Denis c. R., 2018 QCCS 6163
[57] Depuis l’arrêt Lizotte, rendu par la Cour suprême à l’automne 2016, le privilège relatif au litige est érigé au statut de privilège générique[43]. La Cour suprême du Canada a abordé le privilège du litige dans un contexte civil dans le cadre de l’arrêt Blank c. Canada (Ministre de la justice)[44] où le Tribunal l’avait entre autres distingué du privilège avocat-client[45]. Lors de la décision Chan[46], le Tribunal a également reconnu l’application de ce même privilège dans un cadre criminel.
[58] Avec l’arrêt Lizotte[47], la Cour suprême place le privilège relatif au litige au même niveau que celui relatif aux indicateurs de police, ainsi que celui du secret professionnel de l’avocat : ;
[33] À mon avis, le privilège relatif au litige se qualifie de privilège générique. Une fois établies les conditions de son application, c’est-à-dire une fois que l’on est en présence d’un document dont « l’objet principal [. . .] est la préparation du litige » (Blank, par. 59) et que ce litige ou un litige connexe est encore en cours « ou peut être raisonnablement appréhendé » (par. 38), il y a une « présomption à première vue d’inadmissibilité » au sens où l’entendait le juge en chef Lamer dans R. c. Gruenke, 1991 CanLII 40 (CSC), [1991] 3 R.C.S. 263 :
Les parties ont eu tendance à établir une distinction entre deux catégories : un privilège prima facie « général » de common law ou un privilège « générique », d’une part, et un privilège « fondé sur les circonstances de chaque cas », d’autre part. Les premiers termes sont utilisés pour désigner un privilège qui a été reconnu en common law et pour lequel il existe une présomption à première vue d’inadmissibilité (lorsqu’il a été établi que les rapports s’inscrivent dans la catégorie) à moins que la partie qui demande l’admission ne puisse démontrer pour quelles raisons les communications ne devraient pas être privilégiées (c.‑à‑d., pour quelles raisons elles devraient être admises en preuve à titre d’exception à la règle générale). [Soulignement omis; p. 286]
[34] De ce point de vue, le privilège relatif au litige s’apparente au privilège relatif au règlement et au privilège de l’indicateur de police, que la Cour a déjà qualifié de privilèges génériques. Comme ces derniers, il est reconnu par les tribunaux depuis longtemps et a été considéré comme comportant une présomption d’immunité de divulgation une fois qu’il est satisfait à ses conditions d’application.
[59] Pour être protégé par le privilège du litige, le document doit avoir été créé principalement pour les fins du litige. S'il a été créé pour d'autres fins et qu'il est utilisé par les avocats d'une partie au litige, il ne sera pas considéré comme privilégié[48] :
If a document was created for a dual purpose, such as to find out the cause of the accident on the one hand and to furnish information to defence counsel on the other, the document is not privileged because it has not then been created wholly or mainly for the purposes of litigation.[49]
[60] Ce qui tombe habituellement dans la catégorie du privilège du litige, aussi appelé « work product », ne sera pas pertinent quant à la défense pleine et entière de l’accusé[50]. Dans O’Connor[51], la juge l’Heureux-Dubé a d’ailleurs mentionné que le ministère public n’est normalement pas tenu de divulguer le « work product », sous réserve de certaines contradictions importantes ou de faits supplémentaires qui n'auraient pas déjà été divulgués à la défense[52].
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