lundi 1 février 2016

L'obligation de divulgation de la preuve du ministère public

R. c. Charlebois, 2014 QCCQ 11348 (CanLII)

[12]        Dans R. c. Quesnelle2014 CSC 46 (CanLII), la Cour suprême réitère les principes applicables à l'obligation de communication du ministère public dans les affaires criminelles en général. Ainsi, depuis les arrêts Stinchcombe1991 CanLII 45 (CSC)[1991] 3 R.C.S. 326, et McNeil2009 CSC 3 (CanLII)[2009] 1 R.C.S. 66, il est reconnu que la poursuite a l’obligation générale de divulguer à l'accusé, sans qu'il soit nécessaire de lui en faire la demande, tous les renseignements pertinents découlant des fruits de l'enquête. Aux par. 11 et 12, elle s'exprime de la façon suivante :
[11]            Le ministère public a l’obligation générale de communiquer les éléments de preuve et les renseignements pertinents à la personne qui est accusée d’une infraction criminelle. Selon l’arrêt Stinchcombe, aux p. 336 à 340, il est tenu de communiquer tout renseignement pertinent non protégé qui est en sa possession ou sous son contrôle afin de permettre à l’accusé de présenter une défense pleine et entière. […] Exception faite de l’obligation qui incombe à la police de transmettre au ministère public les fruits de l’enquête, les dossiers en la possession de tiers, y compris d’autres composantes de l’État, ne sont habituellement pas assujettis aux règles établies dans l’arrêtStinchcombe en matière de communication.
[12]            Dans l’arrêt R. c. McNeil2009 CSC 3 (CanLII)[2009] 1 R.C.S. 66, notre Cour reconnaît que le ministère public ne peut se contenter de recevoir passivement des renseignements. […] Notre Cour reconnaît aussi l’obligation de la police de communiquer, sans qu’il soit nécessaire de lui en faire la demande, « tous les renseignements se rapportant à son enquête sur l’accusé » (par. 14), ainsi que les autres renseignements qui « se rapportent manifestement à la poursuite engagée contre l’accusé » (par. 59).
[Soulignements ajoutés]
[13]        Dans l’arrêt O’Connor1995 CanLII 51 (CSC)[1995] 4 R.C.S. 411, au par. 12,  la Cour suprême statue que la simple existence d’un élément ne suffit pas à établir sa pertinence par rapport à la défense, mais que celle-ci doit se présumer lorsqu’il se trouve en la possession du ministère public.
[14]        Se référant aux arrêts StinchcombeO’Connor et Chaplin de la Cour suprême, le juge Vauclair, alors juge à la Cour supérieure et siégeant maintenant à la Cour d’appel, résume l'état du droit relativement à la procédure à suivre en matière de divulgation. DansR. c. Berger, aux par. 38 et 50, il écrit :
[38]      Je répète que ce qui est en possession du ministère public est présumé pertinent. Je note également que la Cour suprême n'a pas permis d'emblée au ministère public de soustraire de son obligation les éléments simplement non pertinents, ce qu'elle aurait pu énoncer. La Cour a plutôt opté pour l'expression « manifestement non pertinent » indiquant clairement que les éléments marginalement pertinents doivent être communiqués.
[50]      Lorsque l’existence de la preuve est établie, le ministère public est tenu de justifier la non-divulgation en fonction des exceptions reconnues. Il est en effet le mieux placé pour discuter de la pertinence ou du privilège puisqu’il est le seul à connaître le renseignement demandé. Par contre, lorsque l’existence des renseignements est mise en doute, le ministère public n’est pas tenu de faire quoi que ce soit tant que la défense ne démontre pas l’existence et la pertinence des renseignements. Une fois le fondement établi, il revient au ministère public de justifier la non-divulgation.
[Soulignement dans le texte]
[15]        Dans McNeil, la Cour suprême spécifie que « l’obligation présumée qui incombe à l'avocat du ministère public de communiquer les fruits de l’enquête en sa possession établie dans Stinchcombe repose sur l’hypothèse que les renseignements sont pertinents et comprennent probablement la preuve qui sera présentée contre l’accusé » (par. 28). Rien de tel ne peut toutefois être inféré quant aux renseignements en possession d’un tiers. L’auteur de la demande doit alors justifier l’objet de sa requête, « d’où son fardeau initial de démontrer la " pertinence vraisemblable " » (par. 28).
[16]         « [L]e service de police chargé de l'enquête n'est pas un tiers, même si en droit, il est distinct et indépendant du ministère public. » Au sens strict, ces deux organismes « peuvent être considérés comme une seule entité pour les besoins de la communication » (McNeil, par. 14 et 24).

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