R. c. Desgagné, 2011 QCCQ 423 (CanLII)
[16] Selon la chronologie des événements au dossier, l’arrestation eut lieu à 3 h 56 après l’échec au test de dépistage. Les policiers ont quitté les lieux en compagnie de l’accusé après l’arrivée de la dépanneuse à 4 h 40. Ce délai de 44 minutes est-il justifié dans les circonstances?
[17] Aucune explication n’a été fournie par les policiers à ce sujet. Il est aussi exact qu’on ne leur a posé aucune question sur ce dernier point.
[18] L’al. 258(1)c) du Code criminel édicte que la preuve des résultats des analyses fait foi de façon concluante de l’alcoolémie de l’accusé au moment où l’infraction aurait été commise si certaines conditions sont remplies dont celle-ci :
ii) chaque échantillon a été prélevé dès qu’il a été matériellement possible de le faire après le moment où l’infraction aurait été commise et, dans le cas du premier échantillon, pas plus de deux heures après ce moment, les autres l’ayant été à des intervalles d’au moins quinze minutes,
[19] L’obligation qui incombe aux agents de la paix de prélever un échantillon d’haleine dès qu’il est matériellement possible de le faire signifie qu’ils doivent agir dans un délai relativement court compte tenu des circonstances : R. c. Letford 2000 CanLII 17024 (ON C.A.), (2000), 150 C.C.C. (3d) 225, (C.A. Ont.).
[20] Dans R. c. Morel, 2010 QCCS 2659 (CanLII), 2010 QCCS 2659, le juge Champagne, au paragr. 26, rappelle que la décision rendue dans R. c. Vanderbruggen, 2006 CanLII 9039 (ON C.A.), 2006 CanLII 9039 (ON C.A.) constitue l’arrêt de principe sur cette question. Sur le sens à donner à l’expression « dès que matériellement possible » contenu à l’al. 258(1) c) ii) du Code criminel, la Cour d’appel, au paragr. 12, s’exprime ainsi :
12. There is no requirement that the test be taken as soon as possible. The touchstone for determining whether the tests were taken as soon as practicable is whether the police acted reasonably.
[21] Plusieurs jugements ont été rendus relativement au délai survenu dans l’attente d’une dépanneuse : voir, entre autres, R. c. Tremblay, 2009 QCCQ 1171 (CanLII), 2009 QCCQ 1171, R. c. Payette, 2008 QCCQ 13571 (CanLII), 2008 QCCQ 13571 et R. c. Cuerrier, 2006 QCCQ 561 (CanLII), 2006 QCCQ 561. L’on peut conclure de ces décisions que ce n’est pas tant la longueur du délai qui importe, mais les raisons invoquées qui le supportent. La poursuite a donc le fardeau de démontrer que les policiers ont agi promptement dans les circonstances.
[22] Or, aucune raison n’a été fournie par les policiers pour justifier le délai causé par l’attente de la dépanneuse. La poursuite me prie d’inférer que ce retard est dû aux mauvaises conditions climatiques. Il se peut que ce soit vrai, mais déduire ainsi participe de la conjecture. Il pourrait exister une foule d’autres raisons pour expliquer un tel retard, mais rien de tel n’a été exposé à l’audience.
[23] En l’absence d’explications valables, il est impossible de conclure que les policiers ont agi promptement. Par conséquent, les échantillons d’haleine n’ont pas été prélevés dès qu’il a été matériellement possible de le faire après le moment où l’infraction aurait été commise.
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