vendredi 10 mai 2013

Détermination de la peine concernant une infraction de fraude contre l'employeur

Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Beaudoin, 2012 QCCQ 16312 (CanLII)

Lien vers la décision

[18] Dans l’affaire R. c. Beaulieu, où il y a eu des accusations de fraude pour des montants de 60 000 et 240 000 $ auprès de la Régie de l’assurance maladie du Québec, la Cour d’appel a réduit la sentence de l’accusé, pharmacien, de 30 mois à 15 mois de prison et a considéré le fait que l’accusé n’avait pas agi pour des gains personnels mais avait agi ainsi en raison d’une trop grande complaisance envers sa clientèle. Les fraudes ne résultaient pas de ventes fictives mais avaient été faites sans ordonnance ni renouvellement d’ordonnance.

[19] Dans R. c. Belle-Isle, la Cour d’appel a estimé que la sentence de cinq ans pour une fraude, s’échelonnant de 1969 à 1987 aux fins de couvrir un prêt de 50 000 $, commise aux dépens d’une banque pour laquelle l’accusé était chef comptable, n’était pas déraisonnable, bien que sévère.

[20] Dans l’affaire R. c. Durand, la Cour d’appel du Québec imposait aussi une peine de cinq ans d’emprisonnement relativement à des fraudes totalisant environ 650 000 $ alors que l’accusé occupait la fonction de directeur des finances au sein d’une université. L’appelant avait plaidé coupable et était sans dossier judiciaire. La Cour d’appel a maintenu la peine de cinq ans d’emprisonnement estimant important d’insister sur le fait que l’accusé avait trompé la confiance d’une institution publique où il occupait la délicate fonction de directeur des finances.

[21] Par ailleurs, dans l’affaire Couture c. R., la Cour d’appel a modifié une peine d’emprisonnement de vingt mois pour une peine de six mois assortie d’une probation et de travaux communautaires. L’appelant agissait à titre de comptable auprès de plusieurs compagnies et cherchait à leur permettre d’éluder des impôts. L’accusé était responsable de la perte de 600 000 $ par le gouvernement. L’accusé n’avait pas, personnellement, bénéficié de ces sommes.

[22] Dans l’affaire Verville c. R., l’accusé s’était approprié, par des ponctions à sa propre entreprise, des sommes importantes en n’inscrivant pas à ses livres comptables la somme de 186 488 $ relative à des travaux de construction. La Cour d’appel impose un an d’emprisonnement avec sursis en considérant qu’il a contribué à la déconfiture de sa propre entreprise et que les autres victimes semblaient compensées par l’exécution d’un jugement sur ses biens personnels. La Cour rappelle, dans cette affaire, que la malhonnêteté ne se distinguait pas par un abus de confiance, qu’il s’agissait d’une méthode peu sophistiquée, au su et au vu de tous. Elle rappelle cependant, que la jurisprudence favorise la dissuasion collective lorsque la fraude se distingue par un abus de confiance.

[23] Dans l’affaire R. c. Mirsiny Skoulikides, l’accusée qui était alors directrice d’une succursale d’une banque, avait, pendant une période de près de deux ans, ouvert des marges de crédit au nom des membres de sa famille et utilisait l’argent pour jouer au casino. Elle a ainsi fraudé la banque pour la somme de 91 977 $. Dans cette affaire, le tribunal a considéré la dépendance au jeu de l’accusée et l’a condamnée à douze mois d’emprisonnement avec sursis, lui imposant des thérapies.

[24] Dans l’affaire R. c. Jean Grégoire, l’accusé avait plaidé coupable d’avoir frustré son employeur, la fiducie Desjardins, sur une période de quatre ans, d’un montant global de près de 223 000 $. Alors qu’il était directeur de la fiducie Desjardins, il obtenait des chèques libellés à son nom. La Cour condamnait l’accusé à purger une peine de détention ferme de 15 mois.

[25] Dans l’affaire R. c. Francine Corbeil, la juge Corbeil-Laramée a sentencé à un an d’emprisonnement la vérificatrice en chef de la Commission des valeurs mobilières du Québec pour une fraude de 375 000 $, s’échelonnant sur une période de cinq ans. La juge Corbeil-Laramée émet le commentaire suivant :

En particulier pour un col blanc qui serait tenté de commettre ce genre de crime grave, la perspective de se retrouver derrière les barreaux est de nature à le dissuader de le faire, ce qui est moins certain s’il pense qu’il s’en tirera avec un sursis. Il est vrai que le Tribunal doit aussi examiner, avant d’envisager une privation de liberté, la possibilité de sanctions moins contraignantes lorsque les circonstances le justifient, mais pour les raisons mentionnées, ce principe cède le pas à l’objectif de dissuasion dans un cas comme celui-ci. La sentence a également pour objectif d’empêcher la récidive, de favoriser la réinsertion sociale de l’accusé et de susciter la conscience de ses responsabilités, notamment par la reconnaissance du tort causé aux victimes et à la collectivité.

[26] Dans Chartrand c. R., la Cour d'appel n'est pas intervenue quant à une peine d'emprisonnement de 18 mois à la suite de condamnations pour des infractions de fraude et de complot commises alors que les accusés étaient à l'emploi ou gestionnaires de la société ayant fait l'objet de la fraude. La fraude totalisait 750 000 $ et près de 650 000 $ avaient servi pour l'achat de biens personnels. La Cour d'appel insiste que le fait d'avoir détourné à leur bénéfice et avantage personnels ces sommes nécessitaient que les objectifs de dénonciation et de dissuasion soient placés au premier plan. Les crimes avaient été commis avec préméditation et leur planification reflétait l'intention bien arrêtée de s'enrichir aux dépens de la société Bellingham. Citant de nombreux arrêts de la Cour d'appel, elle rappelle que la dissuasion générale nécessaire pour ce type de crime commis dans des circonstances d'abus de confiance rend légitime la décision de ne pas accorder de sursis : R. c. Coffin, 2006 QCCA 471 (CanLII), 2006 QCCA 471 (CanLII), [2006] R.J.Q. 976 (C.A.); R. c. Pierce 1997 CanLII 3020 (ON CA), 1997 CanLII 3020 (ON CA), (1997), 114 C.C.C. (3d) 23 (C.A.Ont.).

[27] Dans l'arrêt Corbeil c. R., la Cour d'appel modifiait une peine de 15 mois d'emprisonnement ferme pour une peine de 12 mois d'emprisonnement au sein de la communauté à l'égard d'une fraude commise pour un montant de 117 315 $. Entre 1999 et 2000, pendant qu'il était directeur général d'un parti politique, il avait participé à un stratagème par lequel il approuvait sciemment de fausses factures en paiement desquelles il signait des chèques dont le produit était remis à un tiers. Une partie importante de la fraude de 117 315 $ aurait servi à renflouer la caisse de comtés qui avaient besoin d'argent. La Cour d'appel considérait le fait que l'accusé n'avait personnellement profité de la fraude alléguée que pour quelques milliers de dollars (au plus, une dizaine) et que l'accusé avait un gagne-pain qui lui permettait de gagner son pain et celui de ses deux filles. La Cour d'appel reconnaissait qu'il fallait faire jouer ici les objectifs de dissuasion générale et d'exemplarité, mais reconnaissait que ces objectifs n'étaient pas nécessairement bafoués du fait que la privation de liberté pouvait se faire par une détention dans la collectivité. L'accusé n'avait pas de casier judiciaire et le risque de récidive était considéré comme étant très faible.

[28] Dans R. c. Gauthier, La Cour d'appel a maintenu une peine d'emprisonnement avec sursis de 18 mois, pour une accusée, sans antécédent judiciaire, qui s'est reconnue coupable d'une fraude d'environ 150 000 $ commise à l'endroit du gouvernement du Québec alors qu'elle était employée de la Régie de l'assurance maladie du Québec. L'accusée était âgée de 49 ans, bénéficiait d'un rapport préalable à la peine très favorable. La Cour a considéré que le maintien de son emploi stable était un facteur de protection pour la société

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