R. c. Leventis, 2009 QCCS 6532 (CanLII)
Lien vers la décision
[7] À la fin de l’enquête préliminaire, M. Leventis ne présente aucune demande de révision de sa détention en vertu de l'al. 523(2)b) du Code criminel.
[8] Une telle demande doit être présentée au juge qui préside l'enquête préliminaire car ce juge est le mieux placé pour procéder à l’évaluation de la preuve et l'ensemble des circonstances.
[9] Dans l'arrêt R. c. Aoude, le juge Beauregard écrit ce qui suit:
Mais, vu l'intérêt de la question, la poursuite nous a priés de décider si, après avoir renoncé à la continuation d'une enquête tenue en application de l'article 515(6), un inculpé peut présenter à un juge de paix une requête pour être remis en liberté, et nous avons accepté de répondre à cette question. Je le fais par la négative.
J'accepte la proposition de l'appelante selon laquelle les articles 515 à 526 C.cr. forment un régime cohérent dans le contexte duquel l'article 515(6) doit être interprété. Cet article ne prévoit pas une procédure que l'inculpé peut utiliser à sa guise, et quand il le désire. Lors de la comparution de l'inculpé, le juge de paix doit donner à celui-ci la possibilité de faire valoir les raisons qui justifieraient sa mise en liberté. Si l'inculpé ne fait pas valoir de telles raisons, le juge de paix ordonne qu'il continue d'être détenu. Une décision rendue en application de l'article 515(6) ne peut être infirmée ou réformée que par un juge de la Cour supérieure en application de l'article 520 C.cr.
Or, l'inculpé qui renonce à la continuation d'une enquête tenue en application de l'article 515(6) n'est pas dans une meilleure position que celui qui au départ a renoncé à la tenue d'une telle enquête.
En application de l'article 523(2) C.cr. un inculpé peut toujours, dans certaines circonstances et pour des motifs « justificatifs », demander à un tribunal, à un juge ou à un juge de paix, selon le cas, d'annuler une ordonnance de détention provisoire rendue antérieurement. Cette procédure est subséquente à celle de l'article 515(6), ne la remplace pas et ne saurait autoriser un prévenu qui a renoncé à l'enquête prévue à l'article 515(6) ou à la continuation de celle-ci d'ultérieurement demander la tenue d'une telle enquête.
Bref, les intimés pouvaient validement renoncer à la continuation de l'enquête, mais, de ce fait, ils acceptaient la conséquence que le juge de paix ordonne leur détention provisoire sous garde et que cette décision n'allait pas pouvoir être révisée autrement que de la façon que je viens d'indiquer.
(Le soulignement est ajouté)
[10] Normalement, un juge rend une décision initiale de mise en liberté ou de détention du prévenu. La tenue de l'enquête initiale quant à la mise en liberté doit avoir lieu avant le début de l'enquête préliminaire. Cette décision initiale pourra faire l'objet des mécanismes de révision appropriés.
[11] À la fin de l'enquête préliminaire, le juge qui préside l'enquête peut, sur présentation de motifs justificatifs, annuler toute ordonnance de mise en liberté ou de détention provisoire rendue antérieurement en vertu des articles 515, 520, 521, 524 ou 525 du Code criminel.
[12] Quelle conclusion doit-on tirer du fait qu'un prévenu ne présente pas de demande de révision au juge qui préside l'enquête préliminaire mais demande plutôt à la Cour supérieure de réviser une décision antérieure de détention?
[13] Dans Aoude, la Cour d'appel énonce que la partie XVI du Code criminel doit être interprétée comme un régime cohérent. L'approche adéquate exige la flexibilité et l'accessibilité dans les mécanismes de révision de la détention du prévenu
[14] Même s'il est vrai que la partie XVI du Code criminel est notoirement complexe, elle respecte néanmoins une progression chronologique quant aux décisions et aux révisions des ordonnances de mise en liberté ou de détention. Le par. 520(1) prévoit d'ailleurs, spécifiquement, la révision d'une décision rendue en vertu de l'al. 523(2)b). La révision exige logiquement une décision rendue en vertu de cet alinéa.
[15] Pour ces raisons, le prévenu qui bénéficie de l'opportunité de se prévaloir du mécanisme de révision prévu à l'al. 523(2)b), y renonce, s'il fait défaut de se prévaloir de son droit. Il n'est donc pas déraisonnable d'inférer de l'inaction du prévenu qui ne présente pas de demande de révision en vertu de l'al. 523(2)b), qu'il renonce à se fonder sur le changement de circonstances survenu entre la dernière décision de détention et la fin de l'enquête préliminaire pour obtenir une révision de sa détention.
[16] En l'absence de circonstances exceptionnelles, le prévenu, qui omet de présenter une demande en vertu de l'al. 523(2)b), ne peut saisir la Cour supérieure d'une demande de révision de sa détention qui se fonde sur des faits survenus entre la dernière décision qui décide de sa détention, que ce soit la décision initiale ou celle en révision, et la fin de l'enquête préliminaire.
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