R. c. Lacoursière, 2002 CanLII 41284 (QC C.A.)
[21] À l'aide de cette distinction entre le complot en tant qu'infraction et comme mode de participation, on comprendra que le complot consommé, le refus d'y donner suite et le retrait n'absout pas le conspirateur pour son adhésion au complot: un crime selon l'art. 465 a été commis et les parties à ce complot peuvent en être inculpées.
[22] En sanctionnant cette conduite, le législateur veut éviter que soit réalisée la fin illégale: «The law punishes comspiracy so that the unlawful object is not attained.».
[23] Par ailleurs, c'est en considérant maintenant le complot comme mode de participation criminelle selon le par. 21(2) C.cr. en regard des infractions commises dans la réalisation de la fin illégale, que le retrait ou le désistement d'un des conspirateurs peut lui éviter d'être partie à ces infractions. Ceux et celles qui poursuivent la mise en œuvre de la fin illégale encourront une responsabilité pour les infractions commises.
[24] Le retrait du complot signifie que la personne se dissocie du but commun, avec la conséquence que dans l'application de l'art. 21(2) on ne saurait lui imputer une responsabilité pour les actes qu'elle a renoncé à poser. L'article 21(2) entre en jeu quand l'un des conspirateurs commet une infraction dans la réalisation de la fin commune: le retrait supprime donc la fin commune quant à celui-là. Dans une certaine mesure, les parties au complot sont encouragées à s'en désister pour éviter parfois le pire: le principe est bien ancré dans la jurisprudence.
[25] Déjà dans l'arrêt Henderson v. The King (1948) 91 C.C.C. 97, la Cour suprême du Canada affirmait qu'«it is settled law that a person who has been a party to prosecute a common illegal purpose, may dissociate himself with his original co-conspirators» (p. 107); voir également Miller et autre c. La Reine, 1997 CanLII 309 (C.S.C.), [1997] 2 R.C.S. 680 et R. v. Kirkness, 1990 CanLII 57 (C.S.C.), [1990] 3 R.C.S. 74.
[26] Le principe étant admis, reste à déterminer les conditions de recevabilité du retrait.
[27] À ce sujet, dans les arrêts Henderson et Miller, la Cour suprême du Canada a adopté les propos du juge Sloan dans R. v. Whitehouse, (1941), 75 C.C.C. 65, p. 67-68, qui, en résumé, a formulé les propositions suivantes. Le retrait demeure une question de fait: ce doit être (1) «more than a mere mental change of intention» (2) «where practicable and reasonable there must be timely communication of the intention to abandon the common purpose…», le but étant «to break the chain of causation and responsibility».
[28] En doctrine, les auteurs FORTIN et VIAU, «Traité de droit pénal général» (1982), Les Éditions Thémis Inc., résument ainsi les conditions de recevabilité du retrait:
Il consiste dans l'abandon de la part du co-conspirateur de la poursuite de l'objet du complot. Les tribunaux exigent, en pratique, que celui qui se désiste manifeste son désistement par ses paroles ou sa conduite et signifie d'une façon non équivoque à ses co-conspirateurs qu'ils ne peuvent plus compter sur son aide dans la perpétration de l'objet du complot. (p. 366)
[29] En résumé, le retrait doit (1) survenir en temps utile, soit avant la réalisation de l'objet du complot, (2) être définitif et non équivoque, et (3) être communiqué lorsque cela est possible et raisonnable (CÔTÉ-HARPER, RAINVILLE et TURGEON, «Traité de droit pénal canadien», 4e éd. (1998) Éditions Yvon Blais, p. 864 à 869).
Aucun commentaire:
Publier un commentaire