lundi 26 décembre 2011

Les démarches qu'un juge du procès doit entreprendre s'il existe une crainte qu'un membre du jury soit partial

Seck c. R., 2011 QCCA 2250 (CanLII)

[65] La Cour d'appel de Colombie Britannique expliqua les démarches qu'un/e juge du procès doit entreprendre s'il existe une crainte qu'un membre du jury soit partial en ces termes :

39 A trial judge who becomes aware of circumstances which raise a question as to the impartiality of a juror is empowered to discharge that juror pursuant to s. 644 of the Criminal Code or to dismiss the jury and declare a mistrial. Whether to take such a step is a matter which falls within the discretion of the trial judge and an appeal court will generally exercise caution before interfering with the exercise of that discretion. See: R. v. Horne reflex, (1987), 35 C.C.C. (3d) 427 (Alta. C.A.); R. v. Andrews, Farrant & Kerr (1984), 13 C.C.C. (2d) 207 (B.C.C.A.); R. v. Hanna 1993 CanLII 1425 (BC CA), (1993), 80 C.C.C. (3d) 289 at 312 (B.C.C.A.).

40 However, the trial judge must exercise that discretion in accordance with the applicable legal principles that govern the exercise of the discretion. Specifically, if an issue of potential bias of a juror arises from reports made to the trial judge he or she must, in order to properly exercise his discretion.

a) apply the proper legal test for determining whether the information gives rise to a reasonable apprehension of bias. See: R. v. Spencer, supra, at pp.279-80 and 290-91; R. v. Gough, supra, at p.669; R. v. Blackwell, [1995] 2 Cr. App. 625 (C.A.) at p.635 (paras. B/C);

b) at a minimum, conduct an inquiry into the circumstances in order to obtain the necessary information upon which to exercise his or her discretion. This is his duty. See: R. v. Blackwell, supra, at pp. 633-64; R. v. Hertrich reflex, (1982), 67 C.C.C. (2d) 510 at 541; R. v. Andrews, Farrant & Kerr, supra, at pp. 212-13 and see: with regards to the obligation of "obtaining ... the required information": R. v. R.D.S., supra, at para. 111 and R. v. Afghanzada, supra. Regardless of the positions taken by counsel, the court has an independent duty to ensure the fair conduct of the trial. See R. v. Hodgson, 1998 CanLII 798 (SCC), [1998] 2 S.C.R. 449; 127 C.C.C. (3d) 449 at paras. 41 (per Cory J.) and 100 (per L'Heureux-Dubé J., concurring).

[66] Cependant, comme le souligne l'intimée, une cour d'appel doit faire preuve d'un degré de déférence élevé envers le ou la juge de première instance quant à son évaluation du risque de partialité potentielle d'un membre du jury.

[67] Dans l'arrêt Pan, la Cour suprême, sous la plume de la juge Charron, souligne le caractère discrétionnaire des pouvoirs du ou de la juge de première instance en cette matière :

[96] Relativement à l'art. 644 du Code criminel, lorsque le juge du procès apprend qu'un juré a été soumis à des influences externes inacceptables ou encore qu'il est incapable de s'acquitter adéquatement de son rôle de juré ou non disposé à le faire, le juge peut tenir une audience pour déterminer la nature du problème, le cas échéant, et il a le pouvoir discrétionnaire de libérer le juré lorsque les circonstances le justifient […].

[97] […] Il y a également des limites à la possibilité de recourir à l'art. 644 du Code comme mécanisme de libération des jurés au cours d'un procès. Cet article ne permet la libération d'un juré au cours du procès que dans les cas où surgit un problème sérieux quant à son aptitude à agir comme juré. Il n'a pas pour objet d'encourager les jurés à se plaindre au juge de faits anodins au sujet de leurs collègues au cours du procès, pas plus qu'il ne prévoit la libération de jurés pour des problèmes mineurs. Il appartient au juge du procès de décider de la meilleure façon d'instruire le jury de ces questions. […].

[68] Dans l'affaire R. v. Giroux, le président du jury avait soumis une note au juge du procès selon laquelle certains membres du jury se sentaient intimidés par un autre juré qui avait tenu des propos violents envers eux, et avait également frappé une table. La note demandait la libération du juré en question. Le juge du procès a tenu une enquête et a décidé de libérer le juré. Cette décision fut confirmée par la Cour d'appel de l'Ontario :

26 In my view, the trial judge committed no reversible error in discharging the juror or in her conduct of the proceedings leading up to that decision.

[27] There is no doubt — to quote Dickson J. in Basarabas v. The Queen reflex, (1982), 2 C.C.C. (3d) 257 (S.C.C.) at 265 — that "an accused should not be lightly deprived of his or her right to be tried by a jury of twelve persons." However, s. 644 of the Code provides the trial judge with a broad discretion to discharge a juror if satisfied the juror cannot continue to act "by reason of illness or other reasonable cause", and the judge's decision is entitled to considerable deference in that regard.

[28] Nor is there any doubt that cases involving internal strife amongst jurors pose particularly problematic issues, and must be dealt with in a careful and sensitive fashion — as the trial judge did here. It is imperative that neither the court, in addressing the situation, nor the jury, in responding to it, violates the rule preserving the confidentiality of jury deliberations. However, adherence to this cardinal principle constrains the court's ability to make inquiries about the internal strife. In addition, the court must be alert to the possibility that the internal strife in question is merely reflective of an inability on the part of the jury to agree, as opposed to an inability to deliberate. There is always the potential that the request to eliminate the strife issue is merely an attempt by a majority of jurors to cast off a dissenting minority opinion. Finally, the court must be conscious of the danger that the entire jury may be tainted by the internal strife — not just the particular juror or jurors who are subject to the inquiry — and its ability to deliberate compromised, thus impairing the integrity of the jury deliberation process.

[69] Dans l'affaire Lessard, cette cour s'est prononcée comme suit:

Le pouvoir discrétionnaire du juge de libérer un juré au terme de l'article 544 C.cr. ou de mettre fin au procès doit donc être exercé judiciairement et en fonction du critère de l'existence d'un "danger réel".

[…]

La tentative de corruption d'un juré est évidemment une affaire objectivement très sérieuse et qui, quelle que soit l'issue du procès, est une tache sur l'intégrité du processus.

Le juge de première instance est celui qui, bien plus que nous en Cour d'appel plusieurs années plus tard, est le mieux placé pour évaluer son impact réel, concret et pratique sur le jury, en tenant compte de l'atmosphère générale dans laquelle le procès s'est déroulé, des circonstances propres à l'espèce, de ce qu'il a pu observer durant toutes les étapes du procès et de la réaction des membres du jury lors de ses commentaires sur l'incident. Il est également le mieux placé pour trouver la solution permettant de neutraliser le poison ainsi distillé dans l'esprit du jury. Sa décision doit donc bénéficier du plus grand respect et ce n'est que si la preuve révèle qu'il s'est clairement trompé et qu'il n'a pas bien exercé sa discrétion, qu'à mon avis une Cour d'appel peut et doit intervenir.(Soulignements ajoutés)

[70] Ce principe a été réitéré récemment dans l'affaire Laroche

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