R. c. Lévesque, 2010 QCCQ 9121 (CanLII)
Lien vers la décision
[21] Dans notre système pénal canadien, il est clairement établi qu'un juge est lié par une ordonnance rendue par un autre juge. C'est dans ces termes que la Cour suprême du Canada a énoncé la règle interdisant les attaques collatérales:
« (…) Selon un principe fondamental établi depuis longtemps, une ordonnance rendue par une cour compétente est valide, concluante et a force exécutoire, à moins d'être infirmée en appel ou légalement annulée. De plus, la jurisprudence établit clairement qu'une telle ordonnance ne peut faire l'objet d'une attaque indirecte; l'attaque indirecte peut être décrite comme une attaque dans le cadre de procédures autres que celles visant précisément à obtenir l'infirmation, la modification ou l'annulation de l'ordonnance ou du jugement (…) »
[22] Dix ans plus tard, cette même Cour réaffirmait ce principe dans les termes suivants:
« (…) une ordonnance rendue par une cour compétente ne peut faire l'objet d'une attaque dans le cadre de procédures autres que celles visant précisément à obtenir l'infirmation, la modification ou l'annulation de l'ordonnance ou du jugement (…) »
« (…) La règle a été conçue non pas pour soustraire à tout contrôle une ordonnance judiciaire mais pour maintenir la primauté du droit et préserver la considération dont jouit l'administration de la justice (…) »
[23] Bien que ce principe ait souvent été appliqué dans les dossiers traitant de l'émission de mandat, il le fut également lors de l'émission de différentes ordonnances.
[24] Cette règle n'est pas absolue, et elle peut souffrir de certaines exceptions lorsqu'il ne s'agit que de pure forme tel que le précise également la Cour suprême qui ajoute :
« (…) Les principes fondés sur la certitude et sur le besoin d'une administration ordonnée et pratique de la justice qui sous‑tendent la règle interdisant les attaques indirectes ne sont pas applicables à une ordonnance de division et de séparation des chefs d'accusation rendue avant le procès. Une ordonnance de cette nature régit non pas la conduite des parties, mais plutôt le processus judiciaire lui‑même. Permettre, au cours du procès, une attaque indirecte contre une telle ordonnance ne compromettrait pas la primauté du droit ou ne déconsidérerait pas l'administration de la justice. En réalité, si l'ordonnance avait été rendue par le juge du procès, elle aurait fait l'objet d'un examen par les tribunaux d'appel en même temps que le verdict. La procédure ne peut l'emporter sur le fond — on ne saurait permettre le maintien d'une ordonnance erronée au point d'entacher le procès d'un vice fondamental. »
[25] S'appuyant sur l'affaire R. c. J.L.S., les honorables juges Béliveau et Vauclair sont également d'opinion que cette règle s'appliquerait même si la nullité apparaît à la face même de l'ordonnance.
[26] Dans l'affaire Desjardins c. R., notre Cour d'appel déclare que l'omission de fixer un délai dans une ordonnance enjoignant à un accusé de se départir de ses armes peut justifier sa révision, mais pas sa violation. Dans une autre décision, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique conclut que même si le tribunal pour adolescent n'a pas juridiction pour rendre une ordonnance en vertu de l'article 810 du Code criminel, cela ne peut justifier sa violation.
[27] Même si deux décisions (probation sans durée déterminée (C.cr.) ou dépassant la période maximale permise (L.J.C.)) concluent que l'ordonnance est invalide à sa face même et que la règle interdisant les attaques indirectes peut être exclue, il faut souligner que ces dernières sont antérieures aux arrêts Wilson et Litchfield de notre Cour suprême.
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