R c Anderson, 2011 NBBR 317 (CanLII)
Lien vers la décision
44. Ce ne sont pas toutes les déclarations faites par un accusé qui sont visées par la règle des confessions. Les seules déclarations dont il faut examiner le caractère volontaire sont celles qui sont faites à des personnes en autorité. En conséquence, la question préliminaire relative aux déclarations faites par l’accusée à Mme Aube et à Mme Wheelan consiste à savoir si, en tant qu’ambulancières, elles étaient des personnes en autorité. Je vais commencer par examiner les circonstances des déclarations faites aux ambulancières.
50. L’analyse que doit effectuer un juge de première instance siégeant en voir-dire pour déterminer si une déclaration a été faite à une personne en autorité est expliquée dans l’arrêt R. c. Hodgson, 1998 CanLII 798 (CSC), [1998] 2 R.C.S. 449. Dans cet arrêt, la Cour suprême du Canada a déclaré, aux par. 36 et 37, que le juge du procès doit déterminer si l’accusé croyait raisonnablement que la personne qui a reçu la déclaration agissait pour le compte de la police ou des autorités chargées des poursuites. On doit résoudre cette question en considérant ce que l’accusé croyait subjectivement. Toutefois, il existe aussi un élément objectif en ce que l’accusé devait avoir un motif raisonnable de croire que la personne qui a reçu la déclaration était une personne en autorité (voir R. c. Hodgson, au par. 48).
51. L’aspect subjectif de cette recherche impose à l’accusé une charge de présentation. Dans l’arrêt R. c. Grandinetti, 2005 CSC 5 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 27, la juge Abella a affirmé, aux par. 37 et 38 :
Dans l’arrêt Hodgson, notre Cour a défini la procédure à suivre pour décider de la recevabilité d’un aveu. Premièrement, l’accusé a la charge de présentation concernant l’existence d’une véritable question en litige justifiant un examen quant à savoir si, au moment d’avouer, il croyait avoir affaire à une personne en situation d’autorité. Une « personne en situation d’autorité » s’entend généralement de celle qui participe à l’arrestation, à la détention, à l’interrogatoire ou à la poursuite de l’accusé. Il incombe ensuite au ministère public de prouver hors de tout doute raisonnable que l’accusé ne croyait pas raisonnablement que son interlocuteur était une personne en situation d’autorité ou, s’il le croyait, que la déclaration était volontaire. La question de savoir si l’aveu était volontaire ne se pose que si le tribunal conclut au préalable qu’il a été fait à une « personne en situation d’autorité ».
La notion de « personne en situation d’autorité » est très subjective et repose sur la perception qu’a l’accusé de la personne à qui il fait la déclaration. Il faut se demander si, compte tenu de sa perception du pouvoir de son interlocuteur d’influencer la poursuite, l’accusé croyait qu’il subirait un préjudice s’il refusait de faire une déclaration ou qu’il bénéficierait d’un traitement favorable s’il parlait.
52. L’accusée n’a pas témoigné en voir-dire. En conséquence, il n’existe aucune preuve directe de ce que croyait Mme Anderson. À mon avis, celle-ci ne s’est pas acquittée de sa charge de présentation préliminaire en montrant qu’elle croyait que les ambulancières étaient des personnes en autorité.
53. Même si elle avait établi qu’elle a cru subjectivement que les ambulancières étaient des représentantes de l’État, une telle croyance ne pouvait pas être raisonnablement entretenue. À mon avis, les circonstances dans lesquelles la déclaration a été faite ne permettent pas de conclure que Mme Anderson pouvait raisonnablement croire que l’une des ambulancières, ou les deux, agissaient de concert avec la police ou les poursuivants ou en étaient les représentantes. Je conclus que les questions posées à Mme Anderson par les ambulancières avaient pour but de favoriser son traitement médical. En particulier, j’accepte le témoignage des ambulancières quand elles disent qu’il est médicalement pertinent de déterminer qui conduisait le véhicule. Ni Mme Aube ni Mme Wheelan ne suivaient des instructions du caporal Dibblee ou de tout autre agent de police en posant les questions à Mme Anderson ou en faisant connaître les réponses à la police. J’accepte le témoignage du caporal Dibblee quand il dit ne pas avoir expressément demandé à Tracy Aube de charger l’infirmière de l’hôpital d’obtenir un échantillon de sang. En fait, la preuve indique qu’il n’a pas fait une telle demande. Même si on accepte le témoignage de Mme Aube voulant qu’une demande ait été faite par le caporal Dibblee, ce qu’il demandait était simplement de mentionner à l’infirmière de l’hôpital que la GRC demanderait un échantillon de sang. Cela ne suffit pas pour établir que Tracy Aube agissait comme représentante du caporal Dibblee lorsque Mme Anderson a fait les déclarations. Il n’y avait pas de procédure ni de plan convenu entre le caporal Dibblee et les ambulancières visant la communication de renseignements à la police. Vu l’ensemble des circonstances, je conclus que ni Tracy Aube ni Courtney Wheelan n’étaient des personnes en autorité au moment où Mme Anderson leur a fait les déclarations. En conséquence, ces déclarations sont admissibles.
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