mardi 3 novembre 2009

But visé par l’imposition d’une ordonnance de probation

R. c. Mathieu, 2008 CSC 21 (CanLII)

[20] Cette interprétation du mot « peine » se justifie également au regard du but visé par l’imposition d’une ordonnance de probation, soit de favoriser la réhabilitation du délinquant : R. c. Proulx, 2000 CSC 5 (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 61, 2000 CSC 5. À cet égard, je fais miens les propos de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans R. c. Goeujon 2006 BCCA 261 (CanLII), (2006), 209 C.C.C. (3d) 61, 2006 BCCA 261 :

[traduction] La possibilité d'imposer une période de probation dépend de différents facteurs. La probation ne vise pas tant à punir le contrevenant qu'à favoriser sa réinsertion sociale. Peu importe la gravité de l'infraction et le degré de responsabilité du contrevenant, il se peut qu'un contrevenant qui a été détenu un certain temps avant le prononcé de sa sentence et qui mérite une peine d'emprisonnement de deux ans puisse néanmoins bénéficier des effets de réinsertion sociale que facilite une ordonnance de probation.

Les ordonnances de probation peuvent aussi se révéler particulièrement utiles pour les contrevenants qui ont été détenus avant le prononcé de leur sentence. Si de nombreux juges doublent la période de détention présentencielle avant de la déduire de la peine à infliger, c'est parce que le contrevenant est alors détenu dans des conditions difficiles et ne peut bénéficier de programmes de réinsertion sociale : voir R. c. Rezaie 1996 CanLII 1241 (ON C.A.), (1996), 112 C.C.C. (3d) 97 (C.A. Ont.), à la p. 104. Un contrevenant qui a été détenu avant le prononcé de sa sentence, sans avoir accès à des programmes, tirerait avantage d'une période de probation au moment de sa libération, que celle‑ci survienne dès le prononcé de la sentence ou au terme d'un nouvel emprisonnement maximal de deux ans. [par. 49‑50]

[21] De même, les motifs du juge Beauregard de la Cour d’appel dans l’affaire St-Germain sont particulièrement pertinents :

Si une ordonnance de probation peut porter atteinte à la liberté de l’accusé, c’est surtout un moyen de mettre l’accusé à l’épreuve et un moyen de protéger la société.

Le législateur présume que, si un accusé séjourne dans un pénitencier et reçoit les services dont il a besoin, il est inutile d’ajouter à sa mise à l’épreuve une fois qu’il est libéré du pénitencier.

Enfin l’ordonnance de probation est un outil utile pour le juge qui, détention provisoire ou pas, croit plus judicieux de condamner l’accusé à une détention de deux ans ou moins avec une certaine période de probation plutôt que de le condamner à être détenu dans un pénitencier. La question de la probation est donc en relation directe avec la détention qui a lieu après le prononcé de la sentence. (2007 QCCA 310 (CanLII), [2007] J.Q. no 1540 (QL), 2007 QCCA 310, par. 17-19)

[22] En effet, si l’on devait conclure que l’ordonnance de probation n’est pas disponible dans les cas où la période passée en détention présentencielle, additionnée à la peine d’emprisonnement prononcée par le juge, excède deux ans, cela pourrait avoir comme conséquence néfaste l’imposition par le juge d’une période d’incarcération plus longue. Cette interprétation, qui doit être rejetée, aurait d’une part pour fâcheuse conséquence une augmentation injustifiée de la période à être purgée en milieu carcéral; d’autre part, elle priverait de l’effet de réinsertion sociale que facilite une ordonnance de probation les contrevenants susceptibles d’en bénéficier.

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