Leclerc c. R., 2007 QCCA 1347 (CanLII)
[7] Je crois bon de citer ici le paragraphe 730 (3) du Code criminel :
730(3) Le délinquant qui est absous en conformité avec le paragraphe (1) est réputé ne pas avoir été condamné à l’égard de l’infraction; toutefois, les règles suivantes s’appliquent : (...)
[8] Il ressort de ce paragraphe qu'un délinquant absous, que ce soit conditionnellement ou inconditionnellement, est réputé ne pas avoir été condamné à l'égard de l'infraction visée. L'effet de l'absolution est donc le même dans les deux cas.
[9] Par ailleurs, l'article 6.1 de la Loi sur le casier judiciaire, L.R.C. (1985), chap. 47, est rédigé comme suit :
6.1(1) Nul ne peut communiquer tout dossier ou relevé attestant d'une absolution que garde le commissaire ou un ministère ou organisme fédéral, en révéler l'existence ou révéler le fait de l'absolution sans l'autorisation préalable du ministre, suivant l'écoulement de la période suivante:
a) un an suivant la date de l'ordonnance inconditionnelle;
b) trois ans suivant la date de l'ordonnance sous conditions.
6.1(2) Le commissaire retire du fichier automatisé des relevés de condamnations criminelles géré par la Gendarmerie royale du Canada toute mention d'un dossier ou relevé attestant d'une absolution à l'expiration des délais visés au paragraphe
[12] Aux paragraphes 65 à 73 de cet arrêt, voici ce que déclare le juge en chef de la Cour, avec l'assentiment des juges Hilton et Bich :
[66] En principe, le délinquant absous ne peut donc plus présenter de demande de réhabilitation puisque seules les personnes condamnées ont le droit de le faire.
[67] Par l’introduction du nouvel article 6.1 de la Loi sur le casier judiciaire le législateur fédéral prévoit désormais que les informations relatives à l’absolution ne pourront être révélées sans l’autorisation du ministre et devront être retirées du fichier automatisé de la GRC après l’expiration des délais suivants : un an suivant la date de l’ordonnance d’absolution inconditionnelle et trois ans suivant la date de l’ordonnance sous conditions. Au sujet de ce nouvel article 6.1 de la Loi sur le casier judiciaire, la professeure Hélène Dumont écrit :
Les récents amendements à la Loi sur le casier judiciaire ont aussi eu comme effet de traiter les absolutions avec ou sans conditions comme une mesure sentencielle conférant un casier judiciaire temporaire à leur titulaire et qui disparaît automatiquement après l’écoulement d’une certaine période de temps. En d’autres mots, le bénéficiaire d’une absolution n’a pas à demander une réhabilitation administrative pour obtenir la radiation de son casier judiciaire. Il y a une péremption des inscriptions au casier judiciaire après un délai d’épreuve fixé par la loi. Sous cet aspect, on pourrait parler de réhabilitation légale de la personne absoute par l’effet du temps.
[68] Selon la Loi sur le casier judiciaire, les trois principaux effets de la réhabilitation sont : (1) la condamnation en cause ne devrait plus ternir la réputation du demandeur; (2) sauf exceptions, révocation ou nullité, elle efface les conséquences de la condamnation et fait cesser toute incapacité que la condamnation pouvait entraîner aux termes d’une loi fédérale ou de ses règlements; (3) elle entraîne la mise à l’écart de tout dossier portant sur la condamnation. Cependant, comme l’a mentionné la Cour suprême, la Loi sur le casier judiciaire n’a pas pour effet d’anéantir rétroactivement la condamnation et, en conséquence, de permettre à la personne réhabilitée de nier l’existence d’une condamnation passée.
[69] Il est vrai que la personne absoute bénéficiant d’une réhabilitation légale ne peut profiter, en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, des deux premiers effets, soit que la condamnation ne devrait plus ternir sa réputation et que la réhabilitation fait cesser les incapacités que la condamnation pouvait entraîner. La loi ne lui accorde que l’effet relatif au casier judiciaire, et ce, automatiquement après l’écoulement du délai prescrit.
[72] De plus, contrairement à la personne bénéficiant d’une réhabilitation administrative en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, la personne absoute peut certainement nier sa condamnation. À cet égard, l’absolution, jumelée au retrait des mentions relatives à cette absolution après l’écoulement du délai prescrit par la Loi sur le casier judiciaire, est plus bénéfique que l’obtention d’une réhabilitation administrative en vertu de ladite loi.
[73] Le législateur n’a pas eu l’intention, par les modifications apportées à la Loi sur le casier judiciaire, de traiter les personnes absoutes plus sévèrement que celles ayant été condamnées. Au contraire, son intention était plutôt de traiter les personnes ayant reçu la peine la moins sévère prévue au Code criminel d’une manière plus favorable en leur permettant d’obtenir une réhabilitation légale par le simple écoulement du temps. Je suis donc d’avis que par les dispositions du Code criminel relatives à l’absolution et l’article 6.1 de la Loi sur le casier judiciaire qui confère une réhabilitation légale à la personne absoute par le simple écoulement du temps, le législateur fédéral a exercé sa compétence en droit criminel pour légiférer en matière de pardon. La Charte québécoise ne faisant aucune distinction entre les différents types de pardon, il s’agit d’un pardon au sens de l’article 18.2 de la Charte.
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