Delisle c. R., 2010 QCCA 491 (CanLII)
[Défaut de témoigner] Le défaut de la personne accusée, ou de son conjoint, de témoigner ne peut faire le sujet de commentaires par le juge ou par l'avocat du poursuivant.
[106] Dans l'arrêt R. c. Noble, 1997 CanLII 388 (C.S.C.), [1997] 1 R.C.S. 874, paragr. 97, la Cour suprême confirme que cette interdiction vise à faire en sorte que ni le tribunal ni le poursuivant ne puissent attirer injustement l’attention sur le silence de l’accusé. Le juge Sopinka reprend ainsi la règle :
[97] Sur un point connexe, j’ajouterai que ni le par. 4(6) ni l’analyse faite jusqu’ici n’ont pour effet d’empêcher le juge du procès de dire aux jurés que la preuve concernant une question particulière n’a pas été contredite. En pareille circonstance, le juge ne donne pas instruction au jury de tenir compte du défaut de témoigner de l’accusé en tant que tel, mais il leur dit plutôt simplement de prendre note du fait qu’il n’a été présenté aucun élément de preuve contredisant un point particulier. Le juge n’invite pas les jurés à considérer le silence de l’accusé comme un élément de preuve dont il faut apprécier la force probante, mais il leur indique plutôt qu’ils n’ont pas à conjecturer sur quelque élément de preuve contradictoire possible qui n’a pas été présenté. Le paragraphe 4(6) empêche le juge du procès d’aller plus loin et de dire au jury de tenir compte en particulier du défaut de l’accusé de présenter une preuve contradictoire. De plus, en raison du droit de garder le silence et de la présomption d’innocence, le juge du procès ne peut pas, en tant que juge des faits, accorder d’importance particulière au fait que l’accusé n’a pas présenté de preuve contradictoire. Toutefois, il est permis de signaler, comme moyen d’apprécier la preuve, que la preuve sur un point particulier n’a pas été contredite; le juge des faits n’a pas à conjecturer sur des éléments de preuve contradictoires qui ne lui ont pas été présentés.
[107] Dans cette affaire, le juge du procès avait tenu compte du défaut de témoigner de l'accusé pour conclure à sa culpabilité, ce qui était clairement une erreur de droit : Noble, précité, paragr. 53.
[108] Plus récemment, notre Cour, sous la plume de la juge Thibault dans R. c. Devillers, 2005 QCCA 660 (CanLII), 2005 QCCA 660, a rappelé : « La Cour suprême est formelle : le droit de garder le silence et la présomption d’innocence interdisent la prise en compte du silence d’un accusé comme un complément de preuve permettant de conclure à sa culpabilité », (paragr. 74).
[109] Par ailleurs, le paragraphe 4(6) ne doit pas faire l'objet d'une interprétation littérale et exige « quelque chose de plus qu'une simple allusion en passant au fait qu'un accusé n'a pas témoigné au procès » : R. c. Potvin, 1989 CanLII 130 (C.S.C.), [1989] 1 R.C.S. 525, p. 558.
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