir aussi, au même effet, les décisions suivantes: R. c. Dinardo, 2008 CSC 24 (CanLII), [2008] 1 R.C.S. 788, par. 23; R. c. El Faf, 2009 QCCA 556, par. 23 et 39; R. c. Fournier, 2014 QCCA 1758, par. 9; LSJPA – 1521, 2015 QCCA 1229, par. 39; R. c. Takri, 2015 QCCA 690, par. 28-29; R. c. Threefingers, 2016 ABCA 225, par. 67; R. v. Hoohing, 2007 ONCA 577, par. 15; R. c. Wadforth, 2009 ONCA 716, par. 67 (C.A.O.).
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