R. c. Dupuis, 2009 QCCQ 7582 (CanLII)
[95] Si l'accusé a effectivement participé à une course, il ne peut se dégager d'une condamnation de conduite dangereuse en jetant la faute de la collision sur une manœuvre imprévue ou imprudente du co-coureur. En participant à une course automobile, l'accusé a contribué à créer l'évènement dangereux. Il en était une partie vitale. Les gestes du coaccusé, monsieur Garneau, étaient des réactions naturelles au stimulus de la course automobile.
[96] Pour le juge Hill dans Menezes, une course automobile sur une voie publique constitue une co-entreprise entre les participants qui implique de la provocation mutuelle et de l'encouragement vers une rivalité ou démonstration de vitesse. Au paragraphe 98 de son jugement, le juge Hill utilise le langage de la complicité pour expliquer le rôle et la responsabilité de chacun des conducteurs impliqués dans une course automobile:
(TRADUCTION) Même si ultimement une action imprudente constitue la négligence criminelle ou une conduite dangereuse, les conducteurs sont des participants à une offense suivant l'article 21 (2) du Code criminel comme si chacun avait effectivement commis l'infraction.
[97] Dans la même veine, au paragraphe 101 de son jugement, le juge Hill écrit que :
(TRADUCTION) De par leurs actes, ceux qui font la course à des vitesses excessives sur une chaussée publique s'entraident à créer un risque dangereux. L'un encourage l'autre.
[98] Dans la cause de R. v. Flannery, [1982] M.J. No. 9 (Man. Co. Ct.), citée dans Menezes au paragraphe 80, le juge Ferg, aux paragraphes 2, 3 et 17, a défini une course automobile sur une voie publique comme étant un mouvement en vitesse aux allures de compétition, un effort fait de concert afin de maintenir une situation de mouvement en ayant un aspect de rivalité.
[99] Dans l'affaire de Gore Mutual Insurance Co. v. Rossignoli, [1964] 2 O.R. 274 (Ont. C.A.) at 276-7, (citée dans la cause de Menezes, par. 81), le juge McGillvray a maintenu qu'une course est généralement un concours de vitesse qui peut être de nature informelle ou spontanée, dans lequel un conducteur ne peut tolérer de se faire dépasser par un rival et pour autant s'efforce, à une vitesse excessive, pour ne pas être dépassé. Ce faisant, il met en danger d'autres usagers de la chaussée.
[100] Mon collègue de la Cour du Québec, le juge Cadieux a rendu un jugement sur sentence dans la cause Frédéric Garneau, le conducteur de la Hyundai dans la présente affaire. Dans Garneau, l'accusé avait plaidé coupable à une accusation de conduite dangereuse causant la mort. Lors des représentations sur sentence, l'accusé a admis avoir conduit à une vitesse excessive, mais il refusait de reconnaître qu'il était impliqué dans une course automobile. En arrivant à la conclusion que l'accusé était impliqué dans une course automobile, le juge Cadieux s'est appuyé, tout d'abord, sur la définition de "course automobile " qui figure dans le dictionnaire le Grand Robert de la langue française, lequel précise :
Course : épreuve de vitesse; compétition sur une distance, un parcours donné. (par. 37)
[101] Ensuite, le juge Cadieux a noté la définition des mots « course de rue » que le législateur a ajoutée à l'article 2 du Code criminel et qui se lit comme suit :
Course de rue : épreuve de vitesse entre des véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grande route ou tout autre lieu public. (par. 38)
[116] À cela, il faut noter que la jurisprudence prévoit qu'une course automobile résulte souvent d'un acte improvisé ou spontané. Comme l'explique le juge Hill au paragraphe 83 dans Menezes:
(TRADUCTION) Bien souvent, il n'y a pas de piste de course, il n'y a pas de ligne d'arrivée accordée au préalable, et bien sûr, aucun souci des dangers créés. Nous finissons par accepter, comme question de sens commun, que les mouvements synchronisés ou en tandem de deux véhicules qui se démarquent par une vitesse élevée en étant très proche l'un de l'autre sur une distance, souvent accompagnés par des changements de voie brusques, par du blocage ou par des manœuvres osées pour changer de voie en se faufilant dans la circulation sur la route constituent un comportement de course même si tous les attributs d'une course à départ arrêté (drag race) ne soient pas présents. Que l'on fasse par accord exprès ou convention tacite, cette co-entreprise implique de la provocation mutuelle et de l'encouragement vers une rivalité ou démonstration de vitesse.
[117] Certes, on ne retrouve pas de changement de voie dans la présente cause. Est-ce que cela veut dire qu'il n'y avait pas de course? Rappelons, cependant, qu'une course peut se définir comme un mouvement compétitif de vitesse ou une épreuve de vitesse. Les faits dans le présent dossier sont compatibles avec un mouvement compétitif de vitesse ou une épreuve de vitesse, peu importe s'il y avait ou non une entente expresse de courser. Rappelons, également, les propos du juge Hill dans Menezes, à l'effet qu'une course automobile sur la voie publique est souvent un acte improvisé et spontané et qu'on n'a pas besoin de retrouver tous les attributs d'une course à départ (drag race) pour conclure qu'effectivement il y a eu une course
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mardi 5 octobre 2010
L'infraction pour possession de cannabis en vue d'en faire le trafic n'est pas une infraction moindre et incluse à celle de production
Quintin Vézina c. R., 2010 QCCA 1457 (CanLII)
[17] L'infraction pour possession de cannabis en vue d'en faire le trafic n'est pas, comme le soutient l'appelant, une infraction moindre et incluse à celle de production. Il ne s'agit pas ici de simple possession, mais de possession dans un dessein bien précis d'en faire le commerce, étant donné la quantité saisie. (...)
[17] L'infraction pour possession de cannabis en vue d'en faire le trafic n'est pas, comme le soutient l'appelant, une infraction moindre et incluse à celle de production. Il ne s'agit pas ici de simple possession, mais de possession dans un dessein bien précis d'en faire le commerce, étant donné la quantité saisie. (...)
dimanche 3 octobre 2010
La preuve d'expert et l'évaluation de la valeur à lui accorder
R. c. Maguire, 2006 QCCQ 574 (CanLII)
[57] Comme le rappelait la Cour suprême dans l'arrêt Vaillancourt:
"Pour qu'un accusé soit déclaré coupable d'une infraction, le juge des faits doit être convaincu, hors de tout doute raisonnable de l'existence de tous les éléments essentiels de l'infraction.
[58] La preuve d'expert sous-tend les mêmes principes fondamentaux, mais avec certaines variantes qui lui sont propres.
[59] Elle est avant tout une preuve d'opinion qui peut s'appuyer sur un certain nombre de facteurs qui n'auront pas tous nécessairement la même valeur légale et dont l'utilisation sera susceptible d'affecter sa valeur probante.
[60] Il en est de même lorsqu'un juge effectue l'évaluation de la valeur à accorder à un témoignage d'opinion fondé sur des questions hypothétiques. Il devra faire le partage entre ce type de facteurs et ceux qui ressortent de la preuve et sur lesquels s'appuie également l'expert. Cette analyse devra s'effectuer sans conclure que le témoignage de l'expert établit à lui seul l'exactitude des faits qu'il contient.
[61] Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que chacun des faits précis sous lequel est fondé l'opinion de l'expert soit établi en preuve pour lui donner une valeur probante. S'il existe des éléments de preuve admissible tendant à établir le fondement de son opinion, on ne peut faire complètement abstraction de ce témoignage.
[62] Cependant, plus l'expert se fonde sur des faits non établis par la preuve ou encore hypothétiques, moins la valeur probante de son opinion sera grande.
[63] C' est précisément ce qui faisait dire au juge Wilson dans l'arrêt Lavallée que:
"Lorsque la base factuelle de l'opinion d'un expert consiste en un mélange d'éléments de preuve, tant admissibles qu'inadmissibles, le juge du procès est tenu de faire comprendre au jury que la valeur probante à accorder au témoignage de l'expert est directement reliée à la quantité et à la qualité des éléments de preuve admissibles sur lesquels il est fondé".
[76] Tel qu'indiqué précédemment, pour y parvenir, l'expert utilisera un certain nombre de paramètres qui peuvent ressortir de la preuve ou être constitués d'hypothèses et de ouï-dire.
[77] Plus les prémisses utilisées seront des faits prouvés, plus la valeur probante de son témoignage en sera renforcée.
[57] Comme le rappelait la Cour suprême dans l'arrêt Vaillancourt:
"Pour qu'un accusé soit déclaré coupable d'une infraction, le juge des faits doit être convaincu, hors de tout doute raisonnable de l'existence de tous les éléments essentiels de l'infraction.
[58] La preuve d'expert sous-tend les mêmes principes fondamentaux, mais avec certaines variantes qui lui sont propres.
[59] Elle est avant tout une preuve d'opinion qui peut s'appuyer sur un certain nombre de facteurs qui n'auront pas tous nécessairement la même valeur légale et dont l'utilisation sera susceptible d'affecter sa valeur probante.
[60] Il en est de même lorsqu'un juge effectue l'évaluation de la valeur à accorder à un témoignage d'opinion fondé sur des questions hypothétiques. Il devra faire le partage entre ce type de facteurs et ceux qui ressortent de la preuve et sur lesquels s'appuie également l'expert. Cette analyse devra s'effectuer sans conclure que le témoignage de l'expert établit à lui seul l'exactitude des faits qu'il contient.
[61] Par ailleurs, il n'est pas nécessaire que chacun des faits précis sous lequel est fondé l'opinion de l'expert soit établi en preuve pour lui donner une valeur probante. S'il existe des éléments de preuve admissible tendant à établir le fondement de son opinion, on ne peut faire complètement abstraction de ce témoignage.
[62] Cependant, plus l'expert se fonde sur des faits non établis par la preuve ou encore hypothétiques, moins la valeur probante de son opinion sera grande.
[63] C' est précisément ce qui faisait dire au juge Wilson dans l'arrêt Lavallée que:
"Lorsque la base factuelle de l'opinion d'un expert consiste en un mélange d'éléments de preuve, tant admissibles qu'inadmissibles, le juge du procès est tenu de faire comprendre au jury que la valeur probante à accorder au témoignage de l'expert est directement reliée à la quantité et à la qualité des éléments de preuve admissibles sur lesquels il est fondé".
[76] Tel qu'indiqué précédemment, pour y parvenir, l'expert utilisera un certain nombre de paramètres qui peuvent ressortir de la preuve ou être constitués d'hypothèses et de ouï-dire.
[77] Plus les prémisses utilisées seront des faits prouvés, plus la valeur probante de son témoignage en sera renforcée.
Le profilage ne peut être source assumée ou présumée de motifs précis au sens des arrêts Simpson et Mann
R. c. Marcoux, 2005 CanLII 43638 (QC C.Q.)
[36] Enfin, à titre de commentaire additionnel, le tribunal ne peut objectivement mettre de côté que la présente détention s'est faite à la simple vue d'un véhicule "de jeunes" occupée par deux jeunes dans un stationnement de cour d'école où des jeunes doivent avoir l'habitude de se retrouver.
[37] On parle beaucoup aujourd'hui de "profilage" qui peut être une formule visant à permettre aux policiers de s'intéresser à une situation potentiellement criminelle. Par contre, cette norme (profilage) ne peut être à notre avis source assumée ou présumée de motifs précis au sens des arrêts Simpson et Mann déjà cités.
[36] Enfin, à titre de commentaire additionnel, le tribunal ne peut objectivement mettre de côté que la présente détention s'est faite à la simple vue d'un véhicule "de jeunes" occupée par deux jeunes dans un stationnement de cour d'école où des jeunes doivent avoir l'habitude de se retrouver.
[37] On parle beaucoup aujourd'hui de "profilage" qui peut être une formule visant à permettre aux policiers de s'intéresser à une situation potentiellement criminelle. Par contre, cette norme (profilage) ne peut être à notre avis source assumée ou présumée de motifs précis au sens des arrêts Simpson et Mann déjà cités.
Dans une société aussi réglementée, où les méthodes d'enquête se sont raffinées, une arrestation et une détention au hasard ne peuvent trouver place
R. c. Marcoux, 2005 CanLII 43638 (QC C.Q.)
[33] Dans une société aussi réglementée, où les méthodes d'enquête se sont raffinées, une arrestation et une détention au hasard ne peuvent trouver place.
[34] Donner une absolution à ce genre de conduite – même faite sans malice – accréditerait une forme d'absolutisme policier où par sa seule intuition ou intention, un policier pourrait contrôler l'identité des personnes, leurs allées et venues et leurs motivations.
[35] De plus, les policiers réalisaient une "fouille préventive" équivalent à une cueillette de preuve: il eut fallu certainement des motifs raisonnables pour s'exécuter dans de telles circonstances.
[33] Dans une société aussi réglementée, où les méthodes d'enquête se sont raffinées, une arrestation et une détention au hasard ne peuvent trouver place.
[34] Donner une absolution à ce genre de conduite – même faite sans malice – accréditerait une forme d'absolutisme policier où par sa seule intuition ou intention, un policier pourrait contrôler l'identité des personnes, leurs allées et venues et leurs motivations.
[35] De plus, les policiers réalisaient une "fouille préventive" équivalent à une cueillette de preuve: il eut fallu certainement des motifs raisonnables pour s'exécuter dans de telles circonstances.
Selon le principe de Coke, une personne ne peut être déclarée coupable d’une troisième infraction avant d’avoir été déclarée coupable de la deuxième, ni déclarée coupable de la deuxième avant de l’avoir été de la première
R. c. Côté-Gaudreault, 2010 QCCQ 3931 (CanLII)
[17] Dans son analyse, la Cour suprême expose les principes de common law tirés des Institutes de Sir Edward Coke. Notamment :
[…] l’accusé ne peut cependant être déclaré coupable de la troisième [infraction] avant d’être déclaré coupable de la deuxième, ni de la deuxième avant d’être déclaré coupable de la première; la deuxième infraction doit avoir été commise après la première déclaration de culpabilité et la troisième après la deuxième déclaration de culpabilité et des jugements distincts rendus; parce qu’il faut ainsi interpréter les autres lois du Parlement où il y a une gradation des peines imposées pour la première, la deuxième et la troisième infraction etc., il doit y avoir plusieurs déclarations de culpabilité, c’est-à-dire des jugements prononcés par suite de procédures judiciaires visant chacune des infractions différentes, car il ressort qu’il n’y a pas d’infraction tant que jugement n’a pas été rendu contre lui conformément à la loi.
[18] En somme, « […] un accusé ne peut être déclaré coupable d’une infraction qualifiée de deuxième infraction ou d’infraction subséquente à moins que celle-ci n’ait été commise après une première déclaration de culpabilité relativement à une première infraction ou à une infraction antérieure ».
[17] Dans son analyse, la Cour suprême expose les principes de common law tirés des Institutes de Sir Edward Coke. Notamment :
[…] l’accusé ne peut cependant être déclaré coupable de la troisième [infraction] avant d’être déclaré coupable de la deuxième, ni de la deuxième avant d’être déclaré coupable de la première; la deuxième infraction doit avoir été commise après la première déclaration de culpabilité et la troisième après la deuxième déclaration de culpabilité et des jugements distincts rendus; parce qu’il faut ainsi interpréter les autres lois du Parlement où il y a une gradation des peines imposées pour la première, la deuxième et la troisième infraction etc., il doit y avoir plusieurs déclarations de culpabilité, c’est-à-dire des jugements prononcés par suite de procédures judiciaires visant chacune des infractions différentes, car il ressort qu’il n’y a pas d’infraction tant que jugement n’a pas été rendu contre lui conformément à la loi.
[18] En somme, « […] un accusé ne peut être déclaré coupable d’une infraction qualifiée de deuxième infraction ou d’infraction subséquente à moins que celle-ci n’ait été commise après une première déclaration de culpabilité relativement à une première infraction ou à une infraction antérieure ».
Le délai acceptable pour la police d'apprendre les développements jurisprudentiels relatifs à l'exercice de leurs fonctions
R. c. Kokesch, [1990] 3 R.C.S. 3
Je ne veux pas que l'on pense que j'impose à la police l'obligation d'interpréter instantanément les décisions judiciaires. La question du délai qui devrait être alloué après un jugement pour que la police soit censée avoir pris connaissance de son contenu, aux fins de déterminer sa bonne foi, est une question intéressante, mais elle ne se pose pas en l'espèce. La police a bénéficié d'un peu plus de douze ans pour étudier l'arrêt Eccles, d'un peu moins de six ans pour examiner l'arrêt Colet, et d'un peu plus de deux ans pour comprendre l'exigence du mandat énoncée dans l'arrêt Hunter. Tout doute qu'elle aurait pu avoir quant à sa capacité de commettre une intrusion en l'absence d'un pouvoir expressément prévu par la loi à cette fin était manifestement déraisonnable et ne saurait, en droit, être invoqué pour justifier sa bonne foi aux fins du par. 24(2).
Il y a, à mon avis, toute la différence du monde entre la conduite policière qui est censée être de bonne foi en l'espèce et la conduite policière acceptée par notre Cour dans les arrêts R. c. Sieben, 1987 CanLII 85 (C.S.C.), [1987] 1 R.C.S. 295; R. c. Hamill, 1987 CanLII 86 (C.S.C.), [1987] 1 R.C.S. 301; R. c. Duarte, 1990 CanLII 150 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 30; et R. c. Wiggins, 1990 CanLII 151 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 62. Dans chacun de ces cas, la police a agi conformément à un pouvoir expressément prévu par la loi qui légitimait la perquisition effectuée. Elle a le droit, et même l'obligation, de présumer que les pouvoirs de perquisition qui lui sont conférés par le Parlement sont constitutionnels, et d'agir en conséquence. On ne peut pas s'attendre à ce que la police prédise le résultat des contestations judiciaires en vertu de la Charte de pouvoirs de perquisition qui lui sont conférés par la loi, et le succès de la contestation d'un tel pouvoir n'enlève rien à la bonne foi des policiers qui ont effectué une perquisition en vertu de ce pouvoir. Mais, lorsque les pouvoirs de la police sont déjà limités par une loi ou par des décisions judiciaires, il n'est pas loisible à un agent de police de tester ces limites en n'en tenant pas compte et en prétendant par la suite avoir été "dans l'exercice de ses fonctions". Cette excuse ne peut plus être invoquée depuis au moins la décision de notre Cour dans l'arrêt Colet (voir le juge Ritchie à la p. 9).
Je ne veux pas que l'on pense que j'impose à la police l'obligation d'interpréter instantanément les décisions judiciaires. La question du délai qui devrait être alloué après un jugement pour que la police soit censée avoir pris connaissance de son contenu, aux fins de déterminer sa bonne foi, est une question intéressante, mais elle ne se pose pas en l'espèce. La police a bénéficié d'un peu plus de douze ans pour étudier l'arrêt Eccles, d'un peu moins de six ans pour examiner l'arrêt Colet, et d'un peu plus de deux ans pour comprendre l'exigence du mandat énoncée dans l'arrêt Hunter. Tout doute qu'elle aurait pu avoir quant à sa capacité de commettre une intrusion en l'absence d'un pouvoir expressément prévu par la loi à cette fin était manifestement déraisonnable et ne saurait, en droit, être invoqué pour justifier sa bonne foi aux fins du par. 24(2).
Il y a, à mon avis, toute la différence du monde entre la conduite policière qui est censée être de bonne foi en l'espèce et la conduite policière acceptée par notre Cour dans les arrêts R. c. Sieben, 1987 CanLII 85 (C.S.C.), [1987] 1 R.C.S. 295; R. c. Hamill, 1987 CanLII 86 (C.S.C.), [1987] 1 R.C.S. 301; R. c. Duarte, 1990 CanLII 150 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 30; et R. c. Wiggins, 1990 CanLII 151 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 62. Dans chacun de ces cas, la police a agi conformément à un pouvoir expressément prévu par la loi qui légitimait la perquisition effectuée. Elle a le droit, et même l'obligation, de présumer que les pouvoirs de perquisition qui lui sont conférés par le Parlement sont constitutionnels, et d'agir en conséquence. On ne peut pas s'attendre à ce que la police prédise le résultat des contestations judiciaires en vertu de la Charte de pouvoirs de perquisition qui lui sont conférés par la loi, et le succès de la contestation d'un tel pouvoir n'enlève rien à la bonne foi des policiers qui ont effectué une perquisition en vertu de ce pouvoir. Mais, lorsque les pouvoirs de la police sont déjà limités par une loi ou par des décisions judiciaires, il n'est pas loisible à un agent de police de tester ces limites en n'en tenant pas compte et en prétendant par la suite avoir été "dans l'exercice de ses fonctions". Cette excuse ne peut plus être invoquée depuis au moins la décision de notre Cour dans l'arrêt Colet (voir le juge Ritchie à la p. 9).
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