Delisle c. R., 2013 QCCA 952 (CanLII)
[139] Le paragraphe 686(1)a)(i) C.cr. accorde à l'appelant le droit d'interjeter appel d'un verdict de culpabilité au motif qu'« il est déraisonnable ou ne peut pas s'appuyer sur la preuve/it is unreasonable or cannot be supported by the evidence […] ». Dans ses arrêts de principe R. c. Yebes et R. c. Biniaris, la Cour suprême enseigne qu'un verdict est déraisonnable ou ne peut s'appuyer sur la preuve que si un jury ayant reçu des directives appropriées et agissant de manière judiciaire ne pouvait raisonnablement le rendre. Rappelant récemment la pertinence de ce critère dans R. c. W.H., le juge Cromwell écrit que le seul fait d'avoir un doute raisonnable, après l'examen du dossier, ne peut permettre à une cour d'appel de conclure au caractère déraisonnable du verdict :
[27] La cour d’appel qui se penche sur le verdict de culpabilité prononcé par un jury doit respecter deux balises très nettes. D’une part, elle doit dûment prendre en compte la situation privilégiée du jury à titre de juge des faits ayant assisté au procès et entendu les témoignages. Elle ne doit ni devenir un « treizième juré », ni donner suite à un vague malaise ou à un doute persistant qui résulte de son propre examen du dossier, ni conclure au caractère déraisonnable du verdict pour le seul motif qu’elle a un doute raisonnable après examen du dossier.
[140] Toujours dans R. c. W.H., la Cour suprême précise qu'une cour d'appel doit néanmoins évaluer la preuve, en s'appuyant sur son expérience judiciaire. Voici ce qu'en dit le juge Cromwell :
[28] D’autre part, le tribunal d’appel ne peut se contenter d’apprécier le caractère suffisant de la preuve. Il ne s’acquitte pas de la tâche qui lui incombe en concluant qu’il existe des éléments de preuve qui, s’il leur est ajouté foi, étayent la déclaration de culpabilité. Il doit plutôt « examiner, [] analyser et, dans la mesure où il est possible de le faire compte tenu de la situation désavantageuse dans laquelle se trouve un tribunal d’appel, [] évaluer la preuve » (Biniaris, au par. 36) et se demander, à la lumière de son expérience, si « l’appréciation judiciaire des faits exclut la conclusion tirée par le jury » (par. 39, italique ajouté). Ainsi, pour déterminer si le verdict est de ceux qu’un jury ayant reçu les directives appropriées et agissant de manière judiciaire aurait raisonnablement pu rendre, le tribunal d’appel doit se demander non seulement si le verdict s’appuie sur des éléments de preuve, mais également si la conclusion du jury ne va pas à l’encontre de l’ensemble de l’expérience judiciaire (Biniaris, au par. 40).
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