jeudi 21 janvier 2010

Principes dégagés par la Cour suprême à l’occasion de l’analyse lorsqu’un élément de preuve n’est plus disponible parce que perdu ou détruit

Salame c. R. // 2010 QCCA 64 // N° : 500-10-004113-088 // DATE :
15 janvier 2010


[26] Voyons maintenant la question de fond : la destruction de la preuve. Dans R. c. F.C.B., la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse reprend sous la forme de 10 propositions les principes dégagés par la Cour suprême à l’occasion de l’analyse lorsqu’un élément de preuve n’est plus disponible parce que perdu ou détruit :

[10] The basic principles applicable to the analysis of all three grounds of appeal raised in this case were summarized by Sopinka, J. in R. v. La, supra, commencing at para. 16. Those principles derived from R. v. Stinchcombe (No.1), [1991] 3 S.C.R. 326 ; R. v. Egger, [1993] 2 S.C.R. 451 ; R. v. Stinchcombe (No. 2), supra; R. v. Chapman, [1995] 1 S.C.R. 727 ; R. v. O'Connor, supra; and, R. v. Carosella , supra, and further developed in La, are:

(1) The Crown has an obligation to disclose all relevant information in its possession.

(2) The Crown's duty to disclose gives rise to a duty to preserve relevant evidence.

(3) There is no absolute right to have originals of documents produced. If the Crown no longer has original documents in its possession, it must explain their absence.

(4) If the explanation establishes that the evidence has not been destroyed or lost owing to unacceptable negligence, the duty to disclose has not been breached.

(5) In its determination of whether there is a satisfactory explanation by the Crown, the Court should consider the circumstances surrounding its loss, including whether the evidence was perceived to be relevant at the time it was lost and whether the police acted reasonably in attempting to preserve it. The more relevant the evidence, the more care that should be taken to preserve it.

(6) If the Crown does not establish that the file was not lost through unacceptable negligence, there has been a breach of the accused's s. 7 Charter rights.

(7) In addition to a breach of s. 7 of the Charter, a failure to produce evidence may be found to be an abuse of process, if for example, the conduct leading to the destruction of evidence was deliberately for the purpose of defeating the disclosure obligation.

(8) In either case, a s. 7 breach because of failure to disclose, or an abuse of process, a stay is the appropriate remedy, only if it is one of those rare cases that meets the criteria set out in O'Connor.

(9) Even if the Crown has shown that there was no unacceptable negligence resulting in the loss of evidence, in some extraordinary case, there may still be a s. 7 breach if the loss can be shown to be so prejudicial to the right to make a full answer and defence that it impairs the right to a fair trial. In this case, a stay may be an appropriate remedy.

(10) In order to assess the degree of prejudice resulting from the lost evidence, it is usually preferable to rule on the stay application after hearing all of the evidence.

[27] Dans R. c. Fournier, la Cour rappelle qu'il suffit à l'accusé de démontrer la possibilité d'une atteinte réaliste à son droit à une défense pleine et entière; il revient ensuite au poursuivant d’établir que la preuve n'était pas pertinente.

[28] En l’espèce, j’estime que Salame subit un lourd préjudice de la destruction des liquides saisis. En effet, la nature de la boisson est un élément de preuve essentiel à la commission de l’infraction. À cet égard, puisque l’alcool servi par madame Maalouli ne pouvait plus être analysé, il fallait d'abord établir qu’il avait été fabriqué en même temps que celui saisi par les policiers pour tirer une conclusion définitive d’identité des deux substances et ainsi appliquer les conclusions de l’expertise à la boisson servie à la fête. En second lieu, il fallait donner à l’accusé la possibilité d'une contre-expertise. Or, la destruction volontaire et rapide de cet élément de preuve essentiel, voire indispensable à la défense, a privé Salame de toute possibilité et de tout moyen de vérification et de contrôle du résultat des analyses. Ce dommage est amplifié par deux facteurs. Le premier est relatif à l’absence d’une démonstration d’une chaîne de possession sans faille. Le second est plus dominant parce qu’il découle du jugement sur le fond. En effet, le juge a attaché une grande importance aux contenants eux-mêmes, aux conclusions de l'analyse des substances et au rapport contresigné par le chimiste. Après avoir relaté le témoignage du chimiste, il s’est exprimé ainsi :

Tout ça a permis au Tribunal d’attacher beaucoup d’importance à l’expertise de monsieur Morin, même si celui-ci n’avait pas effectué, comme le faisait remarquer la défense, toutes les opérations pour procéder à l’analyse en question.

[29] Le préjudice est donc ici très sérieux.

[30] J'estime que cette violation des garanties procédurales est d'autant plus grave qu'elle est délibérée et juridiquement injustifiée et injustifiable. La réparation doit donc être, à mon sens, à la mesure du préjudice et de la faute. C'est pourquoi j'estime que le remède approprié est l'exclusion de la preuve constituée du rapport d'analyse, du témoignage du chimiste en relation avec l'analyse des liquides et de la partie de celui du policier qui porte sur les saisies des contenants et des substances et sur le suivi des perquisitions.

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