vendredi 1 février 2013

La fraude dans le processus d’approvisionnement

(Extraits sélectionnés de ce texte)
Pressions et motivations, occasions et rationalisation : tels sont les ingrédients de la fraude, quelle qu’elle soit. Les abus sont monnaie courante dans le processus d’approvisionnement et peuvent avoir de graves répercussions étant donné l’ampleur des pertes monétaires potentielles et les atteintes à la réputation d’une entreprise qu’est susceptible d’entraîner la perte de la confiance de parties prenantes importantes telles que les investisseurs, les clients et les fournisseurs.

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Peu importe le scénario, l'employé fautif justifiera ses agissements par des raisonnements tels que « l'entreprise n'en pâtira pas, ce n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan » ou encore « de toute façon, je vais rembourser l'entreprise dès que je pourrai ».

Une autre fraude, peut-être moins évidente mais tout aussi grave, consiste pour les employés à accepter des cadeaux d'un fournisseur, de manière détournée, lorsqu'ils font l'objet de sollicitations accrues, mais que leur rémunération est bloquée ou n'augmente pas au même rythme qu'aux beaux jours de l'entreprise, lorsque l'économie était prospère et soutenait sa croissance et sa rentabilité. Les employés justifient alors des actes qui ne sont pas exécutés dans le meilleur intérêt de l'entreprise. Or, cette attitude et les abus qui en découlent peuvent se propager à toute l'entreprise si celle-ci ne se tient pas sur ses gardes tout au long de la phase transitoire de son cycle de vie.

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La fraude est partout. Elle n'épargne aucune zone géographique ni aucun secteur d'activité. Les professionnels en juricomptabilité de KPMG ont observé une hausse globale des cas de fraude au cours des dernières années, lorsque les intervenants des différents secteurs d'activité et les économies mondiales ont dû lutter pour se sortir de la crise financière.

  • Dans un sondage réalisé en 2009 par KPMG aux États-Unis, 65 % des répondants estimaient que la fraude constituait un risque important dans leur secteur d'activité, et 32 % s'attendaient à ce que les cas de fraude continuent d'augmenter. Pour 31 % des sondés, le risque le plus important provenait des pots-de-vin, de la corruption, de la collusion et des conflits d'intérêts. Cette opinion est plus marquée dans les secteurs des administrations publiques et des soins de santé (39 % des sondés) que dans celui des marchés de consommation (21 %) ou celui de l'information, des communications et du divertissement (15 %). Toutefois, même si seulement 15 % des entreprises admettent être victimes de fraude, ce n'est pas quelque chose qu'il faut négliger1.
  • Les répondants à un sondage sur la fraude effectué par KPMG en 2008, en Australie et en Nouvelle-Zélande, ont déclaré avoir assisté à une augmentation importante du nombre de cas de fraude, et 45 % des sondés ont répondu que leur entreprise avait été victime d'au moins une fraude au cours de la période couverte par le sondage. Parmi les fraudes déclarées, les pertes se chiffraient en moyenne à 1 million de dollars australiens2.
  • Enfin, un sondage réalisé en 2010 par KPMG en Inde relève également une augmentation des cas de fraude, en particulier dans la chaîne d'approvisionnement, y compris le processus d'approvisionnement. Parmi les sondés, 75 % estimaient que la fraude dans les entreprises indiennes était en hausse. Les répondants des secteurs de l'immobilier et des marchés industriels identifiaient le processus d'approvisionnement comme étant le plus vulnérable dans 57 % et 39 % des cas, respectivement3.

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Il existe de nombreux stratagèmes frauduleux en ce qui a trait au processus d'approvisionnement, et certaines approches de base à l'égard de la fraude comportent plusieurs variantes. Les paragraphes qui suivent présentent quelques-uns des stratagèmes les plus répandus.

  • Fournisseurs fictifs ou manipulation du fichier maître des fournisseurs. En entrant, dans le fichier maître des fournisseurs, des données permettant d'acheminer des paiements vers une société fictive ou vers une véritable société ne fournissant pas de services à l'entreprise, l'employé fraudeur est en mesure de créer un enregistrement de paiement et de virer de l'argent à un destinataire qu'il contrôle lui-même ou à une tierce partie qui est son complice. La détection peut ne pas être facile, surtout lorsque les montants des paiements sont établis de manière à ce qu'ils échappent à la vigilance des personnes de niveau supérieur chargées de leur approbation. Une variante de cette approche de base consiste à modifier l'adresse et les coordonnées bancaires d'un fournisseur réel, mais inactif, de l'entreprise, ce qui revient sensiblement à s'emparer de l'identité de ce fournisseur pour faciliter des paiements illicites.
  • Falsification de chèques. Du fait qu'il peut facilement être noyé dans le volume des opérations, un chèque produit manuellement est susceptible d'être encaissé après contrefaçon de la signature de l'autorité approbatrice.
  • Factures fictives et taux de facturation gonflés. Des factures pourraient être générées en vue d'un traitement avec les comptes fournisseurs alors qu'elles n'ont pas trait à des biens ou services reçus. Ainsi, un employé pourrait générer une facture à payer à un fournisseur, mais y mettre son adresse personnelle. Il se pourrait aussi que, sans que le personnel du service de l'approvisionnement soit au courant malgré la diligence dont il fait preuve, un fournisseur qui fournit régulièrement et de manière légitime des services à une entreprise soumette une facture au titre de services n'ayant jamais été fournis ou à des tarifs supérieurs à ceux convenus.
  • Conflits d'intérêts. Si des employés de votre service d'approvisionnement ont un intérêt financier à ce qu'une entité qui est un fournisseur connaisse la réussite, il se peut que les décisions qu'ils prennent en ce qui a trait aux achats favorisent cette société au détriment de votre propre entreprise.
  • Commissions secrètes et pots-de-vin de la part des fournisseurs. De manière presque innocente, certains fournisseurs envoient parfois des cadeaux aux membres du personnel du service de l'approvisionnement, en raison de la longue relation qu'ils entretiennent avec eux. Il peut s'ensuivre un conflit d'intérêts lorsque la relation personnelle qui s'instaure entre l'acheteur et le fournisseur est susceptible d'influer sur les efforts de l'acheteur en vue d'agir au mieux des intérêts de l'entreprise.

  • De manière moins innocente, les fournisseurs peuvent aussi s'entendre secrètement avec le personnel de votre service d'approvisionnement pour contourner les contrôles établis à l'égard du processus d'approvisionnement et soutirer de l'argent de manière frauduleuse à votre entreprise. Les fournisseurs peuvent soudoyer un acheteur de votre entreprise pour qu'il achète certains produits à des prix supérieurs au marché ou de qualité inférieure. Ils peuvent aussi offrir des commissions secrètes ou des pots-de-vin aux membres du personnel de votre service de l'approvisionnement pour que ceux-ci approuvent des charges fictives.

  • Collusion des soumissionnaires. Par entente complice entre le personnel du service d'approvisionnement participant à la sélection des fournisseurs et lesdits fournisseurs externes, ou entre plusieurs fournisseurs externes participant au même processus d'appel d'offres, des contrats peuvent être octroyés à des tarifs surévalués.
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Sur le plan strictement pratique, l'une des faiblesses qu'ont en commun de nombreux mécanismes de base (et qui serait facilement évitable) touche aux contrôles à l'égard de la liste des fournisseurs d'une entreprise. L'ajout de nouveaux fournisseurs et la modification des données sur les fournisseurs existants doivent être contrôlés de près. Lorsque l'entreprise ne fait plus appel à un fournisseur pendant une période donnée, ce fournisseur devrait être retiré de la liste des fournisseurs approuvés. Les autres contrôles internes relatifs aux processus d'approvisionnement, d'approbation et de surveillance devraient faire l'objet d'examens afin d'assurer qu'ils sont appropriés et suffisants pour réduire au minimum le risque à cet égard.

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Signaux d'alerte pour détecter la fraude dans le processus d'approvisionnement

  • Factures dont le montant est un chiffre rond
  • Manque de contrôle à l'égard du processus d'appel d'offres, y compris une documentation peu étoffée et l'absence de concurrence appropriée
  • Mauvaise documentation des dépenses ou absence de rapprochement entre les factures et les bons de commande ou de livraison
  • Recours constant à un fournisseur dont les biens reçus sont de piètre qualité, en particulier lorsque le problème concerne un seul et même acheteur
  • Paiements de factures en double
  • Attentions excessives de fournisseurs à l'endroit du personnel du service d'approvisionnement
  • Fournisseurs dont l'adresse est une case postale
  • Absence de numéro d'inscription à la TPS ou à la TVH/TVQ
  • Opérations effectuées en dehors des heures normales de bureau
  • Factures d'un fournisseur qui ne suivent pas l'ordre normal des numéros
  • Paiements versés à des fournisseurs inactifs
  • Soumissions dont le montant initial est bas et suivies d'ordres de changement excessifs
  • Mauvaises pratiques de gestion de la trésorerie (p. ex., paiement de factures sur-le-champ lorsque la pratique acceptée dans le secteur d'activité concerné veut que le paiement soit effectué dans les 30 ou 60 jours)
  • Chèques mis de côté pour ramassage en personne

Analyse de données
Opérations sortant de l'ordinaire
Tendances et sommaires
Indicateurs de relations
  • Factures en double
  • Suite inhabituelle des numéros de factures
  • Paiements versés à un fournisseur inactif
  • Opérations effectuées en dehors des heures normales de bureau
  • Opérations d'un montant supérieur au plafond autorisé ou division d'une facture en plusieurs factures afin de contourner le processus d'autorisation
  • Faux numéros de TPS ou de TVH/TVQ
  • Réception de factures après le règlement
  • Principaux fournisseurs par type de paiement
  • Principaux fournisseurs dont la qualité est mise en cause (p. ex., retours de marchandises)
  • Principaux fournisseurs dont les livraisons sont le plus souvent incomplètes
  • Comparaison des coordonnées des fournisseurs avec celles du registre de la paie
  • Dirigeants chez les fournisseurs correspondant à des membres du personnel du service d'approvisionnement
  • Plusieurs fournisseurs ayant les mêmes coordonnées (adresse, numéro de téléphone, case postale)

Conclusion

Le processus d'approvisionnement est essentiel à la rentabilité d'une entreprise, surtout en ces temps difficiles où la croissance des revenus est précaire. L'attention accrue portée à ce centre de coûts, les contrôles et les résultats financiers peuvent aider à éviter les sorties de fonds inutiles occasionnées par la fraude. Bien que le coût associé à cette veille stratégique puisse sembler supérieur à la probabilité de pertes découlant d'une fraude, une entreprise se doit de prendre en considération les autres répercussions d'un tel abus de confiance : perte de la confiance du public, amendes ou sanctions juridiques, ou atteintes au cours de l'action.

Tiré de: La fraude dans le processus d'approvisionnement | KPMG | CA
Lien vers le document
http://www.kpmg.com/ca/fr/topics/at-risk-magazine/pages/procurement-fraud-are-you-prepared.aspx

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