jeudi 11 juillet 2013

Il faut s'en remettre aux éléments distinctifs des infractions pour déterminer si la commission d'infractions basées sur les mêmes faits peut donner ouverture à la requête en res judicata

R. c. Lacroix, 2009 QCCS 4004 (CanLII)


[67]            La Cour suprême dans l'arrêt Prince considère qu'il faut s'en remettre aux éléments distinctifs des infractions pour déterminer si la commission d'infractions basées sur les mêmes faits peut donner ouverture à la requête en res judicata.
[68]            Selon cet enseignement, il existe trois situations qui ne peuvent être assimilées à des éléments distinctifs suffisants. Ils sont :
a) l'existence d'un élément constituant la manifestation particulière d'un élément compris dans l'autre infraction;
b) l'existence de plus d'une méthode de commettre un même délit;
c) l'existence d'un élément réputé établi au moyen d'une preuve que ne commande pas la logique mais les considérations de politique sociale ou des difficultés qui se rattachent à la preuve.
[75]            Le Tribunal est d'avis que même si les deux types d'infraction sont basés sur les mêmes faits matériels, à savoir les 112 retraits irréguliers, le libellé des articles de la LVM crée des infractions distinctes alors que le libellé de l'art. 380 du Code criminel est de portée beaucoup plus générale.
[76]            En effet, la Loi sur les valeurs mobilières est une législation qui vise à encadrer et réglementer les agissements des intervenants dans le domaine commercial et financier, et plus précisément dans le domaine des valeurs mobilières.
[77]            Il y a certes des volets de cette législation de nature à créer des sanctions sévères pour prévenir les infractions et assurer le respect de la loi. Cependant, la portée de la législation est beaucoup plus restrictive que les dispositions du Code criminel qui visent à sanctionner un comportement moral délinquant qui englobe et dépasse les situations visées par la Loi sur les valeurs mobilières ou toute législation de même acabit.
[78]            Le Tribunal fait siens les propos du juge en chef Dickson de la Cour suprême qui s'exprimait comme suit :
J'insiste sur le fait qu'en appliquant les critères susmentionnés il importe de se garder de pousser la logique au point de contrecarrer l'intention du législateur ou de perdre de vue la question clé de savoir si les deux accusations sont fondées sur la même cause, la même chose ou le même délit.
[79]            Le Tribunal est d'avis que les chefs d'accusation en l'espèce ne sont pas fondés sur la même cause, la même chose ou le même délit.
[107]      Le Tribunal conclut que :
a)       le requérant a établi un lien factuel suffisant entre certaines des infractions pénales pour lesquelles il a été reconnu coupable pour avoir influencé ou tenté d'influencer le cours d'un titre ou d'une valeur et les chefs d'accusation auxquels il doit répondre pour fraude, selon l'art. 380 du Code criminel;
b)       au-delà du lien factuel suffisant, il n'a pas établi de lien juridique suffisant entre les deux législations puisqu'il existe des éléments distinctifs;
c)         le requérant doit répondre à des chefs d'accusation au criminel qui n'avaient pas d'équivalent lors de son procès au pénal;
d)       les objectifs de la Loi sur les valeurs mobilières sont spécifiques et distincts de ceux du Code criminel même s'ils concernent l'intérêt public.  Les objectifs du Code criminel sont beaucoup plus larges, généraux et créent des crimes qui subsistent indépendamment des dispositions pénales de la LVM;
e)        Les peines maximales déterminées par le législateur en vertu de la LVM sont bien inférieures à celles prévues par le législateur en vertu du Code criminel.  Cet élément n'est donc pas probant pour établir la similarité des infractions reprochées;
f)         les mêmes agissements basés sur une trame factuelle identique peuvent entraîner l'existence d'infractions distinctes selon leCode criminel.
[108]      Pour ces motifs, le Tribunal conclut que le requérant n'a pas établi les circonstances qui lui permettent de demander l'arrêt des procédures criminelles au motif de res judicata.

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