R. c. Bilodeau, 2004 CanLII 45922 (QC C.A.)
Avant d'appliquer ces principes aux faits de l'espèce, j'entends formuler quelques remarques préliminaires.
Premièrement: il est vrai qu'une intuition des policiers qui s'avère fondée par la suite n'a pas pour effet d'établir qu'ils avaient, avant d'agir, des motifs raisonnables; en contrepartie, les motifs des policiers ne cessent pas d'être raisonnables parce que la suite des événements ne confirme pas ce qu'ils croyaient au départ. Dans Mulligan, Legault et Cotnoir, on croyait empêcher un vol ou porter assistance à un conducteur en détresse et on a trouvé une personne ivre au volant.
Deuxièmement: on doit déterminer le caractère raisonnable des motifs en se plaçant dans les circonstances de temps, de lieu et d'urgence auxquels sont confrontés les policiers et non par une analyse sophistiquée que permet le recul du temps.
Troisièmement: les motifs raisonnables découlent souvent d'un ensemble de circonstances; il faut se garder de les disséquer et d'analyser chaque élément d'une façon séparée. Il peut arriver que chaque élément soit compatible avec une conduite innocente alors que l'ensemble pointe dans une toute autre direction.
Quatrièmement: il n'est pas toujours possible de déterminer avec une précision absolue à quel moment les agents de la paix estiment avoir des motifs raisonnables. Avec égards, il me semble que le juge de la Cour supérieure – par une analyse a posteriori – attache une importance indue au fait que les policiers auraient décidé d'intervenir avant que le véhicule ne pénètre dans la deuxième entrée alors qu'on sait que tous ces événements se déroulent en très peu de temps.
Cinquièmement: il ne faut pas perdre de vue que les policiers ont un devoir de prévention. L'avocat de l'intimé écrit dans son mémoire que les occupants du véhicule n'ont pas tenté de s'introduire dans la résidence au 161 rue Bilodeau. Le rôle des policiers ne se limite pas à procéder à l'arrestation des personnes qui commettent des crimes ou tentent d'en commettre. Cela est encore plus évident si on examine la situation du point de vue des citoyens qui résidaient au 161 rue Bilodeau. Comment les policiers auraient-ils pu justifier leur défaut d'intervenir si une tentative d'introduction par effraction dans leur résidence était survenue au cours de la nuit? Les résidants qui constatent la présence d'une automobile ou d'une camionnette stationnée dans leur entrée privée au cours de la nuit, tous feux éteints, ne peuvent-ils pas contacter les policiers? Ceux-ci seraient-ils alors empêchés de procéder à une vérification?
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