lundi 3 août 2009

Évaluation du risque de récidive

R. c. Maheu, 1997 CanLII 10356 (QC C.A.)

Le sursis ne peut être imposé que si le tribunal est convaincu que le fait pour le délinquant de purger sa peine au sein de la collectivité ne mettra pas en danger la sécurité de celle-ci. Le juge a l'obligation de s'assurer que cet objectif est rencontré.

Plusieurs facteurs peuvent être pris en compte pour décider de cette question. On pourrait à cet égard, s'inspirer des critères reconnus par notre Cour pour la mise en liberté provisoire d'un inculpé en faisant les adaptations nécessaires vu le contexte différent. Le juge Proulx, dans l'arrêt R. c. Rondeau, a énuméré, entre autres:

1) la nature de l'infraction,
2) les circonstances pertinentes de celle-ci, ce qui peut mettre en cause le évènements antérieurs et postérieurs,
3) le degré de participation de l'inculpé,
4) la relation de l'inculpé avec la victime,
5) le profil de l'inculpé, c'est-à-dire, son occupation, son mode de vie, ses antécédents judiciaires, son milieu familial, son état mental,
6) sa conduite postérieurement à la commission de l'infraction,
7) le danger que représente pour la communauté particulièrement visée par l'affaire, la mise en liberté de l'inculpé.

La responsabilité du juge, dans le cadre de l'article 742.1, est d'évaluer le risque de danger d'ordre moral et matériel et de s'assurer que non seulement l'accusé offre des garanties quant à sa réhabilitation mais que la peine assurera le respect de la loi et le maintien d'une société juste, paisible et sûre. Les conditions obligatoires et facultatives dont peut être assortie l'ordonnance de sursis servent d'encadrement pour diminuer le risque que prend le juge en ordonnant un sursis d'emprisonnement.

Le juge qui s'apprête à prononcer une ordonnance de sursis ne saurait toutefois, à mon avis, limiter son examen des principes et objectifs codifiés aux articles 718, 718.1 et 718.2 à la seule étape de la détermination de la peine d'emprisonnement pertinente tout comme il ne saurait considérer isolément un principe tel l'exemplarité ou encore la situation particulière d'un délinquant ou l'absence de circonstances exceptionnelles pour éluder une ordonnance de sursis qui aurait pu être justifiée, compte tenu des conditions posées à l'article 742.1. C'est globalement que devrait être examiné l'ensemble des principes et objectifs lorsqu'il s'agit de déterminer si l'emprisonnement avec sursis est une sanction adéquate. Le juge doit être convaincu que cette peine est suffisamment dissuasive et qu'elle offre au délinquant des garanties quant à sa réhabilitation. Il doit être également convaincu que cette peine est proportionnelle à la gravité de l'infraction ainsi qu'au degré de responsabilité du délinquant et qu'elle dénonce de façon satisfaisante le comportement illégal.

C'est à tort à cet égard que l'emprisonnement avec sursis peut sembler être une sanction clémente dont le seul gagnant serait le délinquant. Si l'on considère que ce dernier purgera la totalité de sa peine dans des conditions parfois très restrictives quant à sa liberté de sorties à l'extérieur de son domicile et astreignantes au plan des services que le délinquant peut être appelé à fournir à son entourage immédiat et à la communauté, si l'on considère surtout que la peine d'emprisonnement reste suspendue comme une épée de Damoclès dans l'éventualité où le délinquant manquerait à ses obligations, il peut s'agir d'une peine plus lourde qu'une brève période d'emprisonnement avec détention.

Par ailleurs, les effets bénéfiques de cette peine pour le délinquant qui doit activement s'impliquer dans un processus de réhabilitation et pour la société qui non seulement peut espérer voir décroître le coût de l'appareil carcéral mais peut exercer un contrôle sur l'exécution de la peine imposée au délinquant, font de cette peine nouvelle un outil privilégié dans la poursuite des buts proposés par le législateur au chapitre de la détermination de la peine.

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