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mercredi 3 août 2011

Ce qu'est l'intention spécifique selon les auteurs Côte-Harper, Manganas et Turgeon

R. c. Fiset, 2011 QCCQ 1344 (CanLII)

[59] Selon les auteurs Côte-Harper, Manganas et Turgeon, pour commettre ce type d'infraction, il faut que :

« …l'accusée fasse quelque chose dans le but d'atteindre un résultat ou une conséquence qu'il assigne à sa conduite… »

et aussi que :

« …les actes de la deuxième catégorie (intention spécifique) ont été préconçus et constituent des étapes franchies délibérément dans la poursuite d'un objectif illégal… »

bref :

« … les infractions d'intention spécifique exigent un processus mental qui aboutit à la formulation d'une intention spécifique… »

finalement :

« …il faut qu'elle (l'accusée) ait l'intention de réaliser le but ou la conséquence… »

Les éléments constitutifs de l'infraction de fabrication de faux document et de l'utilisation de faux document

R. c. Bourré, 2005 CanLII 32091 (QC CQ)

[18] Or, la preuve doit reposer sur trois éléments pour trouver l'accusé coupable sous l'article 366 C.cr., soit:

➢ un faux document;

➢ l'accusé doit savoir qu'il fait un faux;

➢ l'intention que ce document soit utilisé pour porter préjudice à autrui.

[19] L'article 368 n'exige cependant pas la preuve que l'accusé avait l'intention de porter préjudice à quelqu'un.

Exemple jurisprudentiel de ce que constitue "soit l'altération, en quelque partie essentielle, d'un document authentique" ou "une altération essentielle dans un document authentique"

R. c. Lagacé, 1995 CanLII 5166 (QC CA)

L'appelante ne conteste pas avoir effacé la mention inscrite à l'endos du chèque par l'avocat de l'assureur; elle soutient plutôt que son geste ne revêt aucun caractère criminel, au sens de l'article 321 et du paragraphe 366(2) Code criminel, cette inscription pouvant être effacée car elle n'était pas essentielle puisque sans valeur, ni effets légaux au sens de la Loi sur les lettres de change, L.R.C. (1985), ch. B-4.

L'argument est ingénieux mais, à mon avis, ce faisant l'appelante cherche à nous distraire du véritable enjeu de ce dossier. Elle n'est pas accusée d'avoir fait un faux chèque; elle est accusée d'avoir fait un faux document, en effaçant la mention restrictive apposée à l'endos du chèque par l'avocat de l'assureur, et de l'avoir utilisé.

Il est possible, quoique je me garde bien de décider de la question, que cette mention n'ait aucune valeur au sens de la Loi sur les lettre de change mais elle en avait certainement pour les parties. Monsieur le juge Durand, par son ordonnance du 21 janvier 1991, exigeait la présence d'une mention précise à l'endos du chèque soit "Pour dépôt seulement au compte en fidéicommis de Me Nadon et Me Laforest". Il n'a pas précisé qui devait apposer cette mention à l'endos du chèque ni à quel moment cela devait être fait. C'est dans ce contexte que l'avocat de l'assureur, en présence de l'appelante, a inscrit cette mention à l'endos du chèque avant de le remettre à l'avocat. Il ne s'agissait peut-être pas encore d'un endossement au sens de la Loi sur les lettres de change, et je ne décide pas de la question, mais cette mention devenait certainement, dans les faits et dans l'esprit de tous, une "partie essentielle" du chèque.

Le fait de gommer cette mention et d'en changer le texte constituait alors "soit l'altération, en quelque partie essentielle, d'un document authentique" (366(2)(a) Code criminel) ou "une altération essentielle dans un document authentique" (366(2)(c) Code criminel).

lundi 1 août 2011

Revue exhaustive de la jurisprudence sur la question de faits similaires par le juge François Marchand

R. c. M.C., 2010 QCCQ 15842 (CanLII)

[38] Tel que mentionné par le soussigné dans l'affaire R. c. Rock Ferland, décision datée du 2 novembre 2004 sur une preuve de voir-dire concernant l'admissibilité de faits similaires en preuve, différents critères et balises ont été énoncés par la Cour suprême.

[39] Ainsi, dans R. c. Handy, la Cour suprême confirme la règle d'exclusion voulant que la preuve de faits similaires soit présumée inadmissible, puisque le risque que cette preuve cause un préjudice est élevé, en détournant l'attention du juge ou du jury. Toutefois, elle ajoute que plus la preuve se rapproche de l'accusation, plus sa valeur probante augmente. Il incombe donc à la poursuite de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la valeur probante de la preuve de faits similaires l'emporte sur le préjudice qu'elle peut causer.

[40] Dans R. c. C. (M.H.) la Cour suprême statue:

«Notre Cour a examiné les principes régissant la recevabilité de la preuve d'actes similaires dans l'arrêt R. c. B. (C.R.), 1990 CanLII 142 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 717. La preuve de disposition qui montre seulement que l'accusé est le genre de personne susceptible d'avoir commis l'infraction en cause est généralement irrecevable. Cette preuve est susceptible d'avoir un grave effet préjudiciable en amenant le jury à penser que l'accusé est une «mauvaise» personne. En même temps, elle est d'une pertinence limitée relativement à la vraie question, celle de savoir si l'accusé a commis l'infraction particulière dont il est inculpé. Il y aura des cas, cependant, où la preuve d'actes similaires touchera à autre chose que la disposition et sera considérée comme ayant une véritable valeur probante. Cette valeur probante tient ordinairement au fait que les actes comparés sont à ce point inhabituels et présentent des similitudes à ce point frappantes que ces similitudes ne peuvent pas être attribuées à une coïncidence. Cette preuve ne devrait être utilisée que lorsque la force probante l'emporte nettement sur le préjudice, ou sur le danger que le jury rende un verdict de culpabilité pour des raisons illogiques.

La nature de la preuve d'actes similaires en l'espèce, comporte de graves dangers de préjudice pour l'appelant. Comme je l'ai dit dans l'arrêt R. c. B. (C.R.), à la p. 735, dans un cas «où la preuve de faits similaires que l'on veut présenter est une preuve à charge d'un acte moralement répugnant commis par l'accusé, le préjudice qui peut en résulter est grave et la valeur probante de la preuve doit vraiment être grande pour permettre sa réception». Le juge du procès a le devoir d'apprécier les facteurs relatifs à la valeur probante et au préjudice, puis de déterminer si, nonobstant la règle fondamentale d'exclusion, la valeur probante de la preuve est tellement forte qu'elle fait pencher la balance en faveur de son utilisation.»

[41] Il faut être prudent pour ne pas trop ouvrir la porte à l'admissibilité d'une preuve de propension, puisque la crédibilité est une question omniprésente dans la plupart des procès, et que tout ce qui ternit la moralité de l'accusé peut accessoirement accroître la crédibilité du plaignant.

[42] La règle qui interdit, avant verdict, toute preuve des antécédents judiciaires de l'accusé ainsi que son mode de vie en général, vise à assurer que le prévenu sera jugé pour l'infraction dont il est accusé et non pas en fonction de sa moralité ou de ses crimes passés. Cette règle vise les preuves dont le seul but est d'établir une propension qui ne se rapporte pas au crime reproché. On considère qu'une telle preuve n'a aucune valeur probante.

[43] Dans André Gagnon c. Sa Majesté La Reine la Cour d'appel du Québec écrit:

«64. … suivant l'état du droit, les faits similaires seront admis, à titre d'exception, lorsque la valeur probante qui en découle dépasse leur effet préjudiciable. La valeur probante d'une preuve ne s'apprécie pas dans l'absolu; elle doit être évaluée en rapport avec une question soulevée, soit par les chefs d'accusation soit par la défense qui est offerte.

[65] La valeur probante d'une preuve de faits similaires dépend du degré de similitude qui existe entre ces faits et les infractions reprochées. Dans l'arrêt Handy, la Cour suprême rappelle les facteurs qui permettent de conclure à la similitude nécessaire :

(1) la proximité temporelle des actes similaires;

(2) la mesure dans laquelle les autres actes ressemblent dans leurs moindres détails à la conduite reprochée;

(3) la fréquence des actes similaires;

(4) les circonstances entourant les faits similaires ou s'y rapportant;

(5) tout trait distinctif commun aux épisodes;

(6) les faits subséquents;

(7) tout autre facteur susceptible d'étayer ou de réfuter l'unité sous-jacente des actes similaires.»

[…]

[68] Dans la recherche des similitudes ou des différences entre les infractions, l'approche mathématique ou comptable est à proscrire. L'exercice auquel la Cour suprême nous convie est la recherche d'un certain équilibre …

[…]

[71] Dans R. c. Handy, le juge Binnie décrivait comme ceci l'exercice auquel doit se livrer le juge d'instance pour équilibrer la valeur probante d'une preuve de faits similaires et le préjudice qui peut découler de sa recevabilité :

Justice est rendue lorsqu'on écarte une preuve pertinente dont l'effet préjudiciable l'emporte sur sa valeur probante (R. c. Marquard, 1993 CanLII 37 (C.S.C.), [1993] 4 R.C.S. 223, p. 246), et lorsqu'on admet une preuve dont la valeur probante est plus grande que son effet préjudiciable (quoique ce soit là l'exception). La justice inclut l'intérêt de la société dans la découverte de la véracité des accusations ainsi que l'intérêt de la société et de l'accusé dans l'équité procédurale. Un système de justice criminelle dans lequel des déclarations de culpabilité injustifiées ont été prononcées notamment en raison de notions erronées de moralité et de propension ne devrait pas (et ne doit pas) prendre à la légère le risque qu'une preuve de propension soit mal utilisée.»

[44] En principe, la preuve d'une prédisposition à accomplir le type d'acte reproché est irrecevable à raison du danger qui peut en découler.

[45] Dans R. c. B., le juge Sopinka écrit:

«La principale raison d'exclusion relative à la propension est qu'il existe une tendance tout à fait humaine à juger les actes d'une personne en fonction de son caractère. Surtout avec des jurys, la tentation serait forte de conclure qu'un voleur a volé, qu'un homme violent a commis des voies de fait et qu'un pédophile s'est livré à des actes de pédophilie.»

[46] Le degré de similitude exigé varie selon le but pour lequel la preuve de faits similaires est présentée. Ainsi, lorsqu'il s'agit de prouver l'identité de l'auteur de l'infraction, les tribunaux exigent un très haut degré de similitude, puisque le risque de préjudice pour l'accusé est grand. Il faut alors que le crime soit véritablement signé par son auteur.

[47] Les tribunaux font par ailleurs preuve d'une plus grande souplesse si le but visé est de nier une défense de bonne foi ou d'association honnête, par la preuve d'un comportement systématique.

[48] Il fut aussi reconnu que la preuve présentée à titre de faits similaires n'a pas nécessairement à établir la commission d'une infraction et qu'au surplus, celle relative aux faits postérieurs aux événements reprochés est aussi admissible.

[49] En fait, le Ministère public n'a qu'à faire une preuve prima facie de la participation de l'accusé à l'infraction qui lui est reprochée, à titre de fait similaire.

[50] La valeur probante de la preuve d'acte similaire doit être analysée en fonction de la question soulevée. Celle-ci doit être appréciée au regard du préjudice que l'accusé peut subir.

[59] Le Tribunal a pris connaissance d'une décision rendue par l'honorable Claude Leblond, le 15 janvier 2009 dans l'affaire R. c. Cormier. Celui-ci a refusé une preuve de faits similaires, alors que dans cette affaire, il y avait, malgré tout, un nombre impressionnant de faits et d'actes similaires. Il a toutefois dénoté des différences et divergences, lesquelles lui ont permis de conclure que l'admissibilité de la preuve de faits similaires causerait un préjudice à l'accusé.

[60] Le soussigné fait siens les citations et propos tenus par l'honorable juge Leblond, lesquels se lisent comme suit:

[29] Dans R. c. Handy (2002 CSC 56 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 908), la Cour suprême réitère que la règle en matière d'actes similaires en est une d'exclusion.

« Il est évident que l’intimé a raison de plaider l’inadmissibilité de la preuve d’inconduite qui va au-delà de ce qui est allégué dans l’acte d’accusation et qui ne fait que ternir sa réputation. Personne n’est accusé d’avoir une prédisposition ou propension « générale » au vol, à la violence ou à quoi que ce soit d’autre. En général, l’exclusion vise à interdire l’utilisation de la preuve de moralité en tant que preuve circonstancielle d’une conduite, c’est-à-dire pour inférer des « faits similaires » que l’accusé avait une propension ou une prédisposition à accomplir le type d’actes reprochés et qu’il est donc coupable de l’infraction (note précitée). »

[30] Évidemment, la poursuite cherche par cette preuve à tirer une inférence. Une telle inférence doit cependant rencontrer des exigences précises.

« Les inférences que l’on cherche à faire doivent être conformes au bon sens, aux notions intuitives de probabilité et à l’improbabilité d’une coïncidence (2002 CSC 56 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 908, par. 42). »

[34] La question de savoir si la valeur probante d’une preuve l’emporte ou non sur son effet préjudiciable ne peut être tranchée qu’en fonction de la fin, i.e de la question soulevée et donc de la question en litige (2002 CSC 56 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 908, par. 69).

« Les questions soulevées découlent des faits allégués dans l’accusation ainsi que des moyens de défense invoqués ou raisonnablement escomptés. Il incombe donc au ministère public de cerner la question en litige dans le procès, à laquelle on prétend que la preuve de prédisposition se rapporte. Si la question n’est plus litigieuse, comme, par exemple, lorsque l’accusé a admis le fait, la preuve n’est plus pertinente et doit être exclue (2002 CSC 56 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 908, par. 74).»

[36] Lorsqu'une preuve d'actes similaires est présentée pour étayer la crédibilité d'une plaignante, la Cour suprême émet quelques réserves.

« Selon le ministère public, la question en litige concerne de façon générale la « crédibilité de la plaignante » et plus particulièrement [traduction] « le fait que l’accusé est fortement prédisposé à accomplir l’acte même qui est allégué dans les accusations portées contre lui ». Toutefois, il y a des précisions à apporter. Il faut prendre garde de trop ouvrir la porte à l’admission de la preuve de propension ou, comme on le dit parfois, de permettre qu’elle ait une trop grande incidence sur la preuve que le ministère public doit présenter (Sopinka, Lederman et Bryant, op. cit., § 11.26). La crédibilité est une question omniprésente dans la plupart des procès, qui, dans sa portée la plus étendue, peut équivaloir à une décision sur la culpabilité ou l’innocence.

Tout ce qui ternit la moralité de l’accusé peut accessoirement accroître la crédibilité du plaignant. Décider que la « question soulevée » porte sur la crédibilité risque, à moins qu’on en limite la portée, de donner lieu à l’admission de rien de plus qu’une preuve de prédisposition générale (« mauvaise personnalité ») (2002 CSC 56 (CanLII), [2002] 2 R.C.S. 908, par. 115 et 116).

[42] Dans l'analyse de la force probante des actes dits similaires, il faut se demander quelle inférence peut-on tirer de ces faits en relation avec la question en litige.

La preuve de faits similaires

R. c. Handy, 2002 CSC 56, [2002] 2 RCS 908

La règle générale d’exclusion voulant que la preuve de faits similaires soit présumée inadmissible a été confirmée à maintes reprises. Elle reconnaît que le risque que cette preuve cause un préjudice, détourne l’attention du jury et entraîne un délai excessif l’emporte habituellement sur sa valeur probante. Cependant, il peut se poser des questions à l’égard desquelles la valeur probante de la preuve de faits similaires l’emporte sur le risque qu’elle soit mal utilisée. Il se peut que les circonstances similaires écartent toute coïncidence ou autre explication tendant à innocenter l’accusé. Plus la preuve se rapproche spécifiquement de l’accusation, plus sa valeur probante augmente. Il incombe à la poursuite de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la valeur probante de la preuve de faits similaires l’emporte sur le préjudice qu’elle peut causer.

La preuve de faits similaires ne cesse pas d’être une preuve de propension du fait qu’elle se rapporte à une question autre que la prédisposition générale.

La principale source de valeur probante est le rapport existant entre la preuve en cause et les infractions reprochées. Parmi les facteurs qui peuvent justifier l’admission d’une telle preuve, il y a la proximité temporelle des épisodes similaires, la ressemblance sur le plan des détails, la fréquence des actes similaires, les similitudes sur le plan des circonstances et tout trait distinctif. Les facteurs justifiant l’exclusion comprennent le caractère incendiaire des actes similaires, la question de savoir si le ministère public peut prouver ce qu’il avance à l’aide d’éléments de preuve moins préjudiciables, le risque de détournement d’attention du jury et la question de savoir si l’admission de la preuve entraînera un délai excessif.

Le principe fondamental pour voir si la réouverture d'enquête est possible est de déterminer si l'accusé serait lésé dans sa défense

R. c. P. (M.B.), [1994] 1 RCS 555

Le principe fondamental qui s'applique pour déterminer si le ministère public devrait être autorisé à rouvrir sa preuve a toujours été de savoir si l'accusé serait lésé dans sa défense. Le pouvoir discrétionnaire du juge du procès à cet égard doit être exercé judiciairement et avoir pour objet d'assurer qu'il est dans l'intérêt de la justice de le faire. Traditionnellement, on a considéré qu'il y a une corrélation entre le stade auquel sont rendues les procédures et le préjudice et l'injustice que subit l'accusé.

Avant que le ministère public ait terminé sa preuve, le juge du procès jouit d'une grande latitude dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de permettre au ministère public de citer de nouveau un témoin pour qu'il corrige son témoignage antérieur.

Dès que le ministère public termine réellement sa preuve, mais avant que la défense choisisse de produire une preuve, le critère que doit appliquer le juge du procès est généralement considéré comme celui selon lequel on doit permettre de rouvrir la preuve pour remédier à un oubli ou à une omission par inadvertance du ministère public dans la présentation de sa preuve, pourvu naturellement que la justice l'exige et que la défense ne soit pas lésée.

Après que le ministère public a terminé sa preuve et que la défense a commencé à y répondre, le pouvoir discrétionnaire d'une cour est très limité et c'est seulement dans des circonstances très particulières que le ministère public sera autorisé à rouvrir sa preuve. Le fait de permettre au ministère public de rouvrir sa preuve après que la défense a commencé à y répondre minerait le principe directeur interdisant l'auto‑incrimination.

L'arrêt Robillard de notre Cour, qui aborde de façon plus libérale le pouvoir discrétionnaire du juge du procès en matière de réouverture, même après la clôture de la preuve de la défense, doit être interprété restrictivement comme s'appliquant seulement aux situations où le ministère public cherche à rouvrir sa preuve pour corriger un vice de forme.

L'état du droit concernant la réouverture d'enquête

R. c. G. (S.G.), [1997] 2 RCS 716

La décision du juge du procès de permettre au ministère public de rouvrir sa preuve n'importe quand avant le prononcé d'un verdict est une décision discrétionnaire, et, partant, un tribunal d'appel fera généralement preuve de retenue à son égard. Ce pouvoir doit être exercé judiciairement, toutefois, et dans l'intérêt de la justice. La question fondamentale à laquelle il faut répondre est de savoir si l'accusé sera lésé dans sa défense. L'étendue du pouvoir discrétionnaire du juge du procès d'autoriser le ministère public à rouvrir sa preuve diminue à mesure que le procès avance parce qu'il y a plus de chances pour que la défense soit lésée.

À la troisième étape du procès, c'est‑à‑dire lorsque la défense a déjà commencé à répondre à la preuve du ministère public, ce pouvoir est extrêmement limité et est beaucoup moins susceptible d'être exercé en faveur du ministère public.

Une réouverture à ce stade ne devrait être autorisée que dans les circonstances tout à fait exceptionnelles qui ressemblent beaucoup aux deux exemples donnés dans l'arrêt P. (M.B.): lorsque la conduite de la défense a directement ou indirectement contribué à l'omission du ministère public de présenter les éléments de preuve en question avant la clôture de sa preuve, et lorsque l'omission ou l'erreur du ministère public portait sur un point non controversé de pure forme et n'avait rien à voir avec le fond de l'affaire. En dehors de ces deux exemples, le ministère public aura beaucoup de difficulté à obtenir la réouverture de sa preuve après que l'accusé a commencé à y répondre.

L'une des principales craintes que suscite le fait de permettre au ministère public de rouvrir sa preuve pendant la troisième étape du procès est l'atteinte au droit de l'accusé de ne pas être mobilisé contre lui‑même. Le ministère public ne doit pas être autorisé à modifier la preuve qu'il a produite après que l'accusé a commencé à y répondre. En outre, le ministère public ne devrait pas être autorisé à bénéficier de l'avantage injuste qui résultera forcément du fait que «sa preuve soit scindée».

Le fait que le ministère public n'est pas responsable de l'omission de produire les éléments de preuve dans le cadre de sa preuve ne change rien au droit de l'accusé de connaître la preuve avant d'avoir à y répondre. À la troisième étape du procès, la possibilité de citer à nouveau des témoins à charge et de rouvrir la preuve de la défense ne peut jamais réparer complètement le préjudice causé à la défense.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il est inapproprié de contre-interroger son propre témoin et d'ébranler sa crédibilité

R. v. Situ, 2005 ABCA 275 Lien vers la décision [ 8 ]                 In  R. v. Nicholson  (1998), 223 A.R. 82,  1998 ABCA 290 , this Court ...