jeudi 19 janvier 2012

Le poids d'une preuve d'empreintes digitales

R. c. Lamitié, 2010 QCCQ 7631 (CanLII)

Lien vers la décision

[136] La présence des empreintes digitales sur le véhicule ajoute aux circonstances incriminantes mais, comme le dit la Cour d’appel d’Ontario dans l’arrêt Mars, la valeur probante d’une preuve d’empreinte digitale dépend de l’ensemble de la preuve. Pour que la présence d’une empreinte digitale sur un objet puisse relier l’accusé à un crime, il faut qu’il y ait d’autre preuve en mesure d’établir que l’accusé a touché cet objet à un moment et à un endroit qui permettent de relier l’accusé au crime en question.

[137] Les autres éléments de preuve permettent ici cette conclusion compte tenu de la proximité de temps et de lieu entre eux et la découverte de l’empreinte digitale de l’accusé qui demeure par surcroît inexpliquée.

[138] Encore une fois, chacun des ces éléments en soi est insuffisant pour démontrer hors de tout doute la culpabilité de l’accusé.

[139] L’accusé a choisi de ne pas témoigner, comme c’est son droit constitutionnel le plus strict, et le Tribunal n’en tire aucune conclusion défavorable. Le Tribunal estime cependant pertinent de citer l’extrait suivant de l’arrêt Johnson cité avec approbation par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Lepage.

« Aucune conclusion défavorable ne peut être tirée s’il n’y a aucune preuve à réfuter. L’omission de l’accusé de témoigner ne peut permettre de remédier à la faiblesse de la preuve de la poursuite. Or, il arrive un moment, semble-t-il, pour reprendre les termes du juge Irving dans R. c. Jenkins (1908), 14 C.C.C. 221, à la p. 230, 14 B.C.R. 61 (C.A.), où « une preuve circonstancielle, constituée d’un ensemble solide et convaincant de faits inculpatoires, oblige un homme à fournir quelque explication sous peine d’être reconnu coupable ». Il en est ainsi, selon moi, seulement lorsque la preuve de la poursuite, à elle seule, est de nature à appuyer une conclusion de culpabilité hors de tout doute raisonnable. Sous cet angle, il serait préférable de dire que l’absence de preuve à décharge, y compris l’omission de l’accusé de témoigner, justifie la conclusion qu’aucun motif de doute raisonnable ne pouvait ressortir de la preuve. Ce n’est pas tant que l’omission de témoigner justifie une conclusion de culpabilité; c’est plutôt qu’elle prive le tribunal de motifs de tirer une autre conclusion. Lorsqu’elle est ainsi rattachée à la solidité de la preuve du ministère public, l’omission de témoigner ne diffère en rien de l’omission de présenter d’autres éléments de preuve à décharge […] Lorsque la preuve du ministère public exige une explication, l’accusé doit être disposé à accepter les conséquences défavorables de sa décision de garder le silence. »

[140] Dans le cas de l’accusé Lamitié le cumul des éléments qui ont été énumérés plus haut établit « une preuve circonstancielle constituée d’un ensemble solide et convaincant de faits inculpatoires » qui convainc le Tribunal, hors de tout doute raisonnable de l’implication de l’accusé dans cet enlèvement.

[141] L’ensemble de ces éléments de preuve aurait exigé une explication qui aurait peut-être pu affaiblir la preuve circonstancielle qui, non contredite et non expliquée, convainc le Tribunal de la participation de l’accusé à l’enlèvement de M. L….

[142] Le Tribunal ne peut « conjecturer sur les moyens de défense possibles que l’accusé aurait pu faire valoir s’il avait témoigné » mais qu’il n’a pas fait valoir. Le Tribunal ne peut baser un doute raisonnable sur de simples hypothèses ou conjectures, mais doit le faire sur la preuve

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