lundi 27 juillet 2009

Arrestation fondée sur des informations erronées contenues au CRPQ

R. c. Asselin, 2006 QCCQ 12589 (CanLII)

[26] Les premières questions que le Tribunal se posent sont les suivantes : Quelle fiabilité faut-il donner aux informations contenues sur le Centre de renseignements policiers du Québec (CRPQ)? Qui est responsable de tenir à jour lesdits renseignements?

[27] Le Tribunal a examiné la jurisprudence sur le sujet et a fait un résumé des causes suivantes :

➢ R. v. J.F.R. [1991] Y.J. No 235 (Yukon Territorial Court)

« Dans cette affaire, après l’interception d’un jeune contrevenant suspecté d’introduction par effraction, des vérifications d’identité ont été effectuées auprès du CPIC. L’information transmise indiquait que l’accusé était soumis à un couvre-feu. Bien que l’accusé ait mentionné que l’information était erronée, les policiers ont tout de même procédé à l’arrestation de l’accusé. Lors de la fouille incidente à l’arrestation, des stupéfiants ont été découverts. La preuve a démontré que les conditions auxquelles était assujetti l’accusé n’étaient plus en vigueur, et ce, depuis sept (7) semaines. La Cour a décidé que l’arrestation devait être exclue. Dans cette décision, il m’apparaît important de mentionner que suivant l’opinion de l’Honorable juge Terr, les policiers avaient agi de mauvaise foi. »

➢ R. v. Clark . [2003] O.J. No 1323 (Ontario Court of Justice)

« Dans cette affaire, lors d’une vérification de routine au CPIC, les policiers ont constaté que l’accusé était assujetti à un couvre-feu. Lors de la fouille incidente à l’arrestation pour bris d’engagement, les policiers ont découvert des stupéfiants. L’accusé a informé les policiers que les conditions de l’engagement n’étaient plus en vigueur. La preuve a démontré que l’information transmise par le CPIC était périmée, et ce, depuis dix (10) mois. La Cour a décidé que suivant l’article 495 du Code criminel, l’arrestation était légale, ajoutant que même en acquiesçant à l’argumentation de la Défense à l’effet que l’arrestation était illégale, la preuve ne devrait pas être exclue. »

➢ R. v. Wilson . [2003] O.J. No 4465 (Ontario Superior Court of Justice)

« Dans cette affaire, des informations transmises par le CPIC ont indiqué que l’accusé était assujetti à un engagement lequel comportait l’interdiction de posséder un téléphone cellulaire. Observant qu’il possédait un tel appareil, les policiers ont procédé à l’arrestation de l’accusé ne sachant pas que cette condition n’était plus en vigueur, et ce, depuis plus de huit (8) semaines. Lors de la fouille incidente à l’arrestation, des stupéfiants ont été trouvés. Il n’a pas été mis en preuve que l’accusé ait avisé les policiers de la caducité de l’information concernant l’interdiction de posséder un téléphone cellulaire. La Cour a décidé que l’arrestation était légale et que même en cas contraire, la preuve découverte ne devrait pas être exclue. »

➢ R. v. White . [2006] O.J. No 1677 (Ontario Court of Justice)

« Dans cette affaire, des renseignements obtenus du CPIC que l’accusé était soumis à un couvre-feu suivant les conditions d’un engagement sur remise en liberté. Lors de la fouille incidente à son arrestation, des stupéfiants ont été découverts. La preuve a démontré que les conditions de remise en liberté n’étaient plus en vigueur, et ce, depuis cinq (5) mois. Lors des événements, l’accusé est demeuré silencieux et n’a pas avisé les policiers de la fausseté des informations transmises par le CPIC. La Cour a conclu que l’arrestation était illégale mais que la preuve obtenue ne devait pas être exclue. »

« Il est à noter que l’ensemble des décisions précitées a abordé la question de la fiabilité des renseignements contenus au CPIC. L’Honorable juge Khawly, dans l’affaire R. v. Clark résume ainsi l’un des courants jurisprudentiels :

“Mindful of the Supreme Court of Canada R. v. Storrey test, .1990 CanLII 125 (S.C.C.), [1990] 1 S.C.R. 241, would a reasonable person standing in a position of the officer also find that this was a reasonable thing to do? Well, there is no evidence before me that CPIC is unreliable or that there is a rampant problem with that system where items that should be deleted from it remain there for an unusual period of time. In this case ten months, in my view, is unusual and unreasonable, but there is no evidence before me that this is a normal pattern with CPIC, which would have given the officer reason to pause before he chose to stop Mr. Clark. In my view, that goes into the area of would a reasonable person, looking at this matter objectively, follow through and do exactly what the officer did?”

“In my view, absent evidence of the unreliability of CPIC on a regular basis, that stop met the requirements of R. v. Storrey”

« Quant au second courant jurisprudentiel, celui-ci est exprimé en ces termes par l’Honorable juge MacDonnell dans l’affaire R. v. White :

“In neither Clark nor Wilson did the Crown call that kind of evidence. In both cases, the courts assumed the reliability of CPIC from the absence of evidence to the contrary. In taking that approach, they put the burden on the accused to show that reliance on CPIC was unreasonable rather than requiring the Crown to show that it was reasonable. The effect was to reverse the onus of persuasion in relation to the lawfulness of the arrest.”

“As I have indicated, the burden in this respect is on the Crown, and the Crown made no effort to meet that burden. I am not prepared to take judicial notice that CPIC is accurate and reliable in this respect. I simply do not know, for example, how information in relation to recognizances gets into the system, who is responsible for entering the information, how cancellations or variations are dealt with, how long it takes for cancellations or variations to be reflected on CPIC, whether there are things that do not get entered, or whether there are procedures in place to ensure that the system is accurate. I do know, from the cases that I have reviewed as well as the case at bat, that the system is not completely reliable. But I do not know how often problems arise, and I am in no position to determine, one way or the other, whether it was objectively reasonable for Constable Kirwan to rely on that system.”

“In the circumstances, the Crown has not established that it was objectively reasonable for Constable Kirwan to rely on either the board or CPIC in forming his belief that the applicant was breaching his bail order.”

[28] Le Tribunal est d’avis que lorsqu’une arrestation est effectuée sans mandat, il appartient à la Poursuite de démontrer, suivant la balance des probabilités, que ladite arrestation repose sur des motifs raisonnables et probables de croire à la commission d’une infraction. En omettant de démontrer la fiabilité des renseignements contenus au CRPQ, lesquels constituent les motifs de l’arrestation, la Poursuite ne rencontre pas son fardeau de démontrer que l’arrestation est légale.

[29] Même si une arrestation est illégale, la preuve matérielle découverte lors de la fouille peut être admise en preuve si elle ne déconsidère pas l’administration de la justice en vertu de l’article 24(2) de la Charte canadienne des droits et libertés.

[30] La Cour doit examiner la gravité de la violation et l’effet que pourrait avoir son exclusion de la preuve par rapport à son utilisation sur l’administration de la justice.

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