dimanche 10 octobre 2010

La jurisprudence identifie plusieurs traits caractéristiques du plaideur quérulent

Gougoux c. Richard, 2010 QCCS 4483 (CanLII)

[24] La jurisprudence identifie plusieurs traits caractéristiques du plaideur quérulent. La décision phare en la matière est Barreau du Québec c. Srougi. Le juge en chef adjoint Wery y reprend de manière succincte les caractéristiques jurisprudentielles et doctrinales :

[26] La jurisprudence et la doctrine ont identifié plusieurs facteurs (ou symptômes) qui sont indicatifs de quérulence. Parmi ceux-ci :

Le quérulent montre de l’opiniâtreté et du narcissisme;

Il se manifeste plus souvent en demande plutôt qu’en défense;

Il multiplie les recours vexatoires y compris contre les auxiliaires de la justice. Il n’est pas rare, en effet, que ces procédures et ces plaintes soient dirigées contre les avocats, le personnel judiciaire, ou même les juges personnellement, qui font l’objet d’allégations de partialité et de plaintes déontologiques;

Quatrièmement, la réitération des mêmes questions par des recours successifs et ampliatifs, et à la recherche du même résultat malgré les échecs répétés de demandes antérieures, est fréquente;

Cinquièmement, les arguments de droit mis de l’avant par lui se signalent à la fois par leur inventivité et leur incongruité. Ils ont une forme juridique certes, mais à la limite du rationnel;

Sixièmement, les échecs répétés des recours ainsi exercés entraînent à plus ou moins longue échéance son incapacité à payer les dépens et les frais de justice auxquels il est condamné;

Septièmement, la plupart des décisions adverses, sinon toutes, sont portées en appel ou font l’objet de demandes de révision ou de rétractation;

Huitièmement, il se représente seul.

[25] Dans Salvas c. Bourgault le juge Tardif en ajoute deux autres:

• (ses) procédures… sont truffées d'insultes et d'injures;

• (L)'affirmation … que des témoins vont venir contredire les parjures et les faux témoignages qui ont été faits lors d'instances précédentes.

[26] Toutefois, il ne s’agit là que de caractéristiques du quérulent, le seul critère applicable étant l’exercice excessif ou déraisonnable du droit d’ester en justice ; référant aux deux décisions précitées, le juge Riordan écrit:

« [19] Bien que nous soyons en accord avec cette dernière analyse, il nous semble préférable d'éviter de voir ces caractéristiques comme des « critères ». Que la plupart des plaideurs sujet à autorisation peuvent manifester ces caractéristiques ne veut pas dire qu'elles représentent les critères d'un tel statut. Ce critère est énoncé sans équivoque à l'article 84 du règlement: « exerce(r) son droit d'ester en justice de manière excessive ou déraisonnable ».

[20] À cet égard, plusieurs des caractéristiques mentionnées, possiblement la majorité, ne démontrent aucun excès ou dépassement du raisonnable dans l'exercice du droit d'ester en justice, surtout lorsqu'on les considère individuellement. Nous notons dans ce sens, par exemple, le fait de se représenter seul ou d'être narcissique ou d'être incapable de payer les dépens ou de prétendre que des témoins viendront contredire des faussetés prononcées antérieurement ou de porter des décisions en appel ou en révision. Cela n'empêche pas bien sûr l'analyse de ces facteurs mais nous ne les entrevoyons pas comme des indices déterminants.»

[27] Les tribunaux s'entendent qu'il n'est pas nécessaire que toutes les caractéristiques soient remplies pour déclarer un plaideur comme étant un quérulent.

[28] Outre la décision dans l'affaire Srougi, le texte de référence en matière de quérulence demeure l'article du juge Yves-Marie Morissette de la Cour d'appel. Cette étude fait le tour de la question et analyse toutes les caractéristiques qui seront décrites ci-après.

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