vendredi 9 octobre 2009

Le témoin à charge n'est pas automatiquement plus crédible au motif qu'il n'a aucun intérêt à mentir

R. c. Araujo, 1999 CanLII 13889 (QC C.A.)

L'erreur jugée déterminante par notre Cour dans chacun de ces arrêts se résume à ceci. Eu égard à la norme de preuve, un juge des faits qui est confronté à des versions contradictoires ne peut s'obliger à choisir entre les versions en accréditant le témoin à charge au motif qu'il n'a aucun intérêt à mentir et en faire un élément décisif si l'inculpé ne réussit pas à démontrer le contraire: c'est là enfreindre les principes fondamentaux qui régissent le fardeau et la norme de preuve.

Un juge ne peut pas faire appel à un élément extrinsèque au dossier, comme par exemple, affirmer qu'en principe un policier ne peut mentir, pour trancher la question de la crédibilité tout en respectant la norme de preuve. Si tel était le cas, il suffirait de substituer le juge des faits à un ordinateur qui déciderait de la crédibilité selon le statut, l'âge ou encore le sexe du témoin. Si la dynamique d'un procès expose très souvent le juge des faits à trancher en apparence une alternative entre deux versions opposées, il n'en est pas ainsi en droit puisqu'une troisième voie est ouverte, soit celle du doute raisonnable qui subsiste en raison de ces versions contradictoires.

Cela dit, il s'impose de distinguer ces situations irrégulières de celles où le juge des faits, à bon droit, peut s'interroger sur l'intérêt à mentir d'un témoin dans son appréciation de la crédibilité qui est de son ressort exclusif. Le sens commun mène très souvent le juge des faits à se demander si la victime a un intérêt à mentir: un problème surgira s'il fait porter à l'accusé le poids de son incapacité à démontrer l'intérêt à mentir et utiliser ce test pour décider de deux versions contradictoires. Récemment, la Cour d'appel d'Ontario exposait avec justesse l'état du droit sur la question:

The absence of any motive to fabricate an allegation is a proper matter for consideration in the course of the fact finding process. The trial judge's reasons indicate no more than that he did consider the absence of any motive to fabricate as one feature of the case. The reasons do not suggest that the trial judge placed any onus on the appellant to prove a motive to fabricate. Nor do we accept that, because the trial judge's finding that the appellant's story had no ring of truth followed directly upon his reference to the absence of a motive to fabricate, the former was the exclusive product of the latter. Reasons for judgment must be read in their totality. Piecemeal analysis of isolated passages undermines the purpose underlying the giving of reasons for judgment and renders the process of appellate review artificial and pedantic.

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