R. c. Gouin, 2011 QCCQ 3771 (CanLII)
[15] Quant à la notion de marque de commerce, elle n'est pas définie au Code criminel.
[16] Comme l'indique la règle d'interprétation énoncée au paragraphe (4) de l'article (4) du Code criminel, il faut référer aux définitions qui sont contenues à la Loi sur les marques de commerce, chapitre T-13.
[21] Essentiellement, une marque de commerce est donc une marque qu'une personne utilise pour distinguer la marchandise qu'elle fabrique, vend, donne à bail ou loue ou pour distinguer les services qu'elle loue ou exécute de la marchandise fabriquée, vendue, donnée à bail ou louée ou des services loués ou exécutés par des concurrents.
[22] De façon concrète, une marque de commerce peut emprunter diverses formes.
[23] Elle peut être nominale ou verbale, c'est-à-dire prendre la forme d'une lettre, d'une série de lettres, d'un mot, d'une combinaison de mots, du nom d'une personne vivante ou fictive, d'un chiffre ou d'une série de chiffres.
[24] Elle peut aussi prendre une forme figurative, comme lorsqu'il s'agit de dessins, de sceaux, de logos, d'armoiries, de mascottes, de héros de bandes dessinées. Elle peut être constituée aussi d'agencement de couleurs, de motifs ou configurations visuelles particulières. Les emballages, les étiquettes et le façonnement de marchandises peuvent aussi constituer des marques de commerce.
[25] On peut même retrouver des marques de commerce sonores, olfactives ou cinématiques.
[26] L'utilisation ou l'emploi d'une marque distinctive, par la présentation d'un façonnement de marchandises ou de contenants ou d'un mode d'enveloppement ou d'empaquetage distinctif de marchandises est un concept fondamental au droit des marques de commerce.
[29] En somme, on peut dire que la marque de commerce naît et vit par l'usage que l'on en fait ou que l'on projette d'en faire et elle meurt par l'absence d'usage.
[30] Aux termes de l'article 406 du Code criminel, il y a deux façons de contrefaire une marque de commerce.
[31] Ou bien l'accusé, sans le consentement de son propriétaire, fabrique ou reproduit la marque de commerce de ce propriétaire ou il fait ou reproduit une marque qui ressemble à la marque de commerce du propriétaire au point d'être conçue de manière à induire en erreur ou alors, deuxièmement, il falsifie de quelque manière que ce soit une marque de commerce authentique.
[32] Le premier cas concerne le fait de fabriquer ou de reproduire la marque de commerce d'une personne ou encore de fabriquer ou de reproduire une marque de commerce ressemblant à la première au point d'être conçue de manière à induire en erreur.
[33] Il faut noter que cette première forme de contrefaçon est légale si le propriétaire de la marque de commerce y consent.
[34] Le deuxième cas concerne la falsification d'une marque de commerce authentique.
[35] Lorsqu'on lit l'article 406 du Code criminel dans son entièreté, il faut nécessairement distinguer la fabrication ou la reproduction d'une marque de commerce ressemblant à une autre marque de commerce au point d'être conçue de manière à induire en erreur de la falsification d'une marque de commerce authentique.
[36] Pourtant lorsqu'une personne fabrique une marque de commerce ressemblante à la marque d'un autre propriétaire au point d'être conçue de manière à induire en erreur, il est difficile, à première vue, de ne pas conclure à la falsification de la première marque de commerce.
[37] Le Tribunal estime que l'intention du législateur était de distinguer ces deux situations et il a manifesté cette intention en utilisant d'une part les termes de fabrication et de reproduction et d'autre part le terme de falsification et, deuxièmement, en utilisant distinctement les termes marque de commerce et marque de commerce authentique.
[38] Pour comprendre en quoi consiste la falsification d'une marque de commerce, il peut être intéressant de considérer l'ancêtre de l'article 406 du Code criminel actuel qui fut d'abord l'article 486 et ensuite l'article 349.
[40] Cette définition, comme celle de l'actuel article 406 du Code criminel ne sont pas sans rappeler les définitions des mots « faux documents » aux articles 321 et 361 (2) du Code criminel.
[41] Tout comme l'article 406 qui utilise le mot « marque de commerce » en son alinéa (a) et les mots « marque de commerce authentique » à son alinéa (b), l'article 321 du Code criminel, lorsqu'il définit le « faux document », réfère à un « document » qui est donné comme étant fait par une personne et qui ne l'est pas, ou encore d'un « document » faux sous quelque rapport essentiel ou enfin d'un « document » fait par une personne avec l'intention qu'il passe comme étant fait par une personne autre que celui qui l'a vraiment fait.
[44] Certains auteurs ont écrit que le qualificatif « authentique » accolé au mot « marque de commerce » au paragraphe (b) de l'article 406 du Code criminel était superflu et ne changeait rien à l'affaire.
[45] Le Tribunal ne partage pas cette interprétation.
[46] La lecture conjuguée des paragraphes (a) et (b) de l'article 406, le texte de son prédécesseur, l'article 486 de l'ancien Code criminel, le texte des articles 321 et 366 (2) du Code criminel de même que l'interprétation qui en a été donnée par la Cour suprême du Canada à l'arrêt R. c. Gaysek 1971 RCS 888, amènent le Tribunal à conclure que l'actus reus de l'infraction de contrefaçon d'une marque de commerce consiste en deux choses qui sont totalement différentes l'une de l'autre.
[47] La première consiste dans la fabrication ou la reproduction de quelque manière, c'est-à-dire, dans le fait pour une personne de faire, de créer ou de façonner ou, encore de copier, d'imiter une marque de commerce ou une marque qui lui ressemble au point d'être conçue de manière à induire en erreur et ce, sans le consentement du propriétaire de la marque de commerce.
[48] C'est le cas de celui qui fabrique une boisson gazeuse et qui accole sur son produit les mots « Coca-Cola » ou des mots qui y ressemblent au point d'induire en erreur.
[49] C'est essentiellement la fabrication ou la copie d'une marque de commerce sans le consentement du propriétaire.
[50] Le deuxième cas consiste en la falsification, l'altération, l'addition, l'effacement, la rature d'une marque de commerce authentique.
[51] Ce procédé exclut la fabrication ou reproduction de la marque de commerce originale ou d'une marque lui ressemblant au point d'être conçue de manière à induire en erreur.
[52] Elle concerne l'altération d'une marque de commerce authentique.
[53] C'est le cas de celui qui altère, falsifie, efface ou rature la marque de commerce apposée sur des marchandises ou sur des colis dans lesquels ces marchandises sont distribuées, au sens de l'article (4) de la Loi sur les marques de commerce
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