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dimanche 4 mars 2018

Comment apprécier la demande d’échantillon d’haleine au moyen de l’ADA devant être fournie « immédiatement » et l'exercice du droit à l'avocat

R. c. Duval, 2016 QCCQ 4881 (CanLII)

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[38]   L’article 254(2)b) du Code criminel prévoit que la demande d’échantillon d’haleine au moyen de l’ADA doit être fournie « immédiatement ».
[39]   À ce sujet, l’honorable Sophie Bourque dans Gaétani mentionne :
36.       L'exigence d'immédiateté est bicéphale : elle s'adresse tant à l'agent de la paix qui doit formuler un ordre de fournir un échantillon d'haleine immédiatement lorsqu'il acquiert des soupçons quant à la présence d'alcool dans l'organisme du conducteur, qu'au conducteur qui doit immédiatement obtempérer à cet ordre, obligation qui justifie qu'il ne puisse communiquer avec un avocat avant de s'exécuter.( Voir Bernshaw).
37.       Lorsque l'exigence d'immédiateté imposée à l'un et l'autre s'exécute de façon simultanée, le respect de l'art. 254(2)b) C.cr. ne pose aucun problème. C'est le cas lorsque l'agent de la paix a en sa possession un ADA fonctionnel dans son véhicule patrouille.
(…)
39.       Si l'exigence d'immédiateté n'est pas respectée par l'agent de la paix, alors la prise d'un échantillon d'haleine constitue une fouille abusive contraire à l'article 8 de la Charte et il peut s'en suivre une exclusion du résultat du test de détection et possiblement du test d'alcoolémie.
(…)
41.       Par contre, lorsque l'agent de la paix n'est pas en possession d'un ADA, provoquant ainsi un délai d'attente pour l'arrivée de l'appareil, la situation est différente. Cette difficulté opérationnelle peut devenir une difficulté constitutionnelle, lorsque l'attente de l'ADA rendant impossible la simultanéité des obligations de l'un et de l'autre crée potentiellement une occasion réaliste pour le conducteur détenu de consulter un avocat durant cette attente. Si une telle occasion existe et que l'agent de la paix n'informe pas le conducteur de son droit de consulter un avocat et ne lui facilite pas une telle communication, alors l'ordre donné ne respecte pas le caractère d'immédiateté et il pourrait avoir une violation des articles 8 et 10b) de la Charte et une exclusion possible de la preuve recueillie (Voir R c. Côté 1992 CanLII 2778 (ON CA)[1992] O.J. No.7 (C.A.Ont.) et Woods et R . v. George 2004 CanLII 6210 (ON CA)2004 CanLII 6210).
(Nos soulignements)
[40]   Cette position de la juge Bourque est également celle adoptée par son collègue le juge Brunton dans Cling. Le juge Chapdelaine dans Salvail démontre qu’il s’agit de l’état de la jurisprudence depuis plusieurs années, en reprenant les propos du juge Fish dans Woods:
25.       Dans l'arrêt Woods, le juge Fish précise que :
-  l'exigence d'immédiateté prévue au paragraphe 254(2) du Code criminel est inextricablement liée à l'intégrité constitutionnelle de cette disposition. Elle justifie les fouilles, perquisitions et saisies abusives, la détention arbitraire et l'atteinte au droit à l'assistance d'un avocat, malgré les articles 89 et 10 de la Charte (par. 29);
-  il y a exigence d'immédiateté implicite relative à l'ordre du policier de fournir un échantillon d'haleine et exigence d'immédiateté explicite en ce qui a trait à l'obéissance à l'ordre susmentionné (par. 14).
[41]   L’arrêt Quansah établit les principes applicables qui ont été traduits ainsi par le juge Marco LaBrie dans Lauzier :
108.    La Cour d'appel de l'Ontario, dans R. c. Quansah, après avoir passé en revue la jurisprudence, et après avoir réitéré les raisonnements des arrêts ThomsenGrantCôtéBernshawGeorgeWoods, résumait sommairement en cinq paragraphes l'état du droit sur la question de l'exigence d'immédiateté de l'article 254(2) Code criminel. La Cour résumait l'état du droit comme suit :
"En somme, je conclus que l'exigence d'immédiateté de l'article 254(2) nécessite que les tribunaux prennent en considération les cinq éléments suivants :
Premièrement, l'analyse de l'exigence d'immédiateté doit toujours tenir compte du contexte. Les tribunaux doivent garder à l'esprit l'intention du Parlement d'établir un équilibre entre l'intérêt public à éliminer la conduite avec facultés affaiblies et la nécessité de protéger les droits individuels garantis par la Charte.
Deuxièmement, l'agent(e) doit formuler un ordre promptement, dès qu'il ou elle soupçonne raisonnablement la présence d'alcool dans l'organisme de la personne qui a conduit. Par conséquent, l'exigence d'immédiateté débute dès l'existence des soupçons raisonnables.
Troisièmement, le terme "immédiatement" implique un ordre prompt et l'obtempération immédiate, quoique, dans certaines circonstances inhabituelles, une interprétation plus souple puisse être adoptée. En fin de compte, le délai écoulé entre la formation de soupçons raisonnables, la formulation de l'ordre et la réponse de la personne détenue d'obtempérer ou non, ne doit pas être plus long que ce qui est raisonnablement nécessaire pour permettre à l'agent de s'acquitter de son devoir en conformité avec l'article 254(2) du Code criminel.
Quatrièmement, l'exigence d'immédiateté doit tenir compte de l'ensemble de toutes les circonstances. Celles-ci peuvent comprendre un délai raisonnablement nécessaire lorsque les tests d'haleine ne peuvent être effectués sur-le-champ en raison de la non-disponibilité immédiate d'un ADA, ou lorsqu'un court délai est nécessaire pour s'assurer de la fiabilité du résultat obtenu lors d'un test de dépistage immédiat par un ADA, ou lorsqu'un court délai est nécessaire en raison de préoccupations (légitimes de sécurité clairement exprimées) de sécurité légitimes et clairement exprimées. Il ne s'agit-là que d'exemples de délais qui n'excèdent pas ce qui est raisonnablement nécessaire pour permettre à l'agent(e) de s'acquitter de son devoir. Tout délai qui n'est pas ainsi justifié ne respecte pas l'exigence d'immédiateté.
Cinquièmement, une des circonstances dont il faut tenir compte est celle de savoir, si le policier pouvait, de façon réaliste, respecter l'obligation de mettre en application les droits du détenu prévus à l'alinéa 10b) de la Charte avant d'exiger l'échantillon. Si oui, l'exigence d'immédiateté n'est pas respectée." [traduction]
(Références omises)
[42]   Conformément aux principes constitutionnels établis par la Cour suprême dans l’arrêt Suberu, lorsque la détention est nécessaire, celle-ci doit être de la plus courte durée possible.
[43]   À défaut, les autres droits constitutionnels de l’accusé en seront affectés, dont celui d’être informé sans délai de son droit à consulter un avocat.
[44]   Le droit à l’avocat prévu à l’alinéa 10b) de la Charte comprend deux principaux volets dont le premier est d’en être promptement informé. Dans Bartle, le juge Lamer mentionnait :
Il est maintenant bien établi que l'al. 10b) exige que la personne mise en état d'arrestation ou en détention (la "personne détenue") soit promptement informée de son droit d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat.
[45]   Il est également important de rappeler l’objet de ce droit fondamental :
 L'objet du droit à l'assistance d'un avocat que garantit l'al. 10b) de la Charte est de donner à la personne détenue la possibilité d'être informée des droits et des obligations que la loi lui reconnaît et, ce qui est plus important, d'obtenir des conseils sur la façon d'exercer ces droits et de remplir ces obligations: R. c. Manninen, 1987 CanLII 67 (CSC)[1987] 1 R.C.S. 1233, aux pp. 1242 et 1243. Cette possibilité lui est donnée, parce que, étant détenue par les représentants de l'État, elle est désavantagée par rapport à l'État. Non seulement elle a été privée de sa liberté, mais encore elle risque de s'incriminer. Par conséquent, la personne "détenue" au sens de l'art. 10 de la Charte a immédiatement besoin de conseils juridiques, afin de protéger son droit de ne pas s'incriminer et d'obtenir une aide pour recouvrer sa liberté: Brydges, à la p. 206; R. c. Hebert, 1990 CanLII 118 (CSC)[1990] 2 R.C.S. 151, aux pp. 176 et 177; et Prosper. L'alinéa 10b) habilite la personne détenue à recourir de plein droit à l'assistance d'un avocat "sans délai" et sur demande. Comme l'a dit notre Cour dans l'arrêt Clarkson c. La Reine, 1986 CanLII 61 (CSC)[1986] 1 R.C.S. 383, à la p. 394, le droit à l'assistance d'un avocat prévu à l'al. 10b) vise à assurer le traitement équitable dans le processus pénal des personnes arrêtées ou détenues.

Le pouvoir de détention pour fins d'enquête

R. c. Lessard, 2007 QCCS 4793 (CanLII)

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[20]            L'arrêt de principe sur le pouvoir de détention pour fins d'enquête est la décision de la Cour suprême du Canada dans R. c. Mann qui consacre avec certains ajustements la décision de la Cour d'appel de l'Ontario dans Simpson.  L'arrêt Mann a été récemment appliqué dans le contexte d'un appel d'urgence au 9-1-1 au sujet d'armes à feu dans R. c. Clayton.
[21]            Le pouvoir de détention pour fins d'enquête a fait l'objet, avant et après la décision dans Mann, de plusieurs décisions de notre Cour d'appel. La doctrine sur ce sujet témoigne des débats vigoureux qu'a engendré la reconnaissance de ce pouvoir de même que les défis entourant son application.  
[22]            Dans l'arrêt Mann, le juge Iacobucci énonce la nature de l'exercice de pondération des droits respectifs de l'État et de l'individu qui doit être effectué dans le contexte d'une intervention policière :
Sauf règle de droit à l’effet contraire, les gens sont libres d’agir comme ils l’entendent. En revanche, les policiers (et, d’une manière plus générale, l’État) ne peuvent agir que dans la mesure où le droit les autorise à le faire.  La vitalité d’une démocratie ressort de la sagesse manifestée par celle-ci lors des moments critiques où l’action de l’État intersecte et menace d’entraver des libertés individuelles.
Le domaine des enquêtes criminelles est incontestablement celui où ces intérêts entrent le plus fréquemment en collision.  Les droits garantis par la Charte n’existent pas dans l’abstrait; ils entrent en jeu pratiquement à toutes les étapes de l’intervention policière.  Comme les policiers ont pour mission de protéger la paix publique et d’enquêter sur les crimes, ils doivent être habilités à réagir avec rapidité, efficacité et souplesse aux diverses situations qu’ils rencontrent quotidiennement aux premières lignes du maintien de l’ordre.
[23]            Les «principes directeurs régissant l'utilisation du pouvoir des policiers en matière de détention aux fins d'enquête» sont résumés par le juge Iacobucci dans l'arrêt Mann.  On peut les énoncer ainsi:
1)     il n'existe pas de pouvoir général de détention pour fins d'enquête mais plutôt un pouvoir limité;
2)     les détentions pour fins d’enquête doivent reposer sur des motifs raisonnables;
3)     la détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suivant une considération objective de l’ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu’il existe un lien clair entre l’individu qui sera détenu et une infraction criminelle récente ou en cours;
4)     la question des motifs raisonnables intervient dès le départ dans cette détermination, car ces motifs sont à la base des soupçons raisonnables du policier que l’individu en cause est impliqué dans l’activité criminelle visée par l’enquête;
5)     le caractère globalement non abusif de la décision de détenir une personne doit également être apprécié en tenant compte de l’ensemble des circonstances; principalement dans quelle mesure il est nécessaire au policier de porter atteinte à une liberté individuelle afin d’accomplir son devoir, la liberté à laquelle il est porté atteinte, ainsi que la nature et l’étendue de cette atteinte;
6)     il n’y a pas nécessairement correspondance entre les pouvoirs dont disposent les policiers et les devoirs qui leur incombent;
7)     bien que, suivant la common law, les policiers aient l’obligation d’enquêter sur les crimes, ils ne sont pas pour autant habilités à prendre n’importe quelle mesure pour s’acquitter de cette obligation;
8)     les droits relatifs à la liberté individuelle constituent un élément fondamental de l’ordre constitutionnel canadien;
9)     il ne faut donc pas prendre les atteintes à ces droits à la légère et, en conséquence,
10) les policiers n’ont pas carte blanche en matière de détention; 
11)  le pouvoir de détention ne saurait être exercé sur la foi d’une intuition, ni donner lieu dans les faits à une arrestation;
12)  les détentions effectuées aux fins d’enquête doivent être brèves et les personnes détenues n’ont pas l’obligation de répondre aux questions du policier.
[24]            L'arrêt Mann a clarifié un aspect important relatif aux devoirs et aux pouvoirs des policiers en matière d'enquête et de prévention du crime.  Dans l'état actuel du droit, les pouvoirs dont disposent les policiers ne correspondent pas nécessairement aux devoirs qui leur incombent.   Seule une intervention législative pourrait modifier la pondération actuelle entre les devoirs et les pouvoirs des policiers.
[25]            L'article 48 de la Loi sur la police et la common law imposent des devoirs aux policiers, devoirs dont découle un pouvoir limité de détention pour fins d'enquête. Ces obligations qui leur incombent ne leur permettent toutefois pas de recourir à n'importe quelle mesure.  L'intervention policière doit être raisonnablement nécessaire pour accomplir le devoir d'enquête et de prévention du crime, compte tenu de l'ensemble des circonstances. 
[26]            On peut résumer le pouvoir de détention pour fins d'enquête énoncé dans Mann en ces termes:
1)     les policiers peuvent détenir une personne pour fins d’enquête s’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner, à la lumière de toutes les circonstances, que cette personne est impliquée dans un crime donné;
2)     la détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suite à une évaluation objective de l’ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu’il existe un lien clair entre l’individu qui sera détenu et une infraction criminelle récente ou en cours.
[27]            Le caractère raisonnablement nécessaire de la détention exige l'analyse de «la mesure dans laquelle il est nécessaire au policier de porter atteinte à une liberté individuelle afin d’accomplir son devoir, la liberté à laquelle il est porté atteinte, ainsi que la nature et l’étendue de cette atteinte».
[28]            Dans R. c. Clayton, la juge Abella, qui rédige l'opinion principale, décrit ainsi la nature de cet examen :
L’examen tiendra compte de la nature de la situation, y compris la gravité de l’infraction, des renseignements sur le suspect ou sur le crime dont disposaient les policiers et de la mesure dans laquelle la détention était une mesure raisonnablement adaptée à ces éléments, notamment en ce qui a trait à l’emplacement et au moment.  Il faut donc mettre en balance l’importance du risque pour la sécurité du public en général ou d’une personne en particulier avec le droit à la liberté des citoyens, pour déterminer si l’interception n’a porté atteinte à la liberté que dans la mesure raisonnablement nécessaire pour faire face au risque.
[29]            Avant d'aborder l'application des deux critères de l'arrêt Mann, il convient de rappeler la prudence avec laquelle il faut aborder le pouvoir de détention pour fins d'enquête. 
[30]            Dans l'arrêt R. c. Vigneault le juge Rothman formule cette règle de prudence comme suit:
While I acknowledge, in principle, the common law rule permitting detention and warrantless searches based upon articulable cause for suspicion that a person is involved in criminal activity that is being investigated by the police, I am of the view that the principle must be applied with circumspection and restraint with due regard for the caution expressed by Mr Justice Doherty in the Simpson case (R. v. Polashek (1999) 1999 CanLII 3714 (ON CA)25 C.R. (5th) 183, 193 (Ont. C.A.).

La personne arrêtée ne jouit pas d'un droit absolu à l'avocat de son choix

Émond c. R., 2012 QCCA 2090 (CanLII)

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[8]         Quant au droit à l'assistance d'un avocat, il y a lieu de rappeler que si celui-ci permet à l'accusé d'indiquer l'avocat qu'il désire consulter, il demeure que le droit de consulter un avocat de son choix n'est pas absolu, comme le soulignait le regretté juge Proulx dans l'arrêt R. c. Dozois, 1996 CanLII 5986 (QC CA)1996 CanLII 5986 (QCCA) :
La personne arrêtée ne jouit pas d'un droit absolu à l'avocat de son choix et elle doit agir promptement pour en consulter un autre au besoin.
[9]         De plus, comme le souligne la Cour d'appel d'Ontario, dans l'affaire R. v. Richfield2003 CanLII 52164 (ON CA)[2003] O.J. No. 3230, la personne détenue doit agir de façon diligente dans l'exercice de son droit de consulter un avocat :
[7] Whether legal advice has been sought diligently by the detained person depends on the context of the situation. The element of reasonableness in furnishing a detainee with the opportunity to retain and instruct counsel necessarily excludes the concept of an absolute right to counsel of choice. As Lamer J. (as he then was) noted in R. v. Ross 1989 CanLII 134 (CSC), 1989 CanLII 134 (SCC), (1989), 46 C.C.C. (3d) 129 (S.C.C.) at 135
Although an accused or detained person has the right to choose counsel, it must be noted that, as this court said in R. v. Tremblay1987 Can LII 28 (SCC), (1987), 1987 CanLII 28 (CSC)37 C.C.C. (3d) 565 (S.C.C.), a detainee must be reasonably diligent in the exercise of these rights, and if he is not, the correlative duties imposed on the police and set out in Mannien 1987 CanLII 67 (CSC), 1987 CanLII 67 (SCC), (1987), 34 C.C.C. (3d) 385 (S.C.C.), are suspended. Reasonable diligence in the exercise of the right to choose one's counsel depends upon the context facing the accused or detained person.  On being arrested, for example, the detained person is faced with an  immediate need for legal advice and must exercise reasonable diligence accordingly.  By contrast, when seeking the best lawyer to conduct a trial, the accused person faces no such immediacy. Nevertheless, accuses or detained persons have a right to choose their counsel and it is only if the lawyer chosen cannot be available within a reasonable time that the detainee or the accused should be expected to exercise the right to counsel by calling another lawyer.
[soulignement ajouté]

Les obligations que l'alinéa 10 b) de la Charte impose aux policiers

R. c. Dozois, 1996 CanLII 5986 (QC CA)

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La Cour Suprême a souligné, à maintes reprises, que l'alinéa 10 b) de la Charte impose aux policiers des obligations non seulement pour informer une personne arrêtée de ses droits mais aussi quant à la mise en application ou l'exercice de ces droits.  Nous sommes ici concernés par ce second volet de la règle.

                             Ainsi, lorsqu'une personne arrêtée a exprimé le désir d'exercer son droit à l'assistance d'un avocat, après en avoir été dûment informée, deux obligations incombent à l'État: (1) fournir une possibilité raisonnable à la personne arrêtée d'exercer son droit et (2) surseoir à l'enquête ou s'abstenir de prendre d'autres mesures jusqu'à ce que la personne ait eu cette possibilité raisonnable.  C'est ce qui a été réitéré dans R. c. Prosper1994 CanLII 65 (CSC),[1994] 3 R.C.S. 236.

                             Comme on l'a noté dans cet arrêt, ce qui constitue une possibilité raisonnable dépendra du cas d'espèce.

                             Avec respect pour l'opinion contraire, j'estime qu'en l'espèce les policiers n'ont pas respecté ces obligations.  Comme la Cour Suprême l'a affirmé dans R. c. Ross1989 CanLII 134 (CSC)[1989] 1 R.C.S. 3, il ne suffit pas nécessairement qu'un premier appel téléphonique ait été fait mais sans succès pour conclure que la possibilité raisonnable de rejoindre un avocat a été de fait accordée.  Il importe cependant que la personne arrêtée fasse preuve de diligence raisonnable dans l'exercice de ses droits (R. c. Tremblay1987 CanLII 28 (CSC)[1987] 2 R.C.S. 435).

                             La personne arrêtée ne jouit pas d'un droit absolu à l'avocat de son choix et elle doit agir promptement pour en consulter un autre au besoin.

                             Je peux difficilement comprendre l'empressement des policiers, après le premier appel téléphonique, à procéder au premier prélèvement, alors qu'ils avaient amplement le temps pour ce faire; je comprends encore moins cet empressement quand après avoir obtenu ce premier échantillon, ils croient eux-mêmes nécessaire de remettre à l'appelant un bottin téléphonique des avocats avant de le sommer de fournir un second prélèvement.  Cette attitude me convainc qu'ils ont tenté de compléter les modalités de leur obligation première, après le premier prélèvement.  Comme l'a écrit le juge Lamer (avant qu'il ne devienne Juge en Chef) dans l'arrêt Ross, supra:

Néanmoins, l'accusé ou le détenu a le droit de choisir son avocat et ce n'est que si l'avocat choisi ne peut être disponible dans un délai raisonnable qu'on doit s'attendre à l'assistance d'un avocat en appelant un autre avocat.



                             L'intimé invoque la renonciation de l'appelant à l'exercice de ses droits, mais il faut préciser à quel moment cette renonciation a eu lieu.  De fait, c'est après le premier test et une dernière tentative infructueuse de trouver le numéro de téléphone de la résidence de son avocat que l'appelant a alors déclaré qu'il attendra son retour à sa résidence pour communiquer avec son avocat.  C'est donc après le premier prélèvement que l'on doit considérer la renonciation.

                             Je ne peux donc suivre le juge de la Cour supérieure quand il s'exprime comme suit:


La règle, il faudra quand même qu'un jour qu'on la comprenne, existe dans un premier but pour permettre à un citoyen d'avoir recours immédiatement à un avocat afin de savoir quels sont ses droits et ses obligations au poste de police, compte tenu des motifs de sa présence à cet endroit.  Mais si l'obtention de (inaudible) s'avère impossible sans que ce soit le résultat d'un quelconque comportement policier, c'est regrettable à dire mais la terre continuera de tourner.  Et c'est ce qui est arrivé dans la cause en litige.


                             En résumé, j'en conclus que d'une part on n'a pas offert à l'appelant une possibilité raisonnable de rejoindre son avocat et, d'autre part, on devait attendre qu'il ait eu cette possibilité raisonnable pour procéder au prélèvement du premier échantillon:  son droit à l'avocat a donc été enfreint et se pose dès lors la question de l'exclusion de la preuve obtenue suite au prélèvement du premier échantillon.  Je fais ici abstraction du second prélèvement et des autres éléments de preuve obtenus à la suite de sa renonciation.

L’absence d’un plan de poursuite réaliste

R. c. Antoine, 2017 QCCS 1325 (CanLII)

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[184]     Dans l’arrêt R. c. Auclair, la Cour suprême affirme que la poursuite doit concevoir un « plan [de poursuite] réaliste pour que [l]es accusations donnent lieu à un procès et que celui-ci se déroule dans un délai raisonnable ».
[185]     Dans l’arrêt Jordan, la Cour suprême formule les commentaires suivants à ce sujet :
[79]      Il convient de rappeler que ces décisions relèvent entièrement de l’expertise du juge de première instance. Bien entendu, celui-ci voudra également se pencher sur la question de savoir si le ministère public, qui a introduit ce qui semblait raisonnablement être une poursuite complexe, a établi et suivi un plan concret pour réduire au minimum les retards occasionnés par une telle complexité (R. c. Auclair2014 CSC 6 (CanLII),[2014] 1 R.C.S. 83, par. 2). S’il ne l’a pas fait, le ministère public ne sera pas en mesure d’établir l’existence de circonstances exceptionnelles, parce qu’il ne pourra pas démontrer que les circonstances en question étaient indépendantes de sa volonté. Dans le même ordre d’idées, et pour la même raison, le ministère public pourrait vouloir se demander si l’existence de multiples accusations pour la même conduite ou si le fait de juger plusieurs coaccusés en même temps a pour effet de compliquer indûment l’instance. Même si le tribunal ne joue aucun rôle de surveillance à l’égard de telles décisions, l’avocat du ministère public doit être conscient du fait que tout délai qui découle de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du poursuivant doit respecter les droits de l’accusé protégés par l’al. 11b) (voir, p. ex., Vassell). Comme la Cour l’a affirmé dans R. c. Rodgerson,2015 CSC 38 (CanLII)[2015] 2 R.C.S. 760 :
Certes, il est loisible au ministère public d’intenter des poursuites lorsque la preuve permettrait à un jury raisonnable de déclarer l’accusé coupable. Toutefois, une sorte d’analyse de rentabilité servirait également le système de justice. Lorsque les autres accusations ou les accusations plus sévères sont d’importance secondaire et que la poursuite relative à ces accusations nécessiterait un procès et des directives au jury beaucoup plus complexes, le ministère public devrait sérieusement se demander si l’intérêt public serait mieux servi en décidant dès le départ de ne pas intenter de poursuite relativement aux accusations d’importance secondaire, ou en décidant de ne pas y donner suite lorsque la preuve au procès est complète. [par. 45]
[80]      Lorsque le juge conclut que l’affaire était particulièrement complexe, de sorte que sa durée était justifiée, le délai est jugé raisonnable et aucun arrêt des procédures n’est ordonné. Aucune autre analyse n’est nécessaire.
[81]      En termes clairs, la présence de circonstances exceptionnelles sera le seul fondement permettant au ministère public de s’acquitter du fardeau qui lui incombera de justifier un délai qui excède le plafond établi. Comme nous l’avons vu, une circonstance exceptionnelle peut découler d’un événement distinct (comme une maladie, une procédure d’extradition ou un imprévu au procès) ou de la complexité d’une cause. La gravité de l’infraction ne peut servir à justifier le délai, même si les causes plus complexes seront souvent celles qui mettent en cause des accusations graves, comme le terrorisme, le crime organisé et les activités liées à une organisation criminelle. Les délais institutionnels chroniques ne peuvent non plus servir de fondement au dépassement du plafond. Fait peut-être plus important encore, l’absence de préjudice ne peut en aucun cas servir à justifier des délais lorsque le plafond est dépassé. Quand il s’est écoulé autant de temps, seules des circonstances véritablement indépendantes de la volonté du ministère public et auxquelles celui-ci ne pouvait remédier peuvent donner une excuse suffisante pour justifier le délai prolongé.
[Le soulignement est ajouté]
[186]     Selon le Guide du Service fédéral des poursuites, le plan de l’enquête criminelle doit donner lieu à un plan de poursuite qui puisse être gérer sur la plan juridique (« legally manageable »).
[187]     L’exigence formulée par la Cour suprême quant à l’existence d’un plan de poursuite réaliste de nature à favoriser la tenue d’un procès dans un délai raisonnable amène les accusés à faire valoir que l’inexistence d’un tel plan dans la présente affaire explique la source ou la raison des délais.
[188]     À cet égard, l’envoi de l’ébauche d’une liste de témoins et d’un projet d’admissions le 11 avril 2014, soit trois jours après la première conférence préparatoire et avant la tenue de l’enquête préliminaire, réfute complètement la position des accusés.  
[189]     L’absence d’une réponse formelle de leur part tend à établir qu’ils en étaient satisfaits.
[190]     Rappelons qu’à ce moment, la Cour d’appel du Québec avait rendu, un an plus tôt, sa décision dans l’affaire Auclair où elle formulait déjà l’avis que la poursuite doit élaborer un tel plan de poursuite.
[191]     Si les accusés s’estimaient insatisfaits du rythme de progression du dossier ou de l’absence d’un plan de poursuite réaliste, l’opportunité de le faire leur était spécifiquement offerte par la poursuite dans sa communication par courriel. Ils ne s’en sont pas prévalus.
[192]     Leurs critiques actuelles apparaissent, encore une fois, le fruit d’une analyse rétrospective qui s’appuie sur le bénéfice que procure le recul.

Revue des principes en matière de divulgation de la preuve

R. c. Antoine, 2017 QCCS 1325 (CanLII)

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[151]     Dans l’arrêt R. c. Dixon, la Cour suprême reconnait que « [l]a nature même du processus de divulgation l’expose à l’erreur humaine et à la contestation ».
[152]     Le processus de communication de la preuve était imparfait dans la présente affaire, mais le dossier ne révèle pas que la poursuite ait été négligente ou insouciante à cet égard.
[153]     Certes, le Tribunal a dû prononcer une ordonnance pour rendre la communication de la preuve facilement accessible de manière électronique.
[154]     Cependant, les imperfections ou erreurs dans la communication de la preuve ne paraissent pas avoir été la source de quelques délais que ce soit à l’enquête préliminaire ou dans la gestion de l’instance en préparation du procès.
[155]     La communication de la preuve s’est réalisée, jusqu’à maintenant, d’une manière soutenue et le rythme de celle-ci n’entrave pas la gestion efficace et équitable de l’instance.
[156]     De plus, compte tenu des délais institutionnels importants auxquels les parties sont confrontées, on ne peut conclure que les problèmes entourant la communication de la preuve expliquent ou constituent la source des délais dans la présente affaire.
[157]     Cette question fait l’objet de l’attention de la Cour d’appel dans l’arrêt Gariépy c. Autorité des marchés financiers.
[158]     Le juge Mainville aborde la question de la manière suivante :
[62]      Avec respect, la question n’est pas de savoir si une communication de preuve tardive est un manquement ou non à l’obligation de divulguer, mais plutôt si les délais qui résultent d’une communication tardive doivent être qualifiés de délais inhérents, institutionnels ou imputables à des actes du ministère public aux fins de l’analyse sous le paragraphe 11b) de la Charte.
[63]      Tel que le juge Sopinka le signalait dans R. c. Morin, les délais de communication de la preuve propres à chaque affaire sont des délais inhérents :
Outre la complexité d'une affaire, il existe des délais inhérents qui sont communs à presque toutes les affaires. L'intimée a décrit ces activités comme des [TRADUCTION] « délais préparatoires ». Peu importe la manière dont on désigne ces délais, ils sont constitués d'éléments comme le recours aux services d'un avocat, les audiences en matière de cautionnement, les documents de la police et de l'administration, les communications de la preuve, etc. Tous ces éléments peuvent ou non être nécessaires dans une affaire en particulier mais chacun d'entre eux prend un certain tempsSi le nombre et la complexité de ces éléments augmentent, la longueur du délai raisonnable augmente également. De même, moins il y a d'éléments nécessaires et plus chacun d'entre eux est simple, le délai devrait être court.
[64]      Toutefois, le juge Sopinka souligne aussi que les délais résultant des défauts ou des retards en matière de communication de preuve incombent au ministère public. Ces délais « comprennent les demandes d'ajournement par le ministère public, le défaut ou le retard en matière de communication de la preuve, les requêtes en renvoi devant une autre cour, etc. ».
[65]      D’ailleurs, la juge en chef McLachlin s’exprime comme suit dans R. c. MacDougall :
Le ministère public a la responsabilité de traduire les accusés en justice: [R. c.] Askov, [1990 CanLII 45 (CSC)[1990] 2 R.C.S. 1199]. Cette responsabilité inclut l'obligation de veiller à ce que, une fois engagées, les procédures judiciaires ne soient pas indûment retardées. […] Les demandes d'ajournement faites par le ministère public et le temps mis à communiquer la preuve sont des exemples de délais qui sont reprochés au ministère publicdans l'appréciation du caractère raisonnable du délai global: voir [R. c.] Morin, [1992 CanLII 89 (CSC)[1992] 1 R.C.S. 771].
[66]      Si cet extrait de R. c. MacDougall laisse entendre que tous les délais de communication de la preuve incombent au ministère public, il faut nuancer ces propos en tenant compte de la référence faite par la juge McLachlin à l’affaire R. c. Morin et les propos qu’y tient le juge Sopinka, lesquels sont reproduits ci-dessus.
[67]      Dans R. c. Godin, le juge Cromwell s’exprime comme suit quant à la qualification d’un délai à la suite d’un retard important à communiquer une preuve pertinente :
[6] Des échantillons ont été prélevés sur la victime par écouvillonnage vaginal le lendemain des infractions reprochées, soit en mai 2005. Cependant, ce n'est que près de neuf mois plus tard, seulement quatre jours avant la date fixée pour le début du procès à la mi-février 2006, que le ministère public a reçu un rapport du Centre des sciences judiciaires (« CSJ ») révélant les résultats de l'analyse génétique. La raison pour laquelle il a fallu neuf mois pour obtenir et communiquer les résultats de l'analyse n'a jamais été expliquée.
[11] Vu les incompatibilités possibles entre les déclarations de la plaignante et la preuve criminalistique, le ministère public s'est abstenu, avec raison, de mettre en doute l'importance potentielle de la preuve ou d'insister pour que le procès débute malgré la communication tardive. Rien ne laisse croire que l'avocat du ministère public ait retardé la communication ou qu'il ait provoqué ce retard par sa faute de quelque façon que ce soit. Le retard demeure néanmoins attribuable au ministère public. C'est en effet au ministère public qu'il incombe de mener un accusé à son procès et de fournir les installations et le personnel nécessaires pour que les inculpés soient jugés dans un délai raisonnable : R. c. Askov1990 CanLII 45 (CSC)[1990] 2 R.C.S. 1199, p. 1225. Il lui incombe en outre d'expliquer les retards inhabituels attribuables aux experts en criminalistique. En l'espèce, il n'a offert aucune explication.
[68]      Des propos similaires sont tenus par la Cour d’appel de la Saskatchewan dans R. v. Pidskalny :
Now, the Crown submits that not every single piece of disclosure needs to be provided to an accused before the preliminary hearing. I agree with this as a general proposition and in no way do I mean to say here that the Crown's disclosure obligations must be fully satisfied before a matter may proceed to the preliminary hearing. That is neither the state of the law nor, indeed, what occurred in this case. Nevertheless, the Crown will bear the consequences where its late or inadequate disclosure directly results in the postponement or interruption of the preliminary hearing and thereby adds to the delay (see:R. v. Thomson, at paras. 16-18). On the facts of this case, I am simply not persuaded that the judge erred in finding that the Crown's inaction with respect to timely and adequate disclosure had led to the adjournment of the preliminary hearing and, therefore, that that delay ought to be attributed to the Crown. I say this simply because I have before me the fact that a judge found Mr. Pidskalny's disclosure concerns to have been well-founded considering the nature of the case and the nature of the requested disclosure. Having no reason to look behind this finding, it would appear that Mr. Pidskalny's adjournment request was prudent and possibly staved off even further delay.
[69]      Dans l’affaire R. c. Cyr-Beauchemin, le juge Chapdelaine de la Cour du Québec s’exprime, avec raison, comme suit :
C'est pourquoi le Tribunal retient qu'à partir du moment où, dans ce dossier, la poursuite refuse, à tort, de divulguer la documentation entourant la certification de l'alcool type et des registres d'entretien (tous des renseignements raisonnablement disponibles), les délais ne peuvent être imputés au requérant en tentant de soutenir qu'il n'était pas prêt à procéder vu sa demande de divulgation. De l'avis du Tribunal, à partir de ce moment les délais engendrés par une divulgation tardive ou tatillonne doivent être imputés à la poursuite.
[70]      Ainsi, la communication de la preuve peut engendrer deux types de délais :
(a)        des délais inhérents à la communication de la preuve qui sont évalués à la lumière des circonstances de chaque cas; et
(b)        s’il y a défaut de communiquer la preuve ou s’il y a retard à communiquer celle-ci au-delà de ce qui peut être considéré comme étant les délais inhérents à l’affaire, les délais additionnels qui en résultent peuvent être qualifiés d’actes du ministère public.
de sorte que l’analyse des circonstances de chaque affaire est importante pour qualifier correctement les délais de communication de la preuve.
[Les soulignements sont ceux du juge Mainville]
[159]     Dans la présente affaire, les problèmes ou erreurs liés à la communication de la preuve ne peuvent être considérés comme la source des délais qui sont principalement institutionnels.
[160]     Pour les affaires en cours d’instance avant l’arrêt Jordan, si la communication de la preuve s’avère la source de délais, il faut considérer, selon l’arrêt Gariépy, si les délais relatifs à la communication de la preuve se trouvent attribuables à la poursuite et s’ils sont justifiés. 
[161]     Lorsqu’une date de procès éloignée a été fixée en raison des délais institutionnels chroniques, le processus de communication de la preuve qui ne conduit pas à des délais supplémentaires dans le déroulement d’une enquête préliminaire ou du procès ne peut donner lieu à une critique à l’égard de la poursuite qui se verrait alors inéquitablement attribuer la responsabilité de délais sans conséquence sur la progression d’un dossier.
[162]     En effet, dans le cadre d’une demande fondée sur l’alinéa 11 b) de la Charte, la poursuite ne peut être tenue responsable des délais entourant la communication de la preuve seulement s’ils entrainent des délais identifiables qui empêchent ou retardent la fixation d’une date d’une enquête préliminaire ou du procès et qui ralentissent le déroulement de l’instance.

La préparation d’un cahier de procès

R. c. Antoine, 2017 QCCS 1325 (CanLII)

Lien vers la décision

[165]     La préparation d’un cahier d’un procès fait l’objet de discussions lors des conférences de gestion présidées par le juge coordonnateur.
[166]     Aucun délai ne semble avoir été fixé pour le dépôt de ce cahier de procès.
[167]     Certes, il aurait pu être préparé avant que sa confection ne soit ordonnée lors de la gestion de l’instance.
[168]     Il convient de rappeler la finalité d’un cahier de procès.
[169]     Le cahier de procès est un outil pour faciliter la gestion de l'instance.
[170]     Il facilite la préparation du procès pour le juge de gestion de l’instance et du procès. 
[171]     Il favorise aussi le droit à une défense pleine et entière de l’accusé qui peut mieux se préparer en vue du procès.
[172]     Selon l'art. 551.2 C. cr., la gestion de l'instance vise, dans la mesure du possible, à ce que la preuve sur le fond soit présentée sans interruption.
[173]     À cette fin, la poursuite et les accusés doivent identifier les questions qui doivent être résolues avant le début du procès et la présentation de la preuve.
[174]     Le cahier de procès facilite la gestion de l'instance en ce qu'il identifie la preuve qui sera présentée par la poursuite : l'identité des témoins et la teneur du témoignage qu'ils rendront, la durée de ce témoignage, tel qu'évalué par la poursuite (interrogatoire chef et contre-interrogatoire), les documents, pièces ou expertises qui seront déposés et la pertinence de la preuve (testimoniale, documentaire ou autre) à l'égard des différents chefs d'accusation, des éléments essentiels de ces accusations, des différents accusés ou de certains moyens de défenses.
[175]     Sans un cahier de procès qui lui fournit une connaissance précise de la preuve qu'entend présenter la poursuite, le juge responsable de la gestion de l'instance ne peut jouer le rôle que lui confèrent les articles 551.1 et suivants du Code criminel.
[176]     Dans une telle situation, le juge de gestion d'instance ne peut : 1) aider les parties à déterminer les témoins à entendre, en tenant compte de la situation et des besoins de ceux-ci; 2) les encourager à admettre des faits ou à conclure des accords; 3) les encourager à examiner toute question qui favoriserait la tenue d'un procès équitable et efficace; 4) trancher toute question qui peut l'être avant le stade de la présentation de la preuve sur le fond ou identifier celles qui peuvent l'être à ce stade.
[177]     Sans un cahier de procès, le juge de gestion de l'instance peut difficilement établir des horaires, imposer des échéances et fixer la durée de la présentation des différentes requêtes et la durée du procès lui-même.
[178]     Le cahier de procès constitue un outil privilégié pour l’évaluation de la durée du procès.
[179]     À cet égard, sa préparation à l’aube ou au début de la gestion de l’instance s’avère préférable. Sa disponibilité au moment de fixer la date et la durée d’un procès représente un atout considérable, même il ne s’agit pas d’un préalable incontournable.
[180]     Il faut se rappeler que la poursuite possède le droit d’avoir une stratégie de procès et de la modifier en cours de route, pourvu que la modification n’entraîne aucune iniquité pour l’accusé.
[181]     La durée anticipée et révisée du procès des accusés se situe autour de 4 mois. Les accusés considèrent qu’une évaluation plus réaliste de la durée du procès aurait permis la fixation d’une date de procès plus rapprochée.
[182]     Encore une fois, il faut rappeler que l’évaluation de la durée du procès n’a pas fait l’objet de contestation lors de sa fixation.
[183]     La suggestion que la production plus contemporaine d’un cahier de procès aurait permis la fixation d’une date plus rapprochée en raison d’une durée plus courte relève une fois de plus, d’un révisionnisme spéculatif.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Une agression sexuelle peut être commise même en l’absence d’un contact physique proprement dit, car la menace ou la tentative d'employer la force suffise pour entraîner la culpabilité de l'accusé

R. v. Edgar, 2016 ONCA 120  Lien vers la décision [ 10 ]        To commit a sexual assault, it was not necessary for the appellant to touch ...