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dimanche 15 juin 2025

Il importe de rappeler que dans l’évaluation du témoignage de l’accusé, les deux premières étapes dans W.(D.) doivent être analysées dans le contexte de la preuve et cela inclut le témoignage de la plaignante; chaque témoignage, y compris celui de l’accusé, ne doit pas s’évaluer en vase clos

R. c. J.J.R.D., 2006 CanLII 40088 (ON CA)

Lien vers la décision


[46]         Le juge de première instance a attentivement analysé le témoignage de A.D. Il était conscient des faiblesses possibles de son témoignage, en particulier le fait qu'elle avait fourni dans son témoignage de nombreux détails sur l'agression présumée qu'elle n'avait pas donnés dans ses déclarations et témoignages antérieurs. Le juge de première instance a expressément mentionné de nombreuses incohérences entre son témoignage et ses déclarations antérieures. Il a également pris en considération les circonstances de son témoignage. Le juge de première instance a finalement déterminé que A.D. était un témoin crédible. Il a motivé cette conclusion. Le fondement sur lequel le juge de première instance s’est appuyé pour conclure que A.D. était crédible ressort clairement de l'ensemble du dossier, notamment ses motifs. Son évaluation de la crédibilité de A.D. peut facilement faire l’objet d’un examen judiciaire par cette cour en appel.

[47]         Le juge de première instance n'est pas non plus passé directement de la conclusion que A.D. était crédible à la conclusion que les allégations avaient été prouvées hors de tout doute raisonnable. Au contraire, il a reconnu la distinction entre une conclusion quant à la crédibilité et une preuve hors de tout doute raisonnable. Bien qu'il ait estimé que A.D. était crédible, le juge n'était pas disposé à conclure hors de tout doute raisonnable que la sodomie alléguée avait eu lieu, probablement parce que A.D. n'a parlé de sodomie que très tard dans son témoignage.

[48]         Le juge de première instance a également reconnu qu'il n'y avait rien dans l’essentiel du témoignage de l'appelant, ou dans la manière dont il avait présenté son témoignage, qui aurait pu l’amener à ne pas accorder foi à ce témoignage. Encore une fois, cet aspect de son raisonnement est évident.

[49]        Outre son évaluation de la crédibilité respective des deux principaux témoins, le juge de première instance a également tenu compte du journal personnel. Comme il le dit dans ses motifs : [TRADUCTION]  « Il y a cependant plus dans cette affaire que ce que chacune des parties a dit au cours du procès, et c'est ce qui ressort du journal de A.D. ».

[50]          Dans ses motifs, le juge de première instance a examiné les circonstances dans lesquelles le journal a été découvert, le contenu des trois inscriptions qui ont été produites en preuve, le moment où l'inscription datée du 6 février a été faite et le contenu de cette inscription.

[51]          Le juge de première instance a conclu que le journal était [ TRADUCTION]  « l'enregistrement par A.D. d'une série d'événements ininterrompus. » J'en déduis que le juge de première instance était convaincu que l'inscription du 6 février décrivant l'agression sexuelle avait été faite entre les dates des deux autres inscriptions, la première étant le 5 décembre 2002 et la troisième le 8 février 2003. Le juge de première instance a ensuite conclu qu'une inscription dans le journal intime faite entre ces dates réfutait l’affirmation de l'avocat de l'appelant selon laquelle A.D. avait inventé ses allégations après avoir commencé à rendre visite à sa mère afin de pouvoir aller vivre avec elle. Bien que le juge de première instance ne l'ait pas expressément déclaré, il me semble évident qu'il faisait référence à la fabrication au moment – ou à peu près au moment – où A.D. avait rapporté l'agression présumée à sa mère au printemps 2004.

[52]          Il était loisible au juge de première instance de conclure que le journal avait été écrit le ou vers le 6 février 2003. Il n'a pas été contesté que A.D. avait fait l’inscription dans le journal et que ni elle ni sa mère n'avaient eu quoi que ce soit à voir avec la prise de possession du journal par la police.

[53]           L'analyse des éléments de preuve par le juge de première instance démontre le cheminement qu'il a suivi pour rendre son verdict et permet un examen efficace en appel.  Le juge a rejeté en bloc la dénégation de l'appelant parce qu'en plus de la preuve de A.D. et de celle concernant le journal, la preuve de l'appelant, malgré l'absence de failles évidentes, ne laissait aucunement place à un doute raisonnable dans l’esprit du juge de première instance. Le rejet pur et simple de la preuve d'un accusé, fondé sur l'acceptation réfléchie et raisonnée, hors de tout doute raisonnable, de la véracité de preuves crédibles contradictoires, explique tout autant le rejet de la preuve d'un accusé qu'un rejet fondé sur un problème lié à la façon dont l'accusé a témoigné ou à l’essence de sa preuve.

[54]          Selon les motifs du juge de première instance, l'appelant savait pourquoi il avait été condamné. Le témoignage de sa fille (combiné au journal, qui a eu pour effet de rehausser sa crédibilité), a convaincu le juge de première instance de la culpabilité de l'appelant hors de tout doute raisonnable, malgré le fait que l'appelant ait nié les accusations sous serment.

[55]         Les motifs du juge de première instance ont permis un examen efficace en appel. Ses motifs ont permis à la Cour de s'assurer qu’il avait convenablement évalué la preuve pertinente, appliqué les principes juridiques appropriés à cette preuve, en particulier la charge de la preuve, tiré les conclusions de crédibilité qui s'offraient à lui compte tenu des éléments de preuve, et finalement rendu un verdict fondé sur la preuve et sur l'application des principes juridiques pertinents au regard de cette preuve. 

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