mercredi 20 janvier 2010

L'avis de récidive -- La suffisance de l'avis : analyse jurisprudentielle

R. c. Cyr, 2005 CanLII 32117 (QC C.S.)

[7] L'arrêt R. c. Taylor, rendu en 1964 par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, marque le point de départ d'un long courant jurisprudentiel établissant que l'avis de récidive requis par l'article 727(1) du C.cr. n'a pas à indiquer tous les détails relatifs aux condamnations antérieures.

[8] Dans cet arrêt, la Cour s'appuie sur le fait que cette exigence était expressément prévue au Code criminel de 1927, alors que ce n'est plus le cas à l'article 712 du Code de 1955, disposition en vigueur au moment du litige, et ancêtre de l'actuel article 727 C.cr: :

The express requirement of 1955 Code s. 712 is that the accused be notified that "a greater punishment would be sought by reason thereof", that is by reason of the previous convictions. That express requirement is against the implication of any further requirement and in particular of requiring details of the previous offences which Parliament had expressly required under 1927 Code s. 851 but has now repealed.

It follows that details of any such previous conviction are not required in the notice but rather the purpose of the notice is as stated, namely, to give warning to the accused of his potential liability for greater punishment by reason of previous conviction.

[9] Dans l'arrêt R. c. Pidlubny, la Cour d'appel de l'Ontario fait sienne les conclusions de la Cour d'appel de Colombie-Britannique et confirme que le texte même de la disposition traitant de l'avis de récidive n'exige pas de la part de la Couronne qu'elle fournisse les détails relatifs aux condamnations antérieures :

Upon a plain reading of that subsection, I do not see how it can be said that the Crown has to give a notice in greater detail or particularly than the one provided in this case. We are sustained in this view by the judgement of the British Columbia Court of Appeal in R. v. Taylor, [1964] 1 C.C.C. 207, 41 C.R. 44, 42 W.W.R. 692, the conclusion and reasons of which we adopt.

[10] Quelques années plus tard, la Cour d'appel des Territoires du Nord-Ouest a, elle aussi, l'occasion de se prononcer sur la question. Il découle clairement de cet arrêt que l'essentiel est de voir si le but de l'avis a été atteint, nonobstant le caractère détaillé ou non de celui-ci. On y lit en effet ce qui suit :

It is obvious that Johnston was in no way misled by the form of the notice: his counsel came prepared to argue the availability, for sentencing purposes under the amendment, of the previous conviction. The purpose of the notice was thus demonstrably served, whatever criticism might be made of its form or content.

[11] En 1979, dans l'arrêt R. c. Bear, la Cour d'appel de la Saskatchewan devait trancher la question de savoir si la Couronne avait le devoir d'indiquer, dans son avis, la teneur de la peine plus sévère qui allait être réclamée auprès du tribunal. La Cour a disposé de la question comme suit :

In this case it is clear the defendant knew the charge he was facing. The notice served upon him, before plea, sets out clearly and unequivocally that if convicted of that offence the prosecution would seek a greater punishment by reason of his previous conviction. Such a notice, in my opinion, met all the requirements o s. 740(1) and the learned trial Judge erred in holding otherwise and in failing to give effect to the prosecution's request. This section does not require the notice to set out the nature or character of the greater punishment to be sought nor, in my view, would it be possible to do so with accuracy because of the discretion given to the Court in the imposition of such greater punishment.

[12] Bien que cet arrêt ne traite pas directement de la question qui nous occupe en l'espèce, soit celle relative à la nécessité de préciser ou non la teneur des condamnations antérieures sur lesquelles se fonde l'avis de récidive, on peut retenir l'idée que celui-ci n'a pas à être détaillé.

[13] Enfin, dans l'arrêt R. c. Monk, la Cour d'appel de l'Ontario se prononce à nouveau sur la question. En s'appuyant sur les principes dégagés par les arrêts Taylor, Pidlubny et Bear ci-haut mentionnés, elle conclut comme suit :

Section 740(1) [ancêtre de l'article 727 C.cr.] simply provides that before the respondent makes his plea, the summary conviction court must be satisfied that the respondent had been notified that a greater penalty will be sought by reason of his previous convictions. There is no requirement that the number of these convictions, or particulars of them, are to be furnished.

[14] De ce qui précède, il me semble que l'on peut retenir le principe que l'avis requis par le paragraphe 727(1) du C.cr. n'a aucunement besoin d'être détaillé. Il suffit qu'il atteigne le but visé par la disposition législative, soit d'informer l'accusé relativement à l'intention du poursuivant de demander l'imposition d'une peine plus sévère.

[15] Dans le cas qui nous occupe, il ne peut être contesté que l'avis de récidive répondait au critère dégagé dans l'arrêt Taylor. Le premier juge, et cela dit avec beaucoup de respect, a erré en droit lorsqu'il a décidé d'exclure l'avis pour cause d'insuffisance.

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