Harrison c. Bélisle, 2011 QCCS 6064 (CanLII)
[7] Le certiorari est un bref de prérogative qui est accordé surtout quand un tribunal inférieur a excédé sa juridiction comme le dit l'honorable juge Ewaschuk, dans Criminal Pleadings and Practice In Canada (2nd edition) à 26:2080 :
Where certiorari, either alone or in aid of habeas corpus, is brought to quash a committal for trial, the test is whether there was "any evidence" upon which the committing justice could have formed the opinion that the evidence was "sufficient to put the accused on trial" (it seems that a committal based on a total absence of evidence in support constitutes jurisdictional error), or whether the justice lost jurisdiction by reason of jurisdictional error, …
[…]
An error relating to "committal for trial" is reviewable on certiorari only if it is jurisdictional. Where a justice hearing a preliminary inquiryerrs as to "the elements of the offence" with which the accused is charged at the inquiry, the justice commits "jurisdictional error". The jurisdictional error is reviewable on challenge by either the Crown or the accused.
[…]
The scope for review of the committal decision of a preliminary inquiry judge is "very limited". Any "reasonable interpretation or permissible inference" from the evidence adduced at the preliminary inquiry, if properly admissible against the accused, must be resolved in "favour of the prosecution".
[…]
A justice holding a preliminary inquiry is not required to measure inculpatory evidence versus exculpatory evidence when determining whether the evidence is sufficient to put the accused on trial. This applies whether or not the Crown's case is totally circumstantial.
[…]
Where the evidence is "entirely circumstantial" in nature, it is for the jury to weigh that evidence.
[…]
Likewise, it is not for the certiorari judge, reviewing the decision of the justice who conducted the preliminary inquiry, to decide whether there is "another rational conclusion" to be drawn from the evidence other than that of guilt.
[8] La règle qui régit le renvoi à procès a été énoncée par la Cour d'appel du Québec dans R. c. Belleville (2007) Q.C.C.A, page 1704 qui dit au paragraphe 10 :
[10] Dans l'arrêt R. c. Arcuri, la juge en chef McLachlin a énoncé comme suit la règle qui régit le renvoi à procès par la ou le juge enquêteur :
[…] je confirme la règle bien établie selon laquelle un juge présidant l'enquête préliminaire doit décider s'il existe suffisamment d'éléments de preuve pour permettre à un jury, ayant reçu des directives appropriées et agissant de manière raisonnable, de conclure à la culpabilité, et le corollaire selon lequel le juge doit évaluer la preuve uniquement pour déterminer si elle peut étayer les inférences que le ministère public veut que le jury fasse. Comme notre Cour l'a énoncé à maintes reprises, cette tâche n'impose pas au juge présidant l'enquête préliminaire de tirer des inférences d'après les faits ou d'apprécier la crédibilité. Le juge présidant l'enquête préliminaire doit plutôt déterminer si la preuve dans son ensemble peut raisonnablement étayer un verdict de culpabilité, tout en reconnaissant pleinement le droit du jury de faire des inférences de fait justifiables et d'apprécier la crédibilité.
[9] De plus, dans Belleville, notre Cour d'appel citant R. vs Russell 2001 CSC 53 (CanLII), [2001] 2 R.C.S. 804, dit :
[11] Quant au recours en certiorari, il est de portée très restreinte :
[19] La portée de la révision par voie de certiorari est très limitée […]. [L]a révision par voie de certiorari n'autorise pas une cour de révision à annuler la décision du tribunal constitué par la loi simplement parce que ce tribunal a commis une erreur de droit ou a tiré une conclusion différente de celle que la cour de révision aurait tirée. Au contraire, le certiorari permet la révision « seulement lorsqu'on reproche à ce tribunal d'avoir outrepassé la compétence qui lui a été attribuée par la loi ou d'avoir violé les principes de justice naturelle, ce qui, d'après la jurisprudence, équivaut à un abus de compétence » (Skogman c. La Reine,1984 CanLII 22 (CSC), [1984] 2 R.C.S. 93, p. 99 (citant l'arrêt Forsythe c. La Reine, 1980 CanLII 15 (CSC), [1980] 2 R.C.S. 268).
[20] […] Bien que l'enquête préliminaire fournisse aussi à l'avocat de la défense l'occasion de déterminer à la fois la nature et le poids des éléments de preuve recueillis contre son client, son objet principal consiste à déterminer s'il existe suffisamment d'éléments de preuve pour justifier le renvoi de l'accusé à son procès : Skogman, précité, p. 106 (citant G. Arthur Martin c.r. : "Preliminary Hearings", Special Lectures of the Law Society of Upper Canada (1955), p. 1); Dubois c. La Reine,1986 CanLII 60 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 366, p. 373-374. Fait très important à souligner, l'enquête préliminaire ne vise pas à déterminer la culpabilité ou l'innocence de l'accusé. Cette détermination a lieu au procès. L'enquête préliminaire a pour objet la vérification préalable et n'est pas censée fournir une tribune où se plaide le bien-fondé de la preuve recueillie contre l'accusé. La portée restreinte des moyens de contrôle reflète l'objet limité de l'enquête préliminaire.
(Nous soulignons).
[12] Le pouvoir de révision d'un renvoi à procès par voie de certiorari est essentiellement limité aux erreurs de juridiction. Il faut toutefois retenir que « commet une erreur de compétence le juge de l'enquête préliminaire qui renvoie l'accusé à son procès en l'absence de preuve relative à un élément essentiel de l'accusation. »
[13] Dans l'arrêt Skogman, le juge Estey employait, pour préciser sa pensée quant aux éléments de preuve requis pour permettre le renvoi à procès, une formule qui a été reprise par la suite :
[12] […] À mon avis, il est donc possible, bien que cette possibilité soit très faible, de déduire de cette preuve que l'accusé et les auteurs de la débenture contrefaite s'étaient entendus pour convertir cette débenture en espèces en la présentant à une compagnie de fiducie ou à une banque. Sans tomber dans le domaine de la pure fantaisie, cent [sic] preuve se rapproche de ce qu'on appelle traditionnellement [TRADUCTION] « un soupçon de preuve ». Par conséquent, on peut glaner du dossier « des éléments de preuve » justifiant le renvoi au procès. Cela dit, il faut ajouter que, dans chaque cas, la présence ou l'absence d'éléments de preuve doit se rapporter à chacun des éléments essentiels de l'accusation en question. (Nous soulignons).
[…]
[22] La Cour suprême a également rappelé, à maintes reprises, qu'« il faut montrer la plus grande retenue à l'égard de la conclusion du juge de l'enquête préliminaire selon laquelle il existe une preuve suffisante ».
[10] Le juge enquêteur a appliqué la loi aux faits de la présente affaire et a correctement conclu (à l'exception du chef numéro 4) que :
[25] Dans R. c. Sazant, 2004 CSC 77 (CanLII), [2004] 3 R.C.S. 635, le juge Major, au nom des juges majoritaires de la Cour suprême, fait siens les propos tenus par le juge présidant l'enquête préliminaire qui a reconnu que :
18 […] [L]e juge de l'enquête préliminaire n'est pas autorisé à apprécier la crédibilité et la fiabilité, et que, lorsque plusieurs inférences peuvent résulter de la preuve, il ne faut considérer que celles favorables au ministère public. Le juge de l'enquête préliminaire qui ne respecte pas ces contraintes outrepasse sa compétence : voir l'arrêt Dubois c. La Reine,1986 CanLII 60 (CSC), 1986 CanLII 60 (C.S.C.), [1986] 1 R.C.S. 366, P. 380.
[26] Certes, il existe de nombreuses contradictions ou incohérences dans les témoignages de M... et Line Tremblay. Il ne revient toutefois pas au juge présidant l'enquête préliminaire d'évaluer la crédibilité des témoins, leur fiabilité ou d'analyser leurs perceptions des événements. « Il appartient exclusivement au jury de tirer des conclusions relatives à la crédibilité », précise la Cour suprême dans l'arrêt Arcuri, précité, au paragr. 32.
[27] La preuve a cependant révélé, par d'autres témoins, que le prévenu a poignardé le plaignant dans le dos ou dans les côtes alors qu'il se trouvait par-dessus lui. Dans R. c. Paice, 2005 CSC 22 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 339, la Cour suprême, au paragr. 10, spécifie que « [l]a preuve du consentement au Canada requiert davantage qu'une conclusion de fait que les parties ont accepté de se bagarrer ». Au paragr. 18, elle ajoute que « [l]'arrêt Jobidon précise que, pour que le consentement soit vicié, il faut que des lésions graves aient été à la fois voulues et causées ». Bien qu'il y ait possiblement eu consentement à la violence dans le « rond-point », ce n'était plus le cas lorsque le plaignant s'est retrouvé sans défense couché dans le gazon.
Conclusion
[28] La preuve soumise établit prima facie que le prévenu s'est livré à une agression d'une manière intentionnelle contre le plaignant sans son consentement en lui infligeant des lésions corporelles graves alors qu'il utilisait une arme.
[29] Ayant examiné l'ensemble de la preuve présentée par les parties, j'estime que cette preuve, si elle été crue, pourrait raisonnablement étayer un verdict de culpabilité sur les 2e, 3e et 4e chefs d'accusation mentionnés à la dénonciation.
[30] En conséquence, la preuve est suffisante pour justifier le renvoi à procès.
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