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samedi 26 janvier 2013

La mise en preuve de message texte sans affidavit

 R. c. Stark, 2010 QCCS 6296 (CanLII)


[2]                 La poursuivante veut présenter en preuve aux jurés quatre messages texte que l'accusé aurait fait parvenir à la victime dans les heures qui ont précédées son décès. 

[3]               Le procureur à la Direction des poursuites criminelles et pénales estime qu'il s'agit là d'une preuve dont la valeur est extrêmement élevée. Il plaide en effet que les messages texte en question aideront le jury à résoudre les questions suivantes ayant trait à:
1- l'état d'esprit de Stark au moment du meurtre;
2- son intention;
3- le mobile qu'il avait;
4- l'identité du meurtrier. 

[4]                 De plus, le Ministère public croit que les probabilités sont grandes que Stark présentera une défense de légitime défense. Ne pouvant scinder sa preuve, l'avocat de la couronne devra contrer à l'avance ce moyen de défense et il compte sur la preuve des messages texte pour y parvenir.

[5]               De son côté, le procureur de l'accusé conteste la demande. Pour l'essentiel, il plaide que l'effet préjudiciable de la preuve proposée dépasse largement sa valeur probante. Au surplus, il s'agit d'une preuve par ouï-dire inadmissible en raison de son bas degré de fiabilité.

[6]               En effet, le technicien en informatique judiciaire qui a procédé à l'extraction des données contenues dans le téléphone portable de la victime ne peut affirmer que la boîte vocale de celui-ci et celle des messages texte n'ont pas été altérées entre le meurtre et la saisie de cet appareil.

[7]               Le principe général de la common law en matière de preuve veut que tout fait pertinent à une question litigieuse soit admissible en preuve (R. c. Blackman, 2008 CSC 37 (CanLII), [2008] 2 R.C.S. 298, par. 29). Selon la jurisprudence, est pertinent " tout ce qui, selon la logique et l'expérience humaine, tend le moindrement à établir un fait en litige" (R. c. Corbett 1988 CanLII 80 (CSC), [1988] 1 R.C.S. 670, 715).

[8]               Le droit n'exige pas d'une preuve qu'elle possède une valeur probante minimale. Elle doit simplement tendre à accroître ou à diminuer la probabilité de l'existence d'un fait litigieux (R. c. Arp, 1998 CanLII 769 (CSC), [1998] 3 R.C.S.  339, par. 38). 

[9]               Avec respect pour l'opinion contraire, je suis d'avis que la requête du Ministère public est bien fondée. Voici pourquoi. 

[10]            Les messages texte qu'on veut présenter au jury proviennent de Stark lui-même. Il s'agit donc de déclarations de l'accusé faites à la victime dans cette cause.

[11]            Je ne connais aucune règle de droit prohibant de façon formelle et sans exception la présentation en preuve de déclarations d'un accusé.

[12]            Dans la cause de Stark, la valeur probante des messages texte qu'il a fait parvenir dans le téléphone de la victime est extrêmement élevée car cette preuve pourrait aider le juge des faits à décider des questions mentionnées ci-dessus (R. c. Griffin [2009] C.S.C. 28). 

[13]            Quant à l'argument de l'accusé concernant le peu de fiabilité de cette preuve, la situation diffère ici sensiblement de celle décrite dans R.c. Ferris 1994 CanLII 31 (CSC), [1994] 3R.C.S.756 où l'accusé avait parlé avant et après la déclaration qu'on voulait mettre en preuve mais on ne savait pas ce qu'il avait dit. Ici, il n'existe aucun élément de preuve permettant d'inférer que le téléphone de Williams aurait pu être altéré.

Règles applicables aux contre-interrogatoire sur les antécédents judiciaires de l'accusée

R. c. Roux, 2002 CanLII 41218 (QC CA)

Lien vers la décision

[18]           L'appelante fait deux reproches au juge du procès. Il aurait erronément permis à l'avocat de l'accusée d'interroger sa cliente sur ses antécédents judiciaires et, en second lieu, il aurait illégalement restreint le contre-interrogatoire du substitut.

[19]           Le premier grief est manifestement non fondé. Rien n'interdit à l'accusée de prendre « les devants » et de dévoiler son passé.

[20]           Le second grief mérite plus d'explications. Le juge a permis de contre-interroger l'accusée sur son dossier criminel mais a exclu de la preuve admissible une condamnation antérieure pour agression armée. Il a estimé qu'en raison des accusations portées ici, l'interrogatoire sur une agression armée était susceptible de causer un préjudice important à l'équité du procès; aussi, exerçant son pouvoir discrétionnaire, il a exclu l'examen de la condamnation d'une accusation de violence.

[21]           La règle, en cette matière, fut définie par la Cour suprême dans R. c. Corbett. La plus récente application de cet arrêt revient à la Cour d'appel de l'Ontario où le juge Dougherty dans R. c. Poitrasécrivait :

A trial judge should exclude evidence of an accused's prior convictions only where the probative value of that evidence in assessing the accused's credibility is outweighed by the prejudicial effect of the evidence such that the admission of the evidence would undermine the fairness of the trial: R. v. Corbett 1988 CanLII 80 (SCC), (1988), 41 C.C.C. (3d) 385 at 400 (S.C.C.). The balancing process described in R. v. Corbett, supra, is first and foremost a function for the trial judge. Appellate courts must show deference to determinations by trial judges as to whether all, some or none of an accused's criminal record will be admitted if the accused testifies

vendredi 25 janvier 2013

La différence entre la contrainte et la légitime défense

R. c. Ryan, 2013 CSC 3

Lien vers le jugement

[19]                          Dans ce passage, le juge en chef évoque deux différences qui « pourrai[en]t bien fonder une différence juridique utile » entre la contrainte et la légitime défense : par. 50. 

[20]                          Premièrement, la légitime défense repose sur le principe voulant qu’il est légitime, dans des circonstances bien définies, d’opposer la force à la force (ou aux menaces d’employer la force) : 

[traduction] « une personne qui est illégitimement menacée ou agressée doit avoir le droit de répliquer » : M. Manning et P. Sankoff, Manning Mewett & Sankoff: Criminal Law (4th ed., 2009), p. 532.  L’agresseur‑victime, comme l’affirme le juge en chef, « ne reçoit que ce qu’[il] mérite » : par. 50.  Cependant, dans les cas de contrainte et de nécessité, la victime est généralement un tiers innocent : voir D. Stuart, Canadian Criminal Law : A Treatise (6th ed., 2011), p. 511.  Deuxièmement, dans les cas de légitime défense, la victime agresse ou menace tout simplement l’accusé; le motif de l’agression ou des menaces n’a pas d’importance.  Dans les cas de contrainte, par contre, la menace a pour but de forcer l’accusé à commettre une infraction.  En clair, la légitime défense constitue une tentative par la victime de mettre fin aux menaces ou aux agressions qu’elle subit en opposant la force à la force; pour sa part, la contrainte amène une personne à succomber aux menaces en commettant une infraction.

[21]                          Toutefois, il ne s’agit pas des seules différences entre la contrainte et la légitime défense.  En effet, selon nous, deux autres différences importantes doivent être prises en compte.

 [29]                          La notion de contrainte ne peut pas être élargie de manière à s’appliquer aux situations où l’accusé oppose la force à la force, ou à la menace de la force, lorsque la légitime défense ne peut être invoquée.  La contrainte est, et doit demeurer, un moyen de défense qui ne peut être invoqué que dans des cas où l’accusé a été forcé de commettre une infraction précise en réplique à des menaces de mort ou de lésions corporelles.  Ce principe limite clairement à certaines situations de fait précises la possibilité d’invoquer ce moyen de défense.  Les éléments de common law constituant la contrainte ne peuvent donc pas être utilisés pour « combler » un présumé vide créé par les limites bien définies par la loi en matière de légitime défense.

L'état du droit concernant l'infraction d'avoir utilisé une arme à feu

R. c. Arnold, 2012 QCCQ 15670 (CanLII)


[159]     Quant à l'infraction d'avoir utilisé une arme à feu, prévue à l'article 85(1) du Code criminel, la Cour suprême a précisé qu'un contrevenant « utilise » une arme à feu au sens de l'article 85(1) du Code criminel lorsque, pour faciliter la perpétration d'un crime ou pour prendre la fuite, il révèle par ses propos ou ses gestes la présence réelle d'une arme à feu ou sa disponibilité immédiate.  L'accusé doit alors avoir l'arme en sa possession physique ou à portée de main. (voir R. c. Steele).

[160]     La condamnation pour cette infraction est subordonnée à la culpabilité de l'accusé pour l'infraction principale (R. c. Pringle).

[161]     Donc, pour cela, selon l'arrêt Griffin, il est essentielque l'infraction principale soit identifiée dans le libellé de l'accusation en vertu de l'article 85 du Code criminel.

Les éléments constitutifs de l'infraction de voies de fait graves

R. c. Arnold, 2012 QCCQ 15670 (CanLII)

Lien vers la décision

[154]     L'actus reus des voies de fait se compose de :
-l'emploi de la force sur une autre personne;
-l'absence de consentement de la victime.

[155]     Pour l'infraction de voies de fait graves, il faut ajouter aux éléments à démontrer que les blessures, les mutilations, la défiguration ou encore le fait que la vie de la victime ait été mise en danger sont une conséquence factuelle de l'agression subie par la victime.

[156]     Quant à l'élément mental, tant les voies de fait simples que les voies de fait graves sont des infractions d'intention générale qui n'exigent que l'intention minimale d'utiliser la force.

[157]     La mens rea des voies de fait graves a été clairement définie dans l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans R. c. Godin:
« La mens rea requise aux fins du par. 268(1) du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, est la prévision objective de lésions corporelles.  Il n'est pas nécessaire qu'il y ait eu intention de blesser, mutiler ou défigurer.  Le paragraphe se rapporte à des voies de fait qui ont pour conséquence de blesser, mutiler ou défigurer.  Cela découle des décisions des arrêts R. c. DeSousa, 1992 CanLII 80 (CSC), [1992] 2 R.C.S. 944, et R. c. Creighton, 1993 CanLII 61 (CSC), [1993] 3 R.C.S. 3, de notre Cour. »
[158]     Donc le critère est celui de la prévisibilité objective de lésions corporelles, et non la prévisibilité objective de lésions corporelles graves.  Ceci implique nécessairement que le test ne consiste pas à déterminer si l'accusé, au moment de commettre les voies de fait, avait réellement à l'esprit les conséquences qui sont survenues, mais plutôt à déterminer si, en posant le geste qu'il a posé, l'accusé aurait dû savoir qu'il pouvait causer à la victime des lésions corporelles, tel que définies à l'article 2 du Code criminel.

La mens rea des infractions de voies de fait & voies de fait causant des lésions corporelles

R. c. Barbaroux, 2012 QCCQ 14910 (CanLII)

Lien vers le jugement

[27]        Le simple fait de toucher une personne peut constituer un emploi de la force.  Cependant, les gestes posés doivent avoir un caractère intentionnel par opposition à un caractère accidentel ou par négligence ou réflexe.

[28]        En l'espèce, l'infraction reprochée est celle de voies de fait ayant causé des lésions corporelles.  Relativement à l'intention, la Cour suprême écrit:

[…] les voies de fait et les voies de fait causant des lésions corporelles exigent toutes deux la même mens reaet l'élément qui réside dans le fait de causer des lésions corporelles ne sert qu'à qualifier l'infraction

Les éléments constitutifs des infractions de voies de fait graves & de voies de fait armées

R. c. Martin Champoux, 2012 QCCQ 14905 (CanLII)

Lien vers la décision

[52]        Relativement à l'infraction de voies de fait graves, pour obtenir une déclaration de culpabilité, la poursuite doit établir hors de tout doute raisonnable que l'accusé a employé la force d'une manière intentionnelle et démontrer une prévision objective de lésions corporelles tel que décidé par la Cour suprême dans l'arrêt Godin. La poursuite n'a pas à prouver que l'accusé avait l'intention de causer les blessures ou de mettre la vie en danger.

[53]        Quant à l'infraction de voies de fait armées, la même intention d'emploi de la force de manière intentionnelle est requise. La poursuite devra aussi démontrer que l'accusé utilisait une arme lors de la commission des voies de fait.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

L'actus reus et la mens rea de l’infraction de possession en vue de trafic & l'appréciation des motifs raisonnables provenant de renseignements reçus d’informateurs

R. c. Rock, 2021 QCCA 878 Lien vers la décision [ 19 ]        L’infraction de trafic est large et vise non seulement la vente, mais aussi le...