mardi 12 avril 2011

Une personne détenue doit connaître l'ampleur du risque pour décider s'il exerce ou renonce à son droit à l'avocat et son droit au silence

R. c. Auclair, 2004 CanLII 24201 (QC C.A.)

[48] Rappelons ici certains principes de base:

1) On ne peut exercer un droit que dans la mesure où on en est bien informé: R. c. Black, 1989 CanLII 75 (C.S.C.), [1989] 2 R.C.S. 138;

2) Le choix d'une personne détenue à l'égard de ses droits est guidé par les motifs de la détention: R. c. Borden, 1994 CanLII 63 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 145;

3) Il est primordial que le sujet connaisse l'ampleur du risque qu'il court pour faire un choix judicieux: R. c. Smith, [1996] 1 R.C.S. 714.

[49] Quel est le fondement de ce principe maintes fois réitéré par la Cour suprême selon lequel un inculpé ou une personne détenue doit connaître l'ampleur du risque pour décider s'il exerce ou renonce à son droit à l'avocat et son droit au silence? Sur la compréhension par la personne de sa situation pour mieux apprécier les conséquences de sa décision (R. c. Smith, précité, p. 727 et R. c. Evans, 1991 CanLII 98 (C.S.C.), [1991] 1 R.C.S. 869). Conséquemment, il est du devoir des policiers, par exemple dans un cas où l'enquête évolue et la situation juridique du suspect change, d'en informer ce dernier: il peut être très loquace à une étape où l'enjeu est moins compromettant et exercer son droit au silence lorsque confronté à une accusation sérieuse.

[50] À partir de cette théorie, comme on a même trompé l'appelant sur l'ampleur du risque qu'il courait au moment de VD-12, et que lors de l'interrogatoire qui a suivi on est silencieux au sujet de son statut alors qu'on devait l'informer qu'il était détenu, il me paraît impossible de conclure à la connaissance par l'appelant de l'ampleur du risque qu'il courait lorsqu'il s'est soumis à l'interrogatoire: on l'a tout simplement empêché de connaître l'ampleur du risque.

[51] Mais il y a plus. Indépendamment de cet aspect de l'ampleur du risque, le fait brutal demeure que nous sommes en présence d'une violation flagrante des droits. Nous savons que le policier Lamarche, aux dires du premier juge, «trouvait révoltant» que l'appelant ait nié sa participation lors de l'interrogatoire antérieur; c'est Lamarche qui a sollicité la permission de son supérieur pour interroger à son tour l'appelant et c'est dans ce contexte qu'il s'est délibérément abstenu de mettre en garde l'appelant et de l'informer de son statut de détenu.

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