Résumé
Dans le texte qui suit, les auteurs prennent l’affaire Lacroix-Norbourg comme point d’ancrage de leur réflexion et s’interrogent sur des questions relatives à l’application respective et cumulative du droit pénal provincial et du droit criminel. Leurs propos révèlent la fragilité de la distinction entre ces deux catégories de droit pénal. Les auteurs analysent la jurisprudence constitutionnelle au regard de cette affaire et suggèrent qu’elle a peut-être contribué à l’érosion du sens à donner aux notions fondamentales de crime et de peine. Ils plaident en faveur de l’application de principes fondamentaux de justice dans le domaine des infractions pénales réglementaires passibles d’emprisonnement et concluent qu’il faut sérieusement s’interroger sur la faisabilité et l’opportunité d’appliquer successivement le droit pénal des valeurs mobilières et le droit criminel.
Tiré de: « En marge de l’affaire Lacroix-Norbourg : les enjeux substantifs et punitifs suscités par le double aspect, réglementaire et criminel, de certains comportements frauduleux dans le domaine des valeurs mobilières »
http://www.erudit.org/revue/cd/2009/v50/n3-4/039332ar.html
http://www.erudit.org/revue/cd/2009/v50/n3-4/039332ar.pdf
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dimanche 11 décembre 2011
samedi 10 décembre 2011
Revue de la jurisprudence sur la détermination de la peine visant l'infraction de voies de fait graves
R. c. Cedar, 2011 QCCQ 14965 (CanLII)
[16] Rappelons que la peine de détention ferme est prononcée en dernier recours.
[17] L’imposition de la peine s’avère une tâche très difficile; tout en étant sensible aux conséquences vécues par les victimes et les proches, il s’agit de punir un individu pour un crime donné et non pas d’agir par vengeance.
[18] La gravité du crime est importante, car le législateur prévoit une peine maximale de 14 ans d’emprisonnement pour l’infraction de voies de fait graves.
[19] La gravité subjective est aussi à souligner. Quoique le crime n’ait pas été prémédité, il s’agit d’une agression gratuite, commise avec un couteau, avec des séquelles importantes pour la victime.
[20] Dans Antonelli c. R, la Cour d’appel du Québec conclut « qu’en matière de voies de fait graves, sans usage d’une automobile, la fourchette des peines va de la sentence suspendue à l’incarcération, mais la jurisprudence n’est pas avare d’affaires où des peines de 3 à 5 ans sont imposées ». Dans ce dossier, il s’agissait de voies de fait graves commises avec une voiture. L’accusé a foncé dans un abribus, dans lequel se trouvaient cinq personnes et il a été condamné à 5 ans d’emprisonnement.
[21] Dans Bouchard-Lebrun c. R., la Cour d’appel maintient la peine de 5 ans pour un accusé, sans antécédents judiciaires, fortement intoxiqué, qui, sans préméditation, a commis des voies de fait graves impliquant que la victime passe le reste de ses jours à l’hôpital.
[22] Dans David Réjouis c. R, la Cour d’appel réduit la peine à une durée de deux ans moins un jour, assortie d'une probation de trois années, pour trois accusations de voies de fait graves. Près de la station de métro, une altercation a lieu avec un autre groupe; l’accusé intervient avec un couteau pour défendre un de ses amis. Trois personnes sont blessées; deux des personnes subissent une blessure superficielle, mais la troisième est atteinte sérieusement aux intestins. Elle doit subir une intervention chirurgicale et être hospitalisée durant deux semaines. L’accusé est jeune, sans antécédents judiciaires et possède de bonnes valeurs familiales.
[23] La Cour d’appel dans Maranda-Duquette c. R., a réduit à 24 mois la peine imposée pour des voies de fait graves. L’accusé a asséné un coup de poing au visage de la victime, qui s’est fracassé la tête sur le sol; victime d’une fracture du crâne, elle a été hospitalisée aux soins intensifs durant une semaine. Aucune arme n’a été utilisée, mais l’accusé avait une condamnation antérieure de voies de fait pour laquelle, il s’est vu infliger une peine de trois jours.
[24] Dans Oweetaluktuk c. R., la Cour d’appel réduit la sentence à 42 mois. L’accusé a asséné deux coups de couteau dans le dos de sa mère, l’a frappée avec une chaise et un tabouret et a frappé sa grand-mère. La Cour d’appel précise que la sentence se situe dans la fourchette des peines imposées pour des infractions commises par des autochtones et des non-autochtones.
[25] Dans R. c. Niedzielski, une peine de 3 ans fut imposée pour un individu qui a agressé, dans une station de métro des personnes, qu’il ne connaissait pas, dont l'une a subi des séquelles très sévères. Cette victime est demeurée dans le coma pendant une longue période et a, en outre, subi plusieurs fractures et des dommages au cerveau. La gravité objective des crimes, la violence gratuite, les gestes posés par l’intimé et les lourdes conséquences pour les victimes sont les facteurs considérés.
[26] La Cour d’appel dans Rioux c. R., impose une peine de 5 ans et 4 mois à un individu qui a commis des voies de fait graves avec un couteau. Le geste impulsif et sans préméditation a eu des conséquences suivantes pour la victime : coma durant un mois, hospitalisation de 2 mois et séquelles importantes. L’accusé n’avait pas d’antécédents judiciaires
[27] Dans R. c. Mark Jackson, La Cour d’appel confirme une peine de 5 ans pour un individu qui s’est bagarré à la sortie d’un bar et qui a utilisé un couteau pour assaillir la victime. L’accusé a de nombreux antécédents judiciaires et a commis le crime alors qu’il purgeait une sentence dans la collectivité.
[28] Dans R. c. Alexandre, la Cour du Québec impose une peine de 5 ans de pénitencier à un individu qui a poignardé la victime à plusieurs reprises. La brutalité de l’infraction, les séquelles importantes, la préméditation, le fait que l’accusé était sur le coup de 3 ordonnances de probation au moment des évènements et avait une condamnation pour négligence criminelle causant la mort ont justifié la peine imposée.
[29] De cette revue de la jurisprudence, il appert que des sentences de 5 ans de pénitencier sont imposées dans les cas où les accusés ont des antécédents judiciaires ou lorsque les séquelles sont plus lourdes que dans la présente affaire.
[16] Rappelons que la peine de détention ferme est prononcée en dernier recours.
[17] L’imposition de la peine s’avère une tâche très difficile; tout en étant sensible aux conséquences vécues par les victimes et les proches, il s’agit de punir un individu pour un crime donné et non pas d’agir par vengeance.
[18] La gravité du crime est importante, car le législateur prévoit une peine maximale de 14 ans d’emprisonnement pour l’infraction de voies de fait graves.
[19] La gravité subjective est aussi à souligner. Quoique le crime n’ait pas été prémédité, il s’agit d’une agression gratuite, commise avec un couteau, avec des séquelles importantes pour la victime.
[20] Dans Antonelli c. R, la Cour d’appel du Québec conclut « qu’en matière de voies de fait graves, sans usage d’une automobile, la fourchette des peines va de la sentence suspendue à l’incarcération, mais la jurisprudence n’est pas avare d’affaires où des peines de 3 à 5 ans sont imposées ». Dans ce dossier, il s’agissait de voies de fait graves commises avec une voiture. L’accusé a foncé dans un abribus, dans lequel se trouvaient cinq personnes et il a été condamné à 5 ans d’emprisonnement.
[21] Dans Bouchard-Lebrun c. R., la Cour d’appel maintient la peine de 5 ans pour un accusé, sans antécédents judiciaires, fortement intoxiqué, qui, sans préméditation, a commis des voies de fait graves impliquant que la victime passe le reste de ses jours à l’hôpital.
[22] Dans David Réjouis c. R, la Cour d’appel réduit la peine à une durée de deux ans moins un jour, assortie d'une probation de trois années, pour trois accusations de voies de fait graves. Près de la station de métro, une altercation a lieu avec un autre groupe; l’accusé intervient avec un couteau pour défendre un de ses amis. Trois personnes sont blessées; deux des personnes subissent une blessure superficielle, mais la troisième est atteinte sérieusement aux intestins. Elle doit subir une intervention chirurgicale et être hospitalisée durant deux semaines. L’accusé est jeune, sans antécédents judiciaires et possède de bonnes valeurs familiales.
[23] La Cour d’appel dans Maranda-Duquette c. R., a réduit à 24 mois la peine imposée pour des voies de fait graves. L’accusé a asséné un coup de poing au visage de la victime, qui s’est fracassé la tête sur le sol; victime d’une fracture du crâne, elle a été hospitalisée aux soins intensifs durant une semaine. Aucune arme n’a été utilisée, mais l’accusé avait une condamnation antérieure de voies de fait pour laquelle, il s’est vu infliger une peine de trois jours.
[24] Dans Oweetaluktuk c. R., la Cour d’appel réduit la sentence à 42 mois. L’accusé a asséné deux coups de couteau dans le dos de sa mère, l’a frappée avec une chaise et un tabouret et a frappé sa grand-mère. La Cour d’appel précise que la sentence se situe dans la fourchette des peines imposées pour des infractions commises par des autochtones et des non-autochtones.
[25] Dans R. c. Niedzielski, une peine de 3 ans fut imposée pour un individu qui a agressé, dans une station de métro des personnes, qu’il ne connaissait pas, dont l'une a subi des séquelles très sévères. Cette victime est demeurée dans le coma pendant une longue période et a, en outre, subi plusieurs fractures et des dommages au cerveau. La gravité objective des crimes, la violence gratuite, les gestes posés par l’intimé et les lourdes conséquences pour les victimes sont les facteurs considérés.
[26] La Cour d’appel dans Rioux c. R., impose une peine de 5 ans et 4 mois à un individu qui a commis des voies de fait graves avec un couteau. Le geste impulsif et sans préméditation a eu des conséquences suivantes pour la victime : coma durant un mois, hospitalisation de 2 mois et séquelles importantes. L’accusé n’avait pas d’antécédents judiciaires
[27] Dans R. c. Mark Jackson, La Cour d’appel confirme une peine de 5 ans pour un individu qui s’est bagarré à la sortie d’un bar et qui a utilisé un couteau pour assaillir la victime. L’accusé a de nombreux antécédents judiciaires et a commis le crime alors qu’il purgeait une sentence dans la collectivité.
[28] Dans R. c. Alexandre, la Cour du Québec impose une peine de 5 ans de pénitencier à un individu qui a poignardé la victime à plusieurs reprises. La brutalité de l’infraction, les séquelles importantes, la préméditation, le fait que l’accusé était sur le coup de 3 ordonnances de probation au moment des évènements et avait une condamnation pour négligence criminelle causant la mort ont justifié la peine imposée.
[29] De cette revue de la jurisprudence, il appert que des sentences de 5 ans de pénitencier sont imposées dans les cas où les accusés ont des antécédents judiciaires ou lorsque les séquelles sont plus lourdes que dans la présente affaire.
Revue de la jurisprudence sur la confiscation des biens infractionnels et des éléments de la "démesure"
R. c. Bernard, 2011 QCCQ 15014 (CanLII)
[17] Il semble approprié, dans un premier temps, d'attirer l'attention sur une particularité de cet article : la confiscation de biens infractionnels est prononcée par le « tribunal qui déclare une personne coupable d'un acte criminel ».
[18] Cette particularité revêt une certaine importance lorsqu'on se réfère à l'article 462.37(1) du Code criminel à propos de la confiscation des produits de la criminalité.
[19] En vertu de cet article, c'est le « tribunal qui détermine la peine à infliger à un accusé… » qui pourra prononcer la confiscation.
[20] Une deuxième précision qui, cette fois-ci, provient de la jurisprudence, mérite d'être apportée.
[21] En effet, la Cour suprême du Canada, en 2009, dans l'arrêt Craig (2009 1 R.C.S. 762), a insisté sur la nécessité de séparer la décision sur la détermination de la peine de celle portant sur la confiscation, évitant une interaction entre les deux processus.
[22] Dans une décision rendue le 10 mars 2011, par la Cour d'appel du Québec, R. c. Neault 2011 QCCA 435 (CanLII), (2011 QCCA 435), cette règle est ainsi rappelée :
Une première leçon qui se dégage de Craig est que l'infliction de la peine et la décision sur la demande de confiscation constituent deux étapes du procès sans corrélation ni interdépendance, qui doivent demeurer distinctes l'une de l'autre.[…]
Paragraphe 19
[23] Et un peu plus loin, au paragraphe 21, on y lit ce qui suit :
L'arrêt Craig est sans équivoque. Le juge qui délibère sur la peine doit occulter la demande de confiscation annoncée et, par la suite, lorsqu'il analyse l'opportunité de la confiscation, il ne doit pas revenir en arrière et tenir compte de la peine infligée.
[24] Notons au passage que la décision rendue par la Cour d'appel dans l'affaire R. c. Neault avait fait l'objet d'une demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême du Canada; or, le 13 octobre 2011, la Cour suprême a rejeté la demande de pourvoi.
2. L'exception à la règle : la démesure
[25] C'est l'article 490.41(3) du Code criminel qui établit les bases de l'exception à la règle de la confiscation :
Sous réserve d’une ordonnance rendue en vertu du paragraphe 490.4(3), le tribunal peut ne pas ordonner la confiscation de tout ou partie de biens infractionnels confiscables en vertu des paragraphes 490.1(1) ou 490.2(2) et annuler toute ordonnance de blocage à l’égard de tout ou partie des biens, s’il est convaincu que la confiscation serait démesurée par rapport à la nature et à la gravité de l’infraction, aux circonstances de sa perpétration et, s’il y a lieu, au casier judiciaire de la personne accusée ou reconnue coupable de l’infraction, selon le cas.
[26] Comme on le constate, cette exception repose sur le concept de la démesure, concept qui est laissé à l'appréciation et à la discrétion du tribunal.
a) La nature de cet exercice d'appréciation
[27] Cet exercice d'appréciation par le tribunal en est un essentiellement de comparaison entre les critères de proportionnalité édictés à l'article 490.41(3) et les effets ou les conséquences que peut entraîner la confiscation.
[28] En d'autres termes, le tribunal a comme tâche de balancer les avantages et les inconvénients d'une confiscation.
[29] L'honorable Paul Vézina de la Cour d'appel du Québec, dans la décision de R. c. Neault, illustre clairement la nature de l'exercice d'appréciation auquel doit se livrer le tribunal dans une décision portant sur la confiscation de biens infractionnels :
L’idée de « démesure » (disproportionate to) et le terme de comparaison « par rapport à » impliquent de soupeser deux réalités pour constater s’il y a équilibre ou déséquilibre entre les plateaux de la balance. D'un côté, il y aura les faits relatifs à l’infraction, évalués selon l’objectif de l’ordonnance et les trois facteurs de la loi, et de l’autre, les effets plus ou moins draconiens de la confiscation (the impact of the forfeiture). Le poids relatif des faits et des effets fera pencher la balance en faveur ou contre la confiscation.
[30] Au paragraphe 25 de la même décision :
Si la loi précise les facteurs d’évaluation de l’infraction, elle est muette sur les effets à prendre en compte et sur la manière de les évaluer. […]
b) L'importance de cet exercice
[31] Encore une fois, cette importance est soulignée par la Cour d'appel dans la décision dans l'affaire Neault, au paragraphe 37 :
Suivant ma compréhension de l’objectif de l’ordonnance, plus on est en présence du crime organisé, plus l’ordonnance s’impose, et de même, plus il appert que le bien est « destiné à servir » à la perpétration d’infraction, plus il importe de ne pas le laisser entre les mains du contrevenant. À l’opposé, si l’infraction est sans rapport avec le gangstérisme et si le bien n’était pas « destiné à servir » au crime, mais a été « utilisé de quelque manière » pour commettre l’infraction, plus s’impose de vérifier si la confiscation ne serait pas démesurée.
c) Le fardeau de preuve de la démesure
[32] Dans une décision rendue par la Cour d'appel du Québec le 16 mai 2011, dans R. c. Manning 2011 QCCA 900 (CanLII), (2011 QCCA 900), nous retenons ce qui suit, au paragraphe 17 de la décision :
Le juge de première instance se dirige bien en droit en indiquant qu'il revient à l'accusé de démontrer par prépondérance de preuve que la confiscation de son véhicule serait démesurée compte tenu des facteurs de l'article 490.41(3) C. cr. […]
d) Les effets de la confiscation
[33] Si la confiscation d'un bien infractionnel peut, en principe, être justifiée par les facteurs énoncés à l'article 490.41(3) du Code criminel, les effets de cette confiscation doivent être aussi évalués et soupesés dans cet important exercice de comparaison, en vue de vérifier s'il y a démesure et, partant, conclure à la non-justification de la confiscation.
[34] Au sujet des effets de la confiscation, la Cour d'appel, dans l'arrêt Neault, au paragraphe 25, nous donne une liste non exhaustive des facteurs à considérer dans l'évaluation des effets de la confiscation :
[…] À mon avis, il est pertinent de considérer entre autres si le bien est superflu, utile ou nécessaire suivant son usage habituel; si le bien est de peu ou de grande valeur en soi et en l’espèce; si le bien est utilisé pour des besoins de base, s’approvisionner, se faire soigner; si le bien sert aux loisirs ou au travail; si le bien contribue à l’exécution d’obligations familiales ou sociales.
[35] On pourrait aussi tenir en considération notamment les aspects suivants : l'existence ou non de moyens de transport en commun, la proximité de ceux-ci avec le domicile, l'état de santé du délinquant, les moyens financiers du délinquant, l'importance du soutien familial assuré par le délinquant…
B. LES ILLUSTRATIONS JURISPRUDENTIELLES
[36] La jurisprudence de nos tribunaux, tout en témoignant que chaque cas est d'espèce en matière de demande de confiscation d'un bien infractionnel, nous fournit plusieurs exemples de la proportionnalité ou de la disproportionnalité de cette mesure de confiscation, eu égard aux circonstances et facteurs propres à chaque affaire.
[37] En effet, dans l'examen sommaire des décisions rendues par les tribunaux relativement à la confiscation des biens infractionnels, on doit constater que chaque affaire comporte une trame factuelle distincte.
[38] Commençons donc par analyser les faits dans les deux décisions (Neault et Manning) auxquelles nous nous sommes référés pour les principes s'y dégageant.
[39] R. c. Neault 2011 QCCA 435 (CanLII), (2011 QCCA 435) :
Il s'agissait dans cette affaire d'une accusation de conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise (112 milligrammes par 100 millilitres de sang), survenue en 2010. L'accusé avait des antécédents de même nature, s'étendant d'avril 2004 jusqu'en décembre 2010. Il s'agissait dans ce cas d'un jeune homme célibataire qui avait nécessairement besoin de son véhicule pour opérer un commerce de méchoui. Le père de l'accusé avait financé l'achat du véhicule. La preuve révélait qu'il n'y avait pas de transport en commun dans la région où résidait l'accusé en compagnie de ses parents (St-Luc-de-Vincennes). La confiscation a été refusée.
[40] R. c. Manning, 2011 QCCA 900 (CanLII), (2011 QCCA 900) :
L'accusé dans cette affaire vit de prestations de derniers secours, étant sans emploi et son automobile constitue le seul bien qu'il possède. Il s'agit d'un individu de 62 ans qui habite, en compagnie de sa conjointe, une chambre d'un motel à Chute-aux-Outardes et qui, en raison de ses problèmes de santé, doit se rendre régulièrement à l'hôpital de Baie-Comeau. L'automobile est nécessaire aussi pour lui et sa conjointe aux fins de s'acheter de la nourriture et des vêtements; il n'a pas les moyens financiers pour prendre un taxi. La confiscation a été refusée dans ce dossier.
[41] R. c. Rheault 2010 QCCQ 8555 (CanLII), (2010 QCCQ 8555) :
Cette décision fait état d'une cinquième condamnation en semblable matière (pour alcool au volant). Le plus bas taux indique 202 milligrammes par 100 millilitres de sang. L'accusé demeure seul, n'a pas de personnes à charge et personne n'est affecté indirectement par la confiscation. La Cour avait ordonné la confiscation du véhicule, soit un Honda Accord de l'année 2004.
[42] R. c. Thiffault 2008 QCCQ 2391 (CanLII), (2008 QCCQ 2391) :
La Cour a ordonné également dans cette affaire la confiscation d'un véhicule (Mazda Protégé 2003) sur laquelle il n'y avait aucun lien. L'accusé, âgé de 48 ans, a été repris pour conduite d'un véhicule avec un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise (146 milligrammes par 100 millilitres de sang). Il avait six antécédents en semblable matière pour la période de 1981 à 2000, en plus d'une accusation de refus de test en 2000, de conduite dangereuse en 1992 et cinq accusations de conduite de véhicule pendant interdiction, en vertu du Code criminel entre 1996 et 2004.
[43] R. c. Bergeron 2009 QCCQ 15576 (CanLII), (2009 QCCQ 15576) :
Dans ce dossier, l'accusé a plaidé coupable à une accusation de conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise (le plus bas taux : 222 milligrammes par 100 millilitres de sang). C'est le septième dossier en semblable matière. La mère de l'accusé s'était portée caution de l'emprunt effectué par l'accusé, sans pour autant avoir de lien sur le véhicule. Le solde de l'emprunt était tout de même de 13 000 $. La Cour a ordonné la confiscation du véhicule saisi.
[44] R. c. Lemieux (EYB 2010 177133) :
Cette décision rendue par la Cour d'appel du Québec le 22 juillet 2010 met en lumière les faits suivants. L'accusé était âgé de 72 ans lorsqu'il a été déclaré coupable d'avoir conduit un VTT en état d'ébriété. Il possède des antécédents judiciaires. La valeur de ce véhicule était de 8 000 $. Il s'agit d'un individu qui est qualifié par la Cour de « pas riche », vivant dans un rang à une distance de 20 à 30 kilomètres du village. Le VTT est nécessaire pour tirer une fendeuse à bois et permettre à l'accusé de s'approvisionner en bois. On dénote que dans les dossiers antérieurs, les peines se résumaient à des amendes. La Cour d'appel maintient le refus de confisquer le véhicule.
[45] R. c. Adamson 2007 BCSC 1143 (CanLII), (2007 BCSC 1143) :
Dans cette affaire, l'accusée a été déclarée coupable de conduite dangereuse causant des blessures corporelles et de refus de test, pour des événements survenus en août 2006. L'accusée n'avait aucun antécédent et la Cour a considéré comme non disproportionnée la confiscation d'un véhicule Mercedes Kompressor de l'année 2002, ayant une valeur de 26 000 $, malgré le fait que l'accusée en avait besoin pour son travail.
[17] Il semble approprié, dans un premier temps, d'attirer l'attention sur une particularité de cet article : la confiscation de biens infractionnels est prononcée par le « tribunal qui déclare une personne coupable d'un acte criminel ».
[18] Cette particularité revêt une certaine importance lorsqu'on se réfère à l'article 462.37(1) du Code criminel à propos de la confiscation des produits de la criminalité.
[19] En vertu de cet article, c'est le « tribunal qui détermine la peine à infliger à un accusé… » qui pourra prononcer la confiscation.
[20] Une deuxième précision qui, cette fois-ci, provient de la jurisprudence, mérite d'être apportée.
[21] En effet, la Cour suprême du Canada, en 2009, dans l'arrêt Craig (2009 1 R.C.S. 762), a insisté sur la nécessité de séparer la décision sur la détermination de la peine de celle portant sur la confiscation, évitant une interaction entre les deux processus.
[22] Dans une décision rendue le 10 mars 2011, par la Cour d'appel du Québec, R. c. Neault 2011 QCCA 435 (CanLII), (2011 QCCA 435), cette règle est ainsi rappelée :
Une première leçon qui se dégage de Craig est que l'infliction de la peine et la décision sur la demande de confiscation constituent deux étapes du procès sans corrélation ni interdépendance, qui doivent demeurer distinctes l'une de l'autre.[…]
Paragraphe 19
[23] Et un peu plus loin, au paragraphe 21, on y lit ce qui suit :
L'arrêt Craig est sans équivoque. Le juge qui délibère sur la peine doit occulter la demande de confiscation annoncée et, par la suite, lorsqu'il analyse l'opportunité de la confiscation, il ne doit pas revenir en arrière et tenir compte de la peine infligée.
[24] Notons au passage que la décision rendue par la Cour d'appel dans l'affaire R. c. Neault avait fait l'objet d'une demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême du Canada; or, le 13 octobre 2011, la Cour suprême a rejeté la demande de pourvoi.
2. L'exception à la règle : la démesure
[25] C'est l'article 490.41(3) du Code criminel qui établit les bases de l'exception à la règle de la confiscation :
Sous réserve d’une ordonnance rendue en vertu du paragraphe 490.4(3), le tribunal peut ne pas ordonner la confiscation de tout ou partie de biens infractionnels confiscables en vertu des paragraphes 490.1(1) ou 490.2(2) et annuler toute ordonnance de blocage à l’égard de tout ou partie des biens, s’il est convaincu que la confiscation serait démesurée par rapport à la nature et à la gravité de l’infraction, aux circonstances de sa perpétration et, s’il y a lieu, au casier judiciaire de la personne accusée ou reconnue coupable de l’infraction, selon le cas.
[26] Comme on le constate, cette exception repose sur le concept de la démesure, concept qui est laissé à l'appréciation et à la discrétion du tribunal.
a) La nature de cet exercice d'appréciation
[27] Cet exercice d'appréciation par le tribunal en est un essentiellement de comparaison entre les critères de proportionnalité édictés à l'article 490.41(3) et les effets ou les conséquences que peut entraîner la confiscation.
[28] En d'autres termes, le tribunal a comme tâche de balancer les avantages et les inconvénients d'une confiscation.
[29] L'honorable Paul Vézina de la Cour d'appel du Québec, dans la décision de R. c. Neault, illustre clairement la nature de l'exercice d'appréciation auquel doit se livrer le tribunal dans une décision portant sur la confiscation de biens infractionnels :
L’idée de « démesure » (disproportionate to) et le terme de comparaison « par rapport à » impliquent de soupeser deux réalités pour constater s’il y a équilibre ou déséquilibre entre les plateaux de la balance. D'un côté, il y aura les faits relatifs à l’infraction, évalués selon l’objectif de l’ordonnance et les trois facteurs de la loi, et de l’autre, les effets plus ou moins draconiens de la confiscation (the impact of the forfeiture). Le poids relatif des faits et des effets fera pencher la balance en faveur ou contre la confiscation.
[30] Au paragraphe 25 de la même décision :
Si la loi précise les facteurs d’évaluation de l’infraction, elle est muette sur les effets à prendre en compte et sur la manière de les évaluer. […]
b) L'importance de cet exercice
[31] Encore une fois, cette importance est soulignée par la Cour d'appel dans la décision dans l'affaire Neault, au paragraphe 37 :
Suivant ma compréhension de l’objectif de l’ordonnance, plus on est en présence du crime organisé, plus l’ordonnance s’impose, et de même, plus il appert que le bien est « destiné à servir » à la perpétration d’infraction, plus il importe de ne pas le laisser entre les mains du contrevenant. À l’opposé, si l’infraction est sans rapport avec le gangstérisme et si le bien n’était pas « destiné à servir » au crime, mais a été « utilisé de quelque manière » pour commettre l’infraction, plus s’impose de vérifier si la confiscation ne serait pas démesurée.
c) Le fardeau de preuve de la démesure
[32] Dans une décision rendue par la Cour d'appel du Québec le 16 mai 2011, dans R. c. Manning 2011 QCCA 900 (CanLII), (2011 QCCA 900), nous retenons ce qui suit, au paragraphe 17 de la décision :
Le juge de première instance se dirige bien en droit en indiquant qu'il revient à l'accusé de démontrer par prépondérance de preuve que la confiscation de son véhicule serait démesurée compte tenu des facteurs de l'article 490.41(3) C. cr. […]
d) Les effets de la confiscation
[33] Si la confiscation d'un bien infractionnel peut, en principe, être justifiée par les facteurs énoncés à l'article 490.41(3) du Code criminel, les effets de cette confiscation doivent être aussi évalués et soupesés dans cet important exercice de comparaison, en vue de vérifier s'il y a démesure et, partant, conclure à la non-justification de la confiscation.
[34] Au sujet des effets de la confiscation, la Cour d'appel, dans l'arrêt Neault, au paragraphe 25, nous donne une liste non exhaustive des facteurs à considérer dans l'évaluation des effets de la confiscation :
[…] À mon avis, il est pertinent de considérer entre autres si le bien est superflu, utile ou nécessaire suivant son usage habituel; si le bien est de peu ou de grande valeur en soi et en l’espèce; si le bien est utilisé pour des besoins de base, s’approvisionner, se faire soigner; si le bien sert aux loisirs ou au travail; si le bien contribue à l’exécution d’obligations familiales ou sociales.
[35] On pourrait aussi tenir en considération notamment les aspects suivants : l'existence ou non de moyens de transport en commun, la proximité de ceux-ci avec le domicile, l'état de santé du délinquant, les moyens financiers du délinquant, l'importance du soutien familial assuré par le délinquant…
B. LES ILLUSTRATIONS JURISPRUDENTIELLES
[36] La jurisprudence de nos tribunaux, tout en témoignant que chaque cas est d'espèce en matière de demande de confiscation d'un bien infractionnel, nous fournit plusieurs exemples de la proportionnalité ou de la disproportionnalité de cette mesure de confiscation, eu égard aux circonstances et facteurs propres à chaque affaire.
[37] En effet, dans l'examen sommaire des décisions rendues par les tribunaux relativement à la confiscation des biens infractionnels, on doit constater que chaque affaire comporte une trame factuelle distincte.
[38] Commençons donc par analyser les faits dans les deux décisions (Neault et Manning) auxquelles nous nous sommes référés pour les principes s'y dégageant.
[39] R. c. Neault 2011 QCCA 435 (CanLII), (2011 QCCA 435) :
Il s'agissait dans cette affaire d'une accusation de conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise (112 milligrammes par 100 millilitres de sang), survenue en 2010. L'accusé avait des antécédents de même nature, s'étendant d'avril 2004 jusqu'en décembre 2010. Il s'agissait dans ce cas d'un jeune homme célibataire qui avait nécessairement besoin de son véhicule pour opérer un commerce de méchoui. Le père de l'accusé avait financé l'achat du véhicule. La preuve révélait qu'il n'y avait pas de transport en commun dans la région où résidait l'accusé en compagnie de ses parents (St-Luc-de-Vincennes). La confiscation a été refusée.
[40] R. c. Manning, 2011 QCCA 900 (CanLII), (2011 QCCA 900) :
L'accusé dans cette affaire vit de prestations de derniers secours, étant sans emploi et son automobile constitue le seul bien qu'il possède. Il s'agit d'un individu de 62 ans qui habite, en compagnie de sa conjointe, une chambre d'un motel à Chute-aux-Outardes et qui, en raison de ses problèmes de santé, doit se rendre régulièrement à l'hôpital de Baie-Comeau. L'automobile est nécessaire aussi pour lui et sa conjointe aux fins de s'acheter de la nourriture et des vêtements; il n'a pas les moyens financiers pour prendre un taxi. La confiscation a été refusée dans ce dossier.
[41] R. c. Rheault 2010 QCCQ 8555 (CanLII), (2010 QCCQ 8555) :
Cette décision fait état d'une cinquième condamnation en semblable matière (pour alcool au volant). Le plus bas taux indique 202 milligrammes par 100 millilitres de sang. L'accusé demeure seul, n'a pas de personnes à charge et personne n'est affecté indirectement par la confiscation. La Cour avait ordonné la confiscation du véhicule, soit un Honda Accord de l'année 2004.
[42] R. c. Thiffault 2008 QCCQ 2391 (CanLII), (2008 QCCQ 2391) :
La Cour a ordonné également dans cette affaire la confiscation d'un véhicule (Mazda Protégé 2003) sur laquelle il n'y avait aucun lien. L'accusé, âgé de 48 ans, a été repris pour conduite d'un véhicule avec un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise (146 milligrammes par 100 millilitres de sang). Il avait six antécédents en semblable matière pour la période de 1981 à 2000, en plus d'une accusation de refus de test en 2000, de conduite dangereuse en 1992 et cinq accusations de conduite de véhicule pendant interdiction, en vertu du Code criminel entre 1996 et 2004.
[43] R. c. Bergeron 2009 QCCQ 15576 (CanLII), (2009 QCCQ 15576) :
Dans ce dossier, l'accusé a plaidé coupable à une accusation de conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise (le plus bas taux : 222 milligrammes par 100 millilitres de sang). C'est le septième dossier en semblable matière. La mère de l'accusé s'était portée caution de l'emprunt effectué par l'accusé, sans pour autant avoir de lien sur le véhicule. Le solde de l'emprunt était tout de même de 13 000 $. La Cour a ordonné la confiscation du véhicule saisi.
[44] R. c. Lemieux (EYB 2010 177133) :
Cette décision rendue par la Cour d'appel du Québec le 22 juillet 2010 met en lumière les faits suivants. L'accusé était âgé de 72 ans lorsqu'il a été déclaré coupable d'avoir conduit un VTT en état d'ébriété. Il possède des antécédents judiciaires. La valeur de ce véhicule était de 8 000 $. Il s'agit d'un individu qui est qualifié par la Cour de « pas riche », vivant dans un rang à une distance de 20 à 30 kilomètres du village. Le VTT est nécessaire pour tirer une fendeuse à bois et permettre à l'accusé de s'approvisionner en bois. On dénote que dans les dossiers antérieurs, les peines se résumaient à des amendes. La Cour d'appel maintient le refus de confisquer le véhicule.
[45] R. c. Adamson 2007 BCSC 1143 (CanLII), (2007 BCSC 1143) :
Dans cette affaire, l'accusée a été déclarée coupable de conduite dangereuse causant des blessures corporelles et de refus de test, pour des événements survenus en août 2006. L'accusée n'avait aucun antécédent et la Cour a considéré comme non disproportionnée la confiscation d'un véhicule Mercedes Kompressor de l'année 2002, ayant une valeur de 26 000 $, malgré le fait que l'accusée en avait besoin pour son travail.
Informatique judiciaire : Guide à l’intention des intervenants en cas d’incident de sécurité informatique
3.4.2 Règles de preuve
Les règles de preuve sont très précises et visent à garantir que la preuve est obtenue et stockée comme il se doit et qu’elle n’a pas été modifiée lorsqu’elle est présentée devant les tribunaux. Selon les règles, les preuves numériques doivent être :
• authentiques – l’intégrité et la chaîne de possession des éléments de preuve doivent être intactes;
• complètes – tous les éléments de preuve qui appuient ou qui contredisent toute preuve qui inculpe un suspect doivent être étudiés et évalués. Il est également nécessaire de réunir des éléments de preuve qui permettent d’éliminer d’autres suspects. On ne doit pas seulement être capable de prouver que l’accusé a commis le crime, mais on doit également prouver que le crime n’a pas été commis par quelqu’un d’autre;
• fiables – les procédures et les outils relatifs à la collecte, à l’examen, à l’analyse et à la conservation des preuves ainsi qu’à l’établissement de rapports s’y rattachant doivent permettre d’arriver aux mêmes résultats au fil du temps. Les procédures ne doivent pas mettre en doute l’authenticité de la preuve et les conclusions tirées à la suite de l’analyse;
• crédibles – les preuves doivent être claires, faciles à comprendre et crédibles. La version des preuves présentées devant les tribunaux doit être liée à la preuve binaire originale, sans quoi il est impossible de savoir si la preuve a été contrefaite.
(...)
En mars 2000, le Groupe des Huit (G8) a établi un ensemble de principes proposés pour les procédures relatives à la preuve numérique. Ces principes offrent une base solide sur laquelle faire fond pendant tout examen effectué avant que les responsables de l’application de la loi n’interviennent.
• Principes du G8 – Procédures relatives à la preuve numérique
o Dans le traitement des preuves numériques, tous les principes judiciaires généraux et relatifs aux procédures doivent être appliqués.
o Dès la saisie de preuves numériques, les mesures prises ne doivent pas venir modifier ces preuves.
o Lorsqu’il est nécessaire qu’une personne accède aux preuves numériques originales, cette personne doit avoir suivi une formation à cet égard.
o Toutes les activités liées à la saisie, au stockage ou au transfert des preuves numériques ou à l’accès à ces preuves doivent être entièrement documentées, conservées et disponibles aux fins d’examen.
o Une personne est responsable de toutes les mesures prises en ce qui a trait aux preuves numériques pendant que celles-ci sont en sa possession.
o Tout organisme responsable de la saisie, du stockage ou du transfert des preuves
numériques ou de l’accès à celles-ci est responsable de la conformité à ces principes.
(...)
3.4.3 Chaîne de possession
La chaîne de possession désigne le suivi des éléments de preuve recueillis sur les lieux du crime jusqu’à la présentation de ceux-ci devant les tribunaux. L’entretien de la chaîne de possession est essentiel dans les cas qui reposent fortement sur des preuves numériques. Ce type de preuve peut facilement être modifié, et un bris dans la chaîne de possession peut compromettre la force probante d’une affaire pénale. Il est essentiel de savoir où se sont trouvées les preuves en tout temps, du moment où elles ont été obtenues au moment où elles sont présentées devant les tribunaux. Les organismes d’application de la loi préfèrent toujours qu’on ne touche pas à la preuve avant leur arrivée sur les lieux. Cependant, cela
n’est pas toujours possible, tel qu’il a été mentionné précédemment. Dans de tels cas, toutes les mesures prises par le personnel ne faisant pas partie des organismes d’application de la loi doivent entretenir la chaîne de possession et respecter les règles de preuve.
Tiré de: Informatique judiciaire : Guide à l’intention des intervenants en cas
d’incident de sécurité informatique
http://www.rcmp-grc.gc.ca/ts-st/pubs/it-ti-sec/g2-008-fra.pdf
Les règles de preuve sont très précises et visent à garantir que la preuve est obtenue et stockée comme il se doit et qu’elle n’a pas été modifiée lorsqu’elle est présentée devant les tribunaux. Selon les règles, les preuves numériques doivent être :
• authentiques – l’intégrité et la chaîne de possession des éléments de preuve doivent être intactes;
• complètes – tous les éléments de preuve qui appuient ou qui contredisent toute preuve qui inculpe un suspect doivent être étudiés et évalués. Il est également nécessaire de réunir des éléments de preuve qui permettent d’éliminer d’autres suspects. On ne doit pas seulement être capable de prouver que l’accusé a commis le crime, mais on doit également prouver que le crime n’a pas été commis par quelqu’un d’autre;
• fiables – les procédures et les outils relatifs à la collecte, à l’examen, à l’analyse et à la conservation des preuves ainsi qu’à l’établissement de rapports s’y rattachant doivent permettre d’arriver aux mêmes résultats au fil du temps. Les procédures ne doivent pas mettre en doute l’authenticité de la preuve et les conclusions tirées à la suite de l’analyse;
• crédibles – les preuves doivent être claires, faciles à comprendre et crédibles. La version des preuves présentées devant les tribunaux doit être liée à la preuve binaire originale, sans quoi il est impossible de savoir si la preuve a été contrefaite.
(...)
En mars 2000, le Groupe des Huit (G8) a établi un ensemble de principes proposés pour les procédures relatives à la preuve numérique. Ces principes offrent une base solide sur laquelle faire fond pendant tout examen effectué avant que les responsables de l’application de la loi n’interviennent.
• Principes du G8 – Procédures relatives à la preuve numérique
o Dans le traitement des preuves numériques, tous les principes judiciaires généraux et relatifs aux procédures doivent être appliqués.
o Dès la saisie de preuves numériques, les mesures prises ne doivent pas venir modifier ces preuves.
o Lorsqu’il est nécessaire qu’une personne accède aux preuves numériques originales, cette personne doit avoir suivi une formation à cet égard.
o Toutes les activités liées à la saisie, au stockage ou au transfert des preuves numériques ou à l’accès à ces preuves doivent être entièrement documentées, conservées et disponibles aux fins d’examen.
o Une personne est responsable de toutes les mesures prises en ce qui a trait aux preuves numériques pendant que celles-ci sont en sa possession.
o Tout organisme responsable de la saisie, du stockage ou du transfert des preuves
numériques ou de l’accès à celles-ci est responsable de la conformité à ces principes.
(...)
3.4.3 Chaîne de possession
La chaîne de possession désigne le suivi des éléments de preuve recueillis sur les lieux du crime jusqu’à la présentation de ceux-ci devant les tribunaux. L’entretien de la chaîne de possession est essentiel dans les cas qui reposent fortement sur des preuves numériques. Ce type de preuve peut facilement être modifié, et un bris dans la chaîne de possession peut compromettre la force probante d’une affaire pénale. Il est essentiel de savoir où se sont trouvées les preuves en tout temps, du moment où elles ont été obtenues au moment où elles sont présentées devant les tribunaux. Les organismes d’application de la loi préfèrent toujours qu’on ne touche pas à la preuve avant leur arrivée sur les lieux. Cependant, cela
n’est pas toujours possible, tel qu’il a été mentionné précédemment. Dans de tels cas, toutes les mesures prises par le personnel ne faisant pas partie des organismes d’application de la loi doivent entretenir la chaîne de possession et respecter les règles de preuve.
Tiré de: Informatique judiciaire : Guide à l’intention des intervenants en cas
d’incident de sécurité informatique
http://www.rcmp-grc.gc.ca/ts-st/pubs/it-ti-sec/g2-008-fra.pdf
mardi 6 décembre 2011
La fiabilité des preuves informatiques
Une preuve n’a de sens que si les données sont intègres. Il faut faire une différence entre la preuve de l’intégrité et l’intégrité de la preuve. Le premier aspect implique que tous les moyens sont mis en oeuvre en amont pour préserver l’intégrité de se qui se passe en aval, notamment la logique et l’exactitude des traitements ce qui permet une journalisation fiable des évènements. Les mécanismes de preuve devraient être omniprésents durant toute la chaîne informatique, de la conception à l’exploitation des programmes et systèmes.
L’intégrité de la preuve signifie qu’elle n’a pas été altérée depuis sa récolte ce qui implique qu’elle doit être sauvegardée correctement. Déjà en 1998, dans un litige qui l’opposait à un employé, la société IBM ne put pas utiliser les preuves qu’elle avait récoltées car le disque qui les contenait n’avait pas été conservé sous séquestre et donc était susceptible d’avoir été altéré.
Ces deux aspects (intégrité et conservation) sont importants car on parle ici de fiabilité. Or l’intégrité d’une donnée signifie que toute modification de cette donnée est volontaire et résulte de l’exécution d’un processus sous contrôle. Cela ne signifie pas qu’elle soit fiable (selon le bien connu « Garbage in, garbage out »). Il faut donc garantir la preuve en amont, au niveau des traitements, en mettant en place les mécanismes qui garantiront l’inaltérabilité des programmes par l’application d’un principe de quatre yeux, d’outils de gestion des versions et de mise en production.
Nous pouvons donc avancer que la preuve est garantie par la vérification des informations avant et après traitement, sur base d’une journalisation. Le terme informatique approprié est « trace d’audit, inaltérable et exhaustive ».
L’appréciation libre du juge va peser sur la nature même de la preuve. Il faut donc, et cela ne sera jamais suffisamment répété, que les preuves présentées soient irréprochables :
o Précautions techniques pour la capture des données : multiplication des sources
(recoupements, sauvegarde, reconstruction des séquences du délit) ;
o Précautions techniques pour la conservation des données : conservation sur un
tiers de confiance;
o Preuve récoltée par des moyens légaux ;
o Mise en évidence d’actions anti-forensiques (effacement) car « ce que l’on
cache vaut bien ce que l’on trouve »
o Police versus privé : le particulier n’a pas, au contraire de la police, à respecter le Code de procédure pénale. Cette considération est évidemment limitée par le principe de loyauté de la preuve.
Tiré de : La criminalité informatique dans l’entreprise : les aspects techniques et légaux de la preuve
http://www.cases.public.lu/fr/publications/recherche/Jeanbaptiste/Memoire_Jeanbaptiste.pdf
L’intégrité de la preuve signifie qu’elle n’a pas été altérée depuis sa récolte ce qui implique qu’elle doit être sauvegardée correctement. Déjà en 1998, dans un litige qui l’opposait à un employé, la société IBM ne put pas utiliser les preuves qu’elle avait récoltées car le disque qui les contenait n’avait pas été conservé sous séquestre et donc était susceptible d’avoir été altéré.
Ces deux aspects (intégrité et conservation) sont importants car on parle ici de fiabilité. Or l’intégrité d’une donnée signifie que toute modification de cette donnée est volontaire et résulte de l’exécution d’un processus sous contrôle. Cela ne signifie pas qu’elle soit fiable (selon le bien connu « Garbage in, garbage out »). Il faut donc garantir la preuve en amont, au niveau des traitements, en mettant en place les mécanismes qui garantiront l’inaltérabilité des programmes par l’application d’un principe de quatre yeux, d’outils de gestion des versions et de mise en production.
Nous pouvons donc avancer que la preuve est garantie par la vérification des informations avant et après traitement, sur base d’une journalisation. Le terme informatique approprié est « trace d’audit, inaltérable et exhaustive ».
L’appréciation libre du juge va peser sur la nature même de la preuve. Il faut donc, et cela ne sera jamais suffisamment répété, que les preuves présentées soient irréprochables :
o Précautions techniques pour la capture des données : multiplication des sources
(recoupements, sauvegarde, reconstruction des séquences du délit) ;
o Précautions techniques pour la conservation des données : conservation sur un
tiers de confiance;
o Preuve récoltée par des moyens légaux ;
o Mise en évidence d’actions anti-forensiques (effacement) car « ce que l’on
cache vaut bien ce que l’on trouve »
o Police versus privé : le particulier n’a pas, au contraire de la police, à respecter le Code de procédure pénale. Cette considération est évidemment limitée par le principe de loyauté de la preuve.
Tiré de : La criminalité informatique dans l’entreprise : les aspects techniques et légaux de la preuve
http://www.cases.public.lu/fr/publications/recherche/Jeanbaptiste/Memoire_Jeanbaptiste.pdf
Les traces d'utilisation d'un système d’informatique
Quelles sont ces traces ?
En général
· L’identification de l’utilisateur : l’identification la plus fréquente est certainement le « userID » ; mais d’autres traces permettent d’identifier l’utilisateur indirectement comme, par exemple, l’adresse IP de son ordinateur.
· L’adresse IP, l’adresse MAC : expérience à faire : se connecter sur
www.celog.fr/inforensique.php .
· L’heure et la date : ces informations sont fonctions du temps réel affiché par l’horloge système, du système d’exploitation lui-même, des applications accédant à ces fichiers, des fuseaux horaires. Pour l’oeil humain, la date et l’heure apparaissent de même façon lisible. Par contre, la façon dont sont interprétées ces données est différente d’un système d’exploitation à l’autre. Par exemple, sur un système Unix la date et l’heure sont une valeur numérique de 4 bytes représentant le nombre de seconde depuis le 1er janvier 1970 et chez Windows il s’agit d’une valeur numérique de 8 bytes représentant le nombre de nanosecondes depuis le 1er janvier 1601! Les fuseaux horaires (time zones) ainsi que l’heure d’été/hivers doivent également être pris en considération. Certains systèmes convertissent les valeurs en temps GMT, d’autres laissent ces
valeurs en temps local.
· Le résultat de l’intervention : succès ou échec
· Le nombre de connexions
· Les différentes commandes passées
· Les volumes manipulés
Spécifique à la messagerie :
· L’adresse expéditeur / destinataire
· Un certificat le cas échéant
· Le sujet du message s’il contient des caractères non standards
Spécifique serveur Web
· Les pages consultées
· Les ports (source et destination) et le protocole utilisés
· Le type de requête
Spécifique équipement de sécurité
· Les ports (source et destination) et le protocole utilisés
· Le nombre de paquets, d’octets
Spécifique aux applications :
Chaque application peut avoir un système d’enregistrement des traces qui lui est propre.
Tiré de : La criminalité informatique dans l’entreprise : les aspects techniques et légaux de la preuve
http://www.cases.public.lu/fr/publications/recherche/Jeanbaptiste/Memoire_Jeanbaptiste.pdf
En général
· L’identification de l’utilisateur : l’identification la plus fréquente est certainement le « userID » ; mais d’autres traces permettent d’identifier l’utilisateur indirectement comme, par exemple, l’adresse IP de son ordinateur.
· L’adresse IP, l’adresse MAC : expérience à faire : se connecter sur
www.celog.fr/inforensique.php .
· L’heure et la date : ces informations sont fonctions du temps réel affiché par l’horloge système, du système d’exploitation lui-même, des applications accédant à ces fichiers, des fuseaux horaires. Pour l’oeil humain, la date et l’heure apparaissent de même façon lisible. Par contre, la façon dont sont interprétées ces données est différente d’un système d’exploitation à l’autre. Par exemple, sur un système Unix la date et l’heure sont une valeur numérique de 4 bytes représentant le nombre de seconde depuis le 1er janvier 1970 et chez Windows il s’agit d’une valeur numérique de 8 bytes représentant le nombre de nanosecondes depuis le 1er janvier 1601! Les fuseaux horaires (time zones) ainsi que l’heure d’été/hivers doivent également être pris en considération. Certains systèmes convertissent les valeurs en temps GMT, d’autres laissent ces
valeurs en temps local.
· Le résultat de l’intervention : succès ou échec
· Le nombre de connexions
· Les différentes commandes passées
· Les volumes manipulés
Spécifique à la messagerie :
· L’adresse expéditeur / destinataire
· Un certificat le cas échéant
· Le sujet du message s’il contient des caractères non standards
Spécifique serveur Web
· Les pages consultées
· Les ports (source et destination) et le protocole utilisés
· Le type de requête
Spécifique équipement de sécurité
· Les ports (source et destination) et le protocole utilisés
· Le nombre de paquets, d’octets
Spécifique aux applications :
Chaque application peut avoir un système d’enregistrement des traces qui lui est propre.
Tiré de : La criminalité informatique dans l’entreprise : les aspects techniques et légaux de la preuve
http://www.cases.public.lu/fr/publications/recherche/Jeanbaptiste/Memoire_Jeanbaptiste.pdf
lundi 5 décembre 2011
La fiabilité des preuves numériques
Ainsi chargées d’apprécier librement la fiabilité des preuves numériques
présentées devant eux, les tribunaux ont pu rendre, notamment dans le domaine
commercial, des décisions très disparates, dont l’analyse permet néanmoins de
tirer quelques enseignements :
1. lorsqu’il admet la force probante de la preuve électronique, le juge s’appuie
généralement sur plusieurs preuves concordantes. Ainsi, dans l’affaire
Cédicas, c’est la connaissance d’un code secret associée à la présentation
d’une carte bancaire qui permet à une société de crédit de rapporter la preuve
de ses créances, alors que, par ailleurs, « il n’est allégué aucun dérèglement
du système informatique, ni la perte du numéro secret par le débiteur » ;
2. le juge (comme le législateur) tend à réclamer une preuve que l’on considère généralement difficile à rapporter, à savoir la preuve négative de l’absence de négligence ou de tout dysfonctionnement du système. Ainsi, dans une affaire aux circonstances similaires à l’affaire Crédicas susvisée, la Cour d’appel de Paris a au contraire rejet´e la preuve informatique rapportée par la
banque car elle ne rapportait pas la preuve de la négligence imputable au
porteur de la carte volée ou bien encore la preuve de l’absence de défaillance
du système de sécurité du distributeur.
Tiré de: Fraude informatique et preuve : la quadrature
du cercle ? (Marie Barel)
http://actes.sstic.org/SSTIC05/Delits_informatiques_et_preuve/SSTIC05-article-Barel-Delits_informatiques_et_preuve.pdf
présentées devant eux, les tribunaux ont pu rendre, notamment dans le domaine
commercial, des décisions très disparates, dont l’analyse permet néanmoins de
tirer quelques enseignements :
1. lorsqu’il admet la force probante de la preuve électronique, le juge s’appuie
généralement sur plusieurs preuves concordantes. Ainsi, dans l’affaire
Cédicas, c’est la connaissance d’un code secret associée à la présentation
d’une carte bancaire qui permet à une société de crédit de rapporter la preuve
de ses créances, alors que, par ailleurs, « il n’est allégué aucun dérèglement
du système informatique, ni la perte du numéro secret par le débiteur » ;
2. le juge (comme le législateur) tend à réclamer une preuve que l’on considère généralement difficile à rapporter, à savoir la preuve négative de l’absence de négligence ou de tout dysfonctionnement du système. Ainsi, dans une affaire aux circonstances similaires à l’affaire Crédicas susvisée, la Cour d’appel de Paris a au contraire rejet´e la preuve informatique rapportée par la
banque car elle ne rapportait pas la preuve de la négligence imputable au
porteur de la carte volée ou bien encore la preuve de l’absence de défaillance
du système de sécurité du distributeur.
Tiré de: Fraude informatique et preuve : la quadrature
du cercle ? (Marie Barel)
http://actes.sstic.org/SSTIC05/Delits_informatiques_et_preuve/SSTIC05-article-Barel-Delits_informatiques_et_preuve.pdf
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Desjardins c. R., 2010 QCCA 1947 (CanLII) Lien vers la décision [ 24 ] L' article 490 C.cr . prévoit un régime pour ...
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