mardi 11 septembre 2012

L'état du droit concernant 3 types d'identification (l’identification oculaire par un témoin / l’identification à partir d’une cassette vidéo ayant capté la scène du vol / une parade d’identification photographique)

R. c. Thibault, 2012 QCCQ 6465 (CanLII)

Lien vers la décision

[7] L'identification est au cœur de l'affaire sous étude. Trois types d’identification y sont en cause : 1) l’identification oculaire par un témoin; 2) l’identification à partir d’une cassette vidéo ayant capté la scène du vol; et 3) une parade d’identification photographique. Chacune de ces preuves d’identification répond à des règles particulières.

[8] Le Tribunal résumait ainsi les principes applicables dans l'affaire R. c. Souligny, décision confirmée par la Cour d'appel:

[20] En ce qui concerne la règle de droit applicable en matière de preuve d’identification oculaire, le Tribunal doit se mettre en garde contre les dangers inhérents à ce type de preuve. Le juge de première instance doit considérer non seulement les forces, mais également les faiblesses de cette preuve d’identification. Il doit tenir compte des risques de contamination liés au fait qu’un tiers ait pu suggérer que l’accusé puisse être le voleur. Bref, il doit examiner la fiabilité objective de la preuve d’identification.

[21] Quant à la preuve d’identification à partir du visionnement d’une cassette vidéo ayant capté le larcin, le Tribunal doit, encore là, faire preuve d’une grande prudence. Les Tribunaux ont reconnu l’importance et l’utilité des bandes vidéo dans la recherche de la vérité lors des procès criminels. Ce genre de preuve peut servir à établir tout autant l’innocence d’un accusé que sa culpabilité. La Cour suprême a établi que, parce que la caméra vidéo enregistre fidèlement tout ce qui entre dans son champ, la bande vidéo peut présenter une preuve d’identification aussi claire et convaincante, que le juge des faits peut se fonder uniquement sur celle-ci pour identifier l’accusé devant lui comme étant l’auteur du crime. Pour arriver à une telle conclusion, la bande doit être de bonne qualité et fournir une image claire des évènements et de l’auteur du crime. Comme le rappelle le Juge Cory : "Au cours de ses délibérations, le juge des faits évaluera le poids qui doit être accordé à la preuve apportée par la bande vidéo, tout comme il évalue le poids de la preuve fournie par des témoignages de vive voix."

[22] Outre que le juge des faits est autorisé à procéder à l’identification, il est aussi permis qu’une autre personne, tel un policier, puisse donner son opinion quant à l’identité de l’auteur du crime apparaissant sur la bande vidéo. Avant d’accepter qu’un tel témoignage puisse être entendu, le juge doit tenir un voir-dire pour en déterminer l’admissibilité. Il faut s’assurer que le témoin possède des compétences particulières lui permettant de donner un témoignage d’opinion. Si le Tribunal accepte d’admettre en preuve un tel témoignage, sa valeur probante relève complètement du juge qui peut ajouter foi à la totalité, à une partie du témoignage ou le rejeter tout simplement. C’est ainsi qu’il ne doit pas prêter une valeur supérieure à l’identification faite par un policier à partir de la preuve vidéo. Il s’agit d’un élément de preuve parmi tant d’autres qui doit donc être analysé au regard de l’ensemble de la preuve soumise.

[23] La parade d’identification constitue un autre moyen d’identifier l’auteur d’un crime. Ce principe est reconnu depuis fort longtemps. Elle doit revêtir certaines qualités que résume bien la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans l’affaire R. c. Vu que nous nous permettons de traduire librement :

a) Il doit être démontré que rien n’a été fait en vue de permettre au témoin d’identifier la personne soupçonnée par les policiers, pas plus que de montrer la photographie du suspect ou d’indiquer sa position dans la parade.

b) Le choix des autres personnes apparaissant à la parade d’identification doit être fait honnêtement, au point que le suspect ne doit pas être substantiellement différent des autres en regard de son âge, de sa stature, son teint, son habillement.

c) La procédure doit être juste en ce que, pour tester l’habileté du témoin à reconnaître le suspect, il doit y avoir plusieurs photographies et l’accusé ne doit pas avoir de différence marquée des autres personnes apparaissant à la parade quant à son âge et son physique.

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